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CS/9347

CONSEIL DE SÉCURITÉ: PAS D’ACHÈVEMENT DES TRAVAUX SANS JUGEMENT DES 17 GRANDS CRIMINELS ENCORE EN FUITE, INSISTENT LES MAGISTRATS DU TPIY ET DU TPIR

4/06/2008
Conseil de sécuritéCS/9347
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil de sécurité

5904e séance – matin


CONSEIL DE SÉCURITÉ: PAS D’ACHÈVEMENT DES TRAVAUX SANS JUGEMENT DES 17 GRANDS CRIMINELS ENCORE EN FUITE, INSISTENT LES MAGISTRATS DU TPIY ET DU TPIR


Les Procureurs et Présidents du Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) ont prévenu ce matin les membres du Conseil de sécurité que l’administration d’une justice pénale internationale restera lettre morte si les 17 personnes figurant sur la liste des accusés du TPIR et du TPIY et qui sont toujours en fuite ne sont pas arrêtées et jugées d’ici 2010. 


Le Conseil de sécurité avait en effet demandé en 2002 au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et au Tribunal pénal international pour le Rwanda de prendre toutes mesures en leur pouvoir pour mener à bien les enquêtes d’ici à la fin de 2004, achever tous les procès en première instance d’ici à la fin de l’année 2008 et terminer leurs travaux en 2010, -comme stipulé par les stratégies d’achèvement des travaux- en concentrant leur action sur la poursuite et le jugement des principaux dirigeants portant la plus lourde responsabilité des crimes commis au Rwanda et dans l’ex-Yougoslavie.


Dressant le bilan des progrès et des réalisations accomplis depuis 1993, le Président et le Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), qui sont respectivement MM. Fausto Pocar et Serge Brammertz, ont indiqué que la coopération du Tribunal avec la Serbie était loin d’être satisfaisante et que cet État avait failli à son devoir d’assistance.  Ainsi la recherche et la poursuite des fugitifs posent toujours problème, quatre accusés étant encore en fuite.  Il s’agit de Radovan Karadzic, Ratko Mladic, Stojan Zupljanin et Goran Hadzic, ont rappelé les responsables du TPIY.  Le Président et le Procureur ont insisté sur le fait que le Tribunal ne devait pas fermer ses portes avant que les criminels accusés ne soient tous jugés, et ils ont prié instamment le Conseil de sécurité de réaffirmer ce principe, quel que soit le calendrier proposé pour la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement des travaux du Tribunal.


S’agissant des activités et de la stratégie d’achèvement des travaux du Tribunal pénal international pour le Rwanda, son Président, M. Dennis Byron, et son Procureur, M. Hassan Jallow, se sont eux inquiétés du cas des 13 fugitifs dont le Tribunal réclame toujours l’arrestation, dans la mesure où les règles des Tribunaux pénaux internationaux ne permettent pas les procès par contumace et alors qu’aucune juridiction nationale acceptable ne semble vouloir se saisir des cas concernés.  Ils ont, dans ce contexte, regretté le manque patent de coopération dont fait preuve le Kenya, pays où l’un des fugitifs les plus notoires, Félicien Kabuga, vaque à ses occupations en toute tranquillité.


Outre la comparution en justice des responsables principaux des crimes commis avant que ne prennent fin les mandats des Tribunaux, les Procureurs et Présidents du TPIY et du TPIR ont également évoqué la question du renvoi d’affaires aux juridictions nationales et la nécessité de leur offrir une assistance technique.  A aussi été évoquée la décision de la Chambre de première instance du Tribunal pour le Rwanda qui a déjà rejeté, ceci pour cause de non-conformité aux normes internationalement reconnues, une des cinq demandes de renvoi présentées par le Procureur.  Le Procureur général du Rwanda a promis de suivre attentivement la procédure d’appel introduite par le Procureur du TPIR, Hassan Jallow. 


Des pays comme le Royaume-Uni, la France, la Belgique ou la Slovénie, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, ont estimé que les dates d’achèvement des travaux des Tribunaux étaient indicatives et qu’ils ne pourront fermer leurs portes sans qu’ait eu lieu le procès des 17 individus encore en fuite, et qui sont accusés des crimes les plus graves.  Cet avis n’a pas été partagé par la Fédération de Russie, dont le représentant a rappelé que cela faisait 14 ans que les Tribunaux ont été créés dans des pays où fonctionnent désormais des systèmes de justice indépendants qui sont en mesure de juger eux-mêmes les accusés du TPIR et TPIY.  Il s’est félicité des progrès réalisés dans le renvoi d’affaires dont étaient saisis les deux Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie devant des juridictions nationales.


TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL CHARGÉ DE JUGER LES PERSONNES ACCUSÉES DE VIOLATIONS GRAVES DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE COMMISES SUR LE TERRITOIRE DE L’EX-YOUGOSLAVIE DEPUIS 1991


TRIBUNAL INTERNATIONAL CHARGÉ DE JUGER LES PERSONNES ACCUSÉES D’ACTES DE GÉNOCIDE OU D’AUTRES VIOLATIONS GRAVES DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE COMMIS SUR LE TERRITOIRE DU RWANDA ET LES CITOYENS RWANDAIS ACCUSÉS DE TELS ACTES OU VIOLATIONS COMMIS SUR LE TERRITOIRE D’ÉTATS VOISINS ENTRE LE 1ER JANVIER ET LE 31 DÉCEMBRE 1994


Exposés


M. FAUSTO POCAR, Président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), a présenté son neuvième rapport conformément à la résolution 1534 de 2004.  À l’approche de l’achèvement de son mandat, le Tribunal a plus que jamais besoin de la communauté internationale pour mener sa mission à bonne fin, a-t-il dit.  Comme en 1993, date de création du Tribunal et donc de la première instance internationale pénale réellement mondiale, les décisions que nous allons prendre aujourd’hui seront cruciales pour assurer la pérennité de la justice pénale internationale, a estimé M. Pocar. 


