CS/700

LE CONSEIL DE SECURITE DEBAT DE LA SITUATION AU LIBERIA

28 mai 1996


Communiqué de Presse
CS/700


LE CONSEIL DE SECURITE DEBAT DE LA SITUATION AU LIBERIA

19960528 MATIN CS/700

Les délégations se disent favorables à la prorogation proposée pour une période de trois mois du mandat de la MONUL

Le Conseil de sécurité a débattu, ce matin de la situation au Libéria, sous la présidence de M. Qin Huasun (Chine). Au cours de cette réunion qui s'est prolongée en début d'après-midi, l'ensemble des Membres du Conseil, ainsi que les représentants du Nigéria, de l'Algérie, du Ghana, du Zimbabwe et de la Zambie ont fait une déclaration. Le représentant du Libéria a informé le Conseil de sécurité de l'évolution de la situation dans son pays.

Les intervenants se sont dits préoccupés par la récente détérioration de la situation politique et la reprise des combats au Libéria. Ils ont estimé que les espoirs nés de la signature de l'Accord d'Abuja se sont vus frustrés par l'ambition politique déraisonnable des dirigeants des factions armées. La plupart des délégations se sont félicitées de l'adoption, le 7 mai dernier à Accra, du mécanisme pour le retour du Libéria aux Accords d'Abuja. Elles ont, dans ce contexte, apporté leur soutien aux dispositions de ce mécanisme, en l'occurrence l'instauration immédiate d'un cessez-le-feu, le retrait des troupes combattantes de Monrovia, le redéploiement des troupes de l'ECOMOG dans la capitale et la garantie de la sécurité du personnel et des biens des organisations humanitaires. A trois jours de l'expiration du mandat de la MONUL, les représentants ont souhaité, telle que proposée par le Secrétaire général, sa prorogation pour une période de trois mois, certaines délégations conditionnant cette démarche à l'évolution de la situation et au maintien des troupes de l'ECOMOG dans le pays. Le Conseil de sécurité, qui demeure saisi de la question, est saisi, au titre de l'examen de la question, d'un rapport du Secrétaire général sur le rôle futur de la MONUL, tenant compte de l'évolution de la situation au Libéria.

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Rapport du Secrétaire général sur la MONUL (S/1996/362)

Dans son dix-septième rapport sur la MONUL, le Secrétaire général indique que le document est présenté en application de la résolution 1041 (1996) du Conseil de sécurité, en date du 29 janvier 1996, par laquelle le Conseil a prorogé le mandat de la Mission jusqu'au 31 mai 1996. Le rapport rend compte de l'évolution de la situation au Libéria depuis le rapport du Secrétaire général du 1er avril 1996 (S/1996/232) et contient des recommandations concernant le rôle futur de la MONUL au Libéria.

Le Secrétaire général estime que les chefs de faction ont nettement démontré, au cours des six derniers mois, leur mépris pour les aspirations à la paix du peuple libérien. Ils se sont moqués des Nations Unies, de la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et de la communauté internationale et ont contraint la plupart des agents internationaux à gagner d'autres pays.

La guerre civile au Libéria occupe la CEDEAO depuis plus de six ans. Les États d'Afrique de l'Ouest, qui connaissent eux-mêmes de graves difficultés financières, ont dépensé des millions de dollars, négocié d'innombrables accords de paix et sacrifié la vie de nombre de leurs jeunes hommes pour tenter d'apporter la paix au Libéria. Il est arrivé que les hostilités débordent les frontières, mettant en péril la stabilité des voisins du Libéria. De surcroît, les pays de la CEDEAO, qui accueillent depuis plusieurs années des réfugiés libériens, risquent de voir des milliers d'autres chercher refuge sur leurs rivages.

Lors de leur récente réunion tenue à Accra, les ministres des affaires étrangères de la CEDEAO ont réaffirmé que l'Accord d'Abuja constituait la seule base de la paix au Libéria et ont arrêté un certain nombre de mesures nécessaires à la reprise de son application. La CEDEAO a averti les chefs des factions que s'ils n'appliquaient pas ces mesures, elle reconsidérerait son intervention au Libéria lors de sa prochaine réunion au sommet prévue pour le début d'août 1996. Le retrait du Groupe de contrôle de la CEDEAO (ECOMOG) du Libéria pourrait se révéler catastrophique, non seulement pour le pays, mais aussi pour l'ensemble de la sous-région.

Au cas où la CEDEAO serait contrainte de décider de se dégager du Libéria et de retirer l'ECOMOG, la MONUL n'aurait d'autre choix que de suivre son exemple. C'est pourquoi j'engage les chefs des factions libériennes à peser soigneusement les lourdes conséquences qu'auront leurs actions au cours des deux mois à venir et, dans ce contexte, de mettre immédiatement en oeuvre les mesures décidées à Accra par la CEDEAO.

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Au cours de la réunion du 7 mai à Accra, les ministres des affaires étrangères de la CEDEAO sont convenus que le gouvernement de transition devait comporter tous les éléments et que le Conseil d'État devait reprendre ses travaux comme prévu par l'Accord d'Abuja. Tous les membres du Conseil, qui représentent divers secteurs de la société libérienne, devraient avoir leur mot à dire dans le processus de prise de décisions. Il importe également de trouver les moyens de permettre à la société civile d'occuper la place qui lui revient dans le processus de paix. A ce propos, le Secrétaire général rappelle qu'il a prié son Représentant spécial d'encourager la participation au processus politique d'un large éventail de dirigeants civils et de continuer d'engager le gouvernement de transition à rétablir l'atmosphère nécessaire à l'épanouissement du processus démographique et à la reprise des activités des médias.

En l'absence d'institutions capables d'organiser les élections et étant donné l'instabilité persistante, il est très peu probable que les élections puissent avoir lieu en août 1996 comme prévu par l'Accord d'Abuja. L'avenir du processus électoral, du moins d'un processus pouvant être appuyé par la communauté internationale, dépendra du rétablissement des conditions fondamentales de paix et de sécurité et de la reprise de l'application de l'Accord d'Abuja.

