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CS/8940

CONSEIL DE SÉCURITÉ: 2006, ANNÉE D’UNE IMPLICATION PLUS SYSTÉMATIQUE DES ORGANISATIONS ET ACTEURS RÉGIONAUX COMPTE TENU DE L’INTERACTION ACCRUE DES CRISES

12 janvier 2007
Conseil de sécuritéCS/8940
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Aperçu des travaux du

Conseil de sécurité en 2006


CONSEIL DE SÉCURITÉ: 2006, ANNÉE D’UNE IMPLICATION PLUS SYSTÉMATIQUE DES ORGANISATIONS ET ACTEURS RÉGIONAUX COMPTE TENU DE L’INTERACTION ACCRUE DES CRISES


Tandis que sa représentativité est plus que jamais questionnée par l’Assemblée générale, pour qu’il reflète enfin les évolutions géopolitiques survenues depuis la fin de la guerre froide, le Conseil de sécurité aura, en 2006, été mobilisé par une série de crises d’une extrême gravité qui ont mis à l’épreuve sa capacité à maintenir la paix et la sécurité internationales.


Conscient de l’étroite interaction des situations de crise, le Conseil a envisagé cette année d’une manière plus systématique la nécessité d’impliquer organisations et acteurs régionaux dans un règlement conjoint et global de l’ensemble des problèmes qui se posent aujourd’hui dans le monde, que ce soit au Moyen-Orient, dans la corne de l’Afrique ou dans la région des Grands Lacs.  Ainsi, l’Iran et la Syrie, accusés par Israël de soutenir le Hezbollah, sont considérés aujourd’hui par beaucoup comme des partenaires potentiels dans la recherche d’une solution négociée dans le Territoire palestinien occupé ou en Iraq.


Si la « deuxième » guerre du Liban, aggravée par l’escalade simultanée du conflit israélo-palestinien et la poursuite des luttes de pouvoir sanglantes entre le Hamas et le Fatah, semble avoir conduit le processus de paix au Moyen-Orient dans une impasse, l’adoption de la résolution 1701 a démontré que le Conseil était toujours en mesure d’intervenir, en obtenant la cessation des hostilités entre Israël et le Hezbollah et en renforçant la force d’interposition des Nations Unies dans le Sud-Liban (FINUL).


Alors que l’Iraq est en proie depuis février dernier à une flambée de violences interconfessionnelles, qui met en péril la réconciliation nationale, l’Iran a été frappé, à deux reprises cette année, de sanctions par le Conseil de sécurité pour le risque de prolifération que fait encourir son programme nucléaire.  C’est également par deux fois que la République populaire démocratique de Corée (RPDC) s’est vue imposer des sanctions, respectivement pour son programme de missiles balistiques et pour l’essai nucléaire auquel elle a procédé en octobre dernier.


Au Soudan, l’accord donné le 23 décembre au Conseil par le Président Al-Bashir aux principes du déploiement d’une force hybride ONU-Union africaine, ainsi qu’à la mise en œuvre des Accords d’Addis-Abeba et d’Abuja, laisse entrevoir un espoir pour les populations civiles du Darfour, dont la situation désespérée suscite une préoccupation grandissante au sein de l’opinion internationale.  La présence annoncée sur le terrain de 20 000 hommes est en effet censée mettre fin à une guerre civile et à la crise humanitaire la plus grave au monde, qui s’est exportée au Tchad voisin, où se sont réfugiés 220 000 Soudanais du Darfour s’ajoutant aux 100 000 déplacés tchadiens.


L’équilibre régional est d’autant plus fragilisé par les évènements en Somalie, où l’intervention éthiopienne a fait battre en retraite l’Union des Tribunaux islamiques et permis le retour à Mogadishu du Gouvernement fédéral de transition.  Mais l’anarchie qui règne dans ce pays depuis une quinzaine d’années, comme les violations massives de l’embargo sur les armes que lui impose le Conseil de sécurité depuis 1992, font peser de lourdes incertitudes sur son avenir.


Sur le plan politique, le Conseil de sécurité peut se féliciter de l’« accompagnement » réussi de la Sierra Leone et du Burundi, sous l’égide de la Commission de consolidation de la paix, vers le rétablissement de l’état de droit et le relèvement économique ainsi que du succès des élections présidentielles et législatives organisées en République démocratique du Congo (RDC), les plus importantes auxquelles aient jamais participé les Nations Unies.


En revanche, le Conseil a été contraint de proroger d’une année supplémentaire le processus de transition en Côte d’Ivoire, où le dialogue entre parties prenantes est parvenu au point mort.  À l’appui de cette initiative, le mandat de l’Opération des Nations Unies dans ce pays (ONUCI) et des forces françaises qui la soutiennent a été renforcé pour permettre au Premier Ministre ivoirien, Charles Konan Banny, de mener à bien les réformes exigées.  La réussite de son entreprise conditionne là aussi la stabilité régionale, en particulier au Libéria, engagé dans la reconstruction, sous la conduite de la première femme chef d’État du continent africain, Ellen Johnson-Sirleaf.


Cette année, le Conseil a tenu 224 séances publiques et adopté 87 résolutions ainsi que 59 déclarations présidentielles.


Les mesures prises par le Conseil de sécurité en 2006 sont disponibles sur le site Internet suivant: http://www.un.org/depts/dhl/resguide/scact2006fr.htm


ASIE


Corée du Nord: Tirs de missiles, essai nucléaire, sanctions


« Adoptée à l’unanimité, la résolution 1695 (2006) est une réponse appropriée à une situation grave », ont estimé les membres du Conseil de sécurité, en condamnant les tirs multiples de missiles balistiques effectués par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) une semaine auparavant.  Par cette résolution, adoptée à l’unanimité le 15 juillet, le Conseil, réuni à la demande du Japon, demande aussi à tous les États Membres d’empêcher les transferts et l’achat de missiles et d’articles liés aux missiles, de matières, de biens et de technologies, aux programmes de missiles ou d’armes de destruction massive de la RPDC.  Ils doivent enfin empêcher le transfert de ressources financières dans le contexte des programmes de missiles ou d’armes de destruction massive de la RPDC.


Par cette résolution, le Conseil a également exigé de cette dernière la suspension de toutes les activités liées à son programme de missiles balistiques.  La RPDC est aussi engagée à reprendre les Pourparlers à Six –Chine, États-Unis, Fédération de Russie, Japon, RPDC et la République de Corée-, et à œuvrer à l’application de la Déclaration commune du 19 septembre.  La RPDC doit, en outre, renoncer à toutes ces armes et programmes nucléaires et redevenir partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et aux garanties de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).


Rejetant catégoriquement cette résolution, le représentant de la Corée du Nord l’a qualifiée d’« acte de banditisme », car elle constitue, selon lui, une atteinte à un État souverain.  La RPDC n’a pas renoncé aux pourparlers à Six, ni à la dénucléarisation de la Péninsule coréenne, a affirmé le représentant, qui a prévenu néanmoins que son pays n’aura d’autre choix que de prendre des « mesures physiques » au cas où un pays s’aventurerait à exercer des pressions pour qu’il cesse ses tirs de missiles.


L’annonce, faite le 3 octobre par le Ministère des affaires étrangères de la RPDC, selon laquelle ce pays procéderait prochainement à un essai nucléaire préoccupe à nouveau gravement le Conseil.  Une déclaration présidentielle en date du 6 octobre demande instamment au Gouvernement nord-coréen de ne pas procéder à un tel essai et de s’abstenir de toute action qui pourrait aggraver les tensions, de s’employer à régler les questions de non-prolifération et de faciliter un règlement pacifique et global par des moyens politiques et diplomatiques.  Le Conseil répète que la RPDC doit se conformer pleinement à toutes les dispositions de sa résolution 1695.


Soulignant que tout essai nucléaire représenterait une menace manifeste pour la paix et la sécurité internationales, le Conseil prévient qu’il agira conformément à sa responsabilité aux termes de la Charte de l’ONU.  C’est chose faite, le 14 octobre, lorsque le Conseil de sécurité se réunit pour frapper le régime de Pyongyang de sanctions, qui vient de procéder à l’essai nucléaire annoncé.  Votée à l’unanimité, la résolution 1718 exige également de la RPDC qu’elle retire l’annonce de son retrait du Traité sur la non-prolifération (TNP) et l’invite à reprendre les Pourparlers à Six sans condition préalable.  Agissant en vertu de l’Article 41 du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, lequel n’autorise que des moyens n’impliquant pas l’usage de la force, le Conseil invite tous les États Membres à coopérer, notamment en procédant à l’inspection du fret à destination ou en provenance de la RPDC.  Ils devront empêcher la fourniture, la vente ou le transfert, directs ou indirects, vers la RPDC de chars de combat, de véhicules blindés de combat, de système d’artillerie de gros calibre, d’avions de combat, d’hélicoptères d’attaque, de navires de guerre, de missiles et lanceurs de missiles, tels que définis aux fins du Registre des armes classiques de l’ONU.  Les États Membres devront, en outre, geler immédiatement fonds, avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire qui sont la propriété ou sous le contrôle direct ou indirect des personnes ou entités liées aux programmes en rapport avec les armes nucléaires, les missiles balistiques et autres armes de destruction massive de la RPDC.


Rejetée comme la précédente, la résolution n’est, selon l’Ambassadeur de la RPDC, Pak Gil Yon, que l’expression de la politique de « deux poids, deux mesures » pratiquée par le Conseil de sécurité.  L’essai nucléaire auquel son pays a procédé est directement imputable aux menaces nucléaires, aux sanctions et aux pressions exercées par les États-Unis, ainsi qu’une nouvelle mesure destinée à renforcer les capacités de dissuasion et de légitime défense de la RPDC.


Aux termes de cette résolution, le Conseil se déclare prêt à envisager des mesures additionnelles si les dispositions de cette résolution n’étaient pas pleinement appliquées pour garantir la sécurité et la dénucléarisation des pays de la région asiatique.


Afghanistan: un Pacte à l’appui du relèvement du pays


Le 31 janvier a été lancé le Pacte pour l’Afghanistan, qui constitue la feuille de route pour la poursuite de l'engagement de la communauté internationale en faveur du pays au cours des cinq prochaines années dans trois domaines d'activités: la sécurité, la gouvernance -dont les droits de l'homme et l'état de droit– et le développement économique et social – qui comprend aussi la lutte contre les stupéfiants.  La signature de ce Pacte fait suite à l’achèvement du Processus de Bonn, marqué par la tenue des élections parlementaires et provinciales afghanes.  Intervenant pour la dernière fois en sa qualité de Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afghanistan, Jean Arnault présente le 17 janvier aux membres du Conseil la teneur de ce Pacte, qui souligne le rôle de premier plan que doit jouer le pays dans son relèvement et établit des principes fondamentaux dont le but est de maximiser l’impact des activités de consolidation de la paix.


Le 10 février, Jean-Marie Guéhenno, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, indique devant le Conseil que la présence à la Conférence de Londres, qui marque le lancement officiel du Pacte, d’une soixantaine de représentants de haut niveau, en provenance notamment des pays voisins de l’Afghanistan, dont 23 ministres des affaires étrangères, a envoyé un signal fort et sans équivoque de la détermination de la communauté internationale à soutenir l’Afghanistan à cette étape cruciale de sa transition.  L’agenda du Pacte pour l’Afghanistan est ambitieux, précise M. Guéhenno, estimant que son cadre permettrait aux participants de s’engager durablement dans la stabilisation des institutions démocratiques naissantes en vue de satisfaire les besoins de base de l’Afghanistan, faire face à l’insécurité, mettre fin à l’industrie des stupéfiants, stimuler l’économie, faire régner la loi, fournir des services de base à la population et protéger les droits de l’homme.  Reconnaissant que le temps presse, M. Guéhenno a souligné que le sens de l’urgence devait marquer les efforts des Afghans et de la communauté internationale.  À cet égard, a-t-il poursuivi, l’annexe du Pacte, qui a trait aux délais d’exécution des différents engagements et recommandations, est importante.


Le 15 février, le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité la résolution 1659 (2006), par laquelle il a décidé de souscrire au Pacte pour l’Afghanistan et à ses annexes.  Aux termes du même texte, le Conseil a accueilli avec satisfaction la Stratégie intérimaire de développement national de l’Afghanistan présentée par le Gouvernement afghan et les engagements pris par les participants à la Conférence de Londres dans les domaines politique, financier et de la sécurité; ainsi que la Stratégie nationale actualisée de lutte contre la drogue présentée par le Gouvernement afghan à la Conférence de Londres.  Face à l’ampleur de la tâche qui lui incombe, la communauté internationale doit cependant rester engagée auprès du peuple afghan, a affirmé le 14 mars le nouveau Représentant spécial du Secrétaire général, Tom Kœnigs, venu présenter le rapport de Kofi Annan sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (A/60/712-S/2006/145).  Dans cette perspective, les membres du Conseil décident de suivre l’une des principales recommandations de ce rapport en prorogeant le 23 mars le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) pour une nouvelle période de 12 mois.  Le 12 septembre, le Conseil a également décidé d’autoriser, pour une nouvelle période de 12 mois, la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), en adoptant la résolution 1707 (2006).


Dès le début de l’année, la situation en matière de sécurité s’est en effet avérée préoccupante, marquée par une augmentation des attaques menées par des groupes d’insurgés dans les régions du sud-est et sud-ouest et par une aggravation des tensions entre factions dans les régions du nord-ouest, avait souligné le Secrétaire général adjoint aux affaires de maintien de la paix.  Les attentats-suicide se sont également multipliés, en particulier suite à la polémique des caricatures du prophète Mahomet, tandis que la présence de groupes illégaux ne fait qu’alimenter l’insécurité dans le pays, a fait observer Tom Kœnigs.  La culture, la production et le trafic de drogues constituent un autre défi important auquel l’Afghanistan est confronté, a insisté son représentant, rappelant que son pays avait présenté, lors de la Conférence de Londres, la mise à jour de la Stratégie nationale de contrôle des stupéfiants.  Il est nécessaire que les pays de la région et la communauté internationale renforcent, dans ce domaine, leur coopération avec l’Afghanistan, a-t-il dit. 


Dirigée par le Représentant permanent du Japon, M. Kenzo Oshima, une délégation a été dépêchée entre le 11 et le 16 novembre par le Conseil de sécurité en Afghanistan et au Pakistan.  Le 22, M. Oshima est venu faire une présentation liminaire des conclusions de cette mission devant les autres membres du Conseil.  Dressant un bilan en demi-teinte de la situation sur le terrain, il a averti que le maximum devait être fait à la fois par les autorités de Kaboul et par la communauté internationale pour rétablir la sécurité et combattre la corruption, si l’on veut que la population retrouve un minimum de confiance dans ses représentants et dans le processus de reconstruction.


Prenant à nouveau la parole le 7 décembre, l’Ambassadeur du Japon a insisté sur la grave menace que faisait peser la multiplication des groupes rebelles et terroristes, conjuguée à la hausse des activités liées à la production et au trafic de stupéfiants, sur l’Afghanistan et les pays de la région.  La situation semble tout particulièrement inquiétante dans le sud et le sud-est du pays, a-t-il indiqué, où l’État s’avère incapable d’étendre son autorité, laissant prospérer des zones de non-droit.  Tout semble indiquer un retour en force des Taliban.  Dans le cadre du Pacte pour l’Afghanistan, la coopération régionale revêt une importance particulière, pour sécuriser notamment la frontière commune avec le Pakistan, devenu l’itinéraire privilégié des trafiquants de drogues et des groupes rebelles et terroristes.  La communauté internationale a été unanimement invitée à redoubler d’efforts dans la fourniture d’une aide financière et matérielle au Gouvernement afghan et à coordonner ses efforts par le biais de la Mission des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) pour ce qui est de l’action humanitaire et du développement, et par celui de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), s’agissant de la normalisation de la situation.


Timor-Leste: Sauvetage d’une démocratie en péril


À l’approche de l’expiration, le 20 mai, du mandat du Bureau des Nations Unies au Timor-Leste (BUNUTIL), et face à la fragilité de ses institutions démocratiques, le Premier Ministre de cette jeune nation, Mari Alkatiri, demande dans une lettre adressée au Secrétaire général en date du 20 janvier (S/2006/39) de maintenir une présence des Nations Unies sur son territoire.  Il évoque sous la forme d’un « bureau politique spécial », qui aiderait également le pays à s’acheminer sans heurt vers la tenue en 2007 d’élections présidentielles et parlementaires justes et transparentes, les premières élections organisées depuis l'indépendance survenue en 1999.  Cette demande fait l’objet d’un débat du Conseil de sécurité le 23 janvier.  Ses membres y répondent favorablement, compte tenu du caractère récent des institutions timoraises et de la persistance d’éléments d’instabilité dans le processus de stabilisation.


Le même constat est repris le 5 mai par le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Timor-Leste, Sukehiro Hasegawa, qui plaide auprès des membres du Conseil pour la création, pour une période de 12 mois, d'un petit bureau intégré des Nations Unies qui serait doté de composantes civile, de police et militaire.  Présent à cette réunion, le Ministre timorais des affaires étrangères et de la coopération, José Ramos-Horta, prévient que la police nationale n’est pas encore capable d’agir, de manière décisive et rapide, dans les situations de crise, comme en attestent les émeutes qui ont impliqué, les 28 et 29 avril à Dili, le « Groupe de 594 soldats », et ont causé la mort de cinq personnes et d’importants dégâts matériels.  À l’exception des États-Unis, la demande de création d’un bureau est accueillie favorablement par les membres du Conseil.  En attendant, le mandat du BUNUTIL est prorogé jusqu’au 20 juin 2006 par la résolution 1677 (2006), adoptée le 12 mai à l’unanimité.