Aux cours des 15 dernières années, a précisé Fausto Pocar, la jurisprudence du Tribunal a favorisé le développement exponentiel du droit pénal international et a conduit à la création d’un nouvel ensemble de règles en matière de procédures pénales internationales.  Nous avons formé une génération entière de juristes et de personnels judiciaires et mis en place de nouvelles normes, pratiques et méthodes en matière de gestion des tribunaux pénaux internationaux et des affaires complexes de crimes de guerre.  Nous nous sommes aussi attelés à améliorer l’efficacité de nos procédures dans le but d’achever notre mandat dans les temps impartis et sommes désormais en mesure de mener de front huit procès concernant 28 accusés.  C’est une situation sans précédent dans l’histoire du Tribunal.  Hormis ceux des accusés Tolimir et Dordevic, qui ont été arrêtés en 2007, tous les procès auront démarré d’ici la fin de l’année, a indiqué le Président du TPIY.  Toutes les autres affaires sont closes, et sur les 161 personnes mises en accusation, 113 ont été jugées et tous les procès en première instance, sauf trois, devraient être terminés d’ici à la fin 2009, a ajouté M. Pocar.  Le Président a précisé qu’il avait, en avril dernier, décidé de reconstituer des groupes de travail chargés d’accélérer les procès en première instance et en appel.


Le Président a toutefois mentionné les difficultés que rencontre le Tribunal.  Se pose notamment le problème du statut et des avantages accordés aux fonctionnaires et aux membres du personnel du TPIY.  À ce stade, il a demandé le soutien accru du Conseil de sécurité et des États Membres pour mettre en place des mesures susceptibles de fidéliser les meilleurs éléments et de remédier aux inégalités qui existent dans la fixation de la pension des juges.


Dressant le bilan des progrès et des réalisations accomplis depuis 1993, il a dit que ceux-ci restent précaires.  La coopération entre États de la région en matière de recherche et de poursuite des criminels de guerre pose toujours problème, notamment en ce qui concerne l’extradition par un État de ses ressortissants.  Le Président du TPIY a évoqué l’évasion, de la prison de Foca,  de Radovan Stankovic, qui était condamné à 20 ans de prison pour viols systématiques, tortures et réduction de ses victimes à l’état d’esclavage.  Stankovic est également coupable d’actes de torture sur des femmes et des mineurs.  Un an après son évasion, ce criminel reste introuvable, ce qui non seulement entache la réputation de la République Srpska mais montre également l’étendue des problèmes que rencontre le Tribunal, a dit Fausto Pocar.  Le Président du TPIY a également attiré l’attention du Conseil sur le mandat des fonctionnaires qui travaillent au sein de la chambre et du parquet de la Cour d’État de Bosnie-Herzégovine, mandat qui prendra fin en 2009.  Plusieurs de ces fonctionnaires, ainsi que des groupes de victimes se sont dits préoccupés par leur départ prochain, ce qui pourrait dissuader les témoins à comparaître.  M. Pocar a demandé instamment à la communauté internationale de soutenir la prorogation du mandat des membres de la Chambre et du Parquet de la Cour d’État de Bosnie-Herzégovine. 


Le Président du TPIY a ajouté que les objectifs d’administration de la justice ne seront pas atteints si les quatre accusés encore en fuite, Radovan Karadzic, Ratko Mladic, Stojan Zupljanin, et Goran Hadzic, ne sont pas appréhendés.  Le Tribunal ne doit pas fermer ses portes avant qu’ils ne soient tous jugés, a-t-il insisté.  Je prie instamment le Conseil de sécurité de dire clairement que ces fugitifs seront jugés par la communauté internationale, quel que soit le calendrier proposé pour la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement des travaux du Tribunal, a déclaré le Président.  J’exhorte la communauté internationale à assumer la responsabilité qui est la sienne de coopérer avec le Tribunal afin de trouver ces fugitifs, a-t-il souligné.  Le Président a également déploré que la Serbie ait failli à son devoir d’assistance en ne faisant pas preuve de la diligence voulue en ce qui concerne la résolution de la question de l’assignation à comparaître.


M. DENNIS BYRON, Président du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a souligné que la charge de travail du Tribunal exigera du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale qu’ils apportent quelques ajustements aux termes de service des juges.  Maintenir une bonne performance tout en réalisant les objectifs fixés dans la stratégie d’achèvement n’est pas chose facile, a-t-il aussi souligné.  Il a donc demandé au Conseil d’autoriser le Secrétaire général à prendre toutes mesures « raisonnables » pour permettre au Tribunal de garder son personnel expérimenté et achever ainsi son mandat.  M. Byron a poursuivi son intervention en indiquant que le Tribunal a bénéficié de l’appui de nombreux États, et en particulier de celui du Rwanda qui a continué à faciliter le déplacement des témoins à Arusha et à offrir des services essentiels à la bonne marche des procès.  Il a tout de même indiqué que la réinstallation des deux personnes acquittées n’a toujours pas eu lieu malgré les efforts déployés par le Greffier pour leur trouver un pays d’accueil.  Cette question, ainsi que celle de l’exécution des peines des personnes condamnées, pose un problème de plus en plus pressant, a-t-il souligné. 