Dans sa résolution 1020 (1995), le Conseil de sécurité a chargé la MONUL d'aider à l'application de l'Accord d'Abuja, en particulier pour ce qui est du désarmement et de la démobilisation. Toutefois, dans la situation d'insécurité et d'instabilité qui règne actuellement à Monrovia et dans l'ensemble du Libéria, la MONUL ne peut pas faire grand chose dans ce sens. Par ailleurs, grâce à ses bons offices, la MONUL continue de jouer un rôle important en aidant la CEDEAO à faciliter la reprise du processus de paix. Elle peut aussi faciliter, en consultation avec l'ECOMOG, l'adoption de mesures de confiance, afin de créer des conditions propices à un retour à l'Accord d'Abuja, explique le Secrétaire général. C'est pourquoi il recommande que le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MONUL de trois mois, jusqu'au 31 août. Pendant cette période, l'effectif de la MONUL, qui se compose actuellement de 25 civils et militaires, resterait plus ou moins à son niveau actuel, étant entendu qu'il faudrait éventuellement l'augmenter ou le réduire légèrement en fonction de l'évolution de la situation sur le terrain en matière de sécurité.

Après le Sommet de la CEDEAO, qui aura lieu au début du mois d'août, le Secrétaire général indique qu'il présentera au Conseil de sécurité des recommandations sur le rôle que la MONUL pourrait éventuellement être amenée à jouer après le 31 août. A l'évidence, ces recommandations dépendront des décisions que la CEDEAO prendra concernant son propre rôle au Libéria. Elles dépendront aussi de la mise en oeuvre par les chefs des factions des mesures concrètes nécessaires pour restaurer un minimum d'ordre public à Monrovia et ailleurs. Ces mesures doivent commencer par le respect scrupuleux du

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cessez-le-feu, le retrait des combattants de Monrovia, le déploiement de l'ECOMOG dans l'ensemble de la ville et le rétablissement de Monrovia en tant que zone de sécurité. Une fois que ces objectifs de base auront été atteints, des mesures devraient être prises pour que les négociations commencent, sous les auspices de la CEDEAO et de l'ONU, en vue de régler les problèmes qui n'ont pas été pleinement abordés dans l'Accord d'Abuja et d'élaborer un plan global d'application. Le consentement des chefs des faction à entreprendre des négociations véritables et l'esprit de conciliation seront sans aucun doute des facteurs décisifs pour la poursuite de l'engagement de la communauté internationale au Libéria. A cet égard, les chefs des factions devraient soigneusement méditer sur les enseignements tirés en Somalie.

Il faudra aussi aborder les questions liées à la sécurité de la MONUL et des organisations humanitaires au Libéria et celle du retour du matériel pillé. Il est peu probable que la communauté internationale soit prête à s'engager de nouveau dans le processus de paix au Libéria tant que tous les éclaircissements nécessaires n'auront pas été apportés sur ces questions et que les factions ne donneront pas les garanties suffisantes pour la sécurité et la sûreté des civils innocents, ainsi que du personnel des Nations Unies et d'autres organisations internationales.

En ce qui concerne la MONUL, il convient de rappeler que lors de sa création, il a été clairement reconnu que l'ECOMOG devrait assurer la sécurité des observateurs militaires des Nations Unies non armés afin qu'ils puissent s'acquitter des tâches qui leur sont confiées. Pour des raisons bien connues toutefois, l'ECOMOG n'a pas été en mesure d'assurer au personnel de la MONUL le niveau de sécurité nécessaire pour fonctionner au Libéria ou s'acquitter entièrement de ses propres responsabilités en tant que force de maintien de la paix. Les événements des dernières semaines l'ont amplement démontré. En conséquence, il convient au cours des prochaines semaines d'examiner avec soin quels sont les moyens qui permettraient de faire face efficacement à ces difficultés.

L'intervention de la MONUL au Libéria a été le premier déploiement d'une mission de maintien de la paix par l'ONU parallèlement à celui d'une organisation régionale, en l'occurrence une organisation sous-régionale. Le Secrétaire général rappelle qu'il a souligné dès le début que le rôle qui était prévu pour la MONUL au Libéria était fondé sur l'hypothèse que l'ECOMOG serait en mesure d'assumer les vastes tâches qui lui avaient été confiées. Malheureusement, l'ECOMOG n'a jamais reçu le personnel et les ressources nécessaires pour lui permettre de s'acquitter efficacement de ses responsabilités. Il serait illusoire de penser que ce modèle novateur d'opération de maintien de la paix sera en mesure de réussir au Libéria, en particulier dans les conditions actuelles, si l'ECOMOG ne bénéficie par d'un financement fiable et suffisant et si la Force n'est pas renforcée et structurée de façon à lui permettre de s'acquitter de ses tâches comme une force de maintien de la paix professionnelle.

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S'agissant du financement de la MONUL, le Secrétaire général

fait observer que l'Assemblée générale est saisie des budgets qu'il a proposés pour la période allant du 1er juin 1996 au 30 juin 1997 (A/50/650/Add.2 et 3). On estime que les dépenses relatives au fonctionnement de la MONUL avec les effectifs autorisés à l'heure actuelle s'élèveront, en chiffres bruts, à 1 603 500 dollars pour le mois de juin 1996, 3 553 700 dollars pour le mois de juillet 1996 et 2 187 400 dollars pour le mois commençant le 1er août 1996. Par conséquent, si le Conseil de sécurité décide de proroger le mandat de la MONUL avec des effectifs réduits, comme il le recommande dans le présent rapport, les dépenses relatives au fonctionnement de la Mission pendant la période considérée devront être modifiées en fonction des montants mensuels indiqués ci-dessus. Le Secrétaire général a donc fait par de son intention de présenter prochainement à l'Assemblée des prévisions de dépenses révisées. Au 9 mai 1996, le montant des contributions au compte spécial de la MONUL non acquittées depuis la création de la Mission s'élevait à 11,9 millions de dollars. A cette date, le montant total des contributions non acquittées pour l'ensemble des opérations de maintien de la paix se chiffrait à 1 milliard 716 millions de dollars.

Déclarations

M. WILLIAM BULL (Libéria) a déclaré que le Libéria semble aujourd'hui plus éloigné de la paix que lorsque la guerre a éclaté en décembre 1989. L'Accord d'Abuja qui a appelé au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration des combattants à la vie civile, au rapatriement des réfugiés libériens ainsi qu'à la tenue d'élections justes et libres en août 1996 sous contrôle international demeure largement inappliqué. La reprise des hostilités le 6 avril dernier continue. Le cessez-le-feu et les autres mesures demandées par la CEDEAO n'ont pas été honorés. Le fléau de la population civile du Libéria est encore plus terrible. Le Libéria, pays qui a depuis plus de 130 ans vécu dans la paix et la stabilité en tant que pays libre, souverain et indépendant, est devenu une nation pariah dont les habitants fuient à bord de bateaux.

