DH/G/419

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DU BRÉSIL

10 juillet 1996


Communiqué de Presse
DH/G/419


LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DU BRÉSIL

19960710

La question des droits de l'homme mobilise toute la société brésilienne, déclare le représentant brésilien

Genève, 10 juillet -- Le Comité des droits de l'homme a entamé, ce matin, l'examen du rapport initial que soumet le Brésil en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le chef de la délégation brésilienne, M. Gilberto Vergne Saboia, Représentant permanent adjoint du Brésil à Genève, est accompagnée de M. José Gregori, Chef de cabinet du Ministre de la justice, ainsi que de membres de la Mission permanente.

Présentant le rapport initial du Brésil, M. Saboia a déclaré que l'accession du Brésil au Pacte international relatif aux droits civils et politiques en 1992 s'inscrit dans le processus de démocratisation du pays commencé en 1985. Aujourd'hui, la question des droits de l'homme mobilise toute la société brésilienne et non pas seulement une poignée de militants. Les autorités, au niveau fédéral, attentives aux demandes accrues du respect des droits de l'homme, s'emploient à améliorer la situation en collaborant avec la société civile. Le rapport à l'examen est la preuve de cette collaboration. Préparé sous le coordination du Ministère des relations extérieures, il s'appuie notamment sur la contribution du Centre d'études sur la violence, institution de recherche indépendante de l'Université de Sao Paulo. Le rapport ne cherche pas à dissimuler les faits, il décrit les politiques et les mesures adoptées et évoque les défis posés.

M. Saboia a indiqué que l'engagement du Brésil en faveur de la promotion des droits de l'homme, qui est allé croissant depuis la fin du régime militaire, est le fondement juridique même de la Constitution de 1988, consolidé par la prévalence de l'état de droit garanti par l'indépendance du judiciaire et l'exercice de la liberté d'opinion et d'expression. Il a rappelé que les dispositions de la Constitution relatives aux droits de l'homme, qui comprennent les principales normes internationales, ne peuvent faire l'objet d'aucun amendement visant à les abolir. Les droits et garanties énoncés dans la Constitution n'excluent pas les autres droits et garanties découlant des instruments internationaux auxquels le Brésil est partie. Une fois promulgués, ces instruments constituent une norme juridique interne et sont directement applicables.

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Par son passé de militant opposé au régime militaire, par son expérience

personnelle et ses origines culturelles, le Président Fernando Henrique Cardoso est en mesure de saisir, mieux que quiconque, l'importance que revêt le respect des droits de l'homme pour toute société, a fait valoir le représentant du Brésil. Ainsi, à l'occasion de la fête nationale, le 7 septembre 1995, le Président Cardoso a annoncé la préparation d'un Plan national des droits de l'homme couvrant de multiples domaines. Dans un souci de coopération et de transparence, le Gouvernement brésilien avait autorisé la visite dans le pays du Rapporteur spécial sur le racisme, M. Maurice GléléAhanhanzo et a autorisé la prochaine visite de Mme Radhika Coomaraswamy, Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes. Une mission de la Commission inter-américaine des droits de l'homme, ainsi que d'Amnesty International ont également effectué des visites au Brésil en 1995.

En dépit de ces éléments positifs, de sérieux problèmes continuent d'assombrir la situation des droits de l'homme au Brésil, a reconnu M. Saboia. Ces obstacles persistants sont difficiles à surmonter, principalement parce qu'ils sont associés à des inégalités socio-économiques, à la misère, à l'ignorance et à des facteurs historiques et culturels, notamment des mentalités et des comportements, qu'il est difficile de changer.

M. Saboia a indiqué que, depuis la publication du rapport, il y a eu une augmentation des incidents de violence et des meurtres, notamment dans les zones rurales, sans qu'il ait été possible de punir les responsables. La difficulté à faire appliquer la loi dans les cas de meurtres collectifs constitue un problème grave pour le pays. Parmi les faits nouveaux positifs survenus récemment, M. Saboia a mentionné notamment le nouveau décret sur la délimitation des terres autochtones, la création d'une Commission des droits de l'homme au sein de la Chambre des députés, les campagnes de mobilisation menées en 1995 contre l'exploitation sexuelle des enfants, la réforme du Conseil pour la défense des droits de la personne humaine, la mise en place du Groupe exécutif pour la répression contre le travail forcé, la création d'une unité des droits de l'homme au sein de la police fédérale et, enfin, le lancement, par décret du 13 mai 1996, du Programme national des droits de l'homme.