M. SERGE BRAMMERTZ, Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, a rappelé que le Bureau du Procureur restait fermement résolu à mener à bien les procès en première instance et en appel conformément à son mandat.  Sur les 28 accusés actuellement jugés en première instance, a-t-il précisé, il n’en reste que huit pour lesquels l’accusation continue de présenter ses moyens.  Il a ajouté qu’aucune arrestation n’était intervenue depuis le dernier rapport et que quatre accusés étaient toujours en fuite à savoir Ratko Mladic, Radovan Karadzic, Stojan Zupljanin et Goran Hadzic.  S’agissant des efforts déployés pour accélérer la présentation de ses moyens pour les procès, il a mentionné une collaboration active et constructive entre le Bureau du Procureur et les Juges dans le souci de raccourcir la présentation des moyens à charge en préférant les déclarations écrites aux dépositions orales. 


M. Brammertz s’est dit préoccupé par les problèmes rencontrés en matière de protection des témoins, problèmes qui ont des répercussions directes sur la capacité de présenter les moyens avec efficacité et rapidité.  Il a exhorté les États où résident ces témoins à aider le Tribunal à les mettre à l’abri des pressions et intimidations.  Avec le concours de l’OSCE nous continuons de suivre les affaires renvoyées en application du Règlement de procédure et de preuve, a-t-il encore dit.  Nous travaillons en étroite collaboration avec les autorités judiciaires de l’ex-Yougoslavie et nous leur apportons notre aide pour qu’elles puissent continuer à mener à bien les procès pour crimes de guerre.  Il s’est dit résolu à renforcer ses liens avec les parquets de la région pour établir de véritables partenariats et à rechercher de nouveaux modes de coopération. 


Le Procureur du TPIY a estimé que le soutien de la communauté internationale aux juridictions des pays de l’ex-Yougoslavie restait crucial au cours des mois et des années à venir.  À cet égard, il s’est dit très préoccupé par l’éventualité d’une diminution des fonds alloués à la Division du parquet de Bosnie-Herzégovine spécialisée dans les crimes de guerre et par le départ des procureurs internationaux.  Il a espéré que les fonds nécessaires seront dégagés eu égard au rôle indispensable du parquet et de la Chambre spécialisés dans les affaires de crimes de guerre. 


En ce qui concerne la coopération des pays avec le TPIY, M. Brammertz a précisé que la Croatie, bien qu’ayant communiqué certains documents provenant de ses archives, n’avait toujours pas donné suite à plusieurs demandes concernant des documents clefs.  Il a indiqué que la Bosnie-Herzégovine a généralement répondu de manière satisfaisante aux demandes d’assistance, mais a néanmoins exhorté les autorités bosniaques à multiplier les initiatives contre ceux qui aident les accusés en fuite à se soustraire à la justice.  Bien que la Serbie ait donné suite à un certain nombre de demandes d’assistance, a-t-il encore précisé, il reste à surmonter des obstacles importants pour pouvoir accéder à certaines archives et consulter certains documents essentiels pour les procès. 


Serge Brammertz a en outre mis l’accent sur l’enjeu majeur que représente l’arrestation des fugitifs en se disant convaincu que les autorités serbes étaient en mesure de retrouver Ratko Mladic, Radovan Karadzic, Stojan Zupljanin et Goran Hadzic.  Il a indiqué que les autorités serbes invoquaient le climat d’incertitude politique qui règne en Serbie pour expliquer l’absence de progrès en ce domaine.  Il a formé le vœu que le nouveau Gouvernement serbe sache donner aux services de sécurité et à la Division du parquet spécialisée dans les affaires de crimes de guerre les moyens de rechercher, d’appréhender et de transférer les fugitifs. 


Si nous sommes fermement résolus à achever notre mission, a-t-il conclu, il me parait inconcevable que ce Tribunal, institué pour traduire en justice les principaux responsables des crimes atroces commis dans la région, ferme ses portes avant d’avoir jugé tous les accusés encore en fuite.  M. Brammertz a estimé qu’il n’était pas question de décevoir les associations de victimes et de ne pas tenir la promesse qui leur a été faite il y a 15 ans de leur rendre justice avec la création du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. 


M. HASSAN B. JALLOW, Procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a annoncé au Conseil que de toute évidence, il y aura des activités en suspens à la fin de cette année, après les trois nouvelles arrestations qui ont eu lieu en République démocratique du Congo (RDC), en France et en Allemagne.  Il est tout aussi probable, a-t-il aussi annoncé, que l’affaire Karamera aille bien au-delà de 2009.  Les acquis du passé et la nécessité d’achever correctement le travail exigent que le Tribunal soit autorisé à poursuivre ses procès après 2008.  Il est absolument nécessaire, a insisté le Procureur, que le Conseil réponde favorablement à la demande du Tribunal de reporter à 2009 la conclusion des procès en première instance.  La poursuite de ces procès, a-t-il prévenu, nécessitera aussi un appui budgétaire de la part de l’Assemblée générale.


Au cas où, a-t-il poursuivi, le renvoi de cinq affaires à la juridiction rwandaise s’avère impossible, le Tribunal aura une charge de travail supplémentaire puisqu’aucun autre pays n’a exprimé le souhait de se saisir de ces cas.  Les cas des 13 fugitifs poseront aussi un problème particulier puisque les règles du Tribunal ne permettent pas de procès par contumace et qu’aucune juridiction nationale acceptable ne semble vouloir s’en saisir.  Il a espéré que, dans les mois à venir, le Tribunal sera capable d’arrêter ces fugitifs grâce à la coopération des États Membres concernés. 


Le Procureur a d’ailleurs fait état des contacts qu’il a pris avec le Kenya pour assurer l’arrestation de Félicien Kabuga.  Il a décrit les efforts menés en RDC, où d’autres fugitifs ont trouvé refuge.  Le Procureur a ensuite expliqué la manière dont son Tribunal répond aux demandes d’assistance juridique des États qui enquêtent, poursuivent ou gèrent les demandes d’extradition des fugitifs.  Plus tard dans l’année, a-t-il aussi annoncé, le Tribunal organisera un forum pour discuter des moyens de poursuivre l’assistance technique après la fermeture du Tribunal. 


