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SG/SM/12923

Nous devons oublier les stéréotypes et bannir les épithètes qui divisent au lieu de définir, déclare le Secrétaire général à l’Alliance des civilisations

28/05/2010
Secrétaire généralSG/SM/12923
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

NOUS DEVONS OUBLIER LES STÉRÉOTYPES ET BANNIR LES ÉPITHÈTES QUI DIVISENT AU LIEU DE DÉFINIR, DÉCLARE LE SECRÉTAIRE GÉNERAL À L’ALLIANCE DES CIVILISATIONS


On trouvera ci-après le texte de l’allocution prononcée par le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, le 28 mai, à Rio de Janeiro, au troisième Forum de l’Alliance des civilisations:


Monsieur le Président [Luiz Inacio Lula da Silva], je vous remercie vivement, ainsi que le peuple brésilien, de votre accueil chaleureux. Muito Obrigado.


J’adresse aussi mes remerciements aux architectes de l’Alliance des civilisations –l’Espagne et la Turquie– pour leur appui constant.  Monsieur le Haut-Représentant [Jorge Sampaio], merci de votre dévouement.


Je tiens également à féliciter Sa Majesté le Roi Abdullah, Serviteur des deux Saintes Mosquées, de son initiative interconfessionnelle, et notamment de son appel à vivre une foi authentique dans un esprit de dialogue et de coopération.


Nous sommes réunis à un moment crucial.  Les temps changent.  L’équilibre des forces se déplace, avec la montée en puissance du Brésil.  Je ne parle pas seulement de l’économie, mais de l’histoire du Brésil, creuset de cultures, de populations et de traditions.  Tous unis plus que jamais, surtout à la veille de la coupe du monde!  L’Alliance des civilisations n’aurait pas pu choisir un meilleur endroit pour tenir son Forum et aller de l’avant.


De prime abord, on pourrait croire que je viens d’un monde différent.  J’ai passé ma jeunesse dans un des pays les plus homogènes qui soient, la Corée.  Mais mon pays sortait de la guerre et c’est la communauté internationale qui l’a reconstruit.


Dès mon plus jeune âge, j’ai vu ce que peuvent accomplir des hommes et des femmes de tous horizons culturels unis derrière une cause commune.  J’ai vu la solidarité en action.  Je ne suis pas seulement un témoin –mais aussi le produit de cette solidarité.  Ce n’est pas simplement mon histoire –c’est ancré au plus profond de moi-même.  C’est pourquoi ce Forum est si important pour moi.  Et pourquoi je sais que l’Alliance des civilisations est importante pour le monde entier.

Dès le départ, nous savions tous que l’Alliance devait sortir des sentiers battus.  Elle ne pouvait pas se contenter de publier de beaux rapports qui seraient relégués à la bibliothèque des Nations Unies.  Nous savions que l’Alliance devait passer à l’action.  Elle devait viser haut et loin.  C’est ce qu’elle fait depuis 2005.


Avec votre soutien, l’Alliance réunit des journalistes du monde entier pour se battre contre les préjugés et l’incompréhension –comme en témoigne le premier rapport israélo-arabe jamais publié.


Nous élargissons les possibilités de dialogue entre les jeunes Burundais de différents groupes ethniques, encourageons la médiation et le règlement des conflits en Asie du Sud, offrons des services de mentorat dans les quartiers d’immigrants en Europe et trouvons des emplois pour les jeunes au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.


Par ailleurs, l’Alliance agrandit son propre réseau de partenaires et sa communauté d’amis.  Nous nous réjouissons d’accueillir notre centième membre, les États-Unis d’Amérique.


L’Alliance a donc un palmarès impressionnant.  Mais ce n’est qu’un début. L’Alliance est un processus –un chantier inachevé.  Dans les communautés où les symboles des minorités religieuses suscitent l’opposition ou la crainte, nous devons poursuivre notre action.  Partout où des gens sont écartés en raison de leur race, de leur religion ou même de leur nom, il nous reste du travail à faire.


Mais la mission de l’Alliance doit aller encore plus loin, et ce pour trois raisons.


Premièrement, et surtout, parce que notre mission compte parmi les plus importantes du XXIe siècle.  Les trois quarts des grands conflits que connaît le monde aujourd’hui ont une dimension culturelle.  Nous cherchons à désamorcer ces tensions en apportant une réponse à quelques-uns des problèmes les plus pressants: comment bâtir des sociétés sans exclus?  Comment promouvoir l’éducation et l’autonomisation des femmes?  Comment étouffer les chants de sirènes des extrémistes auxquels succombent les jeunes?  En bref, comment construire des communautés animées d’un esprit de convivialité –vivant dans la paix, la confiance et le respect mutuel?


