CS/708

LE CONSEIL DE SECURITE PROROGE LE MANDAT DE LA FORCE DES NATIONS UNIES CHARGEE DU MAINTIEN DE LA PAIX A CHYPRE JUSQU'AU 31 DECEMBRE 1996

28 juin 1996


Communiqué de Presse
CS/708


LE CONSEIL DE SECURITE PROROGE LE MANDAT DE LA FORCE DES NATIONS UNIES CHARGEE DU MAINTIEN DE LA PAIX A CHYPRE JUSQU'AU 31 DECEMBRE 1996

19960628

Le Conseil de sécurité a prorogé ce matin, par l'adoption à l'unanimité de la résolution 1062 (1996) le mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre pour une période se terminant le 31 décembre 1996.

Aux termes de cette résolution, le Conseil de sécurité se déclare profondément préoccupé par la modernisation constante des forces armées en République de Chypre et le renforcement de leur capacité, par le niveau excessif de leurs effectifs et de leurs armements et par l'absence de progrès sur la voie d'une réduction sensible des forces étrangères en République de Chypre. Le Conseil prie instamment de nouveau tous les intéressés de s'engager à réduire ces forces ainsi que leurs dépenses militaires en République de Chypre afin d'aider à rétablir la confiance entre les parties et d'ouvrir la voie au retrait des troupes non chypriotes comme le prévoit l'ensemble d'idées. Le Conseil se déclare également profondément préoccupé par les manoeuvres militaires menées récemment dans la région, y compris les survols d'avions militaires dans l'espace aérien de Chypre, qui ont aggravé les tensions.

Le Conseil de sécurité réaffirme que le statu quo est inacceptable et demande aux parties de manifester concrètement leur volonté de parvenir à un règlement politique d'ensemble. Il engage instamment les dirigeants des deux communautés à répondre positivement et d'urgence à l'appel du Secrétaire général qui leur a demandé de coopérer avec lui et avec les nombreux pays qui soutiennent sa mission de bons offices en vue de sortir de l'impasse actuelle et d'établir un terrain d'entente permettant de reprendre les négociations directes.

Le Conseil de sécurité était saisi de deux rapports du Secrétaire général sur la situation à Chypre.

- - CS/708 28 juin 1996(à suivre)Documentation

Texte de la résolution (S/1996/477)

Le Conseil de sécurité,

Accueillant avec satisfaction le rapport du Secrétaire général en date du 7 juin 1996 sur l'opération des Nations Unies à Chypre (S/1996/411 et Corr.1 et Add.1),

Accueillant aussi avec satisfaction le rapport du Secrétaire général en date du 25 juin 1996 sur sa mission de bons offices à Chypre (S/1996/467),

Notant que le Secrétaire général lui recommande dans son rapport du 7 juin 1996 de proroger le mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre,

Constatant que le Gouvernement chypriote est convenu qu'en raison de la situation qui règne dans l'île, il est nécessaire d'y maintenir la Force au-delà du 30 juin 1996,

Réaffirmant ses résolutions antérieures concernant Chypre, notamment ses résolutions 186 (1964) du 4 mars 1964, 939 (1994) du 29 juillet 1994 et 1032 (1995) du 19 décembre 1995,

Se déclarant de nouveau préoccupé par l'absence de progrès sur la voie d'une solution politique définitive, et considérant, comme le Secrétaire général, qu'il y a trop longtemps que les négociations sont au point mort,

Regrettant qu'aucun progrès n'ait été fait en ce qui concerne l'adoption de mesures visant à interdire le long des lignes de cessez-le-feu les munitions réelles et les armes autres que les armes de poing et à interdire de même les tirs d'armes à portée de vue ou d'ouïe de la zone tampon, non plus qu'en ce qui concerne l'élargissement de l'accord d'évacuation de 1989,

Se déclarant préoccupé par les restrictions imposées à la liberté de mouvement de la Force dans le nord de l'île, telles que décrites au paragraphe 27 du rapport du Secrétaire général en date du 7 juin 1996,

1. Décide de proroger, pour une période se terminant le 31 décembre 1996, le mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre;

2. Se félicite de la nomination de M. Han Sung-Joo en qualité de nouveau Représentant spécial du Secrétaire général à Chypre et demande aux deux parties de coopérer pleinement aux efforts qu'il fera pour faciliter un règlement d'ensemble du problème de Chypre;