Les incidents d’avril se poursuivent pendant quelques semaines et le Timor-Leste sombre dans le chaos, après la décision prise par le Premier Ministre de l’époque, Mari Alkatiri –il démissionnera en juin-, de licencier 600 soldats, soit 40% des effectifs de l'armée, à la suite de leurs protestations contre des discriminations ethniques à leur égard.  Ces militaires sont originaires de l’ouest du pays alors que leurs chefs viennent de l’est. Les violences provoquent la mort de 37 personnes et le déplacement de 155 000 autres, soit près de 15% de la population.  Profondément préoccupé par l’évolution de la situation au Timor-Leste, le Conseil adopte le 25 mai une déclaration présidentielle, dans laquelle il condamne les actes de violence commis contre la population ainsi que la destruction de biens.  Il appuie pleinement le déploiement de forces de défense et de sécurité par le Portugal, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et la Malaisie, auxquels le Timor-Leste a demandé d’intervenir dans un cadre bilatéral.


Poursuivant leur réflexion sur la configuration d’une présence des Nations Unies au Timor-Leste, les membres du Conseil de sécurité tiennent à nouveau une réunion, le 13 juin, à l’issue de laquelle ils semblent avoir renoncé, à la lumière des évènements, à l’idée de remplacer l’actuel Bureau par un petit bureau intégré, comme l’a suggéré le Représentant spécial du Secrétaire général.  Ils se montrent en revanche favorables au retour d’une force militaire et de police de l’ONU sur le terrain.  Suite à ce débat, le 20 juin précisément, le Conseil proroge de nouveau jusqu’au 20 août le mandat du BUNUTIL, en adoptant la résolution 1690 (2006), puis de nouveau jusqu’au 25 août en adoptant la résolution 1703 (2006), le temps de déterminer le rôle d’une présence renforcée de l’ONU.


Le Conseil de sécurité se réunit à nouveau le 15 août pour débattre des modalités d’une telle mission, à laquelle il est favorable dans l’ensemble, malgré les réserves de certains membres, dont les États-Unis et l’Australie.  Son représentant explique que son pays, qui a déployé 2 000 soldats et policiers au Timor-Leste à ses propres frais, est prêt à y maintenir une grande partie de ces effectifs pour permettre à la nouvelle mission de l’ONU de se consacrer à des tâches d’appui civil et gouvernemental dans lesquelles l’Organisation jouit d’une bonne expertise et d’avantages comparatifs indéniables. 


Mais la majorité des délégations soutiennent la proposition du Secrétaire général d’inclure une composante militaire, de taille réduite mais solide, au sein de la nouvelle mission, insistant sur le respect de la souveraineté du Timor-Leste pour éviter que celle-ci ne prenne la forme d’une tutelle imposée de l’extérieur à un État souverain et Membre des Nations Unies.  Le rapport souligne aussi la nécessité, pour ceux qui ont commis des violations des droits de l’homme, de répondre de leurs actes, qu’il s’agisse d’une responsabilité pénale ou politique.  La Commission spéciale d’enquête indépendante offrira une bonne base à cette fin, en ce qui concerne les évènements récents.  Le rétablissement proposé d’une structure permettant d’enquêter sur les infractions graves de 1999, de même qu’un suivi actif du rapport de la Commission accueil, vérité et réconciliation constitueraient une reconnaissance du fait qu’il est indispensable de combattre l’impunité dans certaines circonstances pour la prévenir dans d’autres », déclare M. Kofi Annan.


Le 25 août, par un vote unanime de ses 15 membres, le Conseil de sécurité adopte la résolution 1704 (2006), par laquelle il décide de créer la Mission intégrée des Nations Unies au Timor-Leste (MINUT), pour une période initiale de six mois, qu’il compte renouveler.  Le Conseil décide, en outre, que la MINUT comprendra une composante civile appropriée, dont l’effectif ira jusqu’à 1 608 policiers et 34 officiers de liaison.


Dotée d’un mandat explicité en 14 points, la MINUT aura, entre autres, pour tâche d’appuyer le Gouvernement de Timor-Leste et les institutions pertinentes en vue de consolider la stabilité, de promouvoir une culture de gouvernance démocratique, et de faciliter le dialogue politique entre les parties prenantes timoraises dans leurs efforts visant à lancer un processus de réconciliation nationale et à favoriser la cohésion nationale.  La MINUT aidera aussi le Timor-Leste en ce qui concerne tous les aspects des élections présidentielles et parlementaires de 2007, le rétablissement et le maintien de la sécurité publique par un appui à la Police nationale timoraise (PNTL).


En créant la MINUT en remplacement du Bureau des Nations Unies au Timor-Leste (BUNUTIL), le Conseil suit donc la recommandation que le Secrétaire général avait faite, à la suite de la mission d’évaluation qu’il avait dépêchée au Timor-Leste, du 26 juin et au 9 juillet.  Avant de devenir l’hôte du Bureau en 2005, le Timor-Leste avait accueilli depuis 1999, la Mission des Nations Unies au Timor oriental (MINUTO), la Force multinationale (INTERFRET), l’Administration transitoire des Nations Unies au Timor oriental (ATNUTO) et la Mission d’appui des Nations Unies au Timor oriental (MANUTO).



Népal: Espoir après l’accord de paix


La signature, le 21 novembre 2006, d’un accord de paix global entre le Gouvernement népalais et le Parti communiste (maoïste) du Népal, et l’engagement des deux parties à transformer le cessez-le-feu actuel en paix permanente, ont été salués par le Conseil de sécurité dans une déclaration présidentielle en date du 1er décembre.  Le Conseil y a également exprimé son appui à l’intention du Secrétaire général de dépêcher une mission d’évaluation technique dans le pays afin de proposer un plan d’opération complet, y compris une mission politique de l’ONU chargée d’apporter l’assistance demandée, et de déployer un premier groupe de personnel essentiel composé de 35 observateurs et 25 agents électoraux.  Le Conseil se déclare prêt à examiner les propositions du Secrétaire général dès que l’évaluation technique aura été achevée.


Myanmar: Nouveau venu à l’ordre du jour du Conseil


Le 15 septembre 2006, le Conseil de sécurité, réuni à la demande de John Bolton, l’Ambassadeur des États-Unis, a décidé par 10 voix pour, 4 contre (Chine, Congo, Qatar et Fédération de Russie) et une abstention (République-Unie de Tanzanie), d’organiser d’ici à la fin du mois de septembre une réunion consacrée à la situation au Myanmar.  Cette réunion n’a pas eu lieu, mais par ce vote, le Conseil de sécurité a désormais inscrit à son ordre du jour la question de la « situation au Myanmar », dont il peut se saisir si elle constituait une menace à la paix et la sécurité internationales. 


Cette réunion avait été convoquée à la demande des États-Unis, aux termes de deux lettres adressées au Président du Conseil de sécurité, respectivement les 1er  et 15 septembre.  Par ces lettres, le représentant des États-Unis, John Bolton, exprimait sa préoccupation « devant la détérioration de la situation au Myanmar », marquée, selon lui, par la détention de plus de 1 100 prisonniers politiques, les flux de réfugiés en provenance de ce pays et les problèmes liés à la drogue, au VIH/sida et à d’autres maladies.


MOYEN-ORIENT


En 2006, la situation au Moyen-Orient a été dominée par deux crises majeures: le conflit au Liban, qui a opposé du 12 juillet au 14 août les forces israéliennes aux militants du Hezbollah; et l’offensive israélienne lancée à partir du 28 juin en territoire palestinien contre le Hamas.  Ces deux évènements se sont produits presque simultanément dans des circonstances d’ailleurs analogues, ce qui ne fait que souligner l’interdépendance des conflits dans cette région plus troublée que jamais.


Liban: La guerre des 33 jours


Le 12 juillet, des militants du Hezbollah dirigent des tirs de mortiers et de roquettes Katioucha contre des positions des forces de défense israéliennes situées près de la localité de Zarit, de l’autre côté de la Ligne bleue.  Peu après avoir pénétré en territoire israélien, ils attaquent une patrouille de Tsahal, capturant deux soldats, en tuant trois autres et faisant plusieurs blessés.  Tentant de libérer ces derniers, une unité israélienne échoue et perd cinq de ses soldats.  Cette opération est dénoncée comme une « agression » par Israël, qui lance alors sa plus vaste offensive au Liban depuis l’invasion de 1982.


Ce conflit éclate alors que le Liban, engagé dans une douloureuse transition, est fragilisé, depuis octobre 2004, par une vague d’assassinats et d’attentats visant des personnalités politiques et médiatiques.  Un mois après la visite au Conseil de sécurité, le 21 avril, du Premier Ministre libanais, Fouad Siniora, venu présenter l’évolution de la situation dans son pays, le Conseil a adopté la résolution 1680, qui demandait à nouveau instamment la coopération de toutes les parties concernées à la mise en œuvre intégrale de sa résolution 1559 (2004), comme il l’avait déjà fait par une déclaration présidentielle en date du 23 janvier, et comme il le fera à nouveau le 30 octobre.  L’une des dispositions clefs, restée lettre morte, de la résolution 1559 exige en effet le désarmement de toutes les milices, libanaises ou non, présentes sur le territoire libanais.


Dès le 14 juillet, le Conseil, réuni à la demande expresse du Liban, exprime sa grave préoccupation devant l’escalade de la situation au Moyen-Orient.  Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, explique qu’en représailles à l’enlèvement et à la mort de ses soldats, Israël multiplie les frappes aériennes et terrestres contre les infrastructures logistiques libanaises, notamment l’aéroport international de Beyrouth, et impose un blocus aérien et maritime total, aux conséquences économiques et humanitaires catastrophiques.


Condamnant pour la plupart l’agression perpétrée par le Hezbollah, ainsi que le soutien financier et matériel que lui apportent certains régimes, les membres du Conseil ne sont pas moins nombreux à condamner le caractère disproportionné de la riposte israélienne.  De leur côté, les représentants d’Israël et du Liban se rejettent mutuellement la responsabilité du conflit.  Assurant n’avoir aucun lien avec les attaques perpétrées par le Hezbollah, le Gouvernement libanais est accusé au contraire par Israël d’avoir profité du retrait intégral de Tsahal du sud du Liban en 2000 –à l’exception du secteur dit des « fermes de Chebaa- pour « en faire une base arrière du terrorisme », au mépris de la résolution 1559 (2004) du Conseil, qui exigeait pourtant le départ des troupes étrangères du sol libanais.


Soulignant la nécessité urgente de rechercher une solution pacifique négociée au conflit, les membres du Conseil se félicitent de la décision du Secrétaire général et de l’Union européenne de dépêcher des émissaires au Moyen-Orient pour dialoguer avec les parties et mettre fin, le plus rapidement, aux hostilités qui se poursuivent dans la région.


S’appuyant sur les suggestions de cette équipe de médiation, Kofi Annan présente le 20 juillet au Conseil de sécurité six mesures à appliquer « parallèlement et simultanément » pour mettre fin à la crise au Liban, « victime des actes de provocation du Hezbollah et de l’usage excessif de la force par Israël ».  Parmi ces mesures figurent le déploiement, pour une période de deux ans et du côté libanais de la Ligne bleue d’une nouvelle force internationale; la mise en place d’un cadre pour les donateurs afin de garantir la collecte des ressources nécessaires à l’aide, à la reconstruction et au développement du Liban; et la convocation d’une conférence internationale pour discuter d’un calendrier précis de mise en œuvre de l’Accord de Taëf et des mesures permettant au Liban d’appliquer les résolutions 1559 et 1680 du Conseil de sécurité.


Présidant le Conseil de sécurité pour le mois de juillet, l’Ambassadeur de la France, Jean-Marc de La Sablière, souligne le lendemain, à l’occasion d’une nouvelle séance plénière, que les propositions du Secrétaire général sont proches des idées de sa délégation.  Il appelle en outre le Conseil à faire face à ses responsabilités et à mettre au point, dans les meilleurs délais, une résolution offrant le cadre d’un règlement durable de la crise.  La libération des soldats israéliens, le désarmement du Hezbollah et le rétablissement de l’autorité du Liban sur son territoire sont également cités par le Conseiller spécial du Secrétaire général, comme des conditions préalables à un cessez-le-feu durable.  Pour sa part, le représentant d’Israël déclare que son Gouvernement, s’il accepte le principe de la création d’un couloir humanitaire au Liban, poursuivra ses opérations militaires au Liban et à Gaza, « tant que n’aura cessé la terreur orchestrée par le Hezbollah et le Hamas », deux organisations « parrainées par la Syrie et l’Iran ».


Le 27 juillet, le Conseil de sécurité adopte une déclaration présidentielle dans laquelle il demande au Gouvernement israélien d’enquêter sur le tragique incident survenu au Sud-Liban, qui a entraîné deux jours plus tôt la mort de quatre observateurs militaires des Nations Unies, tués par les tirs des Forces de défense israéliennes.  En outre, alors que s’intensifient les hostilités au Liban, le Conseil se déclare gravement préoccupé par les pertes humaines et les souffrances subies par les civils libanais et israéliens, la destruction des infrastructures civiles et le nombre croissant de personnes déplacées.


Le bombardement, dans la nuit du 29 au 30 juillet, du village libanais de Cana par l’aviation israélienne, se solde par une soixantaine de morts, dont 37 enfants.  L’opinion internationale est en émoi.  Le Secrétaire général convoque dès le lendemain matin le Conseil de sécurité, qu’il exhorte à mettre de côté ses divergences pour s’entendre sur la cessation immédiate des hostilités au Liban.  Le soir même, le Conseil adopte une déclaration présidentielle aux termes de laquelle il appelle à la cessation des violences, souligne l’urgence d’un cessez-le-feu durable et demande un accès immédiat à l’aide humanitaire.  Il se déclare en outre déterminé à travailler sans plus tarder à l’adoption d’une résolution pour régler durablement la crise, en s’appuyant sur les initiatives diplomatiques en cours.


Le 31 juillet, arrivé d’urgence de Beyrouth, le Ministre de la culture et Vice-Ministre des affaires étrangères du Liban, Tarek Mitri, demande au Conseil de sécurité de se prononcer en faveur d’un cessez-le-feu immédiat et d’ouvrir une enquête sur le bombardement de Cana, qui constitue, selon lui, une violation flagrante du droit international.  Il détaille également les sept points du plan proposé par son Gouvernement en vue de parvenir à une solution durable et négociée du conflit: instaurer un cessez-le-feu immédiat; procéder à un échange des prisonniers; assurer le retour dans leur foyer des personnes déplacées; imposer le retrait des forces armées israéliennes du territoire libanais; placer les fermes de Chebaa sous administration de l’ONU; demander à Israël de remettre le plan des champs de mines abandonnées au Sud-Liban et garantir le respect de l'Accord d'armistice signé par le Liban et Israël en 1949.  À l’issue de cette réunion, le Conseil adopte la résolution 1697, par laquelle il décide de proroger pour une période d’un mois le mandat de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), le temps de réfléchir à un réaménagement de son mandat et au renforcement de ses effectifs.  Le Conseil de sécurité avait déjà, par la résolution 1655, prorogé une première fois cette année, jusqu’au 31 juillet, le mandat de la FINUL, arrivé à expiration le 31 janvier.


Alors qu’un projet de résolution en vue d’obtenir la cessation des hostilités au Moyen-Orient circule parmi les membres du Conseil, celui-ci se réunit le 8 août, au niveau ministériel, à la demande de la Ligue des États arabes, qui lui demande de réviser les dispositions de ce texte.  Le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Qatar demande en effet que soit pris en compte le plan de paix en sept points du Premier Ministre libanais, entériné la veille par la Ligue des États arabes, pour permettre l’instauration d’un cessez-le-feu durable, subordonné notamment au retrait des forces israéliennes au-delà de la Ligne bleue.  Selon Cheikh Hamad bin Jassem bin Jabr Al-Thani, le renforcement des effectifs de la FINUL et l’élargissement de son mandat faciliteraient le déploiement de l’armée libanaise dans le sud du pays et le rétablissement de l’autorité du Gouvernement libanais sur l’ensemble de son territoire.  Pour sa part, le représentant d’Israël se déclare favorable à un cessez-le-feu durable de nature à prévenir un retour au statu quo ante.  Mais celui-ci dépendrait avant tout des efforts concrètement déployés pour empêcher le réapprovisionnement du Hezbollah en armes par les régimes de Téhéran et de Damas.


Le 11 août, dans la soirée, le Conseil de sécurité adopte à l’unanimité de ses 15 membres la résolution 1701, aux termes de laquelle il lance un appel en faveur d’une cessation immédiate de toutes les attaques du Hezbollah et de toutes les offensives militaires d’Israël.  La résolution prévoit, dès la cessation des hostilités, que le Gouvernement libanais et la FINUL déploient leurs forces simultanément dans tout le sud du pays et que le Gouvernement israélien retire parallèlement les siennes.  Pour ce faire, les effectifs de la FINUL -dont le mandat est prorogé jusqu’au 31 août 2007-, seront portés à un maximum de 15 000 hommes.  La Force sera chargée de contrôler la cessation des hostilités; d’accompagner et d’appuyer les forces armées libanaises à mesure de leur déploiement; et de faciliter l’accès humanitaire aux populations civiles.


Agissant à l’appui d’une demande du Gouvernement libanais, tendant à ce qu’une force internationale soit déployée pour l’aider à exercer son autorité sur l’ensemble du territoire, le Conseil autorise en outre la FINUL à prendre toutes les mesures nécessaires dans les secteurs où ses forces sont déployées pour veiller à ce qu’elles ne soient pas utilisées à des fins hostiles et pour résister aux tentatives visant à l’empêcher de s’acquitter de ses obligations.


