CS/697

LE CONSEIL DE SECURITE ENGAGE LES PARTIES BURUNDAISES A ENTAMER UN DIALOGUE POLITIQUE APPROFONDI POUR PARVENIR A LA RECONCILIATION NATIONALE

15 mai 1996


Communiqué de Presse
CS/697


LE CONSEIL DE SECURITE ENGAGE LES PARTIES BURUNDAISES A ENTAMER UN DIALOGUE POLITIQUE APPROFONDI POUR PARVENIR A LA RECONCILIATION NATIONALE

19960515 APRES-MIDI CS/697

Il demande de continuer à faciliter activement l'établissement des plans de circonstance qui permettraient une réponse humanitaire rapide en cas d'explosion de violence

A la suite de consultations officieuses, le Président du Conseil de sécurité, M. Qin Huasun (Chine), a fait cet après-midi, au nom des membres du Conseil, la déclaration suivante sur la situation au Burundi :

Le Conseil de sécurité a examiné le rapport du Secrétaire général sur la situation au Burundi en date du 3 mai 1996 (S/1996/335) soumis en application de sa résolution 1049 (1996).

Le Conseil est gravement préoccupé par la détérioration persistante de la situation sur le plan de la sécurité au Burundi, notamment par les informations faisant état d'une escalade de la violence qui a débouché sur de nouveaux massacres à Buhoro et Kiyvuka, ainsi que par le nombre de plus en plus important de réfugiés qui quittent le Burundi. Le Conseil constate avec une profonde préoccupation que les organismes de secours ont été empêchés d'acheminer l'assistance humanitaire et l'aide au développement indispensables au Burundi et s'inquiète vivement des souffrances qui en résultent pour la population du Burundi. Il engage les parties et tous les autres intéressés à s'abstenir de toute action qui risquerait d'aggraver le problème des réfugiés.

Le Conseil condamne énergiquement tout recours à la violence et affirme sa conviction que seuls des moyens pacifiques permettront d'apporter un règlement durable à la situation au Burundi. Il engage les parties à entamer un dialogue politique approfondi en vue de parvenir à la réconciliation nationale. Il demande à nouveau instamment aux autorités et à toutes les parties concernées, au Burundi, de faire taire leurs divergences, de renoncer à l'emploi de la force et de manifester la ferme volonté politique de régler rapidement le conflit.

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Le Conseil souligne qu'il importe d'amorcer le débat national prévu par la Convention de gouvernement et de mener par ce moyen un vaste dialogue politique auquel toutes les parties au conflit devraient prendre part sans conditions préalables. Il réaffirme son appui à la convocation de la Conférence régionale sur la paix, la sécurité et le développement dans la région des Grands Lacs et exhorte tous les États concernés à coopérer en vue de la convocation de cette conférence.

Le Conseil réaffirme qu'il appuie sans réserve les efforts que l'ex-Président Nyerere poursuit en vue de faciliter les négociations et le dialogue politique visant à résoudre la crise au Burundi et espère que la réunion qui doit se tenir à Mwanza (Tanzanie) le 22 mai 1996 sera couronnée de succès. Il demande aux parties de mettre pleinement à profit cette réunion pour progresser sur la voie de la réconciliation nationale. Il soutient aussi les efforts que le Secrétaire général et son Représentant spécial déploient à cette fin.

Le Conseil souligne qu'il importe que l'Organisation des Nations Unies continue de coopérer avec l'Organisation de l'unité africaine, l'Union européenne et les autres pays et organismes intéressés, agissant en coordination avec l'ex-Président Nyerere, en vue d'amorcer un dialogue politique approfondi entre les parties au Burundi. Il exprime en l'occurrence son appui aux efforts que déploient l'Organisation de l'unité africaine (OUA) et sa mission d'observation et demande à tous les États d'apporter une contribution généreuse au Fonds de l'OUA pour la paix, afin de permettre à celle-ci d'augmenter l'effectif de sa mission et de prolonger son mandat au-delà de juillet 1996.

Le Conseil se félicite que le Secrétaire général ait fait siennes les conclusions de la mission technique sur l'installation d'une station de radiodiffusion de l'ONU au Burundi et compte qu'il le tiendra au courant des progrès accomplis dans l'application des recommandations de la mission.