Le gouvernement du Libéria prie instamment le Conseil de sécurité d'exiger le plein respect de l'embargo et d'imposer des sanctions à ceux qui en violent l'application. En outre, il propose qu'un régime de sanctions soit envisagé à l'encontre de ceux qui contribuent aux efforts de guerre des différentes factions belligérantes, notamment les sociétés multinationales qui acquièrent des minéraux à un prix très faible au détriment de la population libérienne. A l'instar de la communauté internationale, les Libériens invitent le Conseil d'Etat à mettre fin aux hostilités dans un bref délai.

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Le Conseil d'Etat a indiqué qu'il sera lié par les recommandations adoptées par la réunion ministérielle des Neuf Etats Membres de la CEDEAO. Il est important d'observer qu'un

élément crucial des efforts de paix consiste à renforcer l'ECOMOG en vue de lui permettre de s'acquitter de son mandat en vertu de l'Accord d'Abuja. Une fois encore, le gouvernement du Libérien appelle la communauté internationale à apporter un appui logistique et autre à l'ECOMOG. M. Bull a fait remarquer que si les efforts de pionnier de la CEDEAO ont influé un souffle nouveau aux dispositions de la Charte, encourageant les initiatives sous-régionales dans le domaine du règlement pacifique des différents, la Charte devrait être amendée en conséquence. Il faudrait mettre en place un mécanisme par lequel les activités de maintien de la paix sous-régionales imposées par le Conseil de sécurité seraient financées par les Nations Unies.

Le représentant a regretté que les pays de la CEDEAO aient menacé de se retirer du Libéria en l'absence de volonté politique de la part des dirigeants des factions belligérantes et de l'absence d'appui de la part de la communauté internationale. Face à la détérioration de la situation au Libéria, le gouvernement libérien lance un appel au Président en exercice de la CEDEAO, le Président du Ghana, M. Jerry Rawlings, à reconsidérer la convocation le mois prochain du Sommet de la CEDEAO. Il est également impératif, a estimé M. Bull, que le pays ne soit pas abandonné. Comme l'envisage le Secrétaire général dans son rapport, l'ECOMOG devrait être intégrée dans une force plus importante. Cette mesure contribuerait à éliminer les défaillances logistiques et financières qui ont empêché l'ECOMOG de s'acquitter de son mandat.

M. EDWARD W. GNEHM (Etats-Unis) a regretté la récente descente aux enfers dont le Libéria est de nouveau le théâtre et qui, au dire du Secrétaire général, risque de compromettre sérieusement les acquis du processus de paix d'Abuja. Faisant référence à la visite de Mme Albright à Monrovia, en janvier dernier, le représentant a indiqué qu'il est désormais clair que la lutte au Libéria est avant tout un combat pour le pouvoir entre les élites en place. En avril, les dirigeants de ces factions ont privilégié leurs intérêts propres : Ils ont repris les hostilités transformant Monrovia en champ de bataille et ont pillé les biens des organismes humanitaires. Dans ce contexte, les Etats-Unis se sont vu forcés d'entreprendre une opération d'évacuation des ressortissants étrangers encore présents au Libéria. Les Etats-Unis saisissent cette occasion pour faire part de leur indignation face au pillage systématique des biens de l'ONU, des ONG, des églises, des hôpitaux et des propres foyers de la population libérienne.

Le représentant a estimé qu'il n'est pourtant pas l'heure d'abandonner le Libéria. La communauté internationale se doit de poursuivre ses efforts humanitaires et en faveur de la paix dans ce pays. Les pays de la CEDEAO ont inauguré cette démarche en adoptant un mécanisme en vue du retour du Libéria à l'Accord d'Abuja, qui prévoit la restauration du cessez-le-feu, le retrait des

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troupes combattantes de Monrovia, le déploiement de l'ECOMOG à

travers la ville et l'instauration d'une zone de sécurité dans la ville. Ces mesures s'avèrent nécessaires pour assurer l'engagement continu de la communauté internationale. Il s'agit là du message que les autorités américaines ont adressé aux parties libériennes par le biais des délégations de haut niveau dépêchées sur place au cours des dernières semaines. Les Etats-Unis sont d'avis que le Conseil de sécurité a le devoir s'appuyer cette importante initiative des pays de la région. Il s'agit en effet de la dernière chance pour le Libéria. Les chefs de guerre doivent ordonner le désarmement de leurs forces et leur retrait pacifique de Monrovia, qui doit repasser sous le contrôle de l'ECOMOG. De même, le Conseil d'Etat se doit d'entamer ses travaux en sa qualité de Gouvernement de transition, comme cela est prévu par les Accords d'Abuja. D'ici la fin de la semaine, le Conseil de sécurité devra également se prononcer sur l'avenir de la MONUL. A ce titre, les Etats-Unis appuient la prorogation de la mission pour trois mois.

M. NABIL ELARABY (Egypte) a fait part de sa préoccupation face à la dégradation soudaine de la situation au Libéria. L'Egypte estime que cette état de fait est essentiellement le résultat du manque de volonté manifeste des dirigeants des milices, qui s'évertuent à laisser leur pays sombrer dans l'anarchie. Il est pourtant nécessaire que l'ensemble des factions participent à la prise des décisions au sein du Gouvernement de transition. Le retrait des combattants de Monrovia et le redéploiement de l'ECOMOG sont des conditions fondamentales à la reprise du processus de paix. L'Egypte se félicite de l'initiative américaine de mettre en place un groupe de contact sur le Libéria. La communauté internationale doit poursuivre ses efforts en faveur du Libéria, notamment dans le domaine humanitaire et il est par conséquent prématuré de parler d'échec de la communauté internationale au Libéria. Le retrait des forces de l'ECOMOG et de la MONUL auraient en effet des conséquences catastrophiques, à l'image de la Somalie. Le conflit au Libéria a mis en relief la portée du drame des réfugiés dans la région. De plus, l'Egypte est particulièrement sensible à la situation des enfants recrutés au sein des diverses milices en lutte. Il serait inacceptable que le peuple libérien soit privé de ses droits du fait de la volonté de quelques chefs de guerre. Les pillages et le vol des équipements des organisations humanitaires est inacceptable. L'Egypte soutient la prolongation du mandat de la MONUL.