À Israël et au Liban, le Conseil lance un appel pour qu’ils appuient un cessez-le-feu permanent et une solution à long terme fondés sur le strict respect, par les deux parties, de la Ligne bleue et l’adoption d’un dispositif de sécurité qui empêche la reprise des hostilités.  Il s’agit notamment d’établir, entre la Ligne bleue et le fleuve Litani, une zone d’exclusion de tous personnels armés, biens et armes autres que ceux du Gouvernement libanais et de la FINUL.


Parmi les autres éléments avancés par le Conseil, et sur lesquels pourrait s’appuyer un cessez-le-feu, figurent l’application intégrale des dispositions pertinentes des Accords de Taëf et des résolutions 1559 (2004) et 1680 (2006), qui exigent le désarmement de tous les groupes armés au Liban, afin que seul l’État libanais soit autorisé à détenir des armes et à exercer son autorité.  Le Conseil avance aussi comme élément l’exclusion de toute force étrangère présente au Liban sans le consentement de son Gouvernement et l’interdiction de toute vente ou fourniture d’armes et de matériels connexes.  Les États sont d’ailleurs appelés à prendre les mesures nécessaires pour empêcher la vente ou la fourniture à toute entité ou individu situé au Liban d’armes et de matériels connexes, à l’exclusion du Gouvernement libanais ou de la FINUL.


Tout en se félicitant de l’adoption de cette résolution, le Secrétaire général se déclare cependant profondément déçu que le Conseil n’ait pas pris cette décision plus tôt,convaincu d’un sentiment partagé par des centaines de millions de personnes.  Pour sa part, le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Qatar rappelle la décision de la Ligue des États arabes de saisir, dès septembre et au plus haut niveau, le Conseil du conflit arabo-israélien, compte tenu de l’échec de tous les processus de paix lancés jusqu’à présent.  Toute solution de paix, renchérit le Ministre de la culture du Liban, exige le règlement de la question des fermes de Chebaa, l’élimination de la menace constante sur la sécurité du Liban et le rétablissement de l’autorité du Gouvernement sur tout le territoire.


La cessation des hostilités au Liban est entérinée le 13 août par les deux parties.  Le blocus aérien et maritime ne sera levé en revanche que le 7 septembre.  Côté libanais, la guerre a fait plus d’un millier de victimes civiles, dont 30% d'enfants de moins de 12 ans, et près de 3 400 blessés.  Elle a provoqué le déplacement d’un quart de la population libanaise, soit environ un million de personnes, qui ont principalement fui en Syrie.  Une cinquantaine de militants du Hezbollah ont été tués.  Une majorité des infrastructures du pays ont été détruites ainsi que de nombreux logements, routes, ponts et réserves de carburant, ces dernières ayant déclenché une marée noire en Méditerranée.  Israël accuse le Hezbollah d’avoir sa part de responsabilité dans ce bilan en se servant des civils comme boucliers humains.  Du côté israélien, plus de 150 morts ont été recensés et plus de 500 000 personnes ont fui le nord du pays à cause des tirs de roquettes du Hezbollah.


À peine neuf jours plus tard, le 22 août, le Conseil de sécurité examine les modalités de l’application de la résolution 1701, qui dépend encore largement du déploiement rapide d’une FINUL renforcée.  Délégations et membres du Conseil se félicitent cependant de la cessation effective des hostilités, en dépit de quelques violations isolées, dont l’opération des forces armées israéliennes lancée le 19 août contre un bastion présumé du Hezbollah dans la vallée de la Bekaa, qui préoccupe notamment la France.


Qualifié par les États-Unis d’acte de légitime défense, cet incident rend, selon plusieurs délégations, d’autant plus urgentes l’élargissement de la FINUL et la mise à disposition de celle-ci de 3 500 hommes de plus, d’ici au 2 septembre.  Il s’agira ensuite de porter ses effectifs à hauteur d’un maximum de 15 000 hommes dans un délai de 90 jours suivant l’adoption d’une résolution à cette fin, indique le Secrétaire général dans son rapport (S/2006/670), et ce, afin d’appuyer le déploiement de l’armée libanaise dans la région, simultanément au retrait des forces israéliennes.  Au 17 décembre 2006, les effectifs de la FINUL sont les suivants:11 026 hommes, dont 9 127 militaires, 152 officiers et 1 747 force navale, assistés de 53 observateurs militaires du Groupe Liban de l'ONUST; appuyés par du personnel civil recruté sur le plan international (99) et local (308).


Dans une déclaration présidentielle en date du 12 décembre, le Conseil de sécurité exprime à nouveau son appui sans réserve au Gouvernement légitime et démocratiquement élu du Liban.  Il demande la mise en œuvre intégrale de la résolution 1701 et prie instamment toutes les parties concernées de coopérer pleinement à cette fin.  Dans ce contexte, il redit sa vive préoccupation à l’annonce d’informations faisant état de mouvements illégaux d’armes entrant au Liban.  Il se félicite des mesures initiales prises par le Gouvernement libanais, notamment le déploiement de 8 000 hommes le long de la frontière en vue d’empêcher la circulation des armes et renouvelle l’appel qu’il a lancé au Gouvernement syrien pour qu’il prenne des mesures similaires en vue de renforcer les contrôles à sa frontière.


Par ailleurs, le Conseil invite le Secrétaire général à approfondir l’évaluation technique et indépendante de la situation le long de la frontière et à lui rendre compte de ses nouvelles conclusions et recommandations.  Il se félicite des mesures concrètes prises par le Gouvernement libanais, avec l’assistance de la FINUL, pour faire en sorte que la zone située entre la Ligne bleue et le Litani soit exempte de personnels armés, d’équipements et d’armes autres que ceux du Gouvernement libanais et de la FINUL.  Le Conseil prend note avec intérêt de la nomination par le Secrétaire général d’un cartographe de haut niveau chargé d'examiner les matériaux utiles et d’élaborer une définition territoriale précise de la zone des fermes de Chebaa et note avec satisfaction l’action engagée par le Secrétaire général en vue d’étudier les conséquences sur les plans cartographique, juridique et politique de la proposition formulée dans le plan en sept points du Gouvernement libanais.


Enfin, la déclaration réaffirme qu’il importe d’obtenir de toute urgence la libération sans condition des soldats israéliens enlevés et encourage à nouveau les initiatives visant à régler d’urgence la question des prisonniers libanais détenus en Israël.


Affaire Hariri: Sur la voie d’un tribunal international


Dès le mois de janvier, le 23 précisément, le Conseil de sécurité réaffirme par une déclaration présidentielle son appui vigoureux à la souveraineté, l’intégrité territoriale, l’unité et l’indépendance politique du Liban, ainsi qu’à la liberté de la presse dans ce pays.  Condamnant les attentats terroristes, qui s’insèrent dans une stratégie délibérée de déstabilisation et d’intimidation, le Conseil redemande aux parties concernées la mise en œuvre intégrale de sa résolution 1559, dont certaines dispositions sont restées lettre morte.


Adoptée le 2 septembre 2004, cette résolution demandait instamment à toutes les forces étrangères qui s’y trouvent encore de se retirer du Liban et que toutes les milices libanaises et non libanaises soient dissoutes et désarmées.  Par cette résolution, le Conseil soutient l’extension du contrôle exercé par le Gouvernement libanais à l’ensemble du territoire du pays et se déclare favorable à ce que les prochaines élections présidentielles au Liban se déroulent selon un processus électoral libre et régulier, conformément à des règles constitutionnelles libanaises élaborées en dehors de toute interférence ou influence étrangère.


Depuis octobre 2004, le Liban est en effet secoué par une série d’assassinats et de tentatives d’assassinats politiques, qui ont notamment coûté la vie à Samir Kassir, George Haoui et, plus récemment, Pierre Gemayel.  Le 7 avril 2005, une Commission d’enquête internationale indépendante, successivement dirigée par Detlev Melhis et Serge Brammertz, a été créée par les Nations Unies à la demande de la France, pour faire toute la lumière sur l’attentat terroriste à la bombe perpétré le 14 février 2005 à Beyrouth, qui a coûté la vie à l’ancien Premier Ministre libanais Rafik Hariri et à 22 autres personnes.  Le 15 juin 2006, à la demande du Gouvernement libanais, le mandat de cette Commission a été prorogé d’un an par la résolution 1686 du Conseil de sécurité, qui souscrit en outre à l’intention de la Commission de poursuivre son assistance technique aux autorités libanaises dans le cadre de leurs enquêtes sur les 14 attentats terroristes perpétrés au Liban depuis le 1er octobre 2004.


En 2006, M. Brammertz vient présenter, à quatre reprises, au Conseil les travaux de la Commission qu’il dirige, respectivement les 16 mars, 14 juin, 29 septembre et 18 décembre.  Désireux de protéger la confidentialité des travaux de la Commission, il révèle cependant que des progrès réels ont été réalisés dans la détermination du modus operandi de l’attentat et fait état d’une coopération satisfaisante des parties, notamment du Liban et de la Syrie.  La requête du Gouvernement libanais de créer un tribunal international pour juger les responsables de l’attentat ayant provoqué la mort de Rafik Hariri et de nombreux autres est prise en compte le 29 mars par le Conseil de sécurité.  En adoptant à l’unanimité la résolution 1664, il prie le Secrétaire général de négocier un accord visant à créer une telle juridiction, qui devra se fonder sur les normes internationales de justice pénale les plus élevées.


En dépit des contraintes posées par sa délocalisation temporaire à Chypre, rendue nécessaire par le conflit au Liban, la Commission internationale indépendante poursuit son enquête, qui serait parvenue à un stade critique, déclare M. Brammertz lors de sa dernière présentation de l’année.  L’assassinat, un mois auparavant à Beyrouth, du Ministre libanais de l’industrie, Pierre Gemayel, n’a fait que continuer la « série noire » qui endeuille ce pays depuis des années.  Par la voix d’une déclaration présidentielle, le Conseil condamne le jour même –le 21 novembre- toute tentative visant à déstabiliser le Liban par des assassinats politiques et d’autres actes de terrorisme.


Israël/Palestine: Retour de Tsahal sur fond de luttes interpalestiniennes


La réunion du Conseil de sécurité en date du 22 août, au cours de laquelle a été examinée pour la première fois la mise en œuvre de la résolution 1701, a également été l’occasion pour le Conseil d’attirer l’attention sur la question palestinienne, largement occultée par les évènements au Liban, en particulier sur la situation économique et humanitaire désastreuse dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, où Israël a poursuivi parallèlement ses opérations militaires face aux militants palestiniens.  Mais ces affrontements ont pour toile de fond des mutations profondes qui se sont opérées dès le début d’année dans la région.


La victoire du Hamas aux élections législatives palestiniennes à la mi-janvier, alors que le Premier Ministre israélien Ariel Sharon est dans le coma depuis un mois, est un évènement important de nature à changer la donne politique au Moyen-Orient, signale le 31 janvier la Sous-Secrétaire générale aux affaires politiques, Angela Kane, au Conseil de sécurité.  Les choix qu’opérera le Hamas constitueront la variable la plus importante de l’avenir du processus de paix au Moyen-Orient, renchérit le 28 février le Coordonnateur spécial pour le processus de paix dans cette région, Alvaro de Soto, qui rappelle au Conseil que dans le Territoire palestinien occupé, un gouvernement démocratiquement élu dirigé par le Hamas, une organisation formellement engagée dans la destruction d’Israël et dans des actes terroristes condamnables, est en cours de formation.


L’échiquier politique se modifie encore un peu plus au Moyen-Orient avec le lancement, le 2 mars, d’un dialogue national au Liban et la victoire, le 28, de la liste du parti Kadima aux élections législatives israéliennes.  Le 30, le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, Tuliameni Kalomoh, rappelle à l’occasion d’un débat du Conseil la demande faite par le Président Abbas au Premier Ministre palestinien, Ismail Haniyeh, d’aligner son programme sur celui de la Présidence palestinienne.  Le programme préparé par le Hamas ne reconnaît pas en effet les principes contenus dans la Déclaration d’indépendance de 1988 -principes de non-violence, de la reconnaissance du droit d’Israël à exister- ni les accords conclus et obligations contractées antérieurement.


Parallèlement, la détérioration des conditions humanitaires dans les territoires palestiniens se poursuit, alors qu’Israël a mis fin au transfert des revenus douaniers et de la TVA à l’Autorité palestinienne et renforce sa politique de fermeture des frontières, souligne M. Kalomoh, qui prévient qu’il sera difficile de persuader les Palestiniens des bénéfices à tirer d’une solution de compromis si l’engagement d’Israël en faveur de deux États vivant côte à côte pacifiquement s’amenuise.


Le 17 avril, le jour même d’un attentat-suicide à la bombe à Tel-Aviv, revendiqué par le Djihad islamique et les Brigades des Martyrs Al-Aqsa (liées au Fatah), un débat voit le ton monter entre les différentes parties au conflit.  La plupart des membres du Conseil et les délégations appellent celles-ci à s’abstenir de toute violence.  C’est aussi l’occasion pour l’Union européenne de noter avec préoccupation que le nouveau Gouvernement palestinien ne s'est toujours pas engagé en faveur du plan de travail pour la paix du Président Abbas et des trois principes édictés par le Quatuor, à savoir la non-violence, la reconnaissance du droit d'Israël à exister et l'acceptation des accords existants.


Intervenant de nouveau le 24 avril au Conseil de sécurité, M. de Soto identifie trois défis majeurs.  Tout d’abord, la nécessité d’assurer un climat de sécurité en appelant, d’une part, les autorités palestiniennes à tout mettre en œuvre pour lutter contre le terrorisme et empêcher les tirs de roquettes et, d’autre part, Israël à s’abstenir de lancer des opérations qui mettent en danger les civils palestiniens.  Il précise ensuite qu’il faut répondre aux besoins essentiels de la population civile palestinienne et, enfin, prendre en compte une réalité qui tienne compte des deux parties de la trajectoire tracée par la Feuille de route du Quatuor.


Les violences entre factions palestiniennes s’intensifient, parallèlement à l’effondrement de l’économie, s’inquiète le 21 juin le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, Ibrahim Gambari, venu présenter au Conseil de sécurité le rapport mensuel du Secrétaire général sur la situation au Moyen-Orient.  Alors que la mise en place, décidée le 17 juin par le Quatuor, d’un mécanisme de financement temporaire destiné à faciliter l’assistance directe au peuple palestinien suscite quelques espoirs, un incident radicalise les parties au conflit.


Le 25 juin, huit membres des Comités de résistance populaire de la branche armée du Hamas et de l’Armée islamique s’infiltrent dans une base militaire israélienne, y tuent deux soldats, blessent un autre et enlèvent le caporal Gilad Shalit, également de nationalité française.  Pour obtenir sa libération, Israël lance une vaste offensive militaire dans la bande de Gaza, qui représente la première incursion terrestre de l'armée israélienne sur ce territoire de l'Autorité palestinienne depuis le plan de désengagement unilatéral terminé en septembre 2005, explique cinq jours plus tard au Conseil de sécurité la Sous-Secrétaire générale aux affaires politiques, Angela Kane.  Visant le Gouvernement du Hamas, mais faisant de nombreux morts parmi les civils, l’« Opération Pluie d’été » a également pour objectif de mettre fin aux tirs de roquettes contre les localités israéliennes.  Condamnant sans équivoque l’enlèvement du soldat israélien, certains de ses membres allant jusqu’à le qualifier « d’acte inutile de provocation », le Conseil appelle à sa libération immédiate et sans condition.


Mais pour l’Observateur de la Palestine, suivi par une majorité de délégations arabes, l’ampleur des derniers assauts militaires montrait clairement qu’il s’agissait d’actes prémédités et planifiés.  Il accuse ainsi Israël de se servir sans scrupule de ce prétexte pour justifier des attaques dont le but inavoué est de torpiller la réconciliation entre le Fatah et le Hamas et de provoquer l’effondrement de l’Autorité palestinienne, pour pouvoir ainsi arguer de « l’absence de partenaires de paix » et poursuivre les mesures unilatérales et illégales.


Ainsi, l’arrestation, le 29 juin, de 64 personnalités politiques palestiniennes, dont huit Ministres de l’Autorité palestinienne, de 24 membres du Conseil législatif et de plusieurs maires, « dirigeants démocratiquement élus », est qualifiée d’inacceptable par presque tous les participants au débat.  En outre, selon l’Observateur de la Palestine, les dernières attaques ont été judicieusement lancées un jour après que les factions et les partis palestiniens ont adhéré au plan de paix approuvé par les personnalités politiques palestiniennes détenues dans les prisons israéliennes.  Cet accord interpalestinien, en ouvrant la voie à la reprise des négociations et du processus de paix, était perçu par beaucoup comme une reconnaissance implicite de l’État d’Israël, ont assuré des délégations.


Le 13 juillet 2006, le veto des États-Unis conduit au rejet d’un projet de résolution du Conseil de sécurité présenté par le Qatar, qui proposait des mesures à l’intention de l’Autorité palestinienne et d’Israël sur la situation à Gaza, où se poursuivent les hostilités.  Ce texte demandait notamment la libération du soldat israélien enlevé, comme de toutes les personnalités politiques palestiniennes et civils détenus illégalement par Israël, qui était également engagé à mettre fin à ses opérations militaires et à son usage disproportionné de la force dans les territoires occupés.  L’Autorité palestinienne, quant à elle, était engagée à mener immédiatement une action soutenue pour mettre fin à la violence, y compris aux tirs de roquettes visant le territoire israélien.  Jugé déséquilibré par plusieurs membres du Conseil, dont quatre se sont également abstenus de voter, ce projet de résolution ne reflèterait pas la complexité de la situation sur le terrain dans laquelle Israël réagit aux attaques terroristes et ne fait pas non plus mention des appels lancés au Hamas pour qu’il adhère aux trois principes de la Feuille de route.