Le Conseil réaffirme l'importance qu'il attache aux plans de circonstance dont l'élaboration est préconisée au paragraphe 13 de sa résolution 1049 (1996) et note que des consultations ont déjà eu lieu à cette fin. Compte tenu de l'évolution récente de la situation, le Conseil demande au Secrétaire général et aux États Membres concernés de continuer à faciliter activement l'établissement des plans de circonstance qui permettraient une réponse humanitaire rapide en cas d'explosion de violence ou de détérioration grave de la situation humanitaire au Burundi. Il encourage aussi le Secrétaire général à continuer d'envisager les mesures qui pourraient être prises à l'appui d'un accord politique éventuel.

Le Conseil rappelle à toutes les parties qu'elles sont responsables du rétablissement de la paix et de la stabilité au Burundi et se déclare à nouveau prêt, comme il l'a affirmé dans sa résolution 1040 (1996), à envisager l'adoption de nouvelles mesures au cas où les parties ne manifesteraient pas la volonté politique qu'appelle un règlement pacifique de la crise. Le Conseil demeurera saisi de la question.

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Rapport du Secrétaire général sur la situation au Burundi (S/1996/335)

Dans son rapport présenté en application de la résolution 1049 (1996) du Conseil de sécurité en date du 5 mars 1996, le Secrétaire général observe que la sécurité au Burundi s'est notablement détériorée depuis le début du mois de mars. L'ONU dispose de moyens limités pour suivre la situation sur le terrain et la Mission d'observation militaire de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) est entravée par les restrictions que le Gouvernement impose à ses mouvements. Les informations reçues signalent invariablement une montée de la violence. Des rebelles extrémistes hutus, apparemment infiltrés du Zaïre, se livrent à des coups de main meurtriers contre des objectifs du Gouvernement et contre la population tutsie et les éléments hutus modérés. Les forces armées, dans leur impuissance à prévenir ces attaques contre leur propre ethnie, exercent parfois des représailles contre des civils hutus dans les zones touchées, ce qui renforce la propagande de ceux qui sont à la tête des extrémistes.

Le Secrétaire général estime que ce cercle vicieux ne peut être brisé que si les modérés des deux côtés oeuvrent de concert pour créer un gouvernement de coalition véritable et effectif, ayant une vision commune de l'avenir et s'accordant sur les moyens de remédier aux maux actuels du pays. Tel est l'objectif que M. Nyerere, ancien Président de la République-Unie de Tanzanie, s'efforce d'atteindre avec le plein appui de l'ONU, de l'OUA et de l'Union européenne. Durant sa brève visite au Burundi, qu'il a effectuée du 24 au 26 avril, le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. Marrack Goulding, a bien précisé à tous ses interlocuteurs, comme le lui avait demandé le Secrétaire général, que ce dernier appuyait le Président Nyerere, qu'il était convaincu qu'il ne saurait y avoir de solution militaire et qu'un règlement politique devait être recherché par voie de négociations, et qu'une action urgente était impérative pour empêcher que le pays ne sombre dans une explosion de violence. Le Secrétaire général a réaffirmé ces divers points dans la lettre qu'il a fait remettre au Président Ntibantunganya et au Premier Ministre Nduwayo par son Représentant spécial, M. Marc Féguy, après avoir rencontré celui-ci à Nairobi le 30 avril.

Le Secrétaire général approuve par ailleurs les conclusions de la mission technique sur la mise en place d'une station de radio de l'ONU au Burundi. Il a demandé que soit élaboré d'urgence un plan sur la base de la solution recommandée par la mission, qui s'est rendue sur place du 15 au 21 avril. Cette dernière est parvenue à la conclusion que plutôt que d'installer une station radio indépendante, l'ONU pourrait prendre d'autres mesures pour tenir compte des préoccupations exprimées au paragraphe 6 de la résolution 1049 (1996). Ainsi, le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pourrait être renforcé par l'adjonction d'un ou deux spécialistes de l'information, qui seraient chargés de mettre au point des coproductions avec des stations desservant le Burundi et d'assurer la liaison avec le personnel d'information de l'ONU et d'autres organismes selon les besoins.

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Au cas où le Conseil de sécurité déciderait malgré tout

l'installation d'une station radio des Nations Unies au Burundi, il faudrait prendre en compte certains facteurs techniques. La meilleure façon de procéder serait d'installer les émetteurs des Nations Unies au même endroit que les émetteurs existants de la Radio télévision nationale Burundi (RTNB). On évalue à 300 000 dollars le coût de l'équipement initial. Le budget de fonctionnement ne pourrait être évalué que lorsqu'on aurait déterminé l'ampleur des programmes à diffuser. Il faudrait au minimum un personnel composé de quatre personnes recrutées sur le plan international et d'une trentaine d'employés locaux, à raison d'environ 2 millions de dollars par an.