3. Déplore le tragique incident au cours duquel un soldat de la Garde nationale chypriote grecque a été tué par balle dans la zone tampon le 3 juin 1996, et déplore aussi le fait que des soldats chypriotes turcs ont empêché des membres de la Force des Nations Unies de secourir le soldat de la Garde nationale et de mener une enquête sur l'incident, ainsi qu'il ressort du rapport du Secrétaire général en date du 7 juin 1996;

4. Se déclare profondément préoccupé par la modernisation constante des forces armées en République de Chypre et le renforcement de leur capacité, par le niveau excessif de leurs effectifs et de leurs armements et par l'absence de progrès sur la voie d'une réduction sensible des forces étrangères en République de Chypre, prie instamment de nouveau tous les intéressés de s'engager à réduire ces forces ainsi que leurs dépenses militaires en République de Chypre afin d'aider à rétablir la confiance entre les parties et d'ouvrir la voie au retrait des troupes non chypriotes comme le prévoit l'Ensemble d'idées (S/24472, annexe), souligne l'importance de la démilitarisation ultérieure de la République de Chypre en tant qu'objectif dans le contexte d'un règlement d'ensemble, comme le prévoit également l'Ensemble d'idées, et demande au Secrétaire

général de continuer à encourager les efforts en ce sens;

5. Se déclare profondément préoccupé aussi par les manoeuvres militaires menées récemment dans la région, y compris les survols d'avions militaires dans l'espace aérien de Chypre, qui ont aggravé les tensions;

6. Demande aux autorités militaires des deux parties :

a) De respecter l'intégrité de la zone tampon des Nations Unies, de veiller à ce qu'aucun autre incident ne se produise le long de la zone tampon, d'empêcher les actes d'hostilité, y compris les tirs à balles réelles contre la Force, d'octroyer à la Force une liberté totale de mouvement et de lui offrir leur entière coopération;

b) D'entamer immédiatement des pourparlers avec la Force, dans l'esprit du paragraphe 3 de la résolution 839 (1993) du 11 juin 1993, en vue d'adopter des mesures réciproques pour interdire le long des lignes de cessez-le-feu les munitions réelles et les armes autres que les armes de poing et pour interdire de même les tirs d'armes à portée de vue ou d'ouïe de la zone tampon;

c) D'éliminer sans plus tarder tous les champs de mines et zones piégées se trouvant dans la zone tampon, comme le demande la Force;

d) De cesser toute construction militaire aux abords immédiats de la zone tampon;

e) D'entamer immédiatement des discussions intensives avec la Force en vue d'étendre l'accord d'évacuation de 1989 à tous les secteurs de la zone tampon où les deux parties sont très proches l'une de l'autre, sur la base des propositions révisées soumises par le Commandant de la Force en juin 1996;

7. Se félicite des mesures qu'ont prises les deux parties comme suite à l'examen de la situation humanitaire effectué par la Force, regrette que la partie chypriote turque n'ait pas davantage tenu compte des recommandations de la Force, demande à la partie chypriote turque de respecter pleinement les libertés fondamentales des Chypriotes grecs et des Maronites qui se trouvent dans le nord de l'île et d'intensifier les efforts qu'elle fait pour améliorer leurs conditions de vie, et demande au Gouvernement chypriote de poursuivre ses efforts visant à éliminer toute discrimination contre les Chypriotes turcs vivant dans le sud de l'île;

8. Se félicite des initiatives que l'Organisation des Nations Unies et les missions diplomatiques continuent de prendre pour promouvoir des manifestations bicommunautaires, déplore les obstacles qui ont été opposés à de tels contacts et engage vivement tous les intéressés, en particulier les dirigeants chypriotes turcs, à supprimer tous ces obstacles et à éviter que d'autres ne soient imposés;

9. Prie le Secrétaire général de garder à l'examen la structure et les effectifs de la Force en vue d'une restructuration éventuelle, et de lui soumettre toute suggestion nouvelle qu'il pourrait avoir à cet égard;

10. Réaffirme que le statu quo est inacceptable et demande aux parties de manifester concrètement leur volonté de parvenir à un règlement politique d'ensemble.

