DH/G/418

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHEVE L'EXAMEN DU RAPPORT DU NIGÉRIA

9 juillet 1996


Communiqué de Presse
DH/G/418


LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHEVE L'EXAMEN DU RAPPORT DU NIGÉRIA

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Les experts demandent l'abrogation des décrets révoquant les garanties constitutionnelles et la libération de tous les prisonniers politiques

Genève, 9 juillet -- Le Comité des droits de l'homme a terminé, cet après-midi, l'examen du rapport du Nigéria en entendant les observations des experts sur l'application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans ce pays. Les observations finales du Comité seront adoptées lors de séances privées et rendues publiques à la fin de la session, le 26 juillet. Le Comité achèvera ainsi l'examen du rapport du Nigéria qu'il avait commencé à New York lors de sa session de mars-avril 1996.

Dans leurs observations préliminaires, les experts ont souligné que le régime militaire au Nigéria est incompatible avec les dispositions du Pacte. Les mesure prises sont des «petits pas» sur la bonne voie qui ne s'ouvrira qu'avec l'avènement du pouvoir civil. Saluant la mise en place d'une Commission nationale des droits de l'homme, certains ont toutefois souligné la nécessité pour cet organe de disposer d'un mécanisme d'enquête indépendant. La Commission doit également établir des contacts avec les organisations non gouvernementales, les encourager et collaborer avec elle. Elle devrait aussi se faire assister par le Centre pour les droits de l'homme.

Selon les experts, il est très important que le Nigéria crée les conditions qui permettent aux ONG de travailler librement. Un expert s'est demandé quelles croyances religieuses empêchent le Nigéria d'appliquer pleinement les dispositions du Pacte et de les faire concorder dans son droit interne. Une experte a exprimé sa déception du peu de cas fait à ses questions sur la condition de la femme Nigéria, sur la polygamie, sur les pratiques traditionnelles et autres problèmes affectant la vie et la santé des femmes et des jeunes filles.

Le Nigéria est invité à abroger les décrets 107 de 1993 ainsi que le décret 12 de 1994 qui sont des violations de l'article 25 du Pacte. Au sens du Pacte, le régime actuel n'est pas en conformité avec cet article. Tous les tribunaux spéciaux doivent être abolis. Tous les prisonniers politiques doivent être libérés. Les recommandations de New York doivent être mises en

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oeuvre pour garantir l'indépendance du judiciaire. Le Gouvernement est invité à prendre des mesures susceptibles d'établir la primauté du droit. De même, le Gouvernement doit s'abstenir de porter atteinte à l'indépendance de la presse et de suspendre des journaux.

Le Nigéria n'aura un avenir heureux que si la situation des droits de l'homme est améliorée et radicalement modifiée, ont souligné les experts. Il faut que le pays s'engage dans un processus de réconciliation nationale. Dans ce contexte, il a été suggéré que l'un des objectifs importants de la Commission nationale des droits de l'homme du Nigéria devrait être la création d'un réseau d'ONG nationales à l'abri des partis politiques.

En début de séance, ont entendu les réponses fournies par la délégation du Nigéria, dirigée par M. Auwalu H. Yadudu, Conseiller aux affaires juridiques à la Présidence de la République du Nigéria aux différentes questions des experts. La délégation a fait valoir que son Gouvernement s'est fermement engagé à satisfaire les demandes contenues dans le rapport de la mission d'investigation des Nations Unies. Il a entrepris d'amender les décrets visés, d'exclure les juges militaires des tribunaux d'exception, de rétablir l'habeas corpus, de libérer des détenus, de prévoir des procédures d'appel.

S'agissant du processus de transition vers un régime démocratique, M. Yadudu a indiqué qu'un des objectifs de cette période est l'enregistrement des différents partis politiques. D'ici au mois de septembre, les partis qui répondront aux conditions requises seront acceptés. Au mois de décembre, se tiendront des élections municipales. On prévoit des élections présidentielles au mois d'octobre 1998 et le retrait du pouvoir militaire au plus tard au mois de novembre 1998. Des élections auront lieu à la fin novembre pour les membres de la centrale syndicale. Ces élections confirment l'abrogation du décret de dissolution de la centrale.

En ce qui concerne les atteintes à la liberté d'expression, M. Yadudu a précisé que ce n'était pas le chef de l'État qui avait décidé de la suspension des journaux. Ces restrictions ont été décidées par le pouvoir judiciaire.

Au Nigéria, comme dans d'autres pays, il existe trois catégories de détenus, précise M. Yadudu: les prisonniers de droit commun; ceux qui ont été jugés et reconnus coupables, qui ne sont pas considérés comme des prisonniers politiques; et enfin les prisonniers politiques. Eu égard au cas de M. Abiola, M. Yadudu rappelle que ce chef de parti avait été arrêté à la suite de troubles qu'il avait essayé de fomenter au lendemain de la tenue d'élections. Plusieurs tribunaux ont été successivement saisis de l'affaire et de l'appel interjeté par M. Abiola.

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D'autre part, M. Yadudu a estimé que le Gouvernement du Nigéria n'a pas obligation de faciliter la participation des ONG aux travaux du Comité. Il ne faut pas pour autant conclure que le Nigéria serait opposé à leur participation. Une enquête sera menée pour déterminer pourquoi deux représentants de la Civil Liberties Organisation ont été empêchés de se rendre à New York lors de la dernière session du Comité.

A propos des décrets dont le Comité a recommandé l'abrogation, M. Yadudu

a précisé qu'ils sont la caractéristique d'un régime militaire, rappelant que c'est le régime militaire actuellement au pouvoir qui a ratifié le Pacte en 1993. A propos des allégations d'exécutions extrajudiciaires et de la pratique de la torture, M. Yadudu a déclaré que les Rapporteurs spéciaux sur les exécutions extrajudiciaires et sur la torture devraient faire la lumière sur ces allégations. Les autorités nigérianes enquêteront de leur côté.

Le Comité reprendra ses travaux demain à 10 heures. Il doit commencer l'examen du rapport initial du Brésil.

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