Le Tribunal accueillera aussi l’année prochaine le cinquième colloque annuel des procureurs internationaux qui se concentrera sur les défis de la stratégie d’achèvement et la fermeture ordonnée des tribunaux spéciaux.  Le Tribunal s’est par ailleurs impliqué, au cours de la dernière année, sur le renforcement des capacités au Rwanda, a dit M. Jallow. 


Le Procureur du TPIR a enfin fait état de progrès dans les enquêtes sur les membres du FPR, auxquelles collabore le Rwanda.  Le Procureur général du Rwanda, a-t-il indiqué, a fait connaître sa décision de poursuivre très prochainement pour meurtre et complicité de meurtre quatre officiers militaires de l’Armée rwandaise.  Le Tribunal compte suivre de près ces procédures, a assuré le Procureur du TPIR, en soulignant que les poursuites au Rwanda ne préjugeront naturellement pas de la primauté de la juridiction du Tribunal sur ces affaires. 


Déclarations


M. ABDELRAZAG E. GOUIDER (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré qu’en 2003 et en 2004, le Conseil avait décidé d’une stratégie d’achèvement des travaux des deux Tribunaux et avait alors exhorté les États à coopérer avec eux.  Les rapports dont nous sommes saisis et les exposés faits ce matin montrent des progrès évidents dans la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement des travaux des deux Tribunaux, a estimé le représentant.  Toutefois, des fugitifs échappent toujours à la justice, ce qui est une grande source de préoccupation pour nous, d’autant que cette réalité semble se prolonger indéfiniment et démontre donc l’impossibilité de mettre en œuvre les stratégies d’achèvement selon le calendrier fixé.  Les Tribunaux, pour achever leur mission, ont besoin d’un appui financier et humain supplémentaire, a recommandé le représentant libyen.  Il sera aussi indispensable, a-t-il ajouté, de transférer davantage d’affaires aux juridictions nationales, qui devront bénéficier de l’aide et de l’appui des Tribunaux et de la communauté internationale.  Nous souhaitons vivement que cette stratégie d’achèvement soit réalisée dans les délais.


M. SAÚL WEISLEDER (Costa Rica) s’est dit reconnaissant aux Tribunaux d’avoir présenté leurs rapports conformément aux résolutions 1503 (2003) et 1534 (2004) du Conseil de sécurité, qui portent sur la mise en œuvre des stratégies d’achèvement.  Il a pris note des éléments qui ont entrainé un certain nombre de retards.  Il a estimé qu’il serait opportun, dans le cadre des mécanismes résiduels, que le Conseil de sécurité retienne un certain nombre d’éléments parmi lesquels les droits fondamentaux des accusés et que le processus judiciaire continue d’être impartial et rapide.  Dans le cas du TPIY, il a rappelé que quatre de ses accusés étaient toujours en fuite parmi lesquels Radovan Karadzic et Ratko Mladic alors que pour le TPIR, 13 responsables sont toujours en fuite parmi lesquels Félicien Kabuga.  Il a rappelé qu’au mois de juillet prochain la Cour pénale internationale (CPI) célèbrera le dixième anniversaire de l’adoption du Statut de Rome qui symbolise son acte de naissance.  Pour cette raison, il a souhaité une fois de plus appeler à ce que l’on renforce le sentiment de justice en demandant que les États qui n’ont pas encore ratifié ce statut le fassent, en précisant que 106 pays avaient déjà franchi ce pas. 


Mme CHEN PEIJIE (Chine) a déclaré qu’à l’approche de la stratégie d’achèvement, on attend des Tribunaux qu’ils accélèrent leurs travaux.  Depuis l’introduction de cette stratégie, les Tribunaux ont travaillé d’arrache-pied pour accélérer leurs progrès.  Nous souhaitons qu’ils se fondent sur cette base pour examiner les possibilités d’amélioration de leurs méthodes de travail en ayant recours aux ressources déjà en place, a dit la représentante.  Au cours de ces dernières années, les Tribunaux ont traité de la question des transferts d’affaires vers les États concernés comme étant un élément de la stratégie, et nous espérons que cette pratique se poursuivra dans le cadre d’une coopération judiciaire qui verrait, entre autres, se concrétiser des transferts d’accusés.  Depuis la présentation des rapports en décembre dernier, les Tribunaux ont à la demande du Conseil présenté des avis sur des questions pertinentes, a fait observer la représentante.  Mais les questions du legs et des responsabilités résiduelles doivent être analysées de manière objective, a-t-elle souligné.  Il ne serait pas approprié d’exagérer la charge de travail des Tribunaux, et il est impératif de respecter les stratégies d’achèvement, a souligné la représentante de la Chine.  Nous attendons des Tribunaux qu’ils franchissent au cours de l’année des étapes supplémentaires dans la réalisation de la stratégie d’achèvement, a-t-elle conclu.


M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) s’est inquiété que les Tribunaux ne soient pas en mesure d’achever leurs travaux dans les délais impartis.  Il a souhaité que des orientations claires soient données aux Tribunaux pour que ces institutions ne puissent plus entamer de jugements en première instance après le 1er  janvier 2009.  Il faudra que soit réglée la question de l’avenir et des compétences des juges, conformément aux critères énoncés par le Conseil de sécurité, a-t-il indiqué.  Il a rappelé que cela faisait 14 ans que les Tribunaux ont été créés dans des pays où fonctionnent désormais des systèmes de justice indépendants qui sont en mesure de juger eux-mêmes les accusés du TPIR et TPIY.  Dans ce contexte, le représentant de la Fédération de Russie s’est félicité des progrès réalisés dans le renvoi d’affaires dont étaient saisis les deux Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie devant des juridictions nationales.  Les informations qui ont été fournies sur le niveau et la qualité de la coopération nous font douter de l’objectivité de plusieurs chapitres des rapports, a dit le représentant.  Il semble que le TPIR n’arrivera pas à respecter les délais de la stratégie d’achèvement, est-il indiqué, mais nous ne trouvons aucune explication ou justification à ces retards.  Le représentant s’est inquiété que pour la première fois dans l’histoire de la justice internationale, des témoins aient subi d’énormes pressions et intimidations, et que certains aient même été éliminés physiquement au Kosovo. 