11. Souligne son appui à la mission de bons offices du Secrétaire général et l'importance des efforts concertés déployés afin d'oeuvrer avec le Secrétaire général en vue d'un règlement d'ensemble;

12. Engage instamment les dirigeants des deux communautés à répondre positivement et d'urgence à l'appel du Secrétaire général qui leur a demandé de coopérer avec lui et avec les nombreux pays qui soutiennent sa mission de bons offices en vue de sortir de l'impasse actuelle et d'établir un terrain d'entente permettant de reprendre les négociations directes;

13. Considère que la décision de l'Union européenne concernant l'ouverture en 1997 ou 1998 des négociations d'adhésion avec Chypre constitue pour les deux communautés un nouvel élément important qui devrait faciliter un règlement d'ensemble;

14. Prie le Secrétaire général de lui présenter, le 10 décembre 1996 au plus tard, un rapport sur l'application de la présente résolution;

15. Décide de rester activement saisi de la question.

Rapport du Secrétaire général sur l'Opération des Nations Unies à Chypre (S/1996/411 et Corr.1)

Dans son rapport le Secrétaire général rend compte de l'évolution de la situation entre le 11 décembre 1995 et le 10 juin 1996, en ce qui concerne l'action menée par la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre conformément à la résolution 186 (1964) du Conseil de sécurité, en date du 4 mars 1964, et à ses résolutions ultérieures, dont la plus récente est la résolution 1032 (1995) du 19 décembre 1995.

Le Secrétaire général indique que, pendant les six mois écoulés, la Force a continué de s'acquitter efficacement de ses fonctions à Chypre, avec la coopération des deux parties. Dans l'ensemble, la situation dans l'île est demeurée calme, malgré des regains de tension de temps à autre, auxquels la Force a essayé de remédier du mieux qu'elle a pu.

Le Secrétaire général rappelle que le Conseil de sécurité a déclaré à maintes reprises que le statu quo n'était pas une option acceptable. Il faut aussi que tous les intéressés se rendent bien compte que la situation n'est pas statique et que tout retard dans le règlement global nuit aux deux communautés ainsi qu'à la Grèce et à la Turquie.

Le Secrétaire général réitère toute la préoccupation qu'il éprouve face à la prolifération des armes et à l'ampleur excessive des forces militaires à Chypre ainsi qu'au rythme auquel elles se développent, se perfectionnent et se modernisent. Il souligne qu'il ne peut résulter de cette évolution qu'une recrudescence des tensions dans l'île et dans la région. En outre, les parties en présence n'ont toujours pas tenu compte des appels que le Conseil de sécurité leur a lancés à maintes reprises pour les exhorter à mettre en oeuvre des mesures expresses visant à réduire les risques d'affrontement le long des lignes de cessez-le-feu. La mort tragique du jeune soldat de la Garde nationale est un cruel rappel de la nécessité urgente de parvenir à un accord sur les propositions faites par la Force concernant l'évacuation d'un certain nombre de positions situées le long des lignes de cessez-le-feu respectives et d'y interdire les tirs d'armes. Le Secrétaire général souligne qu'il a été, dans ce contexte, consterné par la tentative faite par les forces de sécurité chypriotes turques pour empêcher par des menaces la Force de s'acquitter de ses fonctions dans la zone tampon. Il indique qu'il a demandé à M. Feissel, Représentant spécial adjoint et chef de mission résidant à Chypre, ainsi qu'au général de brigade Vartiainen de redoubler d'efforts afin de parvenir à des accords avec les autorités militaires des deux parties en vue de l'application des mesures recommandées par le Conseil de sécurité pour réduire la tension le long des lignes de cessez-le-feu.

Les contacts bicommunautaires peuvent beaucoup contribuer à faciliter un règlement global, estime le Secrétaire général. Ce dernier indique qu'il va de soi que l'incitation à la tolérance, à la confiance et à la réconciliation entre les deux communautés, grâce à des contacts plus nombreux et à de meilleures communications, est un élément essentiel du processus de paix et exhorte les deux communautés, en particulier les autorités chypriotes turques, à veiller à ce que rien ne puisse faire obstacle à des contacts de ce genre. La situation des Chypriotes grecs et des Maronites qui vivent dans la partie nord de l'île continue d'être loin de ressembler à la vie normale qui leur était promise dans l'accord conclu par les deux parties à Vienne le 2 août 1975. Le Secrétaire général rappelle que dans son dernier rapport, il se félicitait de la volonté manifestée par les autorités chypriotes turques d'améliorer la vie quotidienne des intéressés (S/1995/1020). Or, les mesures prises à ce jour sont d'une portée extrêmement limitée et restent bien en deçà des besoins. Le Secrétaire général se félicite des mesures prises par le Gouvernement chypriote pour normaliser la vie des Chypriotes turcs qui résident dans la partie sud de l'île. La Force continuera de suivre la question avec les autorités chypriotes turques et le Gouvernement chypriote.