À la demande de la Ligue des États arabes, le Conseil de sécurité se réunit le 21 septembre au niveau ministériel, dans l’espoir de mettre fin aux hostilités entre militants palestiniens et forces de défense israéliennes et de relancer le processus de paix, désormais au point mort.  Cette séance a lieu le lendemain d’une déclaration du Quatuor pour le Moyen-Orient –Nations Unies, Union européenne, Fédération de Russie et États-Unis– qui réitère l’urgente nécessité de progresser vers une paix juste, globale et durable dans la région.  À cette occasion, le Secrétaire général prévient que l’incapacité à parvenir à une solution au conflit israélo-palestinien, dont la « charge symbolique et émotionnelle » est inégalée, porterait atteinte à la légitimité et à l’efficacité du Conseil de sécurité, même si celui-ci, en s’efforçant de mettre fin aux hostilités entre Israël et le Hezbollah par le biais de la résolution 1701 (2006), a montré qu’il pouvait jouer un rôle crucial dans le rétablissement de la paix régionale.


Éclipsée par le conflit au Liban, la situation en Palestine, dont 70% des habitants vivent en dessous du seuil de pauvreté, est pourtant extrêmement préoccupante.  La paupérisation grandissante de sa population a pour corollaire la radicalisation de sa jeunesse, qui nourrit ressentiment et frustration à l’encontre d’Israël.  Pour un certain nombre de délégations cependant, le rétablissement de la paix dans les territoires occupés dépendra avant tout de la formation d’un gouvernement palestinien d’unité nationale favorable à la reprise du dialogue avec Israël, sous l’égide du Président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.


Le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, Alvaro de Soto, rappelle un mois plus tard, le 19 octobre, que la formation d’un tel gouvernement constitue en effet la condition sine qua non de toute reprise du processus de paix.  Isolée par la communauté internationale, paralysée par les divergences de vues entre son Président et son Premier Ministre élu du Hamas, privée par Israël des recettes douanières et fiscales qui lui reviennent, l’Autorité palestinienne s’avère incapable de subvenir aux besoins de plus en plus urgents de sa population.  Plusieurs délégations en revanche soutiennent l’Observateur de la Palestine, lorsque celui-ci estime qu’avant tout, Israël doit desserrer son étau autour des territoires palestiniens occupés et mettre fin à la construction du mur de séparation et à l’expansion de ses colonies de peuplement.


Israël intensifie pourtant ses opérations à partir du 1er novembre dernier, qui marque le début d’une offensive finale visant à mettre fin aux tirs de roquettes palestiniens contre des localités israéliennes.  Le 7, Israël annonce officiellement le retrait de ses troupes des territoires occupés.  Moins de 24 heures plus tard, survient le massacre de Beit Hanoun: 20 Palestiniens sont tués pendant leur sommeil par des obus israéliens, en blessant une quarantaine d’autres.  La réunion du Conseil organisée le lendemain est l’occasion d’évoquer les circonstances dans lesquelles s’est produit cet incident, qualifié de « bavure tragique » par Israël, mais de « terrorisme d’État » par l’Observateur de la Palestine.  C’est aussi pour les délégations l’occasion de demander au Conseil de sécurité de se prononcer rapidement sur un projet de résolution présenté par la délégation du Qatar, qui condamne l’attaque de Beit Hanoun et demande notamment à Israël de mettre fin immédiatement à ses opérations militaires dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.


Mis aux voix le 11 novembre, ce projet de résolution est rejeté, en raison du veto opposé par les États-Unis.  Selon le représentant des États-Unis, John Bolton, ce texte, motivé politiquement, ne présentait pas de façon équitable les événements qui se sont déroulés récemment à Gaza et ne contribuait pas à rétablir la paix.  Selon lui, l’envoi d’une mission d’établissement des faits pour faire la lumière sur l’attaque qui s’est produite à Beit Hanoun, également demandé par la résolution, n’est pas selon lui nécessaire.


L’Assemblée générale en décide pourtant autrement.  Par une écrasante majorité, elle adopte le 17 novembre une résolution demandant l’envoi d’une telle mission.  Cette « divergence de vues » est largement évoquée lors d’une réunion du Conseil de sécurité le 21 novembre, au cours de laquelle la pertinence du rôle joué par cet organe en matière de paix et de sécurité est remise en question par de nombreuses délégations.  Israël est également soumis à un feu roulant de critiques par les nombreux pays arabes participant à ce débat, qui l’exhortent à la retenue et à exercer son droit à la légitime défense dans le respect du droit international.


L’Autorité palestinienne est une fois de plus invitée à former un nouveau gouvernement, dont la plateforme politique refléterait les principes du processus de paix tels que définis par le Quatuor.  Une fois devenu un partenaire légitime de la communauté internationale, un tel gouvernement devra recevoir le soutien nécessaire à la réalisation des réformes attendues de l’Autorité palestinienne, y compris dans le domaine sécuritaire, précise la France.  Ce pays appelle également, aux côtés de l’Espagne et de l’Italie, à l’organisation prochaine d’une conférence internationale sur le Moyen-Orient.


Le 12 décembre, à la veille de quitter ses fonctions de Secrétaire général, Kofi Annan fait devant le Conseil un ultime bilan de la situation au Moyen-Orient.  Il déplore l’incapacité des parties à comprendre ou à essayer de comprendre le point de vue de l’autre: Israël ne peut assurer sa sécurité sans une reconnaissance du grief fondamental des Palestiniens et ces derniers doivent savoir qu’aucune résistance à l’occupation ne saurait justifier le terrorisme.  Au moment où l’Iran organise une conférence internationale niant la réalité de l’Holocauste, il tient également à rappeler que « les Juifs ont de très bonnes raisons de prendre au sérieux toute menace contre l’existence d’Israël ».  Le plus grand paradoxe dans cette histoire tragique, a-t-il poursuivi, est qu’il n’y a pas d’interrogation sérieuse sur la configuration générale d’un accord définitif, a encore dénoncé le Secrétaire général.


Trois éléments pourraient pourtant, selon lui, contribuer à la stabilité au Moyen-Orient.  Tout d’abord une action concertée visant à répondre aux aspirations légitimes des Israéliens, des Palestiniens, des Syriens et des Libanais, qui souhaitent voir exister à l’abri du danger deux États indépendants, Israël et la Palestine.  Ensuite, la fin de l’occupation de terres arabes, tant dans le territoire palestinien que sur les hauteurs du Golan.  Enfin, la conclusion d’une paix globale, juste et durable, telle qu’envisagée par le Conseil de sécurité dans nombre de ses résolutions, notamment sa résolution 1701 (2006).  Compte tenu du lien étroit qui existe entre les différents foyers de tension, les membres du Conseil ont pour la plupart souligné la nécessité d’associer la Syrie et le Liban, acteurs décisifs de la région, à la recherche d’une solution globale.  Dans une déclaration présidentielle publiée en fin de séance, le Conseil se félicite toutefois de l’accord passé le 26 novembre 2006 entre le Premier Ministre israélien, Ehud Olmert, et le Président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui tend à instaurer un cessez-le-feu mutuel à Gaza. 


Par ailleurs, le Conseil de sécurité a prorogé cette année, à deux reprises, de six mois le mandat de la Force des Nations Unies chargée d’observer le dégagement (FNUOD).  Une première fois jusqu’au 31 décembre 2006 par la résolution 1685, adoptée le 13 juin, une seconde jusqu’au 30 juin 2007, par la résolution 1729, adoptée le 15 décembre, à l’unanimité comme la précédente.


Iraq: Explosion des violences sectaires


Le 14 février, le Conseil de sécurité adopte une résolution présidentielle, aux termes de laquelle il se félicite de la proclamation, par la Commission électorale indépendante de l’Iraq, des résultats officiels des élections au Conseil des représentants.  Il trouve particulièrement encourageant que des partis politiques représentant toutes les communautés iraquiennes se soient rendus aux urnes, comme en témoigne la forte participation dans tout le pays.  Le Conseil rend en outre hommage au peuple iraquien, qu’il félicite pour son attachement à un processus politique pacifique et démocratique et pour avoir voté au mépris des difficultés et de la menace de violences.  Le Conseil engage en outre tous les Iraquiens à participer au processus politique pacifique et lance un appel à ceux qui continuent d’avoir recours à la violence pour qu’ils déposent leurs armes.  Ses membres sont unanimes à condamner les actes de terrorisme commis en Iraq, actes qu’il ne faut pas laisser compromettre la progression du pays sur les plans politique et économique.


Mais le 22 février, un attentat détruit une partie d'un mausolée chiite dans le centre de Samarra, une ville sunnite située à 125 kms au nord de Bagdad.  L'attaque d'un de leurs lieux saints les plus sacrés provoque la colère des Chiites, qui descendent dans les rues pour dénoncer cet acte criminel.  Trois mosquées sunnites et un siège du Parti islamique sont attaqués dans la capitale peu après l'attentat.  C’est le début d’une intensification des violences interconfessionnelles dans tout le pays.  Un mois plus tard, le 15 mars, à la veille de la tenue de la première session du nouveau Parlement iraquien, le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Iraq, Ashraf Qazi, met en garde le Conseil contre la recrudescence de cette violence sectaire, qui menace à tout moment le processus de transition politique iraquien.  M. Ashraf Qazi précise que, même si le pays a atteint en 2005 les objectifs politiques définis par la résolution 1546 du Conseil de sécurité, ces comportements sectaires sont devenus une caractéristique de la vie politique iraquienne et minent sérieusement la cohésion sociale du pays.


L’entrée en fonctions du Gouvernement iraquien, le 20 mai 2006, est saluée par le Conseil de sécurité dans une déclaration présidentielle en date du 24, qui l’encourage aussi à œuvrer à la réconciliation nationale et à créer un climat hostile à tout sectarisme.  Le Conseil condamne catégoriquement les actes de terrorisme commis en Iraq, y compris les attentats inqualifiables perpétrés récemment contre des édifices publics et religieux dans le dessein cynique de susciter des tensions entre communautés.  Mais, « contrairement à ce qui est colporté par les médias et malgré les tactiques terroristes, l’Iraq n’est pas en proie à la guerre civile », assure, le 15 juin devant le Conseil, le Ministre iraquien des affaires étrangères, qui insiste à cette occasion sur les « progrès historiques » accomplis par son pays vers une démocratie plurielle, fédérale et unie, en invoquant la formation du premier Gouvernement d’unité nationale.  Hoshyar Zebari, a toutefois plaidé pour le maintien de la Force de la Coalition multinationale jusqu’à ce que les forces iraquiennes « qui assument de plus en plus de responsabilités » soient complètement opérationnelles.


L’enlèvement, puis l’exécution de sang froid, par un groupe terroriste, de membres de la mission diplomatique russe en Iraq sont vigoureusement condamnés par le Conseil de sécurité dans une déclaration présidentielle en date du 29 juin.  Le texte souligne également l’importance de poursuivre les efforts que déploient le Gouvernement iraquien et la force multinationale pour lutter contre le terrorisme et améliorer la sécurité en Iraq, conformément aux résolutions 1546 (2004) et 1637 (2005).


Saisis du dernier rapport présenté par le Secrétaire général en application de la résolution 1546 (2004) (S/2006/706), les membres du Conseil se réunissent le 14 septembre pour en examiner les conclusions.  Ils se déclarent extrêmement préoccupés par l’extrême violence qui sévit dans le pays, devenu l’une des zones de conflit les plus meurtrières au monde.  Dans ce contexte, l’apaisement des tensions communautaires est identifié par les membres du Conseil et les délégations comme une condition préalable au rétablissement de la sécurité.  Avec l’appui des forces de la Coalition multinationale, ainsi que de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI), dont le mandat a été prorogé d’un an le 10 août dernier, le défi le plus important que doivent maintenant relever les autorités iraquiennes est de répondre aux aspirations et aux besoins de l’ensemble de leurs citoyens, indique M. Qazi, en facilitant la réconciliation nationale à l’heure où le pays est déchiré par le sectarisme et les violences interconfessionnelles. 


Provoquées à dessein selon l’Ambassadeur américain, John Bolton, par les insurgés et les extrémistes, ces violences se sont accrues au cours du dernier trimestre, se traduisant par la multiplication des meurtres, des enlèvements, des attaques contre les civils, ainsi que par l’augmentation du nombre de personnes déplacées, qui dépasserait les 200 000.


Le 28 novembre, le Conseil de sécurité, constatant que la situation en Iraq continue de menacer la paix et la sécurité internationales, renouvelle l’autorisation donnée à la Force multinationale dans sa résolution 1546 (2004) et de proroger le mandat de celle-ci jusqu’au 31 décembre 2007, à la demande du Gouvernement iraquien.  Saluant la formation d’un gouvernement d’unité nationale en Iraq, qui dispose d’un programme politique, économique et sécuritaire détaillé et d’un plan solide de réconciliation nationale, le Conseil attend avec impatience, précise la résolution, le jour où les forces iraquiennes seront pleinement responsables du maintien de la sécurité et de la stabilité dans leur pays, permettant ainsi l’achèvement du mandat de la Force multinationale et la fin de sa présence en Iraq.  Prenant la parole à l’issue du vote, le représentant de la France a, quant à lui, estimé que la résolution offrait un horizon clair au retrait des forces étrangères, confirmant ainsi que la souveraineté nationale iraquienne est bien l’objectif vers lequel tend la communauté internationale.


Le 11 décembre, les membres du Conseil de sécurité entendent à nouveau un exposé du Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Iraq, Ashraf Qazi, qui exhorte les pays de la région à s’impliquer dans le règlement d’une situation proche « du chaos et de la guerre civile ».  Présentant le dixième rapport en date du Secrétaire général sur la MANUI (S/2006/945), il souligne aussi la nécessité d’impliquer « toutes les principales forces politiques à l’intérieur de l’Iraq », du moins celles qui sont « prêtes à renoncer à la violence comme outil politique et à venir à la table des négociations ».


Une démarche d’exclusion, sur le plan interne ou le plan externe ne peut conduire à un progrès vers la paix et la stabilité, a prévenu Ashraf Qazi.  Si le rapprochement opéré par l’Iraq avec l’Iran et la Syrie a été mentionné par plusieurs délégations, le Représentant spécial a attiré l’attention du Conseil sur la proposition de Kofi Annan de créer un groupe de contact régional, assisté des Nations Unies, pour servir de « catalyseur » à un forum où les principales questions pourront être débattues et progressivement résolues.


Parmi ces questions, M. Qazi a cité la formation d’une vision politique du nouvel Iraq, le partage équitable des revenus pétroliers, une répartition réaliste des pouvoirs, la création de forces de sécurité fiables, le démantèlement des milices ou encore la mise en place d’un système de protection des droits de l’homme et d’un système judiciaire digne de ce nom. 


Reconnaissant l’urgence de la situation, les membres du Conseil proposent même, pour certains d’entre eux, comme celui de la Grèce, un changement d’orientation stratégique et une étude détaillée du contexte historique des violences sectaires observées aujourd’hui.  L’organisation, le 16 décembre, d’une conférence de réconciliation nationale et la mise sur pied d’un « Pacte international pour l’Iraq » sont cependant saluées avec un optimisme prudent.  En effet, sans le rétablissement préalable de conditions de sécurité acceptables, les réformes politiques, économiques, sécuritaires et sociales requises resteront lettre morte.  Il est donc indispensable que les Nations Unies et la Force multinationale continuent de jouer leur rôle, plaide le représentant des États-Unis, en jugeant essentiel que la MANUI maintienne une présence, pour poursuivre son travail, tant pour l’examen du projet de réforme constitutionnelle que pour l’organisation des élections.


Quant à la Force multinationale, le représentant de l’Iraq rappelle que son Premier Ministre insiste sur l’importance de transférer la responsabilité de la sécurité aux services iraquiens, en particulier en ce qui concerne le recrutement, la formation, l’équipement et l’armement des forces nationales.


Iran: Nucléarisation et sanctions


Le 3 janvier 2006, les autorités iraniennes annoncent leur intention de reprendre leurs activités de recherche nucléaire pacifique à compter du 9 janvier. Ces recherches, qui viseraient à permettre l’enrichissement d’uranium, ont été suspendues pendant deux ans.  Le 4 février, le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) décide de transmettre le dossier iranien au Conseil de sécurité de l'ONU, compte tenu de la suspicion entourant ses activités nucléaires.  Le 11, des milliers d'Iraniens manifestent, à Téhéran, leur soutien au Président Mahmoud Ahmadinejad, qui menace implicitement de se retirer du Traité de non-prolifération nucléaire si les Occidentaux essayaient de « priver » l'Iran de son droit à développer un programme nucléaire civil.  Le lundi 13 mars, l'Iran annonce son intention de construire, après celle de Bouchehr, dans le sud du pays, une seconde centrale nucléaire, qui devrait entrer en fonction fin 2007.


Parallèlement, les consultations du Conseil de sécurité se succèdent pour parvenir à rapprocher les points de vue de ses membres sur la manière de répondre à la crise du nucléaire iranien.  Le 29 mars, ils adoptent une déclaration présidentielle, qui exhorte l’Iran à rétablir la suspension complète et durable de toutes les activités de son programme nucléaire liées à l’enrichissement et au retraitement, y compris des activités de recherche-développement, qui doit être vérifiée par l’AIEA.


Réaffirmant son attachement au TNP, le Conseil rappelle aux termes de cette déclaration le droit des États parties, conformément aux articles I et II de ce Traité, de développer la recherche, la production et l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, sans discrimination.  Mais il note également avec une vive inquiétude le grand nombre de rapports et de résolutions de l’AIEA relatifs au programme nucléaire iranien, qui lui ont été transmis par son Directeur général, Mohamed ElBaradei.  Or, dans son rapport en date du 27 février 2006 (GOV/2006/15), le Directeur général dresse une liste de questions et de problèmes en suspens, dont certains pourraient avoir une dimension nucléaire militaire, et souligne que l’AIEA n’est pas en mesure de conclure qu’il n’y a pas de matières ou d’activités nucléaires non déclarées en Iran.  En outre, l’Iran a décidé de reprendre les activités liées à l’enrichissement, y compris des activités de recherche-développement, et de suspendre sa coopération avec l’AIEA au titre du Protocole additionnel.


