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DEV/2710

LA CRISE FINANCIÈRE REND PLUS URGENTE ENCORE L’AMÉLIORATION DE L’AIDE, CONVIENNENT LES PARTICPANTS À LA QUATRIÈME TABLE RONDE DE LA CONFÉRENCE DE DOHA

01/12/2008
Communiqué de presseDEV/2710
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

LA CRISE FINANCIÈRE REND PLUS URGENTE ENCORE L’AMÉLIORATION DE L’AIDE, CONVIENNENT LES PARTICPANTS À LA QUATRIÈME TABLE RONDE DE LA CONFÉRENCE DE DOHA


(Publié tel que reçu)


DOHA, 1er décembre -- Lors de la quatrième table ronde organisée dans le cadre de la Conférence de Doha, les participants se sont penchés sur les questions touchant au renforcement de la coopération financière et technique internationale au service du développement.


Ils ont notamment estimé que la crise financière actuelle ne devrait pas servir d’argument aux pays donateurs pour ne pas honorer leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD).  Les panélistes ont indiqué que l’amélioration de la distribution et de l’utilisation de l’aide était une responsabilité partagée entre pays développés et en développement, dont l’action commune doit être guidée par les principes de la Déclaration de Paris de 2005 sur l’efficacité de l’aide et du Programme d’action adopté en 2008 à Accra. 


La maîtrise nationale des politiques publiques, l’harmonisation des procédures de décaissement des fonds de l’APD et la gestion axée sur les résultats ont été présentées comme des principes de base devant permettre aux pays les plus fragiles de répondre aux besoins d’urgence et, à terme, de piloter leur propre développement.  Sur ce dernier point, des participants ont rappelé que la réalisation des OMD reposait sur un flux financier d’aide constant devant être réparti en fonction des priorités identifiées par les gouvernements.  Pour ce faire, ont-ils demandé, il faut que les pays récipiendaires améliorent leur gouvernance et renforcent la transparence de leur pratique de gestion de l’aide.  Les conférenciers ont également plaidé pour la mise en œuvre de mécanismes innovants de mobilisation des ressources de financement du développement, dont une éventuelle taxation solidaire de toutes les devises internationales du système financier.


La table ronde a en outre convenu que, dans le contexte actuel de la crise financière, la conclusion du Cycle des négociations commerciales de Doha était vitale pour donner aux économies en développement, en particulier celles des pays africains, les moyens de riposter à la volatilité des prix des matières premières et à la baisse concomitante des revenus nationaux bruts tirés des exportations.  Le Président de la Commission de l’Union africaine (UA), M. Jean Ping, a ainsi souhaité, comme l’avait demandé samedi dernier le Président de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), M. Pascal Lamy, lors de la plénière, que soit levées les subventions agricoles protégeant les puissants pour qu’« enfin », les produits des pays en développement puissent avoir accès au marché. 



RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION FINANCIÈRE ET TECHNIQUE INTERNATIONALE AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT


Déclarations


M. LOVA KJORVEN, Administrateur assistant et Directeur du Bureau des politiques de développement du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a déclaré en préambule à la table ronde que la crise financière actuelle ne devrait pas entraîner de baisse de l’aide publique au développement (APD), notamment en vue de permettre aux pays récipiendaires de mettre en place des système nationaux pour mieux utiliser cette aide et atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  L’assistance technique doit soutenir la distribution de l’APD et rendre plus pertinente la fourniture de services dans les domaines sociaux de base, l’éducation, la santé et le logement, a-t-il dit.  M. Kjorven a estimé que dans un contexte sans précédent de conjonction des crises alimentaire, énergétique, climatique et maintenant financière, la coopération dans le domaine du développement et l’augmentation de l’appui technique revêtaient une importance majeure.  Il faut que les investissements publics permettent aux pays les plus touchés de lutter contre les effets dévastateurs des crises, par le biais du renforcement des capacités.  Pour cela, la qualité de l’aide doit porter sur les transferts de compétence en vue de la création de mécanismes institutionnels adaptés aux défis et à l’appropriation progressive des programmes de développement par les pays dans le besoin. 