M. GERARDO MARTINEZ BLANCO (Honduras) a exprimé la préoccupation de son pays face la poursuite des hostilités et la détérioration de la situation au Libéria, qui sont autant de menaces au processus de paix et une source d'aggravation de la situation politique dans le pays. En dépit de l'engagement sans faille depuis six ans des Nations Unies et de la CEDEAO, le manque de volonté politique des parties à respecter leurs engagements au titre de l'Accord d'Abuja, continue d'affecter gravement la viabilité du processus de paix et risque, le cas échéant, de faire perdre l'appui de la communauté internationale.

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Disant prendre acte du mécanisme approuvé le 7 mai dernier par les Ministres des affaires étrangères des pays de la CEDEAO en vue de réactiver le processus de paix, le représentant a estimé

que si les parties au conflit ne respectent pas ses dispositions, dont le cessez-le-feu, le retrait des combattants de Monrovia, le retour des armes et autres équipements pillés et la garantie de la sécurité et de la liberté de mouvement de la population civile, les conséquences pour le pays risquent de s'avérer désastreuses, tant il est évident que la communauté internationale ne saurait prendre part à un processus de paix auquel les parties ne sont pas prêtes à respecter.

Le Honduras estime qu'il s'agit avant tout de rétablir les conditions fondamentales de paix et de sécurité au Libéria et pour l'application des Accords d'Abuja. Il faut que les parties adoptent des mesures concrètes pour rétablir l'ordre public dans l'ensemble du pays. Soulignant le rôle important de l'ECOMOG, le Honduras souhaite que le Groupe jouisse d'un financement adéquat et puisse être doté des ressources humaines nécessaires à l'accomplissement de son mandat de force de maintien de la paix. Concernant la MONUL, le Honduras appuie la prorogation de son mandat pour trois mois, l'augmentation ou la réduction de ses effectifs étant tributaire de l'évolution de la situation en matière de sécurité.

M. D.C.M. NKGOWE (Botswana) s'est félicité de l'engagement et de la ténacité des Etats Membres de la CEDEAO qui participent à l'ECOMOG. Il est toutefois regrettable que ces pays commencent à montrer certains signes de lassitude. Ils jouent un rôle exemplaire dans le domaine du maintien de la paix régionale. Le Botswana souhaite la poursuite de leur présence. M. Nkgowe a invité les autres Etats Membres de l'ECOMOG à se joindre aux efforts de paix au Libéria. Le représentant s'est déclaré convaincu que la paix au Libéria profitera à tous les pays de l'Afrique de l'ouest. Il est donc impératif que tous les pays de la sous-région participent à la réalisation de cet objectif de paix. Ils devraient faire tout leur possible pour y participer et empêcher tout obstacle de compromettre leurs efforts. M. Nkgowe a estimé qu'il serait possible de parvenir au règlement de la crise au Libéria si tous les pays de la sousrégion adoptaient une approche déterminée, collective et unie.

Les Nations Unies ne peuvent permettre l'échec des efforts déployés par l'ECOMOG. L'échec de l'ECOMOG aurait des implications lourdes pour la coopération future entre les Nations Unies et les organisations régionales dans le domaine du maintien de la paix. Il est important de reconnaître que l'accord régional au Libéria ne constitue pas une solution de substitution aux obligations des Nations Unies. Les Nations Unies demeurent la première organisation pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Dans ce cadre, le retrait de l'ECOMOG du Libéria conduirait à libérer immédiatement les Nations Unies de leurs obligations au Libéria. Le Botswana réitère son appel à la communauté internationale d'assister l'ECOMOG afin de lui permettre de s'acquitter plus efficacement de son mandat. Il est important que des efforts concertés soient déployés en vue de permettre à l'ECOMOG de devenir une force de maintien de la paix solide capable de se défendre et de protéger la population civile en cas de nécessité.

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M. CHOI SUNG HONG (République de Corée) a estimé que l'Accord d'Abuja doit demeurer la base de tout effort visant à restaurer

la paix et la stabilité au Libéria, même si son calendrier de mise en oeuvre demandera à être ajusté à la lumière des développements les plus récents. La République de Corée se félicite à cet égard de l'adoption du mécanisme de retour à l'Accord d'Abuja approuvé par les Ministres des affaires étrangères de la CEDEAO à Accra au début du mois. Elle demande instamment aux factions libériennes de remplir fidèlement les conditions stipulées dans le Mécanisme. La façon dont ces conditions seront appliquées permettra de mesurer l'engagement des factions libériennes en faveur du processus de paix. Le Conseil d'Etat doit lui aussi travailler dans l'esprit de l'Accord. Pour sa part, la communauté internationale peut contribuer à renforcer les capacités de maintien de la paix de l'ECOMOG. Ce dernier demeure la seule force effective de dissuasion face aux factions libériennes. L'ECOMOG peut mieux fonctionner s'il bénéficie d'une aide et d'un appui logistique internationale plus importants. La CEDEAO a également une contribution à apporter pour renforcer la capacité et l'efficacité de l'ECOMOG. Le Libéria étant le premier cas où une organisation régionale mène une opération de maintien de la paix en coopération avec les Nations Unies, l'échec de la mission de l'ECOMOG aurait des conséquences fâcheuses sur le rôle futur des organisations régionales ou sous-régionales en Afrique dans la solution des conflits au sein de la région.

Les chefs de factions devraient payer le prix de leur conduite et être tenus pour responsable des violations graves du droit international qu'ils ont perpétrées. Il conviendrait de les avertir également que tout dirigeant de faction prenant le pouvoir par d'autres moyens que démocratiques se verrait dénier toute reconnaissance internationale. La République de Corée se félicite de la décision de la CEDEAO à cet égard. Elle estime en outre que l'embargo sur les armes devrait être mis en oeuvre de manière plus efficace. Le processus de paix ne pourra en effet être garanti sans un arrêt des fourniture d'armes.

M. SERGEY V. LAVROV (Fédération de Russie) a déclaré que les événements des derniers mois au Libéria ont atteint un degré d'horreur sans précédent. L'aggravation de la situation dans le pays ne va pas sans affecter la stabilité des pays de la région. La Russie appelle les chefs de guerre au Libéria à respecter le cessez-le-feu, à se retirer de Monrovia et à rétablir son statut de zone de sécurité, à permettre le redéploiement de l'ECOMOG, à respecter les biens et la sécurité des organisations humanitaires et de la MONUL. Il est clair que la présence de la MONUL dépend pleinement du maintien des troupes de l'ECOMOG. La Fédération de Russie appelle les chefs de guerre à renoncer à leurs ambitions politiques déraisonnables et à mûrir le précédent fâcheux de la Somalie.

