SOC/57

COMMISSION DU DEVELOPPEMENT SOCIAL : TABLE RONDE SUR LE SUIVI INTEGRE DES DECISIONS PRISES A L'ISSUE DES CONFERENCES INTERNATIONALES

29 mai 1996


Communiqué de Presse
SOC/57


COMMISSION DU DEVELOPPEMENT SOCIAL : TABLE RONDE SUR LE SUIVI INTEGRE DES DECISIONS PRISES A L'ISSUE DES CONFERENCES INTERNATIONALES

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La Commission du développement social a poursuivi les travaux de sa session extraordinaire liée au suivi du Sommet mondial pour le développement social et a tenu, cet après-midi, une table ronde sur les progrès réalisés en vue d'assurer un suivi intégré des dispositions adoptées à l'issue des conférences internationales au niveau du système des Nations Unies, et en particulier dans le cadre du mécanisme établi par le Comité administratif de coordination (CAC). En octobre 1995, le CAC a créé trois équipes de travail interinstitutions, chargées des questions ayant trait à l'emploi et aux modes de vie durables; à la création d'un environnement favorable au développement économique et social et aux services sociaux de base pour tous. Ces équipes ont pour mission de s'assurer que le système des Nations Unies fournit un appui efficace à la mise en oeuvre intégrée, à l'échelle nationale, des Programmes d'action adoptés à l'issue des Conférences internationales des Nations Unies. Le CAC a en outre créé, en avril 1996, un Comité interinstitutions pour les femmes dans le cadre de ce suivi.

La table ronde, sous la conduite de M. Gustave Speth, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a été l'occasion d'une discussion approfondie entre les membres de la Commission et les personnalités suivantes, qui représentaient les différentes équipes de travail interinstitutions chargées du suivi des conférences internationales : Mme Katherine Hagen, Sous-Directrice du Bureau international du travail (BIT), pour l'équipe de travail sur l'emploi et les modes de vie durables; M. Mark Malloch Brown, Vice-Président de la Banque mondiale, pour l'équipe de travail sur l'environnement favorable au développement économique et social; M. Colin Power, Directeur général adjoint de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), pour l'équipe sur les services sociaux de base pour tous; ainsi que Mme Rosario Green, Conseiller spécial du Secrétaire général pour les questions "sexospécifiques", pour le Comité interinstitutions pour les femmes.

Dans une intervention liminaire, M. Nitin Desai, Secrétaire général adjoint à la coordination des politiques et du développement durable, a rappelé que l'organisation de tables rondes au sein de la Commission du développement social, comme dans d'autres instances, a été motivée par la nécessité d'injecter de nouvelles idées dans le processus de décision - -

SOC/57 29 mai 1996(à suivre)intergouvernemental. Le but de cet exercice est d'établir un lien entre

l'élaboration des politiques à l'échelle intergouvernementale et la concrétisation des résultats de ce processus au sein du système des Nations Unies.

Ouvrant la discussion, M. GUSTAVE SPETH, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et Modérateur de la discussion, a déclaré que la Commission du développement social a un rôle important à jouer en ce qu'elle doit assurer le suivi et la mise en oeuvre pleine et entière des recommandations du Sommet de Copenhague. En dépit des efforts déployés dans le domaine de l'aide au développement, a rappelé M. Speth, la courbe de la pauvreté croît plus rapidement que celle de la démographie. Les chiffres en la matière indiquent un écart grandissant entre les 20% les plus pauvres et les 20% les plus riches. La pauvreté, le chômage ou encore la pression démographique sont tous des fléaux susceptibles d'engendrer l'instabilité sociale et politique. La lutte contre la pauvreté doit d'abord se concentrer sur la croissance économique qui, aux dires de la Banque mondiale, reste fragile dans nombre de pays et négative dans la plupart des pays en développement. Parlant de l'aide publique au développement (APD), M. Speth a fait observer que ni les forces du marché privé, ni la mondialisation de l'économie ne remplaceront cet apport essentiel que constitue l'APD. Illustrant ses propos, il a indiqué que le flux des investissements étrangers dans quelques rares pays en développement reste faible et arrive à peine à 6% en Afrique. Partant, la lutte contre la pauvreté à l'échelle mondiale exige une intensification de la coopération internationale et une augmentation de l'aide au développement.

Les programmes d'action des différentes conférences internationales se chevauchant, force est de souligner la nécessité d'une approche intégrée. Les institutions du système des Nations Unies se sont donc regroupées et se sont organisées autour de quelques initiatives d'importance fondées sur la nécessité de fournir des services sociaux de base pour tous, d'assurer un emploi pour chacun, de maintenir le niveau des ressources naturelles dont dépend la survie des populations pauvres, de garantir la sécurité alimentaire, de promouvoir les femmes, et d'instaurer un environnement favorable au développement social. Les représentants des équipes de travail interinstitutions ont ensuite exposé les activités entreprises au sein de ces dernières.