M. BADER AL-DARFA, Secrétaire exécutif de la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l’Asie occidentale, a souligné que la fourniture de l’APD était essentielle pour les pays les moins avancés (PMA).  Il a indiqué que 25,5% des investissements étrangers directs fournis à ces pays en 2006 ont consisté en une aide destinée à la réalisation de projets d’infrastructures et d’amélioration des services sociaux, ajoutant qu’une part significative de l’APD en Asie occidentale était de plus en plus consacrée à la réduction de la dette et des effets des catastrophes naturelles.  Trente ans plus tard, la promesse de consacrer 0,7% du PIB à l’APD n’a pas été atteinte, a ensuite noté l’intervenant, qui a expliqué que la solidarité des États arabes était nécessaire pour que les pays en développement puissent atteindre les OMD.  Alors que l’APD des donateurs les plus puissants baisse, la solidarité entre États arabes, par le biais des fonds et banques régionaux, est très active dans le soutien aux services sociaux de base touchant à la santé, à l’éducation et au logement, a indiqué l’orateur.  Pour ce qui est de l’assistance technique, il a souligné que compte tenu de la crise financière, les pays confrontés à de grandes difficultés avaient encore plus besoin de voir s’accroître leur volume de ressources nationales.  Il a ainsi évoqué l’Initiative d’aide pour le commerce qui doit contribuer, conformément aux objectifs du Cycle de Doha, à épauler le développement des échanges entre pays en développement et pays développés en rendant les exportations plus concurrentielles pour tous.  L’accent mis sur la recherche, le transfert des technologies et l’adaptation aux normes internationales du commerce sont autant d’éléments pour intensifier les échanges Nord-Sud et Sud-Sud, a estimé M. Al-Darfa. 


L’intervenant a également rappelé que les États Membres de sa région fournissaient depuis 1970 une aide généreuse aux pays arabes, son montant ayant atteint au cours des années 132 milliards de dollars.  Il a précisé que les pays du Golfe, puisant dans leur épargne tirée de l’exploitation pétrolière, apportaient leur aide sous forme de dons sans condition aux pays les plus démunis.  Il a qualifié d’« impératif de solidarité » cet effort, tout en appelant la communauté internationale à faire plus dans les secteurs de la reconstruction de l’Iraq, et du soutien au peuple palestinien.


M. AHMAD MOHAMED ALI AL-MADANI, Président de la Banque islamique de développement, a relevé qu’à ce jour l’effort international de développement n’avait pas permis d’éliminer l’extrême pauvreté dans les régions les plus touchées par ce fléau.  Quarante pour cent des membres de la Banque appartiennent à l’Afrique subsaharienne, une région où la misère s’est brutalement accrue sous l’effet des crises alimentaire et énergétique et des changements climatiques, a ajouté le conférencier.  Il faut améliorer la cohérence dans la mise en œuvre des programmes conduits au titre de l’APD, a-t-il souligné.  Il a cité un groupe de coordination piloté par la Banque islamique de développement chargé d’unir les efforts des donateurs dont les fonds sont gérés par les organismes arabes de développement économique, dont la Banque arabe pour le développement économique en Afrique et le Fonds de l’OPEP pour le développement.  Il a insisté sur l’importance d’intensifier les transferts des compétences et les savoirs pour aider les pays les plus pauvres à devenir autonomes.  Au nombre des initiatives, M. Al-Madani a parlé du groupe des amis de la Banque islamique de développement, dont la mobilisation des ressources privées a permis la fourniture des services de santé au Bangladesh, au Yémen et au Soudan.  Enfin, il a estimé que l’enseignement islamique était au service d’un développement durable soucieux du bien-être matériel mais aussi spirituel de tous.  Toutes les idées comptent, a-t-il dit, et pour que les ruisseaux deviennent des rivières, il nous faut faire en sorte que chacun ait quelque chose à gagner au développement.


