SG/SM/5991

LA CONFERENCE SUR LES REFUGIES ET LES MIGRANTS MARQUE LA SOLIDARITE MONDIALE ENVERS LA RUSSIE ET LES ETATS DE LA CEI, JUGE LE SECRETAIRE GENERAL

Pour M. Boutros-Ghali, la Conférence est exemplaire car la situation des personnes déplacées ne relève d'aucune réglementation internationale

 

On trouvera ci-après le texte du discours que le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, fera à l'occasion de la Conférence sur les réfugiés et les migrants dans la communauté des Etats indépendants, à Genève le 30 mai 1996 :

 

La Conférence qui s'ouvre aujourd'hui revêt, à mes yeux, une importance capitale.

Elle montre clairement la volonté de la communauté internationale de se mobiliser pour contribuer à la résolution de ce qui est, tout à la fois, un problème politique et un drame humain : la situation des réfugiés et des personnes déplacées dans l'ensemble de la Communauté des États indépendants et dans les régions avoisinantes.

Nous avons tous vécu, ces dernières années, les immenses bouleversements géopolitiques qui ont affecté cette grande et importante région du monde.

En quelques années, la Russie a modifié profondément le cours de sa propre histoire. De nouvelles entités ont accédé au statut d'État et sont devenues des membres à part entière de l'Organisation des Nations Unies.

Mais il est clair que nous vivons encore très largement une période de transition, que ces grands espaces n'ont pas encore atteint la stabilité à laquelle ils aspirent et que de nombreuses populations n'ont pas encore trouvé le lieu où elles peuvent espérer une installation définitive et une protection juridique affirmée.

A l'heure actuelle, plus de 9 millions de personnes déplacées vivent encore dans l'incertitude de l'avenir. Leurs conditions sont souvent précaires et leur statut aléatoire.

 

- - SG/SM/5991 REF/1140 29 mai 1996(à suivre) Elles attendent de nous à la fois assistance et conseils. Elles espèrent ainsi que nous les aiderons à prendre en main leur propre destinée.

Je me félicite donc de voir ici réuni l'ensemble des États concernés par cette situation. Je veux également remercier tous les participants à ce forum, les États, les institutions spécialisées, les organes des Nations Unies, les organisations non gouvernementales et toutes celles et tous ceux qui montrent ainsi leur volonté de contribuer à la mise en place de cette vaste entreprise multilatérale.

Cette conférence marque clairement, me semble-t-il, la solidarité de la communauté internationale envers la Russie et l'ensemble des États membres de la CEI.

Quant à moi, croyez bien que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour contribuer à mobiliser l'ensemble de l'Organisation des Nations Unies afin d'assurer le suivi du Forum qui vous réunit tous aujourd'hui.

Je voudrais également souligner que cette conférence est, à plus d'un titre, une manifestation exemplaire.

Chacun sait, en effet, que si le statut de réfugié est aujourd'hui largement pris en compte par le droit international, la situation des personnes déplacées ou soumises à des migrations forcées ne relève d'aucune réglementation internationale précise et définie.

C'est dire l'importance que revêt le Programme d'action sur lequel vont porter vos débats. Il constitue, me semble-t-il, un progrès important dans l'application du droit international à toutes les formes contemporaines de migrations involontaires ou forcées.

Votre conférence, au-delà même du problème régional qu'elle aborde aujourd'hui, offre donc un immense espoir aux 30 millions de personnes déplacées qui, en de multiples lieux de la planète, attendent aide et soutien.

Je veux donc remercier la Fédération de Russie d'avoir pris l'initiative de cette manifestation.

C'est en effet la Fédération de Russie qui, consciente des immenses déplacements de population provoqués par les problèmes sans précédent auxquels nous nous heurtons actuellement, a proposé à l'Assemblée générale des Nations Unies d'organiser la présente conférence.

Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, contraint de trouver des solutions régionales à la crise provoquée par l'afflux de réfugiés qui a fait suite à l'effondrement de l'Union soviétique, était également favorable à la tenue de cette conférence. L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe s'est associée aux efforts déployés pour qu'elle ait lieu.

En conséquence, l'Assemblée générale, dans sa résolution 49/173 du 24 février 1995, a prié le Haut Commissaire de convoquer une conférence régionale pour l'examen des problèmes relatifs aux réfugiés, aux personnes déplacées ou contraintes à d'autres formes de déplacement et aux rapatriés dans les pays de la Communauté d'États indépendants et dans certains États voisins. C'est ainsi que nous sommes réunis aujourd'hui.