Le Conseil de sécurité exprime la conviction que la suspension demandée, ainsi que le respect total par l’Iran des conditions requises par le Conseil des gouverneurs de l’AIEA, sous vérification, contribueraient à une solution diplomatique négociée garantissant que le programme nucléaire iranien sert des fins exclusivement pacifiques.


Devant la décision de l’Iran de reprendre ses activités liées à l’enrichissement, y compris la recherche-développement, et son refus de coopérer avec l’AIEA, le Conseil exige le 31 juillet que ce pays suspende toutes ses activités liées à l’enrichissement et au retraitement, y compris la recherche-développement, cette fois-ci par l’adoption de la résolution 1696.  Adoptée en vertu de l’Article 40 du Chapitre VII de la Charte de l’ONU, par 14 voix pour et une contre (Qatar), cette résolution demande également à tous les États de faire preuve de vigilance, afin d’empêcher le transfert de tous articles, matières, marchandises et technologies que l’Iran pourrait utiliser pour ses activités liées à l’enrichissement et au retraitement et pour ses programmes de missiles.  Le Conseil se dit en outre convaincu que cette suspension favorisera une solution diplomatique garantissant la nature pacifique du programme nucléaire iranien.  À cet égard, il fait siennes les propositions de l’Allemagne, de la Chine, des États-Unis, de la Fédération de Russie, de la France et du Royaume-Uni –Groupe des Six- tendant à la mise en place d’un mécanisme global à long terme qui permettrait de nouer des relations et des liens de coopération avec l’Iran et d’asseoir la confiance internationale dans la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire de l’État.


La plupart des membres du Conseil qui prennent la parole à l’issue de l’adoption soulignent que la résolution ne nie en aucun cas à l’Iran le droit de développer l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  Il s’agit simplement, selon eux, de placer son programme nucléaire sous le régime de vérification de l’AIEA.  Plusieurs délégations se félicitent également que la résolution écarte l’option du recours à la force militaire.


Mais l’Iran ne renonce pas à ses ambitions nucléaires.  Face aux risques de prolifération que fait encourir son programme, le Conseil de sécurité décide donc, le 23 décembre, d’élargir le régime des sanctions qu’il entend imposer à ce pays.  Aux termes de la résolution 1737, l’Iran est frappé d’un embargo sur les articles nucléaires, les articles « à double usage » ainsi que du gel des avoirs financiers de certaines personnalités iraniennes, qui tombent aussi sous le coup d’une interdiction de se déplacer à l’étranger.


Adoptée à l’unanimité des 15 membres du Conseil, cette résolution exhorte à nouveau l’Iran à suspendre sans plus tarder ses activités liées à l’enrichissement et au retraitement de l’uranium, y compris la recherche-développement nucléaire, sous vérification de l’AIEA, ainsi que tous ses projets liés à l’eau lourde, y compris la construction d’un réacteur modéré à l’eau lourde, également sous vérification de l’AIEA.


De nouveau, le texte exprime la conviction du Conseil que la suspension de ses activités et le respect intégral par l’Iran, dûment vérifié, des exigences dictées par le Conseil des Gouverneurs de l’AIEA favoriseraient une solution diplomatique négociée garantissant que le programme nucléaire de ce pays sert des fins exclusivement pacifiques.  L’Iran, affirme la résolution, doit donc prendre sans plus tarder les mesures prescrites par le Conseil des Gouverneurs dans sa résolution GOV/2006/14, qui sont essentielles pour instaurer la confiance.  Encouragé à ratifier rapidement le Protocole additionnel, son Gouvernement devra accorder à l’AIEA l’accès et la coopération qui lui sont nécessaires pour pouvoir vérifier la suspension envisagée et régler les questions en suspens.


Au vu du rapport demandé au Directeur général de l’AIEA, dans les 60 jours, le Conseil affirme qu’il mettra fin à ces mesures dès qu’il aura déterminé que l’Iran respecte pleinement les obligations que lui imposent ses résolutions pertinentes et se conforme aux exigences du Conseil des Gouverneurs de l’AIEA.  Si, au contraire, il ressortait du rapport demandé que l’Iran n’a pas appliqué les dispositions de la présente résolution, le Conseil de sécurité adoptera alors, en vertu de l’Article 41 du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, toutes autres mesures requises.


En attendant, les États sont tenus de prendre les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture à l’Iran de toute assistance ou formation technique, de toute aide financière, de tous investissements, services de courtage ou autres, ainsi que le transfert de ressources ou de services financiers, liés à la fourniture, à la vente, au transfert, à la fabrication ou à l’utilisation des articles, matières, équipements, biens et technologies prohibés par la présente résolution.


Le Conseil de sécurité engage en outre tous les États à faire preuve de vigilance concernant l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire de personnes qui participent, sont directement associées ou apportent un appui aux activités nucléaires de l’Iran.  La même vigilance, souligne la résolution, doit s’appliquer aux ressortissants iraniens, pour les empêcher de recevoir un enseignement ou une formation dans des disciplines qui favoriseraient les activités nucléaires de l’Iran.


Par ailleurs, les États devront notifier l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire des personnes désignées dans l’annexe de la présente résolution.  La résolution leur fait également obligation de geler les fonds, avoirs financiers et ressources économiques des personnes ou entités visées dans cette annexe.


Après avoir entendu les déclarations des membres du Conseil de sécurité, le représentant de l’Iran réfute les accusations selon lesquelles l’Iran aurait refusé de se soumettre aux inspections de l’AIEA et déclare qu’il se trouve face à ce Conseil parce que son Gouvernement a refusé une exigence « illégale ».  Il indique que son Gouvernement est prêt à répondre à toutes les préoccupations des auteurs de la résolution même s’il affirme qu’elles sont parfaitement infondées et ne servent que leurs intérêts propres.


AFRIQUE


Embrasement dans la corne de l’Afrique


Avec la détérioration de la situation dans la région soudanaise du Darfour, la propagation de ce conflit dans l’État voisin du Tchad, l’arrivée de l’Union des Tribunaux islamiques en Somalie et l’intervention de l’Éthiopie pour les déloger, l’impasse dans la démarcation de la frontière entre l’Éthiopie et l’Érythrée et les discours belliqueux des deux pays, l’année 2006 restera marquée dans les annales comme celle d’un embrasement dans la corne de l’Afrique. 


Soudan: Un pied au Darfour


Le 27 décembre, après plusieurs médiations et de longues négociations, le Président du Conseil de sécurité, Nassir Abdulaziz Al-Nasser du Qatar, peut enfin se féliciter de la volonté du Président soudanais de permettre la mise en œuvre immédiate du plan d’appui en trois phases de l’ONU en faveur de l’Union africaine (UA).  Le plan doit aboutir au déploiement d’une force hybride ONU-UA dans la région du Darfour.  Oumar al-Bashir ne s’arrête pas là.  Dans la lettre qu’il adresse au Conseil le 23 décembre, il prend soin de réaffirmer sa volonté de mettre en œuvre les Accords d’Addis-Abeba et d’Abuja, en particulier de faire cesser les hostilités et de relancer le processus politique. 


Pour « tester » la volonté du Gouvernement soudanais, selon les mots du Secrétaire général, Kofi Annan, l’ONU déploie dès le 28 décembre, un premier groupe de 25 membres du personnel militaire et de police.  En effet, dans son rapport du 8 novembre, Kofi Annan détaille l’accord entre l’ONU et l’UA, dont 7 500 hommes sont présents au Darfour au sein de la MUAS, créée le 8 juillet 2004 pour surveiller l’Accord de cessez-le-feu de N’djamena que le Gouvernement soudanais, le Mouvement de libération du Soudan/Armée de libération du Soudan (A/MLS) et le Mouvement pour la justice et l’égalité (MJE) ont signé en septembre 2003. 


Dans son accord avec l’UA, l’ONU s’engage à apporter à la MUAS, un appui logistique, matériel et militaire, des services consultatifs à la police civile et d’autres appuis en personnel dans les domaines de la lutte antimines, de l’information et de l’assistance pour la mise en œuvre de l’Accord de paix sur le Darfour.  À l’issue des trois phases, la mission ONU/UA devrait disposer de 17 000 militaires et de 3 000 policiers sur le terrain.  L’Accord de paix sur le Darfour, dit Accord d’Abuja, est censé mettre fin à une guerre civile et à une crise humanitaire qui, depuis février 2003, ont fait entre 180 000 et 300 000 morts et près de 2,4 millions de personnes déplacées et de réfugiés.  Il est signé le 5 mai, par le Gouvernement soudanais et le A/MLS, après deux ans de négociations menées sous la houlette de l’UA.  L’Accord porte sur le partage du pouvoir et des richesses, le statut de la région du Darfour, la démobilisation des combattants et les arrangements sécuritaires.  Il propose un vote d’ici à 2010 sur la création d’une seule entité géographique à la place des actuelles trois provinces qui composent la région. 


L’Accord s’est fait attendre.  « Notre stratégie de paix a échoué au Darfour », dira le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan et Chef de la Mission des Nations Unies (MINUS).  Ce 13 janvier 2006 devant le Conseil de sécurité, Jan Pronk intervient un jour après que l’UA a publié un communiqué dans lequel il appuie l’idée, faute de moyens, que sa Mission passe le relais à une opération de l’ONU.  Le Représentant spécial dénonce une situation chaotique caractérisée par la violence, les assassinats, les viols et des violations des droits de l’homme.  En ce début d’année, il prône le déploiement d’une force plus importante capable de désarmer les milices janjaouites, alliées du Gouvernement soudanais.  Il prône aussi l’imposition d’un embargo sur les armes.  Il est appuyé par l’Envoyé spécial de l’UA et Médiateur en chef des pourparlers de paix inter-soudanais.  Salim Ahmed Salim attire l’attention du Conseil sur les risques de propagation du conflit dans la région, compte tenu des tensions qui existent déjà entre le Soudan et le Tchad.  Depuis 2005, N’djamena montre clairement Khartoum du doigt.  Il lui impute, entre autres, la rébellion du Rassemblement pour la démocratie et la liberté (RDL) qui s’organise dans l’est frontalier du Soudan.  Selon le Gouvernement du Tchad, Khartoum aurait pris ombrage de ses médiations au Darfour où des populations subissent les foudres des milices janjaouites.  Pour mâter la rébellion, le Tchad revendique et exerce son droit de poursuite sur le territoire soudanais.


« La crise entre le Soudan et le Tchad est probablement la crise humanitaire la plus complexe », confie, le 24 janvier 2006, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Antonio Guterres, qui plaide, à son tour, pour le déploiement d’une force plus robuste au Darfour.  Le Conseil répond à l’appel.  Le 3 février, il publie une déclaration présidentielle dans laquelle il prie le Secrétaire général d’établir conjointement avec l’Union africaine un plan d’urgence en vue d’une opération de maintien de la paix de l’ONU au Darfour.  En attendant la création d’une telle opération, le Conseil de sécurité attend du Conseil de paix et de sécurité de l’UA qu’il se prononce sur la qualité de l’appui qu’il espère de l’ONU.


Devant l’aggravation de la situation entre le Tchad et le Soudan, la Libye organise un mini-sommet de l’UA et obtient des deux pays la signature, le 8 février 2006, de l’Accord de Tripoli portant sur l’établissement de mesures de confiance.  Si les choses semblent s’apaiser entre ces deux protagonistes, au Darfour, le chaos est toujours de mise.  Malgré la décision prise le 10 mars par le Conseil de paix et de sécurité de l’UA de fixer au 30 avril la date limite pour parvenir à un accord.  Ce même jour, l’UA décrit aussi la qualité de l’appui qu’il attend de l’ONU.  Onze jours plus tard, soit le 21 mars, le Représentant spécial du Secrétaire général est clair.  « L’Accord de cessez-le-feu de N’djamena est violé chaque jour, le Comité mixte ne se réunit pas et le respect des sanctions prévu avec la création du Groupe d’experts n’existe qu’en théorie », s’alarme Jan Pronk.  Le Soudan est en effet frappé d’un embargo sur les armes depuis l’adoption, le 30 juillet 2004, de la résolution 1556 qui sera suivie de la résolution 1591 du 29 mars 2005 imposant des restrictions aux déplacements et le gel des avoirs financiers de toutes les parties à l’Accord de N’djamena et tout autre belligérant du nord, du sud et de l’ouest du Darfour. 


Ce 21 mars, Jan Pronk réitère aussi sa demande de voir une force plus robuste au Darfour.  Un mois plus tard, le Conseil prie le Secrétaire général de faciliter la planification préparatoire nécessaire à un passage de la MUAS à une opération de l’ONU.  Dans cette résolution 1663, le Conseil proroge également le mandat de la MINUS jusqu’au 24 septembre.  Créée par la résolution 1590 du 24 mars 2005, la MINUS est chargée d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord de paix global, signé en janvier 2005, par le Gouvernement soudanais et le Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan (S/PLA) de John Garang qui mettront ainsi fin à une guerre de 20 ans entre le nord et le sud du pays, en formant un gouvernement d’unité nationale qui tiendra malgré la mort du Premier Vice-Président, John Garang, le 31 juillet dans un accident d’hélicoptère.


Quelques jours après l’intervention de Jan Pronk, soit le 29 mars, le Conseil adopte la résolution 1665 pour proroger le mandat du Groupe d’experts chargé d’aider à l’application des sanctions.  Le Gouvernement soudanais s’agace des « ingérences » de la communauté internationale au Darfour.  Il refuse au Coordonnateur des secours d’urgence des Nations Unies l’entrée sur son territoire.  Le 11 avril, le Conseil demande des explications, dans une déclaration présidentielle par laquelle il fait aussi sienne la décision du Conseil de paix et de sécurité de l’UA de fixer au 30 avril la date limite pour parvenir à un accord au Darfour.


Cet accord est à portée de main annonce, le 18 avril, le Médiateur en chef des pourparlers intersoudanais.  Samedi dernier, s’explique Salim Ahmed Salim, les négociateurs ont passé en revue les arguments des uns et des autres sur les questions clefs et l’UA est en mesure de présenter un ensemble de propositions aux parties avant la fin du mois d’avril.  Le Médiateur est tellement optimiste qu’il demande au Conseil de prendre immédiatement les mesures qui s’imposent pour renforcer la MUAS, en soulignant l’ampleur des tâches que cette nouvelle donne impliquera pour la Mission de l’UA.  Le 25 avril, dans une déclaration présidentielle, le Conseil demande aux parties aux pourparlers d’Abuja d’examiner les propositions du Médiateur. 


Pour assurer le succès, le Conseil adopte le même jour la résolution 1676 par laquelle il impose des restrictions aux déplacements et le gel des avoirs financiers au Commandant de la région militaire occidentale de l’Armée soudanaise, au Chef suprême de la tribu Jalul au Darfour-Nord, au Commandant de l’Armée de libération du Soudan et au Commandant des opérations du Mouvement national pour la réforme et le développement.  Mais dans son intervention du 18 avril, Salim Ahmed Salim n’oublie pas d’exhorter le Conseil à aider le Tchad et le Soudan à trouver une solution à leurs problèmes.  Un coup d’État raté est perpétré le 14 mars contre le Président Idriss Déby par le Socle pour le changement, l’unité et la démocratie (Scud).  Le Président tchadien accuse le Soudan: « derrière ces Tchadiens, il y a une fois de plus la main du Soudan qui a violé à plusieurs reprises l’Accord de Tripoli ».


Après le Conseil de paix et de sécurité de l’UA, qui publie un communiqué, le 13 avril, le Conseil lit sa propre déclaration, ce 25 avril, pour exprimer ses vives préoccupations.  Il encourage le Secrétaire général à suivre la situation de près, en coopération avec l’UA.  Dans la même déclaration présidentielle, il se dit aussi préoccupé par la situation des réfugiés provenant du Darfour et de la République centrafricaine ainsi que par celle des milliers de personnes déplacées au Tchad.  Le 9 mai, réunit au niveau ministériel, le Conseil peut enfin se réjouir de la signature de l’Accord d’Abuja.  Il ne perd pas de temps.  Le 16 mai, il demande à l’UA de se concerter avec l’ONU à propos des ressources qu’il faut encore prévoir pour donner à la MUAS les moyens de faire appliquer les arrangements de sécurité prévus par l’Accord.  Par la résolution 1679, le Conseil demande aussi que soit dépêchée, dans la semaine, une mission d’évaluation technique UA/ONU.  Il s’adresse aux cinq groupes rebelles qui n’ont pas signé l’Accord pour les menacer de « restrictions sur les déplacements et du gel de leurs avoirs financiers s’ils contreviennent à l’Accord ».


Cet empressement s’explique par le fait que les choses ne semblent pas s’arranger sur le terrain.  De retour d’une visite au Darfour, le Coordonnateur des secours d’urgence dénonce les restrictions de mouvement imposées au personnel humanitaire et la poursuite des attaques et des violences contre les civils par les forces gouvernementales et rebelles.  Jan Egeland attire, à son tour, l’attention du Conseil sur les tensions récurrentes le long de la frontière entre le Soudan et le Tchad.  Il faut faire vite et dans le but de convaincre le Gouvernement soudanais de l’importance d’une implication de l’ONU au Darfour, le Conseil organise une mission sur le terrain.  Khartoum s’élève, en effet, avec véhémence contre toute présence non africaine au Darfour, soupçonnant les puissances occidentales d’avoir un agenda caché.  Le 14 juin, le Chef de la mission du Conseil et Représentant permanent du Royaume-Uni, Emyr Jones Parry, fait son rapport.  « La communauté internationale n’a pas bien compris le conflit au Darfour qui n’est ni interethnique, ni racial, ni caractérisé par une opposition entre pasteurs et agriculteurs », estime-t-il.  La situation entre le Tchad et le Soudan est évoquée par son homologue de la France.  Jean-Marc de La Sablière dit avoir insisté auprès des protagonistes pour qu’ils respectent strictement l’Accord de Tripoli. 