Mme KATHERINE HAGEN, Directrice adjointe du Bureau international du travail (BIT), représentant l'équipe de travail interinstitutions sur l'emploi et les modes de vie durables, a indiqué que cette équipe avait pour tâche de définir des stratégies interinstitutions intégrées afin d'assurer une mise en oeuvre maximale des engagements pertinents contractés lors des conférences internationales récentes, depuis le Sommet des enfants, à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, et bientôt Habitat II. Au terme de son examen des engagements relatifs à l'emploi et aux modes de vies durables figurant dans les documents finaux issus de chacune de ces Conférences, l'équipe a conclu qu'il était essentiel d'accorder la priorité à la coordination des efforts des institutions et agences à la lumière des objectifs prioritaires des pays eux-mêmes; et donc, de travailler au niveau des pays. La meilleure approche que l'équipe a identifiée à cette fin est la suivante : l'examen en profondeur des activités des institutions et agences de l'ONU

dans les pays, afin de tirer les leçons des expériences passées; il convient de tout mettre en oeuvre en vue d'établir un système permettant un partage maximal des informations; d'élaborer des stratégies interinstitutions par pays ou par groupes de pays ayant des caractéristiques communes majeures, et de favoriser davantage les échanges d'expériences entre les pays. Toutes ces activités ont un seul et même objectif : celui de définir les voies et moyens qui permettront à l'Organisation d'être plus efficace et performante dans l'assistance et la fourniture des services que les pays attendent d'elle. M. MARK MALLOCK BROWN, Vice-Président de la Banque mondiale, représentant l'équipe interinstitutions sur la création d'un environnement favorable au développement économique et social, a souligné qu'à la suite des conférences internationales, un nouveau consensus est né sur des idées selon lesquelles une évolution sociale est tributaire d'un cadre macro-économique sain. Les institutions financières se sont également mises d'accord pour reconnaître que les programmes d'ajustement structurel ne peuvent être mis en oeuvre au détriment du progrès social. Partant dans ses programmes, la Banque mondiale s'efforce aujourd'hui de garantir que les programmes d'ajustement structurel comprennent également des programmes de réformes sociales afin de maintenir ou de renforcer le niveau des dépenses sociales dans les pays où ils sont appliqués. Une évolution de la pensée économique s'est fait jour qui souligne que s'il n'existe pas de modèle de gestion universelle des affaires publiques, un gouvernement responsable, démocratique et transparent est une composante essentielle du développement économique et social.

Mettant l'accent sur la croissance des capitaux privés en direction des pays en développement et sur le déclin accéléré de l'aide publique au développement (APD), M. Brown a reconnu que le flux de capitaux privés ne peut être la panacée puisqu'il ne se dirige que vers un nombre limité de pays tout en se concentrant sur les seuls secteurs économiques prometteurs. S'il faut promouvoir davantage ce flux de capitaux privés, force est de garder à l'esprit qu'à cause du caractère privé de ces capitaux, un nombre important de pays se retrouvent de plus en plus marginalisés par le système international, en particulier en Afrique. Ces tendances mondiales soulignent la nécessité de passer des questions abstraites globales à une analyse concrète pays par pays, a conclu M. Brown.

M. COLIN POWER, Directeur général adjoint de l'Organisation des nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), représentant l'équipe spéciale interinstitutions sur les services sociaux de base pour tous a précisé que cette dernière se concentrait sur la coordination des efforts des institutions et agences du système en matière de promotion de l'éducation pour tous, de santé, et d'amélioration de la qualité de vie des pauvres. Il est temps de reconnaître les failles d'une approche du développement qui ne place pas l'être humain au centre de ses préoccupations, a-t-il dit, mettant l'accent sur le fait que la communauté internationale sait précisément ce qu'il faut faire pour mettre fin aux frustrations des pauvres. Nous savons, par exemple, que les femmes sont les plus durement touchées par la pauvreté, et que la clé du développement durable réside dans leur promotion, en particulier la satisfaction de leurs besoins fondamentaux, en matière d'éducation, de santé et d'accès aux ressources. Nous savons que la plus grande souffrance des pauvres réside dans le déni de leurs droits les plus fondamentaux. La nouvelle approche interinstitutionnelle des Nations Unies offre de nouvelles opportunités de parvenir à la réalisation des objectifs de développement durable. Notre mandat est d'identifier des moyens d'inciter l'action des

gouvernements en vue de la satisfaction des besoins de tous en matière de sécurité alimentaire; d'éducation; de santé; d'accès à l'eau salubre et potable, et de logement. L'une des missions de l'équipe spéciale est de donner des orientations en cette matière aux coordonnateurs résidents, et de développer la recherche de mesures concrètes à même de répondre aux besoins spécifiques des pays et régions.