Cela me conduit à la deuxième raison d’intensifier notre action: la démarche à suivre pour bâtir des sociétés sans exclus doit elle-même être ouverte à tous. Chacun a un rôle à jouer.  Après tout, la paix et la réconciliation ne peuvent pas être imposées.  Telles des graines plantées par chacun et cultivées par la communauté, elles se développent jour après jour.


L’Alliance cultive ces valeurs par l’information, le dialogue et l’éducation.  Mais nous savons que l’éducation va bien au-delà de l’apprentissage. Elle consiste parfois à « désapprendre ».  Nous devons oublier les stéréotypes liés à la notion monolithique de « l’autre ».  Nous devons bannir les épithètes qui divisent au lieu de définir.

La troisième raison d’intensifier notre action est la mondialisation.  Si la mondialisation est un facteur d’unification, c’est aussi un facteur d’aliénation. Nous avons accès à toujours plus d’informations, d’idées et de technologies.  Mais il suffit d’un clic de souris pour voir poindre la peur et la haine.


Les avantages de la mondialisation sont plus sensibles –mais pour beaucoup, ces avantages semblent hors de portée.  Dans bien des cas, ces craintes conduisent les gens à se replier sur eux-mêmes au lieu de s’ouvrir au reste du monde.  « Notre manière de procéder est la meilleure », ou pire encore, « C’est ma manière à moi et rien d’autre », tel est le message qu’ils font passer.


Cette attitude est un facteur de tensions et d’instabilité.  Le rôle de l’Alliance est aussi de s’attaquer à ce problème.  Pour intensifier notre action, nous devons faire encore plus pour tendre la main aux jeunes, les écouter et apprendre à leur contact.


Demain, je me rendrai en Afrique.  Soixante-quinze pour cent des Africains ont moins de 30 ans.  La moitié de la population mondiale est âgée de moins de 25 ans et la grande majorité de ces jeunes vivent dans des pays en développement. Nous devons tirer parti des ressources qu’ils offrent.  Mais encore faut-il qu’ils puissent aspirer à une éducation de qualité et à un travail décent.


Hier, j’ai rencontré des jeunes dans la favéla (bidonville) de Babilonia, à Rio de Janeiro.  Une jeune femme m’a dit: « Quand je vais dans les quartiers riches, on voit ce que je suis, pas qui je suis ».  Mais elle nous a montré à tous.


Les jeunes que j’ai rencontrés étaient animés d’une ardente volonté de se battre contre la discrimination et d’améliorer leur sort.  J’apprends à votre contact.  Vous apprenez à mon contact.  Nous progressons ensemble.  Tel était leur message.  C’est aussi le nôtre.


Je suis conscient de l’ampleur de la tâche.  Le monde actuel connaît un malaise et des tensions alimentées par la crainte, elle-même due à l’ignorance.  Nous vivons dans un monde où le proverbe « diviser pour régner » est trop souvent vrai.  La division fait gagner des voix aux élections et des points dans les sondages d’opinion.  Il est beaucoup plus facile de blâmer les autres que de se forger sa propre opinion.


Et pourtant, partout où je vais, je constate autre chose –la prise de conscience grandissante que notre sort est lié, que l’avenir de mon enfant dépend de celui de votre enfant, que nous sommes une grande famille mondiale faite de nombreux membres et non pas de groupes monolithiques.


Il nous reste encore un long chemin à parcourir.  Mais je suis conforté par le proverbe brésilien: « La bonne volonté raccourcit le chemin ».  Votre bonne volonté et votre excellent travail raccourcissent notre chemin à tous.


Je vois se dessiner à l’horizon un monde qui comprend que nous sommes meilleurs ensemble, un monde où l’on écoute au lieu de crier, un monde animé de la volonté de faire avancer les choses.


Gouvernements, société civile, secteur privé, communauté religieuse, jeunes –l’Alliance vous représente tous.  Un mouvement social mondial.  Une alliance pour l’humanité.


Quelle que soit notre tradition religieuse, nous sommes unis par la même foi dans notre avenir commun.  À nous de mettre notre humanité commune au service d’un monde meilleur.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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