« Le Tchad œuvre à faire échouer le processus de paix qui commençait à prendre racine au Darfour en fournissant des armes et un appui politique aux groupes qui s’opposent à l’Accord d’Abuja », accuse le représentant du Soudan, le 29 juin devant le Conseil de sécurité.  Ces remarques sont accueillies par le représentant du Tchad comme étant fallacieuses et sans fondement.  Au Darfour, le Soudan ne veut pas de l’ONU et la situation continue de s’empirer.  Le 31 août, le Conseil adopte la résolution 1706 priant le Secrétaire général de prendre les dispositions voulues pour assurer rapidement le déploiement de moyens supplémentaires pour permettre à la MINUS de se déployer au Darfour, en remplacement de la MUAS dont le mandat d’achève le 30 septembre.  Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte de l’ONU, la MINUS est autorisée à empêcher toute perturbation de la mise en œuvre de l’Accord de paix et à saisir les armes et matériels connexes dont la présence constitue une violation des accords.


« En adoptant cette résolution, le Conseil prend une décision hâtive », commente le représentant du Soudan, le 11 septembre.  Il s’exprime au cours d’une réunion durant laquelle le Secrétaire général constate une escalade militaire au Darfour.  Kofi Annan appelle les gouvernements africains à convaincre le Soudan d’accepter que la MINUS prenne le relais de la MUAS.  Le point mort est constaté, le 18 septembre.  L’Accord de paix n’est pas appliqué et le Soudan maintient son refus de voir l’ONU au Darfour.  Le 20 septembre, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA consent à reporter l’expiration du mandat de la MUAS à la fin de l’année, en demandant à l’ONU d’apporter un appui pour permettre à sa Mission d’accomplir son mandat.  Deux jours plus tard, le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’UA adressent une lettre conjointe au Président du Soudan pour lui expliquer les détails de cet appui.  Le même jour, le Conseil proroge le mandat de la MINUS jusqu’au 8 octobre par la résolution 1709.  Une semaine plus tard, c’est au tour du mandat du Groupe d’experts chargé d’aider à l’application des sanctions d’être prorogé pour une période de six mois par la résolution 1713.  


Le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’UA reçoivent leur réponse le 5 octobre.  Elle est positive.  Encouragé, le Conseil de sécurité se réunit le lendemain et proroge jusqu’au 30 avril 2007 le mandat de la MINUS.  Mais qu’en est-il du mandat et des modalités d’une force africaine appuyée par l’ONU au Darfour?  Le Soudan s’attaque d’abord au mandat du Représentant spécial du Secrétaire général pour le Darfour.  Le 22 octobre, Jan Pronk est expulsé pour avoir précisément outrepassé son mandat, « en se livrant à une guerre psychologique contre l’armée soudanaise ».  Le Représentant spécial a eu le tort d’écrire dans son blog personnel que les forces gouvernementales ont essuyé deux défaites au Darfour, tout en parlant d’une baisse de morale au sein de ces forces.  Kofi Annan prend acte de la décision soudanaise mais pense surtout à hâter le déploiement de la force africaine.  Il convoque responsables européens, africains, arabes et onusiens dans la capitale éthiopienne.  Le 16 novembre, il annonce l’Accord d’Addis-Abeba sur une force « hybride » ONU-UA.


Le problème est que le Gouvernement du Soudan n’interprète pas de la même manière son « Accord de principe ».  Pour lui, l’Accord ne prévoit pas le déploiement de soldats de l’ONU aux côtés de soldats africains.  « On ne doit pas parler de force mixte mais d’une force africaine assistée par les Nations Unies.  L’ONU paie pour que l’UA fasse le boulot », estiment les autorités soudanaises.


Des éclaircissements sont donc attendus.  Au Darfour, les choses s’empirent comme l’affirme le Coordonnateur des secours d’urgence, le 22 novembre, devant le Conseil.  Les relations entre le Tchad et le Soudan ne s’améliorent pas non plus.  Le Conseil s’en inquiète dans une déclaration présidentielle du 15 décembre.  Quatre jours plus tard, il publie une autre déclaration demandant au Soudan de faciliter la livraison immédiate de modules d’appui légers et lourds de l’ONU à la MUAS, conformément à l’Accord d’Addis-Abeba.  Il lui demande aussi de faciliter une opération mixte bénéficiant, précise le Conseil, de l’appui technique et des structures de commandant fournis par l’ONU. 


Ce n’est donc que le 27 décembre que le Président du Conseil de sécurité et le Secrétaire général pourront se féliciter de l’engagement du Gouvernement soudanais de répondre promptement à cette requête.  Le Soudan s’engage à accueillir au Darfour des bérets bleus aux brassards de l'UA.  Saisie par le Conseil par le biais de la résolution 1593 du 31 mars 2005, la Cour pénale internationale (CPI) poursuit son travail au Darfour comme le souligne son Procureur, Luis Moreno Ocampo, les 14 juin et 14 décembre devant le Conseil. 


Somalie: Aide éthiopienne pour pourchasser les groupes islamistes


      L’année 2006 peut être vue comme celle de l’échec du Processus d’Arta, qui lancé en 2002, a permis la mise sur pied, en 2005, du Gouvernement et du Parlement fédéraux de transition, fondés sur la Charte nationale de transition.  Cette évolution positive sera de courte durée.  Un an plus tard, soit le 22 décembre 2006, le Conseil est obligé de conclure ses travaux sur la Somalie, en constatant une intensification des combats. 


Au début du mois de juin, après quatre mois d’affrontements violents qui se poursuivront tout au long de l’année, l’Union des Tribunaux islamiques (UTI), une alliance de chefs islamistes somaliens, constituée en 1998, arrache le contrôle de Mogadishu aux institutions fédérales de transition, plus précisément à l’Alliance pour la restauration de la paix et contre le terrorisme (ARPCT), regroupant depuis février 2006, des ministres et des seigneurs de guerre.  La population semble en liesse et l’Autorité intergouvernementale de développement (IGAD) reconnaîtra plus tard la capacité de l’UTI à apporter paix et stabilité dans les régions qu’elle contrôle.  Certains membres de la communauté internationale sont plus dubitatifs. 


Face à leurs accusations, l’UTI rompt le silence.  Dans un communiqué publié le 6 juin, elle explique que « l’actuel conflit a été alimenté par les fausses informations fournies au Gouvernement des États-Unis par les seigneurs de guerre qui ont gardé le peuple somalien en otage pendant 16 ans ».  L’UTI dément catégoriquement toute accusation selon laquelle elle hébergerait des terroristes.  Elle va plus loin et invite la communauté internationale à visiter les zones où elle opère pour voir « de ses propres yeux » s’il y a des éléments terroristes dans les zones qu’elle contrôle.  Personne ne fera le déplacement mais le 22 juin, un cessez-le-feu est signé à Khartoum suivi, le 5 septembre, d’un accord de paix provisoire qui encourage l’UA, le 13 septembre, à adopter un plan de déploiement d’une force de paix de l’IGAD, une idée que l’UA nourrit depuis mars 2005. 


Mais les combats se poursuivent et le 24 septembre, Kismayo, la troisième ville du pays, tombe entre les mains des combattants islamistes.  L’UTI contrôle désormais toutes les principales villes du pays.  L’échec des pourparlers est consommé le 1er novembre.  Mais la victoire de l’UTI sera de courte durée.  Le 18 décembre, elle accuse l’Éthiopie de soutenir les forces gouvernementales et lui lance un ultimatum de sept jours pour retirer ses troupes.  L’Éthiopie nie sa présence.  Le Commissaire européen au développement, Louis Michel, tente une médiation pour la reprise du dialogue entre parties somaliennes.  Rien n’y fait.  Le 20 décembre, l’APRCT récupère Mogadishu et quatre jours plus tard, l’Éthiopie annonce officiellement son entrée en guerre.  Le 31 décembre, après la prise de la région de Kismayo, son dernier bastion, l’UTI bat en retraite.    


L’année commence pourtant sous de bons auspices.  Dès le 5 janvier 2006, la déclaration d’Aden est signée; elle prévoit la convocation le 26 février 2006 à Baidoa de la première session du Parlement fédéral de transition en territoire somalien.  Face toutefois aux affrontements occasionnels, aux actes de violence armée, aux enlèvements, aux actes de piraterie et de vol à main armée ou encore au recours à la force dans certaines régions du pays, l’UA envisage, lors de son Sommet du 25 janvier, de déployer une mission de soutien de la paix de l’IGAD à laquelle devrait succéder une mission de l’UA. 


Le Conseil se félicite de ces développements, le 13 mars, dans une déclaration présidentielle et se dit même prêt, le moment venu, à déroger à l’embargo sur les armes imposé en vertu de sa résolution 733 (1992) qui, selon le Comité créé pour le surveiller, continue d’être violé.  D’ailleurs, le 10 mai, le Conseil demande la reconstitution pour six mois du Groupe de contrôle chargé d’évaluer l’application de l’embargo, en adoptant la résolution 1676.  Dans le rapport qu’il a soumis au Conseil, le Groupe remet sur la table sa proposition d’imposer un embargo intégré sur les armes qui serait la conjugaison de l’embargo existant et d’un embargo commercial sur le charbon de bois et sur les poissons pêchés dans les eaux somaliennes, et ce, pour réduire la progression des mouvements de fonds à destination des principaux acteurs en Somalie, et, partant, du volume correspondant des armes qui continuent à être achetées au moyen de ces fonds.


Mais les choses prennent une autre tournure, en juin, avec l’entrée en scène de l’UTI.  Le 15 juillet, le Conseil publie une déclaration pour saluer l’Accord de cessez-le-feu de Khartoum du 22 juin.  Il invite toutes les parties au dialogue et les prie de ne rien faire qui puisse compromettre le cessez-le-feu et la recherche d’une solution politique.  Le Conseil prend aussi note de la demande formulée, le 5 juillet, par les chefs d’État et de gouvernement de l’UA visant une dérogation à l’embargo sur les armes pour ouvrir la voie au déploiement éventuel d’une mission de soutien à la paix et concourir au rétablissement des forces nationales de sécurité somaliennes.  Se disant prêt à étudier la proposition concernant une telle mission, le Conseil se déclare disposé à envisager de modifier légèrement l’embargo sur les armes de manière à permettre aux institutions fédérales de transition de donner à la Somalie un dispositif de sécurité propre.


Mais dans le pays, force est de constater une augmentation considérable des flux d’armes et de munitions.  Le 29 novembre, le Conseil adopte la résolution 1724 priant le Secrétaire général de reconstituer, pour une nouvelle période de six mois, le Groupe de contrôle sur la Somalie.  Quelques jours plus tard, l’IGAD rencontre une délégation de l’UTI.  Un communiqué est publié le 2 décembre dans lequel l’IGAD appelle au retrait de toutes les forces étrangères, se doutant d’une implication de l’Éthiopie.  Elle note aussi l’engagement de l’UTI à reprendre le dialogue sur les questions en suspens dont le partage du pouvoir, la sécurité et la création d’un mécanisme pour la mise en œuvre des accords de cessez-le-feu et de paix provisoire et tout autre accord qui viendra d’un nouveau cycle de négociations.  Face à cette bonne volonté, le Conseil se réunit le 6 décembre et adopte la résolution 1725 qui autorise l’IGAD et l’UA à établir une mission de protection et de formation en Somalie (IGASOM) pour, entre autres, suivre les progrès réalisés par les institutions fédérales de transition et l’UTI dans l’application des accords convenus dans le cadre du dialogue. 


La mission a aussi pour mandat de former les forces de sécurité des institutions de transition.  Partant, l’embargo sur les armes est levé pour les forces de l’IGAD et de l’UA.  Dans cette résolution, le Conseil prend la précaution d’énoncer son intention d’envisager des mesures contre ceux qui tenteraient de prévenir ou d’entraver un dialogue pacifique, de renverser les institutions fédérales de transition par la force ou de prendre des mesures qui menaceraient davantage la stabilité régionale. 


L’UIT pointe l’Éthiopie du doigt, et le 12 décembre, lui lance l’ultimatum de sept jours et déclare que le déploiement de forces étrangères serait assimilé à une invasion et conduirait à des affrontements régionaux.  Le 22 décembre, le Conseil ne peut que constater une intensification des combats, dans une déclaration présidentielle.  Deux jours plus tard, l’Éthiopie reconnaît officiellement la présence de ses troupes en Somalie.  Elle reçoit le lendemain l’injonction de l’UA de quitter le territoire somalien.  Le même jour, le Conseil fait le point de la situation avec le Chef du Bureau politique des Nations Unies en Somalie, créée en 1995 et opérant depuis Naïrobi.  François Lonseny Fall se montre alarmé.  Le conflit s’étend désormais sur un front de 400 kilomètres.  L’APRCT a repris le contrôle de plusieurs zones détenues par l’UTI et s’avance vers Mogadishu, en faisant face à une résistance farouche.  Les soupçons pèsent désormais sur une implication de l’Érythrée aux côtés de l’UIT qui a déclaré la guerre sainte à l’Éthiopie.  Les appels à la fin des hostilités lancés par le Secrétaire général, le Président de la Commission de l’UA, la Ligue des États arabes ou encore l’IGAD restent vains.  Le 31 décembre, la coalition formée par l’Éthiopie et l’APRCT reprennent Kismayo.  L’UTI est vaincue.


Éthiopie/Érythrée: Franchissement des frontières mais pas de délimitation


Ces deux pays, qui franchissent les frontières de la Somalie, ne parviennent pourtant pas à sortir de leur propre différend territorial, comme en témoigne la présence, depuis 2000, d’une mission de la paix des Nations Unies.  Créée le 31 juillet par la résolution 1312, pour superviser le redéploiement des forces et surveiller la zone de sécurité temporaire, la MINUEE ne cesse de dénombrer les obstacles qui se multiplient sur son chemin.  Dans son rapport du 3 janvier, le Secrétaire général qualifie « de plus en plus tendue et imprévisible » une situation caractérisée par l’impasse depuis le mois d’août 2005, dans le processus de démarcation de la frontière entre les deux pays.  L’Éthiopie refuse de mettre en œuvre la décision, pourtant acceptée auparavant comme « définitive et contraignante », que la Commission du tracé de la frontière a rendue en avril 2002, sur la délimitation de la frontière.  Kofi Annan cite aussi le déploiement des contingents éthiopiens dans des zones avancées, depuis décembre 2004, le non-respect de la zone de sécurité, créée en attendant la mise en œuvre de l’avis de la Commission, et la multiplication des restrictions imposées par l’Érythrée à la MINUEE, y compris l’interdiction de tous les vols d’hélicoptère sur l’espace aérien érythréen, depuis octobre 2005.  


Pour la suite, le Secrétaire général propose six formules, comportant chacune « des inconvénients et des avantages ».  Il donne le choix entre le maintien de la configuration de la Mission, son réaménagement, sa transformation en une mission d’observation, le déploiement d’unités de prévention dans la zone temporaire de sécurité tenue par l’Éthiopie, la réduction de la Mission en une mission de liaison ou le retrait pur et simple.  Le statu quo est demandé par les États-Unis pour « ne pas lancer des signaux dans un sens ou dans l’autre ».  Le représentant américain demande 30 jours de répit, le temps que l’administration de son pays tente une médiation « pour voir si on peut progresser dans le processus de démarcation de la frontière ».  Apparemment, les choses sont plus complexes qu’il n’y paraît.  Dans un climat marqué par la détention de 11 employés érythréens de la MINUEE dans les geôles de leur Gouvernement, Kofi Annan intervient le 16 février pour lancer une mise en garde: « Les deux gouvernements semblent convaincus qu’il n’y aura pas de nouvelle guerre, mais dans ce genre de situation, où deux armées se font face, il peut y avoir une erreur de calcul ».


Les remarques du Secrétaire général sont suivies, le 22 février, par une réunion au Siège de l’ONU à New York, des « témoins » de l’Accord de cessez-le-feu d’Alger, signé le 12 décembre 2002.  Aussi, l’Algérie, l’Union Africaine, l’Union européenne, et les Nations Unies, encouragent-ils les États-Unis à poursuivre leur initiative de médiation et rappellent aux parties leur engagement à reconnaître les clauses de délimitation et de démarcation de la Commission chargée de la question comme « fermes et définitives ».  Le Conseil de sécurité se félicite des conclusions de cette réunion, le 24 février, dans une déclaration présidentielle.  Il exige de l’Éthiopie et de l’Érythrée qu’elles permettent à la MINUEE de mener ses activités sans restriction et qu’elles fassent preuve de la plus grande retenue et s’abstiennent de recourir à la menace ou à l’emploi de la force l’une contre l’autre. 


La médiation américaine porte peut-être ses fruits.  Le 10 mars, la Commission du tracé de la frontière se réunit à Londres avec les parties.  Quatre jours plus tard, pour se donner le temps de réfléchir sur les six formules du Secrétaire général, à la lumière des derniers développements, le Conseil de sécurité adopte une résolution technique prorogeant le mandat de la Mission pour une période d’un mois, soit jusqu’au 15 avril.  Deux jours avant l’expiration du mandat, une autre résolution technique, la résolution 1670 portant sur une période supplémentaire d’un mois, est adoptée.  Le 17 mai, la Commission du tracé de la frontière se réunit une nouvelle fois à Londres.  La réunion est suivie de l’adoption de la résolution 1678 portant, cette fois, sur une prorogation de 15 jours du mandat de la MINUEE.