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M. FRANCESCO PAOLO FULCI (Italie, au nom de l'Union européenne, a déclaré que le message adressé par sa délégation aux factions belligérantes est concis et clair. Sa délégation réitère son appel à un cessez-le-feu immédiat et demande aux parties

concernées de revenir au processus de paix d'Abuja. M. Fulci a souligné que sa délégation n'entend pas étendre sa reconnaissance à tout gouvernement mis en place par la force. La situation au Libéria rappelle celle de la Somalie, il n'y a pas si longtemps. La communauté internationale avait essayé en Somalie de contribuer à restaurer la paix, mais avait constaté que la lutte pour le pouvoir était pour les dirigeants des différentes factions une préoccupation plus importante que le bien-être de la population. M. Fulci a émis l'espoir que la volonté des dirigeants de factions libériennes de poursuivre les combats, ne forcera pas une nouvelle fois la communauté internationale à se retirer d'un pays africain qui a un besoin désespéré d'assistance. Cette situation serait tout aussi catastrophique pour le Libéria que pour l'ensemble de la sous-région.

Rappelant que l'Union européenne et ses Etats Membres ont jusqu'ici figuré parmi les contributeurs les plus importants d'assistance humanitaire au Libéria, M. Fulci a indiqué que sa délégation reste engagée en faveur de l'assistance à la population civile mais cette assistance dépendra du retour à un climat de sécurité. Par ailleurs, M. Fulci a invité tous les pays à mener des enquêtes approfondies sur les livraisons d'armes dans le pays. Tant que les factions continueront à s'armer, il ne sera pas possible de parvenir à une paix durable. De l'avis de sa délégation, ce n'est que par le biais de l'engagement en cours des pays voisins que la paix au Libéria aura la chance de prévaloir. A cet égard, M. Fulci a émis l'espoir que la prochaine réunion de la CEDEAO aboutira des résultats positifs.

M. JOHN WESTON (Royaume-Uni) s'est accordé avec la recommandation du Secrétaire général selon laquelle le mandat de la MONUL devrait être prorogé sur une base d'assistance et de soutien, et a approuvé ainsi l'adoption de la résolution présentée. La responsabilité des chefs de faction dans le sort tragique de leur propre peuple est claire, tout comme l'est leur responsabilité concernant le respect de l'Accord d'Abuja. Le Royaume-Uni appuie les conclusions formulées par les Ministres des affaires étrangères de la CEDEAO à Accra selon lesquelles il faut relancer l'application de l'Accord d'Abuja. La pleine mise en oeuvre de cet Accord demeure le meilleur cadre pour résoudre les problèmes du Libéria, et l'ECOMOG demeure l'option la plus viable pour progresser. Le renforcement de l'ECOMOG reste des plus nécessaires, au moins pour assurer la sécurité adéquate du personnel de la MONUL. Le Royaume-Uni espère que la communauté des contributeurs examinera attentivement l'aide qu'elle peut le plus utilement apporter. Il se féliciterait notamment du déploiement du second bataillon ghanéen pour l'ECOMOG, tout en notant les préoccupations du Gouvernement ghanéen à propos du fait que les chefs de factions n'appliquent pas l'Accord d'Abuja et la possibilité que ce bataillon supplémentaire puisse être utilisé pour faciliter le retrait de toutes les troupes ghanéennes du Libéria.

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La communauté internationale est à bout de patience. Un cessez-le-feu immédiat doit être accepté et Monrovia doit retrouver son ancien statut de zone protégée. L'ECOMOG doit de son côté se voir autorisée à se déployer conformément à son

mandat, et l'aide humanitaire doit pouvoir accéder à ceux qui en ont le plus besoin. Sans ces mesures de base, il ne sera pas possible de mener à bien le désarmement, la démobilisation et la réintégration des anciens combattants. Le message adressé aujourd'hui aux chefs de faction ne peut être plus clair : arrêtez les combats, déposez vos armes et écoutez les demandes de votre peuple.

M. GERHARD HENZE (Allemagne) a estimé que la mise en péril du processus de paix au Libéria incombe avant tout aux dirigeants des multiples milices, qui n'ont démontré aucune compassion pour la survie ou le bien-être du peuple libérien. La communauté internationale doit les tenir responsables pour leurs crimes contre la population. L'Allemagne appelle fermement les dirigeants des factions à mettre immédiatement fin aux combats et à respecter les exigences du "Mécanisme de retour du Libéria à l'Accord d'Abuja". Indiquant que le Conseil de sécurité devra au cours de cette semaine, se prononcer sur l'avenir de la MONUL, le représentant a fait remarquer qu'il devra surtout évaluer si cette présence répond encore à une logique. Les dirigeants des factions devront manifester leur volonté de voir la MONUL poursuivre son action. L'Allemagne souhaite enfin la garantie des conditions minimales de sécurité en vue de la poursuite de la fourniture de l'assistance humanitaire.

M. ALAIN DEJAMMET (France) a estimé que les récents événements qui se sont produits au Libéria continuent de susciter l'inquiétude du gouvernement français. La délégation française estime que les factions portent l'entière responsabilité de ce qui vient de se produire. Elle regrette en particulier que la reprise des combats à Monrovia et dans le reste du pays se soit traduite par l'anéantissement des efforts faits dans le domaine humanitaire.

Les Ministres des affaires étrangères de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) qui se sont réunis à Accra le 7 mai ont réaffirmé que l'accord d'Abuja constituait la seule base pour rétablir la paix au Libéria. Partant de là, ils ont défini un certain nombre de mesures que les factions devront mettre en oeuvre d'ici la tenue du Sommet de la CEDEAO qui interviendra au début du mois d'août. Les Ministres ont fait savoir très clairement que le maintien au Libéria de la force africaine dépendra des progrès qui auront été réalisés par les factions pour remettre sur les rails le processus de paix.

La délégation française souhaite que les factions entendent l'appel qui leur est ainsi lancé. Un retrait complet de la communauté internationale du Libéria aurait en effet pour conséquence de permettre la reprise des combats sur l'ensemble du pays sans perspective de règlement à court terme. Cette perspective serait de plus dangereuse pour la stabilité de la sous-région. C'est la raison pour laquelle la France ne souhaite pas abandonner les Libériens à euxmêmes.