Mme ROSARIO GREEN, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour les questions sexospécifiques, représentant le Comité interinstitutions pour les femmes s'est déclarée satisfaite de la création du Comité interinstitutions qui se réunira dorénavant sur une base régulière remplaçant ainsi le Comité ad hoc. Les réunions du Comité ad hoc, a rappelé Mme Green, ont constitué un élément important des efforts qui ont conduit à l'adoption d'une approche coordonnée en matière de promotion de la femme. Partant, Mme Green a souhaité que le nouveau Comité s'inspire des travaux déjà réalisés par le Comité ad hoc et participe à l'élaboration d'un plan à moyen terme visant à définir une orientation précise des questions ayant trait aux femmes. Une autre fonction importante serait d'appuyer les efforts des équipes de travail interinstitutions mises en place afin d'assurer un suivi intégré des conférences internationales. Mme Green a souhaité que le Comité travaille de concert avec les équipes chargées de questions telles que l'emploi pour ajouter une dimension "sexospécifique" aux solutions proposées. Il serait également utile que le Comité agisse en tant que catalyseur dans les différentes initiatives des Nations Unies telles que l'Initiative spéciale pour l'Afrique, pour que les besoins spécifiques des femmes soient pris en considération. Il reviendrait également au Comité d'élaborer un programme pluriannuel en coopération avec la Commission de la condition de la femme.

Lors du dialogue entre les membres de la Commission et les représentants des équipes de travail, le représentant du Royaume-Uni a notamment demandé des précisions sur le fonctionnement des équipes de travail. Quelle est la fréquence de leurs réunions? La durée de ces dernières et le lieu où elles doivent se réunir? Quelles sont les difficultés que ces dernières ont rencontrées jusqu'à présent? L'approche intégrée se reflète-t-elle au sein des équipes de travail? Cette répartition très vaste des questions entre différentes équipes de travail ne risque-t-elle pas, contrairement aux objectifs poursuivis, de multiplier le nombre des débats et celui des activités bureaucratiques et donc de freiner les efforts déployés afin de renforcer les activités opérationnelles de l'Organisation et de retarder la mise en oeuvre pratique des recommandations des conférences ? Le représentant a souhaité des précisions sur les travaux du Groupe de travail chargé d'examiner les questions liées au développement social dans les pays touchés par des conflits. La représentante du Mexique a souhaité savoir ce qu'il est advenu de la mise en oeuvre de la demande formulée dans le Programme d'action de Copenhague afin qu'une étude soit réalisée sur les répercussions des politiques d'ajustement structurel sur le développement social.

Le représentant du Soudan a demandé à savoir quelles sont les mesures concrètes qui ont déjà été prises au niveau des pays dans le cadre de la nouvelle approche d'action interinstitutionnelle intégrée, et dans quelle mesures les institutions financières avaient traduit dans les faits leurs engagements en faveur de l'éducation pour tous. Pour ce qui est de cette dernière question, il a été soutenu par le représentant de l'Argentine qui s'est demandé quels étaient les véritables actes auxquels on pouvait s'attendre de la part des institutions

financières. Il a également demandé comment les institutions et agences entendent relever le perpétuel défi auquel les Nations Unies sont exposées, à savoir, opérer le passage de l'abstrait au concret.

Répondant aux questions posées, le représentant du PNUD a convenu que les institutions ne disposent pas des ressources nécessaires pour passer de l'analyse à la concrétisation des solutions envisagées. A propos des relations avec les commissions fonctionnelles, l'Administrateur du PNUD a expliqué l'approche du Programme qui est de maintenir un dialogue avec les commissions, d'une part, et de mettre en oeuvre des initiatives qui visent un développement intégré en dépêchant dans les pays des équipes spéciales qui travaillent sous la direction des coordonnateurs résidents au fait des besoins spécifiques des pays. Le processus de stratégies par pays qui sont à peu près au nombre de 80 ont prouvé toute leur pertinence.