Dans les circonstances actuelles, le Secrétaire général considère que la présence de la Force dans l'île demeure indispensable pour assurer la réalisation des objectifs fixés par le Conseil de sécurité. Il recommande par conséquent au Conseil de proroger le mandat de la Force de six mois, jusqu'au 31 décembre 1996. Le Secrétaire général indique que, conformément à l'usage, il consulte actuellement les parties intéressées à ce sujet, et qu'il rendra compte au Conseil de ces consultations dès qu'elles seront achevées.

Rapport du Secrétaire général sur sa mission de bons offices à Chypre (S/1996/467)

Ce document est présenté en application de la résolution 1032 (1995) du Conseil de sécurité, en date du 19 décembre 1995, par laquelle le Conseil avait demandé au Secrétaire général de lui faire rapport de sa mission de bons offices durant la période actuelle du mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre y compris une évaluation complète de ses efforts en vue d'aboutir à un règlement de la situation sur l'île.

Le Secrétaire général regrette qu'en dépit des nombreuses tentatives entreprises pour trouver une base permettant de reprendre les pourparlers directs entre les deux dirigeants, les négociations entre les deux parties restent dans l'impasse, et la situation est toujours bloquée. Pour le Secrétaire général, il y a trop longtemps que les négociations concernant Chypre sont au point mort. Trente deux ans après la première intervention des Nations Unies dans le conflit de Chypre, et 22 ans après les événements de 1974, la communauté internationale est raisonnablement en droit d'exiger des preuves que les deux parties et les autres intéressés cherchent sérieusement un accord global sur la base de ce que les deux parties sont convenues il y a 20 ans. Le Conseil de sécurité a affirmé à plusieurs reprises que le maintien du statu quo n'était pas acceptable, et que personne ne pouvait objectivement y voir une base viable permettant de préserver le caractère et la sécurité des deux communautés.

Cette absence de progrès est d'autant plus décevante, poursuit le Secrétaire général, que les éléments nécessaires pour forger un accord global ont été définis. La décision prise par l'Union européenne d'entamer avec Chypre en 1997, ou 1998, des négociations sur l'adhésion à l'Union est un fait nouveau d'importance qui devrait faciliter un accord global. Comme l'a fait observer le Conseil des Ministres de l'Union, l'adhésion ouvrira des perspectives de sécurité et de prospérité accrues pour les Chypriotes grecs comme pour les Chypriotes turcs. L'imminence

des négociations d'adhésion devraient donner un nouveau caractère d'urgence à la recherche d'un accord global.

Il est maintenant nécessaire que la communauté internationale fasse fond sur cette évolution de la situation et donne un nouvel élan au processus de négociation. La Grèce et la Turquie ont une responsabilité particulière dans ce contexte; il est crucial non seulement qu'elles apportent leur soutien actif à la recherche d'un règlement mais aussi qu'elles ne laissent pas leurs relations évoluer d'une manière qui compromette cette recherche. Un certain nombre d'autres Etats Membres, poursuit le Secrétaire général, dont les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et les membres de l'Union européenne, ont montré récemment qu'ils y étaient disposés à ajouter leur poids à une action coordonnée visant à appuyer la mission de bons offices, et d'aider les deux communautés à faire régner la paix et la prospérité dans leur île. C'est toutefois sur ces dernières, les communautés chypriote grecque et chypriote turque que continuera de reposer la responsabilité principale. Un règlement durable ne sera pas obtenu tant que les deux dirigeants n'auront pas pu convaincre leurs communautés que leur intérêt réside davantage dans la souplesse et le compromis que dans la poursuite de l'affrontement. Le Secrétaire général demande aux deux dirigeants, d'oeuvrer avec lui ainsi qu'avec les nombreux pays qui appuient sa mission de bons offices, pour mettre fin à l'impasse actuelle et établir un terrain d'entente permettant de reprendre les négociations directes.

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