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La France n'a cessé d'apporter son soutien au processus de paix au Libéria. Elle le fera encore en acceptant, comme le recommande le Secrétaire général, de prolonger le mandat de la MONUL pour une durée de trois mois. La France, comme elle s'y est engagée, apportera également une aide au processus de paix

de 15 millions de francs. Elle espère que cette aide contribuera à renforcer le Groupe de contrôle de la CEDEAO (ECOMOG) sur le terrain et donc à mieux garantir la sécurité dans la capitale et dans le reste du pays lorsque les soldats de la CEDEAO pourront s'y redéployer. Cela dit, la prolongation du mandat de la MONUL devra être mise à profit par le Conseil pour examiner si les chefs de guerre entendent réellement restaurer la paix au Libéria. Dans le cas contraire, la France devra, comme le suggère le Secrétaire général, reconsidérer le rôle de la mission d'observateurs. Elle espère sincèrement, ne pas être contrainte de se prononcer en faveur de son retrait.

M. ZBIGNIEW M. WLOSOWICZ (Pologne) a souligné que les dirigeants des factions au Libéria sont responsables en premier lieu des derniers développements survenus dans le pays, puisqu'ils ne font preuve de volonté politique en faveur d'un accord ou d'un compromis. Les dirigeants des factions belligérantes devraient prendre conscience que la communauté internationale ne sera prête à maintenir sa présence dans leur pays que s'ils respectent les engagements pris dans le cadre de l'Accord d'Abuja. Toute absence de progrès donnera lieu au retrait de la présence internationale, avec toutes les conséquences négatives qui pèseront sur le pays. Sa délégation estime que tout dirigeant de faction qui accèdera au pouvoir par la force ne sera pas reconnu par la communauté internationale.

Appuyant les efforts déployés par la CEDEAO, M. Wlosowicz a souligné le rôle joué par l'ECOMOG, la seule opération de maintien de la paix existante mise en place par une organisation sous-régionale. Son retrait risque d'entraîner des conséquences lourdes pour le Libéria. De l'avis de sa délégation, la communauté internationale devrait appuyer les efforts de l'ECOMOG. En même temps, les Etats qui participent à 'ECOMOG ne devraient épargner aucun effort visant à améliorer son efficacité. La Pologne demeure convaincue que les Nations Unies devraient continuer à contribuer aux efforts de paix. C'est pourquoi, elle appuie la prorogation jusqu'au 31 août prochain du mandat de la Mission des Nations Unies au Libéria (MONUL).

M. JUAN SOMAVIA (Chili) a plaidé en faveur de l'adoption de mesures susceptibles de favoriser l'investigation des crimes perpétrés contre les civils et les violations des droits de l'homme, ainsi que les obstacles posés à l'action des organisations gouvernementales et les ONG. Les biens pillés et volés doivent être rendus ou leur valeur remboursée. Le Chili plaide en outre en faveur d'une action ferme visant à ce que les responsables de ces actes assument pleinement leurs responsabilités. Le Chili est par ailleurs préoccupé par le fait que le manque de coopération des chefs de factions n'incite l'ECOMOG à réexaminer sa présence au Libéria. Il s'agit en effet de

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souligner que le retrait de l'ECOMOG aurait de sérieuses conséquences sur la présence de la MONUL. Il est évident que l'ECOMOG fait face de graves problèmes financiers qui menacent la poursuite de ses opérations. Il serait judicieux de réfléchir à des formes de financement engageant d'une certaine manière les institutions de Bretton Woods, voire allier la mise en oeuvre des projets de développement au Libéria au

cessez-le-feu et à la conclusion d'accords politiques. Enfin, le Chili accorde une importance cruciale à la tenue d'élections tant il est vrai que l'absence d'autorités légitimes sera toujours un facteur destabilisateur.

M. NUGROHO WISNUMURTI (Indonésie) a estimé que la reprise des hostilités et la violation des Accords d'Abuja ne font que traduire le manque manifeste de volonté politique de la part des dirigeants du Libéria. En définitive, la mise en oeuvre des dispositions de cet accord incombe au Conseil d'Etat. Dans ce contexte, l'Indonésie appuie pleinement les conclusions de la réunion du Comité des neuf de la CEDEAO, le 7 mai dernier à Accra. Il est en effet encourageant de noter que la mécanisme en vue du retour du Libéria à l'Accord d'Abuja stipule le caractère incontournable dudit Accord, en tant que base unique pour l'instauration de la paix au Libéria. L'Indonésie est en outre d'avis que les protocoles récemment adoptés par le Conseil d'Etat sont en contradiction avec l'esprit d'Abuja et qu'aucun gouvernement ne sera reconnu s'il accède au pouvoir par la force.

L'Indonésie se félicite de l'initiative des Etats-Unis d'établir un groupe international de contact sur le Libéria. La solution au conflit doit être trouvée aux niveaux interne et régional. Le Conseil d'Etat se doit d'examiner le rôle futur de l'ECOMOG afin qu'il puisse remplir adéquatement son mandat. L'Indonésie appelle les dirigeants des factions en guerre à instaurer immédiatement le cessez-le-feu et à adopter des mesures concrètes dans le cadre des Accords d'Abuja. Dans le cas contraire, les dirigeants libériens seraient confrontés au danger de perdre tout appui de la communauté internationale, notamment si l'ECOMOG décidait de se replier, entraînant celui de la MONUL. L'Indonésie appuie la prolongation pour trois mois du mandat de la MONUL.

M. ADELINO MANO QUETA (Guinée-Bissau) a estimé que la solution politique est la seule voie pour un règlement du conflit libérien. Dans ce contexte, il a lancé un nouveau et pressant appel à toutes les parties libériennes de respecter l'accord d'Abuja et demandé aux chefs des factions de coopérer avec l'ECOMOG et la MONUL en vue de l'application de cet accord. Malgré les événements tragiques qui ne cessent de se répéter au Libéria, et les retards qui en découlent pour la mise en oeuvre de l'accord d'Abuja, la Guinée-Bissau partage l'opinion du Secrétaire général des Nations Unies, selon laquelle l'ONU et la communauté internationale doivent rester attachées au processus de paix et que la MONUL aura un rôle vital à jouer à cet égard. Elle demande à la communauté internationale de fournir une assistance financière logistique

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et autre à l'ECOMOG afin de lui permettre de s'acquitter de son mandat s'agissant notamment celui du désarmement des faction libériennes pour adopter des mesures de confiance et de sécurité. De même, elle estime que le statut du personnel de l'ECOMOG, de la MONUL et des organismes humanitaires doit être strictement respecter par toutes les factions libériennes afin qu'ils puissent continuer à assurer l'acheminement de l'aide humanitaire dans tous les pays en particulier pour les réfugiés

et les personnes déplacées.