M. PAUL ROBERT TIENDREBEOGO (Burkina Faso) a appelé les Tribunaux à prendre les mesures nécessaires pour respecter les délais fixés dans les stratégies d’achèvement.  Il a tout de même estimé que l’œuvre accomplie par les Tribunaux ne sera bénéfique que si les fugitifs sont rattrapés et jugés.  Il s’est donc félicité de la bonne disposition de plusieurs États à coopérer avec les Tribunaux.  Il a cependant exprimé sa préoccupation face aux insuffisances constatées dans la coopération de certains autres États.  Concernant l’héritage des Tribunaux et leurs fonctions résiduelles, le représentant burkinabè a dit attendre avec intérêt les propositions que le Groupe de travail fera sur des questions essentielles telles que les archives, la protection des témoins, l’application des peines ou encore le procès des fugitifs quand ceux-ci seront capturés. 


M. ZAHEER LAHER(Afrique du Sud) s’est félicité des mesures prises par les Tribunaux pour veiller au respect de la stratégie d’achèvement et notamment de la décision du TPIR de transférer cinq accusés dont l’un est un fugitif.  Il est, dans ce contexte, également nécessaire de renforcer la capacité des tribunaux nationaux afin d’être en mesure de traiter les affaires qui leur sont renvoyées, a dit le représentant.  S’agissant du TPIY, il a dit que sa délégation était préoccupée par le fait qu’aucun des fugitifs n’ait encore été appréhendé.  Il a exhorté les États à respecter la Charte des Nations Unies et à lancer des mandats d’arrêt contre les cinq fugitifs.  Le territoire sur lequel se cachent ces individus est dans l’obligation de coopérer avec le Tribunal, et nous constatons avec préoccupation un manque de coopération à cet égard.


M. MARCELLO SPATAFORA (Italie) s’est félicité des progrès tangibles réalisés dans la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement des Tribunaux pénaux internationaux (TPI) grâce à l’implication des juges.  Nous constatons que la coopération avec les pays ne s’est pas suffisamment améliorée pour permettre l’arrestation des derniers fugitifs, a-t-il cependant regretté.  Il a dit que la mission des TPI était d’apporter une paix durable et que cela exigeait que les accusés encore en fuite soient traduits en justice.  Il a ajouté qu’il ne fallait pas lancer le message selon lequel le temps jouerait en faveur de ces personnes.  Dans le cadre de l’exécution de la stratégie d’achèvement, il a prévenu que le Conseil de sécurité devait éviter de donner l’impression de favoriser une justice trop rapide au détriment de l’équité.  Il a appuyé l’importance de continuer à transférer certaines affaires aux systèmes judiciaires nationaux.  Le représentant a ensuite salué l’appui fourni au TPIR par l’Institut UNICRI et l’OSCE, en rappelant que le legs des Tribunaux était examiné avec le plus grand sérieux au sein du Conseil.  


M. HOANG CHI TRUNG (Viet Nam) s’est déclaré préoccupé par le nombre de fugitifs, tout en indiquant que sa délégation était convaincue que la communauté internationale finirait par les traduire en justice.  Il a encouragé les Tribunaux à continuer à étudier les renvois possibles de cas aux juridictions nationales, ce qui, a-t-il dit, aiderait le Conseil à décider d’un mécanisme résiduel approprié pour assurer les procès concernant les affaires qui n’auront pas été renvoyées.  M. Hoang Chi Trung a conclu en appelant la communauté internationale à fournir les ressources nécessaires qui permettraient aux Tribunaux de garder leur personnel qualifié et de poursuivre leur travail.  Il a aussi souligné la nécessité d’aider les juridictions nationales à renforcer leurs capacités à traiter des affaires renvoyées et d’autres questions juridiques. 


M. WILLLIAM ROELANTS DE STAPPERS (Belgique) a rappelé que les dates d’achèvement des travaux des Tribunaux sont indicatives et qu’elles devraient pouvoir être adaptées en fonction de l’évolution de la situation.  Il a aussi souligné que la décision de renvoyer ou non des affaires particulières aux juridictions nationales est strictement judiciaire.  Le représentant a, par ailleurs, appelé tous les États concernés à coopérer pleinement avec les Tribunaux en vue d’arrêter les accusés qui sont en fuite et les transférer à La Haye ou à Arusha.  Il a, à cet égard, pris note avec regret de l’appréciation mitigée du Procureur Brammertz sur la coopération de la Serbie avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY). 


En tant que Président du Groupe de travail sur les questions résiduelles, le représentant belge a annoncé qu’un document contenant plusieurs options est actuellement en préparation.  À titre national, il a souligné, outre la question du jugement des fugitifs qui n’auraient pas encore été arrêtés au moment de la clôture des Tribunaux, l’importance des questions liées à la protection des victimes et des témoins ainsi qu’à l’exécution des peines.  S’agissant de cette dernière question, il a estimé que le nombre d’accords conclus avec les Tribunaux est encore insuffisant, avant d’appeler les États à envisager de conclure de tels accords.  .


Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a déclaré que son gouvernement était conscient des progrès réalisés au cours des six derniers mois par les deux Tribunaux.  La représentante a demandé que tous les efforts soient déployés pour ne pas retarder la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement.  Par le passé, et à plusieurs reprises, nous avons demandé que les fugitifs soient capturés et traduits en justice, et il est inacceptable que 17 individus accusés des crimes les plus graves soient encore en fuite, a regretté la représentante.  Les Tribunaux ne pourront achever leur mandat s’ils ne sont pas appréhendés.  En ce qui concerne l’ex-Yougoslavie, Mladic et Karadzic, en particulier, devront être traduits devant la justice internationale, a insisté la représentante.  Dans d’autres cas, les fugitifs pourraient être jugés devant des juridictions nationales, ce qui exigera une coopération entre les États et les Tribunaux.  La représentante a noté que la coopération avec la Serbie était partielle et insuffisante et a appelé la Serbie et la Bosnie-Herzégovine à déployer tous les efforts possibles pour traduire les fugitifs devant les instances de La Haye.  La représentante a aussi exhorté la RDC et le Kenya à localiser les inculpés en fuite et qui devront être traduits devant le TPIR.  Réagissant à certains propos tenus ce matin, elle a déclaré que sa délégation ne partageait pas les propos de la délégation de la Fédération de Russie concernant le rôle du TPIY qui, aux yeux du Royaume-Uni, est un organe indépendant et impartial.  Le TPIY et le TPIR sont les seules autorités établies par le Conseil pour juger de la nature de la coopération entre les Tribunaux et le territoire de l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, a-t-elle estimé.  La protection des victimes est aussi une question importante, dans la mesure où elle constitue un défi dans certaines régions comme le Kosovo.  Cela fait 13 ans que le massacre de Srebrenica a eu lieu, et il faut que les personnes responsables, Mladic et Karadzic, répondent de leurs actes devant la justice internationale, a souligné la représentante britannique.


M. NEVEN JURICA (Croatie) a déclaré que son pays avait figuré parmi les premiers à demander la création des Tribunaux pénaux internationaux.  Aujourd´hui, alors que les mandats des Tribunaux touchent à leur fin, a-t-il ajouté, on peut dire que la plupart des objectifs ont été réalisés.  Il s’est félicité de tous les efforts entrepris dans le cadre de la stratégie de sortie en indiquant que la Croatie participerait à tous les débats relatifs à la mise en place de mécanismes résiduels.  Il est essentiel que les fugitifs fassent l’objet d’un procès et que Radovan Karadzic, Ratko Mladic, Stojan Zupljanin et Goran Hadzic répondent de leurs crimes devant un tribunal international pour éviter d’avoir un legs incomplet des Tribunaux.  Seule une instance juridique internationale peut décider du transfert de ces affaires devant une juridiction nationale, a-t-il cependant ajouté.  La question des archives est importante non seulement dans le domaine judiciaire mais aussi pour la question de la réconciliation, a insisté le représentant croate.  Il a estimé que son pays était en mesure de mener les procès les plus délicats.  Il a mentionné comme étant « exemplaire » la coopération entre la Croatie et le TPIY en citant les 9 000 documents transmis au Procureur du Tribunal par son gouvernement. 


M. HASAN KLEIB (Indonésie) a insisté sur la stratégie d’achèvement des tâches confiées aux Tribunaux et dans ce cadre, a souligné la nécessité pour le Conseil de sécurité d’établir un mécanisme spécial qui traite des responsabilités résiduelles, en particulier eu égard aux questions concernant les fugitifs, les transferts d’affaires vers les juridictions nationales, la protection des témoins, le contrôle des peines et les archives.  Nous estimons en particulier que la responsabilité résiduelle que le Conseil devrait envisager de traiter est celle ayant trait aux fugitifs.  C’est une question dont la recherche de solution exige la coopération des États, a dit M. Kleib.  S’agissant du transfert des affaires aux juridictions nationales, le représentant a estimé essentiel pour la communauté internationale de travailler au renforcement des capacités des tribunaux nationaux.   Le représentant indonésien s’est félicité du fait que le Groupe de travail informel sur les Tribunaux, présidé par la Belgique, était parvenu avec succès à un accord dans certains domaines ayant trait aux fonctions résiduelles. 


M. JEAN-PIERRE LACROIX (France) a déclaré que les objectifs des Tribunaux, qui approchent de la fin de leur existence, avaient été pleinement réalisés.  Il a rappelé que selon le calendrier d’achèvement retenu, 2008 est la date butoir pour la fin des procès tenus en première instance, et 2010 pour la fin de l’ensemble des travaux.  Il a relevé l’intensification du rythme des travaux et l’apport qu’a constitué le recrutement des juges ad litem.  Le représentant a noté les retards pris, qui s’expliquent par les aléas judiciaires décrits dans les rapports.  Il a estimé que la communauté internationale y avait sa part de responsabilité, puisque les retards étaient aussi liés au manque de coopération des États. 


Il a estimé que la mission des TPI ne sera pas accomplie tant que les fugitifs ne seront pas arrêtés et jugés.  Il a déploré la collaboration insuffisante de la Serbie et du Kenya en ce qui concerne l’arrestation de criminels.  Il a déclaré qu’il serait inacceptable que la fin du mandat des Tribunaux signifie l’impunité des criminels en fuite.  Il a estimé qu’il conviendra de prévoir un moyen de reconstituer un mécanisme à la fois efficace et économique qui permettra de juger ces fugitifs une fois qu’ils seront arrêtés. 