Le Conseil est sur le point de prendre une décision sur l’avenir de la Mission.  Le 31 mai, il se prononce en faveur de la deuxième formule du Secrétaire général, à savoir la reconfiguration.  Dotée d’un mandat prorogé pour une période de six mois par la résolution 1681, la MINUEE devra fonctionner avec des effectifs réduits à un maximum de 2 300 hommes, dont un maximum de 230 observateurs militaires.  Les espoirs d’une atténuation des tensions s’amenuisent.  L’Érythrée refuse de participer à la réunion que la Commission du tracé de la frontière a prévue le 16 juin à La Haye, au motif que l’Éthiopie n’a toujours pas accepté sans restriction la décision sur la délimitation.  Le 24 août, aucun des deux pays ne répond à l’invitation de la Commission.  L’Éthiopie s’en explique en ne voyant aucune signification juridique ni utilité procédurale ou pratique à examiner d’autres questions tant que l’Éthiopie n’aura pas accepté la décision de la Commission sur la délimitation. 


Dans le rapport qu’il soumet au Conseil, le 19 septembre, le Secrétaire général se montre découragé.  Il dénonce « une situation intenable » qui risque de déclencher, intentionnellement ou non, des évènements aux conséquences désastreuses sur les deux pays et sur la région.  Il dénonce aussi « les discours publics et les actions politiques des deux pays qui contredisent l’Accord de cessez-le-feu d’Alger ».  Au refus de l’Éthiopie de reconnaître la décision de la Commission, il compare celui de l’Érythrée de poursuivre sa coopération mais surtout l’arrestation de fonctionnaires internationaux de la MINUEE, l’expulsion de cinq agents de sécurité de l’ONU et la détention de membres du personnel local.  Dix jours plus tard, le Conseil tire ses conclusions.  Il donne quatre mois aux parties pour progresser sur la voie de la démarcation sinon il transforme ou reconfigure la Mission dont le mandat est prorogé jusqu’au 31 janvier 2007. 


Succès et échec en Afrique de l’Ouest


Dans cette région de l’Afrique, les succès enregistrés au Libéria et en Sierra Leone sont quelque peu assombris par les frustrations engendrées par la situation en Côte d’Ivoire.  Compte tenu de l’interdépendance de ces cas spécifiques, le Conseil juge opportun d’inviter le Représentant spécial du Secrétaire général dans la région, le Secrétaire exécutif de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et les Ministres des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, de la Guinée et du Ghana, à identifier les éléments constitutifs d’une approche globale et coordonnée de la consolidation de la paix dans cette sous-région du continent.  Ce 9 août, avant de rendre publique une déclaration présidentielle, le Conseil dresse un bilan alarmant.


Région en transition politique, économique et démographique, l’Afrique de l’Ouest, compte une population de 270 millions d’habitants dont 60% a moins de 30 ans.  Largement sans emploi, la grande majorité de ces jeunes, au lieu d’être une source d’espoir, constitue une menace à la stabilité.  L’accent est mis sur le caractère « explosif » d’une situation dans laquelle les jeunes « désœuvrés » constituent un réservoir d’enfants soldats et de miliciens.  La démobilisation, le désarmement et la réintégration (DDR) des anciens combattants ainsi que la lutte contre le commerce illicite des armes légères sont perçus comme la condition préalable à tout effort de consolidation de la paix. 


Le développement durable est cité ensuite car à la base des conflits sont identifiés la pauvreté, le sous-développement, le manque de démocratie, la mauvaise gouvernance politique et économique ainsi que l’absence de l’état de droit et l’impunité.  Sont aussi identifiés comme causes sous-jacentes des conflits le poids écrasant de la dette, les contraintes des politiques d’ajustement structurel et la raréfication des investissements privés et de l’aide publique au développement (APD).  La nécessité de régler les problèmes liés aux activités transfrontières illicites, aux personnes déplacées et aux réfugiés est également soulignée.


Côte d’Ivoire: Poursuite des « manœuvres obstructionnistes »


Plus de quatre ans après le début du conflit entre le Gouvernement ivoirien et la rébellion des Forces nouvelles (FN) et trois ans après l’Accord de Linas-Marcoussis, signé en 2003 par dix partis politiques dont le Front populaire ivoirien (FPI) du Président Laurent Gbagbo, qui n’a pas apposé sa signature, la communauté internationale ne peut se départir d’un certain sentiment de frustration face aux retards du processus de paix ivoirien.  Aussi, le 1er novembre 2006, le Conseil sera-t-il obligé, une deuxième fois, d’approuver la décision du Conseil de paix et de sécurité de l’UA de maintenir Laurent Gbagbo à la présidence et Charles Konan Banny à la primature pour une « dernière période de transition » n’excédant pas 12 mois. 


L’année 2006 s’achève comme elle a commencé.  La nomination de Charles Konan Banny, le 4 décembre 2005, est suivie, au début du mois de janvier, d’une agitation populaire menée, à Abidjan et dans plusieurs villes de l’ouest du pays, par les « Jeunes patriotes », proches du Président.  Les manifestants contestent la « décision » du Groupe international de travail (GTI) de ne pas prolonger le mandat de l’Assemblée nationale, arrivé à son terme le 16 décembre.  Pourtant dans son communiqué final du 15 janvier 2006, le GTI ne fait que « tirer la conclusion » que ce mandat n’a pas été prolongé.  Entériné le 21 octobre 2005 par la résolution 1633, le GTI, qui a été créé par le Conseil de paix et de sécurité de l’UA, a pour mandat d’aider le Gouvernement ivoirien à appliquer son programme de transition.  Composé du Bénin, du Ghana, de la Guinée, du Niger, du Nigéria, de l’Afrique du Sud, de la France, du Royaume-Uni, des États-Unis, de l’ONU, de la CEDEAO, de l’UA, de l’Union européenne (UE), de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), il publie des communiqués tous les mois après ses réunions avec les protagonistes du conflit.


Les manifestants n’ont que faire de ces subtilités.  Ils s’en prennent tout particulièrement aux membres de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI), créée par la résolution par la résolution 1528 du 6 janvier 2004, et soutenue par des forces françaises, dont le retrait sera d’ailleurs demandé par le FP.  Face à la violence des troubles, « l’inaction de certaines autorités nationales » est dénoncée le 17 janvier, par le Secrétaire général.  Beaucoup voient dans ces « violences orchestrées » une volonté de tester la détermination de la communauté internationale.  Elle restera ferme.  Le Président du Nigéria entreprend des efforts de médiation à Abidjan et le Conseil s’en félicite, le 19 janvier, en espérant qu’ils conduiront rapidement à la baisse des tensions.  Dans cette déclaration présidentielle, le Conseil prend soin de souligner que des sanctions ciblées seront imposées contre les personnes qui font obstacle à la mise en œuvre du processus de paix.


La déclaration présidentielle est suivie, le 24 janvier, par la résolution 1652 portant prorogation des mandats de l’ONUCI et des forces françaises jusqu’au 15 décembre.  Le Conseil entend revoir les tâches et les effectifs militaires de l’ONUCI, à la lumière des progrès accomplis dans la mise en œuvre de la feuille de route arrêtée par le GTI, qui doit aboutir à l’organisation d’élections au plus tard le 31 octobre 2006.  Contenue dans l’Accord de Pretoria du 6 avril 2005, la feuille de route s’articule autour des composantes suivantes: gouvernance et processus politique; désarmement, démobilisation et réinsertion des ex-combattants; désarmement et démantèlement des milices; redéploiement de l’administration; identification et nationalité; processus électoral; rétablissement de la sécurité avec l’appui des forces impartiales; respect des droits de l’homme; sanctions et entraves à la liberté de mouvement; suivi des médias; et action humanitaire.


Le 1er février, le Secrétaire général adresse une lettre au Conseil de sécurité, le pressant de tout faire pour éviter l’aggravation de la crise.  En attendant que le Conseil n’examine sa proposition de renforcer de quatre bataillons les effectifs de l’ONUCI, présentée en réponse à une demande du GTI, le Secrétaire général exprime son intention de transférer à titre temporaire une compagnie d’infanterie mécanisée et une unité de police de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL).  Le Conseil l’approuve et dans la résolution 1657 du 6 février, il autorise ce redéploiement jusqu’au 31 mars pour renforcer la sécurité du personnel et des biens de l’ONU.


Les choses commencent à s’accélérer.  À l’initiative du Premier Ministre, le Gouvernement tient un séminaire, du 9 au 11 février, à Yamoussoukro auquel participent la plupart des ministres dont celui de la reconstruction et Secrétaire général des FN, Guillaume Soro.  Les participants conviennent d’instituer des mécanismes de mise en œuvre des principaux aspects de la feuille de route.  Le Premier Ministre explique ces avancées au GTI, et le 17 février, ce dernier publie le communiqué de sa quatrième réunion, dans lequel il se félicite de la collaboration entre le Chef de l’État et Charles Konan Banny.  Cette collaboration permet la convocation à Yamoussoukro d’un sommet qui relance le dialogue et trace la voie de la sortie de crise.  Le 28 février, les quatre principaux protagonistes de la crise ivoirienne rivalisent de bonnes intentions.  Réunis pour la première fois en Côte d’Ivoire depuis le début du conflit en septembre 2002, Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara du RDR, Henri Konan Bédié du PDCI et Guillaume Soro reconnaissent que la Constitution ivoirienne et la résolution 1633 du Conseil ne sont pas antinomiques.  Outre qu’elle endosse le GTI, la résolution proroge, pour la première fois, le mandat du Président ivoirien pour une période n’excédant pas deux mois, soit jusqu’au 31 octobre 2006.


Les personnalités présentes à Yamoussoukro conviennent que l’identification de la population et les préparatifs des élections doivent être conduites simultanément.  Les quatre protagonistes concluent aussi un accord sur une représentation équilibrée des forces politiques au sein de la Commission électorale indépendante, sortant ainsi cet organe de l’impasse. 


Les progrès continuent.  Après une absence de 16 mois d’Abidjan, Guillaume Soro revient le 14 mars et rencontre, pour la première fois, dans la capitale économique, le Chef de l’État.  Le lendemain, le Conseil des Ministres peut enfin se réunir au complet.  La Côte d’Ivoire entre dans une nouvelle ère, commentera Charles Konan Banny, le 29 mars.  Devant le Conseil de sécurité, le Premier Ministre ivoirien présente une situation positive où le « mur de la méfiance » est en train de se briser.  Mais des défis subsistent, met-il en garde, en citant le financement du processus électoral, le processus de démobilisation, désarmement et réintégration (DDR); le renforcement de la sécurité sur toute l’étendue du territoire afin de garantir la sécurité des électeurs; les problèmes humanitaires et des droits de l’homme; le renforcement des capacités des institutions judiciaires en vue d’assurer l’état de droit; l’appui à l’économie et aux finances de l’État en vue de résorber le chômage élevé chez les jeunes et le retour des personnes déplacées.  Le même jour, le Conseil se félicite de ce « nouvel élan » au processus de paix, dans une déclaration présidentielle. 


Charles Konan Banny revient devant le Conseil, le 27 avril.  L’optimisme est toujours de mise « même si les choses ne vont pas vite ».  Le processus de sortie de crise évolue lentement, mais sûrement, dans la bonne direction, estime le Premier Ministre qui fait sien le souhait du Secrétaire général de voir renforcer les capacités humaines, matérielles et financières de l’ONUCI.  Seule une présence militaire dissuasive peut assurer la sécurisation de tout le processus de sortie de crise, avertit-il.  Dans sa réponse, le Conseil rappelle d’abord aux principaux dirigeants politiques leur engagement du 8 avril, pris à Yamoussoukro II, de mener, de manière concomitante, les opérations de DDR et d’identification.  Il souligne les conséquences graves que pourraient avoir tous retards supplémentaires dans l’exécution des échéances-clefs de la feuille de route. 


L’appel du Conseil est entendu.  Le 24 mai, dans une déclaration présidentielle, il peut saluer le lancement de premières opérations pilote d’audiences foraines dans sept sites, notamment à Abidjan, au sud et au nord du pays, organisées conformément à Yamoussoukro I.  Le Conseil salue également les discussions engagées par les états-majors des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (FANCI) et des Forces Nouvelles en vue d’initier le programme DDR.  Cette déclaration est publiée dans un contexte de nouvelles tensions politiques causées par une campagne lancée par les jeunes patriotes et des membres influents du parti au pouvoir pour protester contre le projet tendant à entreprendre simultanément les opérations de désarmement et d’identification.


Le 2 juin, le Conseil autorise enfin l’augmentation des effectifs de l’ONUCI, par la résolution 1682 du 2 juin.  L’Opération se voit doter de 1 500 personnels supplémentaires, dont un maximum de 1 025 personnels militaires et 475 personnels de police civile, ce qui est loin des 3 400 hommes demandés par le Secrétaire général.  Le 23 juin, en Côte d’Ivoire, le vide législatif est comblé.  Aux termes d’un accord, les parlementaires reviennent à l’Assemblée nationale jusqu’aux prochaines élections.  Le 5 juillet, le Secrétaire général organise une réunion de haut niveau à Yamoussoukro.  Les preuves de bonne volonté se succèdent.  Un accord intervient pour fixer au 31 juillet, la fin des processus de précantonnement et de démantèlement des milices.  Les participants prennent aussi des décisions concernant le processus électoral et saluent la proposition de Kofi Annan d’organiser, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre, une réunion pour examiner la situation et éventuellement, prendre les mesures voulues.  Le Conseil de sécurité s’en félicite dans une déclaration présidentielle du 19 juillet. 


Trois semaines plus tard, soit le 7 août, le Conseil se félicitera de l’ouverture des audiences foraines à travers tout le pays, de l’achèvement du pré-cantonnement des FANCI et des forces des FN, de la création du Groupe de suivi du processus de DDR et du commencement des opérations de démantèlement et de désarmement des milices.  Il prend note du décret présidentiel autorisant la Commission électorale indépendante à proposer tous ajustements techniques nécessaires au Code électoral.  Mais les tensions restent vives, les Jeunes patriotes et leurs alliés poursuivent leurs actes de violence contre le cours du processus. 


Avant de proroger pour une période de trois mois, par la résolution 1708 du 14 septembre, le mandat du Groupe d’experts chargé de surveiller l’application de l’embargo sur les armes et sur les diamants bruts, imposés à la Côte d’Ivoire par les résolutions 1572 (2004) et 1643 (2005), le Conseil apprend que le 8 septembre, le GTI conclut à l’impossibilité de respecter la date limite du 31 octobre fixée pour la tenue des élections.  Les « manœuvres obstructionnistes » sont dénoncées par Kofi Annan.  L’impasse, explique-t-il, est avant tout le résultat de désaccords profonds sur les questions relatives aux procédures de délivrance des certificats de nationalité et à l’établissement des listes électorales.  Les désaccords bloquent la mise en œuvre du précantonnement et le démantèlement est suspendu en raison du nombre peu élevé et de la piètre qualité des armes et des munitions récupérées.


Cinq jours avant la réunion qu’il a prévue de tenir le 20 septembre avec les dirigeants de la Côte d’Ivoire et de la région, le Secrétaire général reçoit une lettre du Président ivoirien l’informant de son intention de ne pas y participer et de présenter ses propres propositions concernant le processus de paix.  La réunion se tient mais n’aboutit à rien; le Président de l’Afrique du Sud ayant argué que les participants ne devraient pas se prononcer sur des questions fondamentales en l’absence du Chef de l’État.  Le Président Laurent Gbagbo et Charles Konan Banny demeureront respectivement Chef de l’État et Premier Ministre de la Côte d’Ivoire, à partir du 1er novembre 2006, pour une nouvelle période finale de transition n’excédant pas 12 mois, décidera le Conseil, en précisant que Konan Banny ne pourra pas se présenter comme candidat à l’élection présidentielle. 


Par cette résolution 1721 du 1er novembre, le Conseil investit le Premier Ministre de tous les pouvoirs nécessaires et d’une autorité totale et sans entraves.  La résolution est accueillie favorablement par toutes les parties concernées à l’exception du Président Gbagbo qui juge ses dispositions « contraires à la Constitution ».  Il annonce son intention de procéder à une série de consultations pour mettre en place un « cadre de rechange » visant à résoudre la crise.  Tous les plans de paix de la communauté internationale ont échoué et il incombe au peuple ivoirien la responsabilité de trouver « sa propre solution », s’explique le Président.  Le 1er décembre, le GTI ne peut que constater « avec inquiétude » le retard pris dans l’application de la dernière résolution du Conseil.  Réfléchissant toujours à l’opportunité de suivre la recommandation du Secrétaire général visant à renforcer l’ONUCI de trois bataillons restants sur les quatre, le Conseil proroge le mandat de l’Opération et des forces qui la soutiennent pour une période 15 jours, soit jusqu’au 10 janvier 2007, par la résolution 1728 du 15 décembre.  Le même jour, il proroge par la résolution 1727, le mandat du Groupe d’experts pour une période de six mois.