La Guinée-Bissau se félicite de la tenue à Accra, le 7 mai de la réunion des Ministres des affaires étrangères de la CEDEAO sur la question du Libéria. Nous constatons avec satisfaction que les membres du Conseil d'Etat ont déclaré qu'ils respecteraient les recommandations issues de cette réunion des Ministres des affaires étrangères de la sous-région ouest africain. Nous espérons de même que le Sommet des Chefs d'état de la CEDEAO prévu pour le début du mois d'août aboutira à des décisions importantes auxquelles participeront tous les chefs de factions libériennes, a ajouté le représentant, qui a rendu hommage au Gouvernement des Etats-Unis pour l'initiative prise d'établir un groupe de contact international pour le Libéria. En outre, la Guinée-Bissau demande à tous les Etats de se conformer strictement à l'embargo sur toutes livraisons d'armes de matériel militaire au Libéria, décrété par la résolution 788 (1992) du Conseil de sécurité.

M. HUASUN QIN (Chine) a noté que depuis le début du mois dernier, la situation au Libéria s'est gravement détériorée. Le conflit entre les différentes factions s'est poursuivi et Monrovia est presque devenue une ville morte. Cette situation a sérieusement compromis la mise en oeuvre de l'Accord d'Abuja et rendu difficile la tenue des élections générales prévues pour le mois d'août prochain. L'ECOMOG n'est plus en mesure de garantir la sécurité à la Mission des Nations Unies pour le Libéria, faute de ressources financières et de personnel. La Chine est profondément préoccupée par ces développements. Le processus de paix au Libéria, a fait remarquer M. Qin, se trouve maintenant à sa phase critique. Les ministres des affaires étrangères des neuf Etats Membres de la CEDEAO ont réaffirmé à leur récente réunion tenue à Accra que l'Accord d'Abuja demeure la seule base pour la promotion de la paix au Libéria. La Chine appuie pleinement leurs décisions et prie instamment les parties concernées au Libéria de mettre fin immédiatement aux hostilités et de coopérer avec les Nations Unies et la CEDEAO, en respectant scrupuleusement l'accord en vigueur et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et en oeuvrant en faveur de la restauration de la paix.

La MONUL peut également promouvoir, en étroite coopération avec l'ECOMOG, le rétablissement des mesures de confiance afin de créer le climat propice à l'application de l'Accord d'Abuja. C'est dans ce contexte que le gouvernement de la Chine appuie la recommandation du Secrétaire général visant à proroger de trois mois le mandat de la MONUL. M. Qin s'est déclaré d'avis que le règlement final de la question du Libéria ne dépendra que des Libériens eux-mêmes. Ce n'est que lorsque les parties concernées abandonneront

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véritablement les armes et s'engageront dans un processus de négociations et de dialogue patient et sincère qu'une solution politique acceptable par tous sera atteinte et que le peuple libérien pourra jouir à nouveau de la paix et emprunter la voie de la reconstruction et du développement. Le gouvernement chinois, a rappelé M. Qin, réaffirme qu'une Afrique stable et en croissance est essentielle à un monde pacifique et prospère.

M. IBRAHIM GAMBARI (Nigéria) a émis l'espoir que les parties

concernées au Libéria feront preuve de volonté en faveur de la paix, pour éviter que leur pays ne suive l'exemple de la Somalie. La communauté internationale ne devrait pas oublier trop facilement pourquoi l'ECOMOG est devenue nécessaire au Libéria. Le Nigéria, a rappelé M. Gambari, a consacré plusieurs milliards de dollars et mis des milliers de soldats à la disposition de l'ECOMOG, dont plusieurs centaines ont payé de leur vie, en vue d'instaurer la paix au Libéria. Le représentant a souligné la nécessité de restructurer l'ECOMOG en établissant une force crédible, susceptible de s'acquitter de son mandat difficile mais essentiel. Les contributions financières devraient être versées directement à la force tout entière et non pas à des contingents en particulier. On ne peut jouer séparément et prétendre que l'on cherche une solution intégrale à la situation au Libéria.

M. RAMTANE LAMAMRA (Algérie) s'est félicité de la détermination internationale et régionale en vue de stabiliser la situation au Libéria, selon un calendrier bien précis. Le représentant a fait remarquer qu'il fallait une volonté politique sans faille afin de conférer un élan au processus de paix et le rendre irréversible. Il s'agissait en outre d'installer la confiance entre des partenaires politiques en guerre depuis six ans. L'Algérie, si elle estime que l'appui international s'est fait attendre, demeure convaincue que les atermoiements des dirigeants des factions libériennes a eu pour résultat de saper la crédibilité du processus de paix en cours. Les événements récents ne sauraient par conséquent constituer une surprise, si l'on avait tenu compte des mises en garde répétées du Secrétaire général et de l'OUA sur le caractère explosif de la situation. L'Algérie estime que la solution à la crise passe par le respect plein et entier des Accords d'Abuja et ce, par l'ensemble des factions en guerre. La CEDEAO a pour sa part investi des efforts diplomatiques et des moyens financiers considérables qui doivent rencontrer une réponse adéquate et responsable de la part des chefs de guerre.

M. JACK WILMOT (Ghana) a déclaré que son Gouvernement était très déçu par la récente reprise des combats à Monrovia. Les chefs des factions ont démontré clairement leur mépris des aspirations du peuple du Libéria pour la paix et leur manque de respect à l'égard de la communauté internationale. Le Président du Ghana, M. Rawlings, qui exerce les fonctions de Président de la CEDEAO, n'a rien négligé pour rechercher la paix au Libéria. Ces efforts ont conduit à la signature en août 1995 de l'Accord d'Abuja. Malgré les retards dus au manque de soutien logistique de l'ECOMOG, le processus de paix s'est engagé sur la bonne voie, avant que le Conseil et les chefs de faction ne commencent à entraver l'Accord d'Abuja.