Le représentant brésilien a ajouté que, pour renforcer l'efficacité de son action en faveur d'une application effective du Pacte, le Gouvernement a réformé les fonctions du Conseil de défense des droits de l'homme. Le Ministère public aura des moyens accrus pour protéger et promouvoir les droits de l'homme. Ces réformes auront besoin de l'aval du Congrès et il faudra apporter un amendement à la Constitution. La Commission des droits de l'homme du Congrès, de par son mandat, peut travailler de façon autonome. Il y aura un organe analogue au Sénat.

A propos des mesures prises pour garantir l'indépendance du judiciaire au Brésil, M. Saboia a fait valoir qu'en dépit des difficultés financières et de la nécessité d'en améliorer l'efficacité, il est en général reconnu que l'indépendance et l'impartialité du judiciaire sont respectées au Brésil.

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S'agissant du problème des escadrons de la mort, M. Saboia a admis qu'il y avait un seuil de violence inacceptable au Brésil. Une législation a été proposée pour limiter la possession d'armes. On a envisagé un enseignement des droits de l'homme dans les académies militaires. M. Saboia a souligné que les nombreux cas de violence au Brésil sont dus à la misère. Le programme du Président Cardoso vise en priorité à redresser les injustices par une politique de stabilisation et une politique agraire plus juste. Le Gouvernement a pris des initiatives pour venir en aide aux paysans sans terre, en attendant une réforme de la politique foncière.

M. Saboia a souligné que les enfants des rues sont souvent victimes des escadrons de la mort. D'après des données recueillies dans l'État de Rio de Janeiro, le nombre des victimes aurait toutefois diminué. On ne possède pas de statistiques fiables sur les enfants des rues. Une organisation non gouvernementale a étudié, depuis les années 80, le phénomène dans six grandes villes brésiliennes. Selon cette ONG, le nombre de ces enfants varient de 4 000 à 80 selon les villes. Leur nombre total pourrait s'élever à plusieurs dizaines de milliers.

S'agissant de la pratique de la torture, M. Saboia a noté qu'il n'y avait pas de statistiques précises sur le nombre de cas de torture. Un projet de loi définissant et sanctionnant le crime de torture est en cours d'examen au Congrès après avoir été approuvé par la Chambre des députés le 3 juillet dernier.

Les membres du Comité ont exprimé leur inquiétude en ce qui concerne surtout la responsabilité du Gouvernement fédéral pour garantir l'application des normes des droits de l'homme dans le pays. Ils ont souhaité savoir comment le Gouvernement brésilien s'acquitte de sa responsabilité de veiller à ce que les normes énoncées dans le Pacte soient concrètement appliquées à tous les niveaux de gouvernement de la Fédération. Ils ont fait observer que le caractère fédéral du Brésil, au sein duquel les États fédérés jouissent d'une large autonomie législative, judiciaire et administrative, rend difficile le contrôle des normes locales. Ils ont demandé des éclaircissements sur un projet de «fédéralisation des droits de l'homme». Quelles sont les infractions en liaison avec les droits de l'homme qui seraient «fédéralisées»? Est-ce que cela concerne la police? Est-ce que le Gouvernement prévoit un système de régulation permettant de ne pas avoir de jurisprudences divergentes ? Certains experts ont demandé des précisions sur des informations faisant état d'infiltrations de certaines autorités judiciaires par les escadrons de la mort. Ils ont demandé quelles mesures les autorités brésiliennes envisagent pour démanteler ces réseaux de la mort?

Le Comité poursuivra, cet après-midi à 15 heures, son débat sur le rapport initial du Brésil.

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