M. ECKHARD DEUTSCHER, Président du Comité d’aide au développement de l’ Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a déclaré que le contexte actuel de crise était un test de crédibilité du système international.  Honorer les engagements en matière d’APD, a-t-il souligné, est vital pour éviter à l’Afrique de sombrer sous le coup de l’augmentation des prix des denrées alimentaires et du pétrole.  « Nous le savons, la crise financière exerce des pressions sur les budgets de l’aide des pays donateurs, et c’est la raison pour laquelle il nous faut trouver des solutions pour contourner ce problème », a-t-il dit.  Pour cela, il a demandé que les acteurs clefs en matière d’aide au développement gardent à l’esprit que l’APD reste un bon investissement pour renforcer les capacités de pays qui, demain, seront des partenaires économiques de premier plan.  Il a rappelé que le Programme d’action d’Accra avait appelé à l’amélioration de la distribution et de l’utilisation de l’APD, en posant entre autres qu’il est nécessaire que les partenariats de développement soient beaucoup plus inclusifs de sorte que les idées se matérialisent sur le terrain et profite à la fois aux donateurs et aux récipiendaires.  M. Deutscher a insisté sur le fait qu’il faut que l’aide soit adaptée aux besoins ciblés de chaque pays et que soient levées les conditions qui entravent sa distribution et créent des tensions politiques inutiles.


À cette fin, il a exhorté les pays en développement, en vue de l’appropriation des programmes de développement qu’eux-mêmes réclament, d’améliorer la gestion publique de leurs affaires et d’instaurer une gouvernance et un système de décaissement des fonds réellement transparents.  Le conférencier a estimé qu’il faudrait suivre les recommandations de la Déclaration de Paris, qui ne mentionne nulle part la nécessité de poser des conditions d’attribution de l’aide.  Or, la réalité contredit cela, puisque 75% de l’APD sont alloués sous conditions, a-t-il relevé.  Il a en outre critiqué les conditions d’éligibilité des pays à l’Initiative PPTE (pays pauvres très endettés) et a appelé à un dialogue suivi entre donateurs et acteurs locaux.  Ce sont ces deux parties qui, ensemble, parviendront à créer le climat politique propice au développement puis à l’appropriation, a-t-il dit. 


Mme GARGEE GHOSH, représentante de la Fondation Bill & Melinda Gates, est intervenue pour indiquer que la fondation dont elle est membre avait pour vocation d’utiliser les progrès et innovations du XXIe siècle pour réduire les inégalités à travers le monde.  « Nous sommes actifs dans les secteurs liés de l’agriculture, du microfinancement, de l’assainissement et de la santé, a-t-elle dit, par le biais de projets à long terme qui complètent les actions de longue date des donateurs.  Mme Ghosh a précisé que la Fondations Bill & Melinda Gates opérait dans un cadre axé sur les résultats recueillant l’aide politique des États qui, dans le meilleur des cas, pratiquent un décaissement des fonds destinés à l’aide en fonction de leurs cycles budgétaires.  Sur ce dernier point, elle a insisté sur le besoin que la distribution de l’APD soit plus prévisible, comme le demande le Programme d’action d’Accra.


M. JEAN PING, Président de la Commission de l’Union africaine, a expliqué que la crise systémique actuelle fragilisait à une vitesse dévastatrice les économies en développement.  Les pays pauvres ont vu comment les pays développés ont riposté aux impacts de la crise financière, a-t-il ajouté.  « Nous avons admiré les mesures extraordinaires prises au niveau des États, les plans de sauvetage, les quasi-renationalisations de certains établissements bancaires, ou encore la réunion d’urgence du Sommet du G-20 à Washington.  La réactivité devant l’ampleur de la crise de confiance qui a frappé le monde développé quant à son système économique a été impressionnante, a encore dit M. Ping.  Il a toutefois exprimé sa crainte que le monde développé n’utilise l’argument de la crise financière pour réduire encore son volume d’APD vers les pays en développement, pour qui l’atteinte des OMD pourrait devenir une chimère.  Dans le contexte actuel, si les pays en développement accusent une baisse de seulement 1% de leur croissance, ce ne sont pas moins de 20 millions de personnes qui basculeront à court terme dans la pauvreté, a lancé M. Ping.  Il a précisé que l’Afrique, tributaire de la volatilité des prix des matières premières, subissait plus que les autres continents la baisse de la demande de ces matières, entraînant une baisse du revenu national et des capacités d’investissement car l’essentiel des recettes provient des exportations.  M. Ping a exhorté les pays à conclure le plus rapidement possible le Cycle des négociations commerciales de Doha, comme le souhaite le Président de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), M. Pascal Lamy, pour permettre « enfin » l’accès au marché des produits des pays en développement. 