M. GIANCARLO SOLER TORRIJOS (Panama) a déclaré que son pays était conscient du travail important réalisé par les deux Tribunaux.  S’agissant du TPIY, le représentant a jugé important de resserrer le dialogue en vue d’une meilleure protection des témoins et d’une bonne application des peines.  Il a toutefois regretté le peu de coopération obtenu de la part du Gouvernement serbe s’agissant de l’accès aux archives et de l’arrestation de Karadzic et de Mladic.  S’agissant du TPIR, il s’est dit également préoccupé par le peu de coopération obtenu de la part de la RDC et du Kenya en vue de l’arrestation de fugitifs.  Le représentant a ajouté que les deux Tribunaux n’ont pas été créés comme des institutions permanentes et qu’ils devront donc achever leur mandat après avoir accompli la totalité de leurs tâches.  Il est donc important qu’ils disposent de l’infrastructure et du personnel adéquats et qu’ils réalisent les objectifs fixés avec la même diligence constatée jusqu’à maintenant dans la conduite de leurs travaux.


M. ZALMAY KHALILZAD (États-Unis) a exhorté les deux TPI à continuer de mettre en œuvre les stratégies d’achèvement en souhaitant que les procès en cours arrivent à leur terme le plus rapidement possible.  Il a félicité les efforts réalisés pour transférer des affaires vers les juridictions nationales lorsque cela est approprié.  Il a souligné la nécessité d’un appui de la communauté internationale aux capacités judiciaires nationales du Rwanda et des pays de l’ex-Yougoslavie.  Il a prié la communauté internationale d’œuvrer à l’arrestation des personnes en fuite le plus rapidement possible et il a invité les États concernés à coopérer avec le TPIY et notamment le TPIR.  Il a noté avec préoccupation qu’un des financiers du génocide rwandais se trouvait au Kenya en regrettant l’insuffisance du niveau de coopération du Gouvernement du Kenya dans les efforts déployés pour arrêter Félicien Kabuga.  En ce qui concerne le TPIY, la capture de Mladic et Karadzic reste essentielle pour appuyer une réconciliation durable dans les Balkans, a encore insisté le représentant, en invitant la Serbie à tout mettre en œuvre pour arrêter et remettre à la justice internationale les derniers fugitifs. 


M. SANJA STIGLIC (Slovénie), au nom de l’Union européenne, a exprimé la détermination de l’Union européenne de faire en sorte que les accusés qui sont encore en fuite soient tous traduits en justice.  C’est la seule manière, a-t-elle insisté, de réaliser l’objectif ultime des Tribunaux, qui est de rendre justice et de contribuer à la paix et à la réconciliation dans les pays concernés par le mandat qui leur a été accordé.  Appelant ces Etats concernés à arrêter et à transférer les fugitifs, la représentante a regretté la coopération « insuffisante » de la Serbie avec le TPIY, notamment ces derniers mois.  Elle a rappelé que l’Union européenne a adopté trois « Positions communes » pour appuyer la mise en œuvre effective du mandat du Tribunal spécial pour l’ex-Yougoslavie en imposant un gels des fonds et des ressources économiques, ainsi que des restrictions sur l’entrée dans son territoire, contre les personnes poursuivies par le Tribunal.


La représentante a appelé les deux Tribunaux à identifier les réformes à entreprendre pour achever leur travail de la manière la plus efficace et la plus rapide possible, avant d’indiquer la disposition de l’Union européenne à trouver les moyens les plus efficaces et les plus rentables de traiter des fonctions résiduelles et d’autres questions juridiques.  Pour l’heure, a-t-elle dit, l’Union européenne attache une grande importance à ce que les procès tenus par les juridictions nationales soient conformes aux normes internationales.  Mme Stiglic a aussi estimé que quelque soit le moment de leur arrestation, les fugitifs de haut rang devront être jugées par une juridiction internationale. 


M. MARTIN NGOGA, Procureur général du Rwanda, a souligné que les crimes dont est saisi le TPIR ont été commis au Rwanda, principalement par des Rwandais et contre des Rwandais.  C’est la raison pour laquelle le Rwanda juge impératif, a-t-il dit, de participer pleinement à l’identification des questions relatives au fonctionnement du Tribunal, en particulier le processus d’achèvement.  Le Rwanda, a-t-il indiqué, a continué à améliorer ses mécanismes institutionnels de coopération avec le Tribunal pour réaliser la stratégie d’achèvement et relever les défis associés à cette coopération.  Aussi, s’est-il réjoui, le Rwanda a-t-il été capable de répondre à toutes les demandes formulées par les différents organes du Tribunal. 


Assumant sa responsabilité, le Rwanda a entamé des consultations avec le Tribunal sur la réception et la conduite des procès des cas qui pourraient lui être renvoyés.  Ayant dit cela, le Procureur a donné les détails des dispositions prises par son pays, en soulignant qu’un accord sur le renvoi des affaires a été signé avec le Tribunal en mars 2008.  Le Procureur et le Greffier du Tribunal, a-t-il précisé, se sont d’ailleurs rendus au Rwanda et ont tous les deux exprimé leur satisfaction face au niveau de conformité des institutions judiciaires nationales avec les normes internationalement reconnues. 


Les fugitifs ne sont pas seulement au nombre de 13, a souligné le Procureur, en indiquant qu’il était soucieux du respect des délais fixés par la stratégie d’achèvement.  Cette stratégie, a-t-il averti, ne doit pas se transformer en amnistie pour ceux qui ne figurent pas sur la liste du Tribunal.  Malgré tous les efforts qu’il a déployés, s’est-il en effet inquiété, le Rwanda est gravement préoccupé par la direction prise par le processus de renvoi, laquelle direction pourrait miner la confiance dans le système de justice internationale.  Le Rwanda, a insisté le Procureur, doit être jugé sur sa conduite et ses politiques et non sur des craintes ayant trait à une quelconque mauvaise conduite qui pourrait survenir dans le futur.  Les décisions du Tribunal ne doivent pas être perçues comme visant à compromettre un système national tout entier, a dit le Procureur, en jugeant donc regrettable que la décision prise récemment dans l’affaire Munyakazi ne soit pas conforme aux précédents rapports du Tribunal qui saluaient sans équivoque la pleine coopération du Rwanda.