C'est en nous appuyant sur un cadre institutionnel solide, des capacités opérationnelles et d'intervention efficaces, la coopération gouvernementale et non gouvernementale, ainsi que la solidarité internationale que nous pourrons apporter des solutions valables aux problèmes des réfugiés et des migrants et déterminer les moyens de prévenir d'autres déplacements de population.

Le succès de cette conférence dépend de la mise en oeuvre du Programme d'action. Ce programme énonce les causes de la crise et expose les conséquences qu'elle a pour la sécurité et la stabilité internationales.

La stratégie globale élaborée dans le cadre de la conférence est fondée sur le respect des droits universels de la personne. Elle réaffirme des principes internationalement reconnus en matière de mouvements de population. Avant tout, elle établit clairement la nécessité de la coopération internationale, de la solidarité et du partage des charges.

Les principes du Programme d'action sont de la plus haute importance. Ils concernent essentiellement :

_ Le droit à la liberté de circulation;

_Le droit de choisir son lieu de résidence dans son propre pays;

_Le droit d'avoir une nationalité;

_Le droit des citoyens à se voir reconnaître la qualité de citoyen dans l'État successeur.

Le Programme d'action réaffirme en outre un large éventail de droits des minorités, ainsi que le droit des personnes expulsées à revenir dans leur foyer.

La mise en oeuvre du Programme suppose une interaction étroite et constante entre l'action humanitaire et politique. Les crises humanitaires de très grande ampleur qui ont récemment eu lieu, notamment dans la région des Grands Lacs en Afrique et sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, ont montré que l'on ne saurait parvenir à des solutions durables sans la volonté politique requise.

La prévention revêtira une importance de premier plan. En dernière analyse, les interventions les mieux conçues ne peuvent être efficaces si l'on ne parvient pas à régler ou à circonscrire les problèmes à la source. Pour prévenir d'autres déplacements de population, il convient, entre autres, de s'appuyer sur : -La diplomatie préventive, afin de prévenir les conflits;

-Des lois et institutions efficaces qui assurent la protection des droits de l'homme en général et des minorités en particulier;

-La mise en place de mesures propres à susciter la confiance et à consolider la paix;

-L'assainissement de l'environnement; et

-La création de débouchés économiques que chacun puisse exploiter dans la région où il est né.

Comme nous avons pu le constater au fil des conférences que la communauté internationale a récemment consacrées à des questions de portée mondiale, l'exécution et le suivi joueront un rôle crucial. La stratégie qui sera adoptée dans les trois ou quatre prochaines années sera décisive pour la mise en oeuvre du Programme jusqu'à l'an 2000.

Conscients que c'est avant tout aux États de la CEI qu'il appartient de résoudre les problèmes qu'ils rencontrent et que leur avenir est entre leurs mains, les trois membres du Secrétariat de la Conférence - à savoir le HCR, l'Organisation internationale pour les migrations et l'OSCE - se sont engagés à les aider à mettre en oeuvre le Programme d'action.

L'union de ces trois organisations - un organisme des Nations Unies, une organisation internationale n'appartenant pas au système des Nations Unies et une organisation régionale - est la preuve de la nouvelle solidarité et du nouvel engagement international qui se font jour dans l'intérêt de tous. D'autres initiatives pourront s'en inspirer à l'avenir.

Aux pays de la CEI, je tiens à exprimer ma profonde admiration pour les initiatives qu'ils prennent et l'engagement dont ils font preuve en faveur du progrès politique, social et économique. En poursuivant dans cette voie, ils seront mieux à même de résoudre les problèmes qui se posent.

A l'ensemble de la communauté internationale, j'adresse un appel pour qu'elle appuie pleinement le Programme d'action, sur le plan moral, technique et financier. La mise en oeuvre de ce Programme ne bénéficiera pas uniquement aux États membres de la CEI, mais aussi à d'autres pays, tant dans la région qu'ailleurs.

Aux hommes et aux femmes du monde entier, je conseille de suivre cette conférence de près, car c'est ici, par la mise en place de nouvelles formes de coopération internationale visant à remédier à de nouveaux types de problèmes de portée mondiale, que l'avenir se décide.

Cette conférence est de la plus haute importance pour des milliers d'innocents et de personnes qui souffrent. Elle peut aussi marquer une étape décisive dans la démocratisation de la communauté internationale et ce, pour le bien de l'humanité tout entière.

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