Les subventions agricoles, notamment, qui protègent les riches doivent être levées et les pays développés ne doivent pas se servir du prétexte de la crise pour réduire leur part des budgets consacrés à l’APD, a encore déclaré M. Jean Ping.  Sur ce dernier point, il a rappelé que depuis 1970, après chaque crise financière qui a touché les pays donateurs, l’APD avait diminué, laissant l’Afrique presque livrée à elle-même.  


M. SAM WORTHINGTON, Président d’« InterAction » et représentant de la communauté des ONG des États-Unis, a indiqué qu’aujourd’hui la part de l’APD provenant de donations privées représentait la moitié de l’aide.  Il a souligné que la force des ONG était leur connaissance du terrain et la qualité des partenariats établis avec les communautés locales.  « Nous sommes une valeur ajoutée au niveau local, a-t-il dit, dans les domaines de la santé et du transfert technologique, qui renforcent la collaboration Sud-Sud par le biais de programmes solidaires de longue durée et soutenus par des flux financiers.  Il a indiqué que l’un des enjeux de demain serait de convaincre les gouvernements d’accroître leur aide pour compenser la décrue de certaines mannes privées qui sont découragées par

la crise financière actuelle.  Faisant référence au futur Président des États-Unis, il a estimé que M. Barack Obama devrait augmenter l’APD à l’Afrique de 50 milliards de dollars.  Il a également plaidé pour la mise en place de taxes sur les transactions du système financier pour mobiliser de nouvelles ressources financières destinées au développement.


Échange de vues


Le représentant de Bahreïn a appelé à la refonte de l’architecture de l’aide en tenant compte des besoins et priorités identifiés par les pays.  « Nous devons repenser le système sur cette base qui suppose une coordination accrue entre pays donateurs et récipiendaires, a-t-il dit.  Le représentant du Tchad a souhaité que l’on rende l’aide plus efficace en harmonisant l’action des États et des acteurs du développement.  « Nous savons que la crise financière va entraîner une diminution supplémentaire de l’aide, et c’est pourquoi nous devons nous accorder sur les moyens de maximiser ce dont nous allons disposer », a-t-il estimé.   Il a également souhaité que le secteur privé soit plus impliqué et que les problèmes liés aux aspects logistiques et d’infrastructure en général ne soient plus relégués au second plan des grands accords de coopération.  


Le représentant du Soudan a emboîté le pas de son homologue tchadien en disant que les répercussions de la crise sur les flux financiers allaient pousser les pays africains à mieux s’organiser, à utiliser efficacement ce qu’ils recevront.  Les pays donateurs doivent toutefois honorer leurs engagements pour empêcher un véritable désastre à court terme, a-t-il ajouté, déclarant que l’Afrique n’avait pas besoin de compassion mais d’actions concrètes.  Une représentante de la société civile a, elle aussi, plaidé pour la taxation des devises internationales afin de rendre l’impôt solidaire à l’échelle mondiale.  De son côté, le Ministre des finances du Bangladesh a fait de la distribution de l’APD le cœur de l’action en faveur du développement, et ce quels que soient les volumes mobilisés.  La valeur de l’aide doit être fonction du nombre de pauvres, pas de la taille de la population, a-t-il dit, l’APD étant en outre trop fragmentée alors que la lutte contre la pauvreté est la première priorité. 


L’Italie a fait entendre sa voix en appuyant l’idée plusieurs fois évoquée que l’efficacité de l’aide doit venir de l’identification par les pays de leurs priorités et besoins.  Cela implique que les gouvernements fassent l’effort politique d’améliorer leur gouvernance et de rendre leur pratique de gestion plus transparente, a-t-il dit, en vue notamment de la réalisation des OMD.  Pour le délégué d’Israël, il est par ailleurs impératif que les pays en développement jugulent la fuite des cerveaux, qui équivaut à une perte en ressources humaines indispensables pour que les pays s’approprient, à terme, l’effort de développement.  Le représentant des États-Unis a, quant à lui, estimé qu’au XXIe siècle, l’APD devait devenir un instrument pour mobiliser d’autres ressources et contribuer ainsi à l’instauration d’un environnement propice au développement politicoéconomique.  À cette fin, la croissance des pays en développement doit rester soutenue même en temps de crise, ce qui nécessite que les recommandations du Cycle de Doha soient mises en œuvre, a-t-il ajouté. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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