Le Procureur s’est dit d’autant plus déçu que les actes des juges aient uniquement eu pour fondement des rapports d’ONG.  Cette décision ne saurait être justifiée de cette manière.  Ces juges, a-t-il estimé, ont mal interprété le fait que le Rwanda ait rejeté les conclusions de certaines juridictions étrangères, alors que c’est son droit souverain.  Et pour renforcer l’image d’un Rwanda opposé à l’acquittement, a encore regretté le Procureur, le Tribunal a choisi d’invoquer l’incident de 1999 concernant l’affaire Barayagwiza, tout en oubliant que le Rwanda n’a jamais protesté face aux cinq acquittements que le Tribunal a prononcés par la suite.  Notant que le Procureur du Tribunal compte faire appel de la décision, le Procureur du Rwanda a assuré que son pays suivra l’évolution des choses avec intérêt. 


S’agissant de l’affaire Kabgayi, a-t-il dit, le Rwanda réitère son engagement et sa disposition à mener le procès dans le strict respect des normes et des principes d’un procès équitable.  Dans ce cadre, a-t-il estimé, il revient au Conseil de créer des mécanismes d’appui aux efforts du Rwanda et de traiter, dans le même temps, de la question des fonctions résiduelles.  À ce stade, a insisté le Procureur, nous avons besoin d’un mécanisme à long terme entre les États Membres et le Gouvernement du Rwanda dans le cadre duquel des questions telles que le renvoi de toutes les affaires après 2010, la poursuite des fugitifs, l’exécution des peines et la gestion des archives, seront examinées.  Nous devons nous prémunir contre la multiplication des « faits accomplis » et ce n’est qu’avec un tel mécanisme qu’il sera possible d’assurer un processus d’achèvement efficace et sans heurt, a souligné le Procureur. 


En mars dernier, a-t-il rappelé, le Rwanda a signé un accord sur l’exécution des peines et a mis tout en œuvre pour recevoir les personnes condamnées par le Tribunal.  Il n’y a donc aucune justification juridique ou administrative pour refuser ou retarder le transfèrement de ces personnes dans les prisons rwandaises, a conclu le Procureur. 


M. PAVLE JEVREMOVIC (Serbie) a souligné que sur les 46 personnes recherchées par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, son pays en a transféré 41, et que les recherches se poursuivent pour localiser les derniers fugitifs.  La Serbie a en outre soumis 95% des documents demandés par le Tribunal et fait en sorte d’accélérer le processus pour les 5% restants, a dit M. Jevremovic.  Tous les témoins réclamés par le Tribunal ont été présentés, a poursuivi le représentant. en soulignant que, comme tout autre pays, la Serbie ne peut pas intervenir et contraindre les personnes à témoigner volontairement.  Le choix des témoins relève des prérogatives du Tribunal et leur refus de témoigner ne peut en aucun cas être imputé aux États, a-t-il insisté.  En revanche, a-t-il regretté, le Tribunal ne mentionne pas, dans son rapport, le refus catégorique de certains États et organisations de protéger les témoins ou les multiples cas de disparitions de témoins.  


La Serbie, a par ailleurs déclaré le représentant, a été horrifiée par les informations sur la traite des êtres humains, du Kosovo en Albanie, contenues dans le livre de l’ancien Procureur du Tribunal, Carla del Ponte.  Notre pays, a-t-il annoncé, a lancé des procédures judiciaires pour enquêter et poursuivre les responsables de ces crimes et demande, en conséquence, l’aide de la communauté internationale.  Toujours à propos du livre de Carla del Ponte, le représentant s’est déclaré très préoccupé par la manière troublante et absolument inacceptable dont d’anciens fonctionnaires de haut rang du Tribunal dévoilaient des informations confidentielles dans leurs déclarations publiques.  La Serbie prendra les mesures qui s’imposent et elle demande en la matière la coopération de la communauté internationale, a conclu le représentant.  


Reprenant la parole, M. Pocar, Président du TPIY, a indiqué que son équipe s’attachait à achever les travaux du Tribunal dans les délais; et il a dit qu’il prendrait bonne note des préoccupations exprimées au sujet de la stratégie d’achèvement.  Le transfert des affaires est en effet un outil important pour nous permettre d’achever nos travaux, mais cela ne peut se faire que dans le cadre d’une décision de justice qui doit tenir compte du respect des garanties judiciaires dans le cas de transferts.  Il reste peu de procès à mener, et j’ai cru comprendre que les fugitifs mentionnés devraient être jugés une fois déférés devant les tribunaux internationaux qui devront les juger, a dit M. Pocar.  Évoquant le fait qu’il s’agit de sa dernière présentation des activités du TPIY, le Président a expliqué que partager les efforts de mise en place d’une justice internationale avait été une expérience fascinante.


Prenant lui aussi la parole, M. Byron, Président du TPIR, a estimé que cette séance avait prouvé la détermination du Conseil à mettre un terme à l’impunité en établissant une justice pénale internationale.  Il a toutefois précisé que les frais concernant le renforcement des capacités du TPIR étaient prélevés sur un fonds de contributions volontaires et non pas sur le budget ordinaire.


De son côté, le Procureur du TPIY, M. Brammertz, a remercié le Conseil d’avoir insisté sur la coopération que devaient fournir les pays de la région et la communauté internationale au Tribunal.  Il a ajouté qu’il était en contact journalier avec les procureurs de la région de l’ex-Yougoslavie afin que soient transmis des éléments utiles aux dossiers.  Il a rendu hommage aux procureurs de la région pour le travail remarquable qu’ils avaient accompli, malgré un contexte politique difficile et le peu de moyens mis à leur disposition.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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