Étant donné les circonstances inquiétantes qui prévalent au Burundi, le Secrétaire général demeure convaincu que la communauté internationale se doit de préparer des plans de circonstance en prévision d'une éventuelle intervention militaire destinée à sauver des vies humaines au cas où une catastrophe éclaterait au Burundi et entraînerait un massacre de la population civile. L'objectif de cette intervention serait exclusivement humanitaire et consisterait à épargner la population civile. Les consultations que le Secrétaire général a entreprises en application du paragraphe 13 de la résolution 1049 (1996) ont été vastes et intenses. Elles ont montré que le sentiment d'urgence que lui avait inspiré la situation au Burundi était largement partagé. Il en ressortait également une nette concordance de vues sur la gravité de la situation et la nécessité d'agir, peut-être même rapidement, afin d'empêcher que la situation n'empire encore. L'une des mesures que le Secrétariat a été engagé à prendre, et qui correspond à sa capacité, consiste à élaborer des plans pour une éventuelle opération de maintien de la paix, décidée en vertu du Chapitre VI de la Charte, qui serait déployée en cas d'accord politique des parties. Les préparatifs de cette opération sont déjà en cours, bien qu'il faille déplorer que les conditions politiques permettant sa mise en oeuvre soient pour le moment loin d'être réunies.

Les États Membres sont convenus de la nécessité d'entreprendre également des plans de circonstance en prévision d'autres éventualités, y compris si le pire se produisait. Un certain nombre de pays se sont déclarés prêts en principe à envisager de fournir des contingents dans les circonstances prévues. Mais ils ont également tenu à préciser que certaines conditions devaient être remplies à cet égard. D'autres États Membres se sont déclarés en principe prêts à envisager de fournir une assistance de ce genre, mais aucun d'entre eux ne s'est encore porté volontaire pour prendre en mains la planification, le déploiement et le commandement de l'opération. Dans ce contexte, il a été souligné que les consultations devaient se poursuivre de manière discrète et confidentielle.

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Il semble donc maintenant nécessaire de regrouper les divers États Membres qui ont fait savoir individuellement au Secrétariat qu'ils pourraient éventuellement contribuer à une opération de ce genre d'une manière ou d'une autre. Étant donné le caractère impératif et urgent de la situation au Burundi, le

Secrétaire général a décidé de fournir ses bons offices pour faciliter les consultations dans ce domaine entre les États Membres concernés, étant entendu que la planification d'une force multinationale dépasse la capacité du Secrétariat de l'ONU et devrait, comme dans le passé, revenir à l'État Membre ou aux États Membres prenant la tête de l'opération.

Le Secrétaire général invite entre-temps le Conseil de sécurité à appuyer cette entreprise. Il est essentiel que la communauté internationale montre à toutes les parties au Burundi qu'elle a la volonté politique et la capacité nécessaires pour prendre en temps voulu des mesures effectives visant à empêcher une nouvelle tragédie dans la région des Grands Lacs.

Le Conseil de sécurité était également saisi d'une lettre (S/1996/341) adressée à son Président le 8 mai 1996 par le Représentant permanent du Burundi auprès de l'Organisation des Nations Unies. Par cette lettre, le Représentant permanent transmet le texte du communiqué de presse publiée par le Ministre des relations extérieures et de la coopération de la République du Burundi. Dans cette déclaration le Ministre burundais des relations extérieures met en relief la réalité que des assaillants terroristes ont perpétré des assassinats à l'encontre d'un membre du Parlement et des autres citoyens et que des établissements sociopublics et des maisons des citoyens ont été saccagés, endommagés et détruits.

A titre de démenti officiel et catégorique des accusations éhontées contre l'Armée burundaise à laquelle certains milieux imputaient trop gratuitement et tendancieusement les victimes sacrifiées récemment en province de Cibitoke, le Ministre des relations extérieures certifié que ce sont, au contraire, les forces de l'ordre qui ont opéré le sauvetage des autres nombreux citoyens menacés par ces bandes armées terroristes infiltrées de l'étranger.

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