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En dépit des attaques dont ils ont été victimes, et avec très peu de soutien matériel de la part de la communauté internationale, la CEDEAO et l'ECOMOG ont poursuivi leurs efforts, en dépit desquels le conflit au Libéria a connu une escalade, se terminant par des combats à Monrovia, qui était jusque là épargné. Le Président du Ghana, Président de la CEDEAO, a alors pris des mesures immédiates en envoyant des représentants afin de mener des négociations avec les partenaires principaux de la CEDEAO et les parties au conflit. Les Envoyés ont obtenu un accord avec les parties au Libéria, afin de remettre en vigueur les accords d'Abuja par un

cessez-le-feu, d'obtenir le redéploiement de l'ECOMOG dans Monrovia, le retrait des combattants armés de la ville, et la libération des otages. Les efforts du Président de la CEDEAO ont abouti le 7 mai 1996 à la 7ème réunion des Ministres des affaires étrangères du Comité des 9 de la CEDAO, à Accra.

Les Ministres ont conclu que l'Accord d'Abuja restait le meilleur cadre pour la paix au Libéria et que l'ECOMOG devait poursuivre ses efforts pour leur mise en oeuvre. Ils ont souligné le fait que la principale responsabilité de la paix revient aux libériens eux-mêmes, et en particulier au Gouvernement et aux chefs de faction. Les Ministres ont établi un mécanisme de retour à l'Accord d'Abuja, qui, s'il est mis en oeuvre par le Gouvernement de transition, démontrera son attachement au processus de paix. L'application de ce mécanisme sera surveillé par le C9, qui fera rapport au Sommet de la CEDEAO en juillet prochain.

les Ministres de la CEDEAO ont également réitéré le fait que la tâche d'assurer la paix et la sécurité revenait principalement au Conseil de sécurité des Nations Unies et à la communauté internationale, qui doit fournir la même aide au Libéria qu'aux autres conflits dans la région. L'ECOMOG ne peut seul assumer ce travail. Or, il ne dispose pas actuellement des moyens logistiques ou en personnel de le faire. Le Conseil de sécurité doit fournir à l'ECOMOG les ressources financières et matérielles nécessaires, en même temps qu'une aide humanitaire et au développement au Libéria, et le faire maintenant. Parmi les mesures qu'il sera amené à prendre, le Conseil devrait appeler les pays donateurs qui se sont engagés à fournir des fonds pour le processus de paix au Libéria à l'occasion de la Conférence sur le Libéria qui s'est tenue sous les auspices des Nations Unies en octobre 1995 à New York, à le faire maintenant.

Le représentant a exprimé sa reconnaissance aux pays qui ont fourni une aide à l'ECOMOG et au processus de paix jusqu'à présent. Il a appuyé la recommandation du Secrétaire général concernant l'extension du mandat de la MONUL.

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M. MACHIVENYIKA TOBIAS MAPURANGA (Zimbabwe) a indiqué que sa délégation appuie fermement le "Mécanisme de retour à l'Accord d'Abuja" qui a été adopté le 7 mai dernier, à Accra, par les Ministres des affaires étrangères de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). A cet égard, le Zimbabwe exhorte les factions libériennes à agir avec célérité et à rétablir le cessez-le-feu, à se retirer de Monrovia et à y permettre le libre déploiement des forces du Groupe de contrôle de la CEDEAO (ECOMOG), à retirer leurs armes de Monrovia et à faire en sorte que la capitale soit à nouveau une zone de sécurité, à garantir la liberté de mouvement des civils, à rendre les armes prises à l'ECOMOG ainsi que les véhicules et équipements volés à la MONUL, aux institutions des Nations Unies et aux organisations non gouvernementales, et à restaurer le Comité des violations du cessez-le-feu.

Le Zimbabwe tient à réaffirmer que lorsque des régions ou des organisations régionales proposent des initiatives en faveur de la paix pour mettre un terme aux menaces dangereuses pour la paix et la sécurité, elles devraient pouvoir recevoir un appui actif et constant de la communauté internationale par le truchement des Nations Unies. Le Zimbabwe estime également que la situation qui prévaut au Libéria nécessite le doublement du contingent de l'ECOMOG afin qu'il puisse se déployer dans l'ensemble du pays. La gravité du problème libérien dépasse largement le cadre national et régional. Il incombe, par conséquent, à la communauté internationale d'apporter l'appui financier et logistique nécessaire afin de permettre un déploiement adéquat. Ainsi, le Zimbabwe, demande à la communauté international de voler au secours du peuple libérien, qui en a tant besoin à l'heure actuelle.

M. PETER KASANDA (Zambie) a fait remarquer que la guerre civile au Libéria n'a pas seulement affecté le peuple de ce pays, mais elle a également des conséquences lourdes en matière de paix et de stabilité dans toute la sousrégion. Les effets négatifs du conflit se sont traduits par le fléau des réfugiés et des personnes déplacées dans les pays voisins. L'économie des pays voisins du Libéria continue de subir ce lourd fardeau. C'est pourquoi, la paix et la sécurité au Libéria constituent une partie intégrante de la paix et de la sécurité dans l'ensemble de la sous-région. Le temps est venu pour tous les chefs de factions de rompre avec le passé. La situation invite maintenant à un engagement de la part de toutes les factions concernées de déployer tous les efforts nécessaires en vue de régler leurs divergences par des moyens pacifiques. L'Accord d'Abuja constitue la pierre angulaire du plan national de survie du Libéria. La clé à un règlement pacifique de la situation au Libéria réside dans le respect de cet Accord. A cet égard, la Zambie appuie pleinement les recommandations formulées par la réunion ministérielle de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO), visant la création d'un mécanisme pour permettre au Libéria de retourner à l'Accord d'Abuja. Les Ministres des affaires étrangères des Etats de la CEDEAO ont souligné que l'Accord d'Abuja constitue l'unique base pour la paix au Libéria.

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Il incombe à toutes les factions libériennes de ses conformer aux exigences établies par la CEDEAO et aux dispositions de l'Accord d'Abuja. L'ECOMOG et la MONUL se retireront du Libéria si aucun progrès n'est réalisé dans ce sens. Les différentes factions ne devraient épargner aucun effort pour permettre la tenue d'élections justes et libres au Libéria, en août prochain. M. Kasanda s'est félicité par ailleurs de l'initiative du Gouvernement des Etats-Unis visant la création d'un Groupe de contact international sur le Libéria qui a tenu sa première réunion à Genève, le mois dernier.

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