Le représentant de la Banque mondiale a fait part des activités de la Banque en Bosnie-Herzégovine et en Angola, en coopération avec le PNUD. Une initiative visant à assurer le passage de la pacification du pays à sa reconstruction et à son développement. A la question du Mexique, le représentant a expliqué que des études sont entreprises pour juger de la valeur des programmes d'ajustement structurel. Il s'agit en outre d'y incorporer une série de mesures pour prévenir leurs effets négatifs sur les groupes vulnérables. Poursuivant, le représentant a fait savoir qu'en ce qui concerne les programmes d'allégement de la dette sur une base multilatérale ou encore des conditions d'octroi de prêts, la Banque se préoccupe davantage de la dimension sociale de ces activités. Répondant au Soudan et à l'Argentine, le représentant a indiqué que la Banque mondiale s'efforce de diversifier ses partenariats en recourant aux ONG par exemple, et ce, dans le souci de rester à l'écoute des besoins et des exigences des différents pays.

La représentante du BIT a, pour sa part, souligné la nécessité de disposer d'indicateurs communs. Des équipes spéciales se penchent d'ailleurs sur cette question et prévoient une réunion le 9 juillet prochain. Le BIT entend en outre organiser des séminaires nationaux en automne et publier une série de rapports au mois de février prochain. Le représentant de l'UNESCO, répondant sur le nombre de réunions prévues pour les équipes de travail, a assuré les délégations que l'objectif est d'achever les travaux en un an. Parlant à son tour des indicateurs, il s'est félicité des directives qui ont été définies en la matière par le PNUD. Venant à la question de l'aide au développement, le représentant a précisé qu'en dépit d'un déclin évident de cette aide, le volume de l'aide consacré à l'éducation a augmenté de 30%.

Revenant aux questions, le représentant du Canada a souhaité savoir si une possibilité existe de discuter, entre les différentes équipes interinstitutions, des stratégies visant à lutter contre l'exploitation des enfants par le travail. Pour sa part, le représentant des Pays-Bas a demandé aux panélistes de préciser quel type de projets il ne convient plus de mettre en oeuvre et d'expliquer les raisons de leur échec. Le représentant du Chili, attirant l'attention sur la séance extraordinaire de l'Assemblée générale sur l'administration publique, a argué que l'application des objectifs du Sommet mondial de Copenhague dépend d'une gestion publique démocratique et transparente. Soulignant que le développement est aujourd'hui indissociable d'une bonne gestion des affaires publiques, le représentant a souhaité connaître la place que les

équipes interinstitutions accordent à cette question. La représentante de l'Ukraine a, pour sa part, souhaité en savoir davantage sur les perspectives de la coopération avec les pays en transition. La représentante du Bénin s'est, elle, inquiétée de la reconnaissance du rôle de la famille dans le développement social.

Répondant à ces dernières questions, le représentant du PNUD a souligné que la constitution des équipes interinstitutions ont au moins l'avantage d'éviter le double emploi sur le terrain. Illustrant ces propos, il a stigmatisé la situation d'un pays, où en dépit des contraintes financières que connaît l'ONU, trois institutions différentes poursuivent leurs opérations dans le même domaine. Venant à la question du Chili, il a indiqué que la question de l'administration des affaires publiques est inscrite à l'ordre du jour de l'équipe interinstitutions chargée de la question de la création d'un environnement favorable au développement social. Par ailleurs, le représentant de la Banque mondiale, répondant à l'Ukraine a convenu de l'importance d'aborder les problèmes des pays en transition dans un cadre spécifique.

En ce qui concerne la question du Bénin, la Conseillère spéciale du Secrétaire général sur les questions sexospécifiques a fait savoir que le Comité de la condition de la femme consacrera une place particulière à la famille au sein de son ordre du jour. S'agissant de la question du Canada, la représentante du BIT a mis l'accent sur le caractère complexe de la question du travail des enfants. Elle a expliqué que le programme mis en oeuvre par le BIT vise à lutter contre les causes réelles du travail des enfants en coopération avec les gouvernements et les ONG. Cette lutte, a-t-elle dit, doit également se concentrer sur la recherche d'options acceptables pour les employeurs, les familles ou encore les gouvernements. Supprimer le travail des enfants ne suffit pas, encore faut-il trouver des solutions économiques de rechange. Etayant ces propos, le représentant de l'UNESCO a mis l'accent sur l'importance des campagnes d'éducation sur les droits de l'enfant. Il est question pour cela de travailler en collaboration avec le BIT pour garantir le respect des lois nationales sur l'éducation de base. Répondant au Bénin, le représentant a fait état d'un programme sur la gestion de la transformation sociale qui traite de l'impact de cette transformation sur la famille.

La Commission se réunira de nouveau demain matin à partir de 10 heures. Elle entendra les rapports des Présidents de ses Groupes de travail.

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