Deux jours plus tard, Laurent Gbagbo présente les cinq éléments constitutifs de sa « nouvelle approche » dont l’objectif est la sortie de crise par les élections.  Il ne donne pas un ordre mais pour chaque point, « nous agirons dès que les conditions seront réunies », précise « l’enfant des élections qui récuse la prise de pouvoir par la force ».  Le Président cite, en premier lieu, l’instauration d’un dialogue direct avec la rébellion en vue du désarmement et de la réunification du pays.  Les rebelles n’ont toujours pas dit pourquoi ils n’ont pas déposé les armes, s’impatiente-t-il.  Il cite aussi la suppression de la zone de confiance, étant donné que la possibilité de reprise des hostilités militaires est « inexistante ».  Il cite ensuite la création d’un service civique national pour « combler les attentes de ceux des jeunes, qui faute de formation, d’emploi et d’une haute idée de la République sont exposés à toutes les tentations mêmes les plus suicidaires.  Il cite encore l’amnistie générale « mais sans donner la prime à l’impunité ».  Il cite enfin la mise en place d’un programme d’aide au retour des déplacés de guerre comme un devoir de solidarité vis-à-vis des compatriotes qui vivent une « situation que nul n’a voulue ».


Répondant le 1er janvier, dans son discours à la nation, le Secrétaire général des FN déclare que « le dialogue aurait dû intervenir plus tôt et qu’il ne peut être envisagé en dehors de la résolution 1721 ».  Le Conseil lui donne raison.  Dans la déclaration présidentielle qui clôt ses travaux sur la Côte d’Ivoire, ce 21 décembre, il renouvelle son appui au Premier Ministre et demande au GTI de mettre à jour le calendrier détaillé de mise en œuvre du processus de paix, en prévision de réunion du 12 janvier, et d’arrêter toutes les recommandations nécessaires en vue de l’examen de la situation par la CEDEAO et l’UA, le 1er février au plus tard.  


Libéria: Les défis de la reconstruction


Élue le 8 novembre 2005 à la tête du Libéria, la première femme Chef d’État du continent africain, Ellen Johnson-Sirleaf, est confrontée aux défis de la reconstruction et de la réconciliation nationale dans un pays qui, entre 2001 et 2004, a été frappé par toute la panoplie de sanctions dont dispose le Conseil de sécurité: embargos sur les armes, les diamants et le bois, sans compter le gel des avoirs financiers et les restrictions sur les déplacements imposés à certains individus liés à l’ancien dictateur Charles Taylor. 


Devant l’énormité de la tâche, la Présidente du Libéria plaide dès son arrivée au pouvoir, le 16 janvier 2006, pour le maintien de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), créée par la résolution 1509 du 19 septembre 2003.  Elle le dit au Conseil de sécurité, le 17 mars.  Elle lui fait aussi part des réformes qu’elle mène depuis son accession à la tête de son pays, pour obtenir la levée des sanctions sur le diamant et le bois, sources importantes du financement du redressement.  Le 20 décembre 2005, par la résolution 1647, le Conseil avait prorogé pour une période de 12 mois toutes les sanctions imposées au pays.  Ce 17 mars, parmi les mesures de réforme, Ellen Johnson-Sirleaf cite, entre autres, un plan anticorruption, la création d’une Commission vérité et réconciliation, l’institution de la Cour suprême de justice et la mise en place de mécanismes pour assurer une plus grande transparence en matière de gouvernance.


Cet engagement est salué par le Conseil. « Si l’élan de la réforme est maintenu, l’objectif de la levée des sanctions devrait être atteint sous peu », se félicite même la représentante du Danemark et Présidente du Comité des sanctions concernant le Libéria.  Le Conseil saisit l’occasion de ce débat pour féliciter la Présidente libérienne d’avoir demandé au Président du Nigéria de consulter ses collègues de la sous-région et la communauté internationale en vue de résoudre le cas de l’ex-président libérien Charles Taylor qui, poursuivi par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, vit en exil au Nigéria depuis 2003. Il sera transféré à Freetown, le 29 mars, après une tentative d’évasion.  Le 20 juin, pour assurer la sérénité du procès, le Tribunal se déplacera à La Haye dans les locaux de la Cour pénale internationale (CPI).  Le Conseil se félicitera de ces arrangements, le 16 juin par la résolution 1688.  Il sera aussi informé de l’accord passé avec le Royaume-Uni pour que l’ancien dictateur libérien purge sa peine sur le territoire britannique.  


Mais les choses n’en sont pas encore là et le Conseil doit réfléchir à l’avenir de la MINUL.  Faut-il ou non réduire ses effectifs?  Pas avant six mois, répond le Secrétaire général dans son rapport du 14 mars.  La MINUL doit encore mener des tâches essentielles, dont l’assistance au Gouvernement, entre autres, pour la réinsertion des personnes touchées par la guerre et des ex-combattants, le renforcement de l’autorité de l’État dans tout le pays ou encore l’application du Programme d’aide à la gouvernance et à la gestion économique.  Convaincu, le Conseil proroge de six mois le mandat de la MINUL par la résolution 1667 du 31 mars, le jour même où le Secrétaire général réduit son effectif militaire de 15 000 hommes de 250 éléments. 


La MINUL doit surtout assister le Gouvernement libérien dans la réforme du secteur de la sécurité et pour faciliter les choses, le Conseil ajuste, par la résolution du 13 juin, l’embargo sur les armes en faveur des forces armées, de la police et du Service spécial de sécurité.  Un autre embargo est levé le 20 juin, c’est celui qui pèse sur l’industrie du bois.  Le Groupe d’experts chargé de surveiller l’application des embargos se félicite, en effet, des réformes apportées à ce secteur.  Un décret déclarant nulles et non avenues toutes les prétendues concessions forestières est signé, un Comité de suivi de la réforme forestier est créé, un Contrôleur financier non-libérien est nommé au sein de l’Office des forêts, un contrat d’exploitation qui garantit la transparence des activités liées au bois d’œuvre est sur le point d’être institué et un mécanisme permettant à la société civile de surveiller le secteur forestier est mis en place.  Le Conseil décide dont de lever l’embargo sur le bois pour une période de trois mois, le temps de voir si la législation forestière proposée par le Comité de suivi de la réforme forestière sera adoptée.


S’agissant du diamant, les choses sont plus compliquées.  L’embargo est reconduit pour une période de six mois, en attendant l’institution, « d’un régime de certificats d’origine des diamants bruts qui soit efficace, transparent et vérifiable sur le plan international, dans la perspective de la participation du Libéria au Processus de Kimberley ».  En conséquence, le mandat du Groupe d’experts est reconduit pour la même période.  Mais qu’en est-il de la stratégie de sortie pour la MINUL?  Déjà réduit à 14 794 hommes, l’effectif militaire de la Mission se voit encore amputé de 125 hommes contrairement à la composante civile qui, selon les termes de la résolution 1694 du 13 juillet, accueille 125 hommes supplémentaires.  Ainsi reconfigurée, la MINUL voit son mandat prorogé jusqu’au 31 mars 2007 par la résolution 1712 du 29 septembre. 


Le Conseil retourne à l’examen des sanctions et se félicite que l’Assemblée nationale du Libéria ait adopté une loi sur la réforme forestière répondant aux critères de levée définitive des embargos.  Les nouvelles sont moins réjouissantes concernant les diamants.  Dans son rapport du 15 décembre, le Groupe d’experts estime que le Libéria n’a pas encore les contrôles internes nécessaires pour participer au régime de certification du Processus de Kimberley.  Les éléments nécessaires doivent encore être intégrés au sein « d’un mécanisme fonctionnel cohérent, crédible et viable ».  Concernant les armes, le Groupe d’experts alerte du danger que les mercenaires libériens soient attirés par les possibilités économiques qui s’offrent en Côte d’Ivoire et juge probable qu’il existe des réseaux informels pouvant être activés en cas de reprise des combats dans ce pays.  En conséquence, le 20 décembre par la résolution 1731, le Conseil reconduit pour 12 mois les sanctions sur les diamants et les armes tout en prorogeant le mandat du Groupe d’experts jusqu’au 20 juin 2007. 


Sierra Leone: La « success story » continue


Décrit comme une véritable « success story » de l’ONU, la Sierra Leone continue sa marche vers la consolidation de la paix.  Elle est d’ailleurs, avec le Burundi, l’un des deux premiers « clients «  de la Commission de consolidation de la paix qui, le 12 octobre dernier, l’a jugée éligible au Fonds pour la consolidation de la paix.  Le pays se prépare désormais aux élections présidentielles et législatives, du 28 juillet 2007, avec l’aide du Bureau intégré des Nations Unies (BINUSIL) qui, créé par la résolution 1620 du 30 août 2005, est venu remplacer la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL), en place depuis 1999.  Le pays a encore beaucoup à faire pour ce qui est de rationnaliser l’appareil de sécurité, promouvoir la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, transformer le secteur privé en un moteur de l’économie, répondre aux besoins de l’appareil judiciaire et assurer le respect des droits de l’homme.  


Le début de l’année 2007 sera d’une importance critique, prévient le Secrétaire général dans son rapport du 28 novembre.  Il souligne que l’appui technique des Nations Unies et des autres donateurs devra être fourni au bon moment pour aider la Commission électorale nationale et la sécurité nationale à répondre aux besoins considérables engendrés par les élections.  Il met l’accent, à ce propos, sur la contribution considérable du BUNISIL et plaide pour que le Conseil ajoute aux 10 membres de l’équipe de liaison militaire cinq officiers supplémentaires et aux 20 policiers de la composante de police civile 10 autres éléments.  Le Conseil suit cette recommandation dans sa résolution 1734 du 22 décembre et demande au Secrétaire général de procéder, à la veille des élections, à une évaluation approfondie du rôle du Bureau en vue d’arrêter un plan de retrait.   


Sahara occidental, seul hôte d’une mission de l’ONU en Afrique du Nord


Cette année-ci encore, devant la persistance de l’impasse, le Conseil est obligé de proroger, par deux fois, le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), aux termes des résolutions 1675 du 28 avril et 1720 du 31 octobre.  Mais les membres du Conseil ont de plus en plus de mal à contenir leur frustration.  


Dix-sept ans après l’acceptation par le Maroc et le Front POLISARIO des Propositions de règlement, 15 ans après le Plan de règlement du Secrétaire général et trois ans après le Plan de paix pour l’autodétermination du peuple du Sahara occidental, aucun progrès ne vient éclairer l’horizon.  Le Maroc est prêt à négocier sur l’octroi d’une autonomie relevant de sa souveraineté, alors que le Front POLISARIO appuie, depuis le 6 juillet 2003, le Plan de paix.  Partant du constat que le Conseil rejette catégoriquement toute solution non consensuelle, le Secrétaire général n’a plus que deux options: la poursuite de l’impasse ou des négociations directes sans condition préalable avec pour seul objectif de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui prévoirait l’autodétermination du Sahara occidental.


Le rapport que Kofi Annan présente le 16 octobre, décrit les dernières activités de son Envoyé personnel qui dresse un bilan sans complaisance.  Peter van Walsum se dit convaincu que les positions prises par les parties ne sont pas la seule cause de la prolongation de l’impasse.  Il montre aussi du doigt « les pays qui font preuve de compréhension face à la réticence du Maroc à voir un territoire, grand comme le Royaume-Uni, peuplé de quelques centaines de milliers d’habitants seulement, devenir un État indépendant à sa frontière Sud ».  Ces mêmes pays, accuse encore l’Envoyé spécial, « s’opposent à ce que l’on fasse pression sur le Front POLISARIO pour qu’il accepte la souveraineté marocaine et se satisfasse d’un référendum excluant l’option de l’indépendance ».  L’Envoyé personnel diagnostique alors qu’une utilisation sélective d’arguments est la raison pour laquelle l’une et l’autre partie semblent surestimer l’appui dont elle jouit.


Peter van Walsum prévient donc que les négociations directes ne pourront pas démarrer tant que le Conseil de sécurité n’aura pas fait entendre très clairement que l’exercice de l’autodétermination en est le seul objectif convenu.  Les négociations ne peuvent porter ni sur une proposition d’autonomie, ni sur un référendum incluant l’option d’indépendance, bien que ces éléments puissent être avancés pendant les négociations.  L’Envoyé personnel prévient le Maroc que le rejet de cette approche sera un sérieux revers dont ne devrait cependant pas se réjouir le Front POLISARIO.  À mesure que l’impasse se prolonge, la communauté internationale s’accoutume de plus en plus à l’exercice d’un contrôle marocain sur le Sahara occidental.  L’accord de pêche, conclu en juillet 2006, entre le Maroc et l’Union européenne est un excellent exemple, rappelle l’Envoyé personnel à des parties qui ont jusqu’au mois d’avril 2007 pour débloquer la situation.


Le calme après la tempête dans les Grands Lacs


Entre le processus de paix au Burundi, qualifié l’année dernière comme ayant « valeur d’exemple » et l’avènement, le 6 décembre de cette année, d’un président élu à la tête de République démocratique du Congo (RDC), la communauté internationale ne trouve pas de mots assez forts pour saluer les fruits de ses efforts.  L’année commence mal pourtant.  Lors du débat-marathon sur la région des Grands Lacs qu’il tient le 27 janvier, au niveau ministériel, le Conseil doit, une nouvelle fois, condamner les activités des milices et groupes armés opérant dans cette région, en particulier les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), le Palipehutu-Forces nationales de libération (FNL) et l’Armée de résistance du Seigneur (LRA). 


Dans cette résolution 1653, le Conseil exige de l’Ouganda, du Rwanda, de la RDC et du Burundi, qu’ils prennent des dispositions pour que leurs territoires respectifs ne servent pas à faciliter les activités des groupes armés présents dans la région.  Le Conseil regrette d’ailleurs le report du deuxième Sommet de la Conférence internationale en vue de l’adoption d’un pacte de sécurité, de stabilité et de développement pour les pays de la région des Grands Lacs, qui sera finalement signé le 15 décembre par les 11 chefs d’État concernés.  Mais le 24 janvier, le tableau que dresse le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés et celui que dressera, le 29 septembre, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, ne sont pas réjouissants. 


RDC: Fierté internationale


Le succès des élections présidentielles et législatives en RDC, quatre ans après l’Accord global et inclusif pour une gestion consensuelle de la transition, est un véritable motif de fierté pour la communauté internationale.  Le moins fier d’entre elle n’est pas le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix qui peut saluer le travail effectué par la plus grande mission que l’ONU n’ait jamais déployée.  Les quelque 17 000 membres du personnel en uniforme et 3 500 membres du personnel civil de la Mission des Nations Unies en RDC (MONUC) ont piloté « de façon remarquable », avec l’aide directe du Comité international d’accompagnement de la transition (CIAT), dont l’Afrique du Sud et l’Union européenne, une transition parfois chaotique qui a conduit, comme prix de la paix, à la mise en place d’un gouvernement d’unité nationale composé d’un président, de quatre vice-présidents et 60 ministres et vice-ministres. 


Mais avant les satisfecit, il faut revenir en arrière et constater avec le Conseil que les choses s’annoncent mal en ce début d’année.  Le 23 janvier, un contingent guatémaltèque de la MONUC, engagé dans une opération contre des éléments soupçonnés d’appartenir à l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) est attaqué, dans l’est de la RDC, au parc national de la Garamba.  Huit militaires trouvent la mort et cinq autres sont grièvement blessés.  Le Conseil se réunit le lendemain et condamne cette attaque mais aussi la prise par des rebelles de villages dans les environs de Rutshuru, au Nord-Kivu.  Déjà peuplé de différents groupes armés, l’est de la RDC est aussi soupçonné d’abriter des éléments rebelles de la LRA qui mènent depuis longtemps une insurrection brutale dans le nord de l’Ouganda qui s’est traduite par la mort, l’enlèvement et le déplacement de milliers de civils en Ouganda, au Soudan et en RDC.


L’embargo sur les armes doit donc rester de mise.  Par la résolution 1654 du 31 janvier, le Conseil prie le Secrétaire général de rétablir, jusqu’au 31 juillet, le Groupe d’experts chargé de la surveillance de cet embargo imposé par la résolution 1493 du 28 juillet 2003 et élargi par la résolution 1596 du 14 avril 2005 à tout destinataire se trouvant en Ituri, au Nord et au Sud-Kivu.  L’instabilité permanente à l’est du pays risquant d’affecter le bon déroulement des élections, le Secrétaire général dit, conformément à la résolution 1650 du 21 décembre 2005, son intention de redéployer à la MONUC, jusqu’au 31 décembre 2006, un bataillon d’infanterie, un hôpital militaire et 50 observateurs militaires de l’effectif de l’Opération des Nations Unies au Burundi (ONUB).  Le Conseil approuve Kofi Annan dans la résolution 1669 du 10 avril, en fixant néanmoins un délai initial au 1er juillet, la situation au Burundi, qui a achevé sa période de transition, demeurant volatile.


Les initiatives visant à assurer la stabilité en RDC ne cessent de se multiplier.  L’Union européenne accepte même de prêter main forte à la MONUC.  Le 25 avril, le Conseil l’autorise à déployer « EUFOR-RDC » durant la période entourant les élections.  Par la résolution 1671, ce déploiement est autorisé pour une période s’achevant quatre mois après la date du premier tour des élections présidentielles et législatives.  La Force européenne a pour mandat d’apporter son soutien à la MONUC au cas où elle rencontrerait des difficultés; de contribuer à la protection des civils et à celle de l’aéroport à Kinshasa et d’effectuer des opérations « de caractère limité » afin d’extraire des individus en danger.


Il est vrai que l’organisation des premières élections démocratiques depuis 45 ans, dans un pays grand comme cinq fois la France et pratiquement dépourvu d’infrastructures « donne une autre dimension au mot cauchemar », comme l’a dit le Coordonnateur humanitaire de l’ONU en RDC.  Fixées au 30 juillet, les élections présidentielles et législatives doivent permettre aux 25,6 millions d’électeurs congolais de départager, dans les 169 circonscriptions établies, 33 candidats à la présidence et 9 406 aux 500 sièges de l’Assemblée nationale.  Il s’agira d’installer 50 567 bureaux de vote, d’imprimer 33 millions de bulletins de vote de 170 types différents et de déployer 300 000 agents électoraux et 50 000 policiers.  Tout ceci, dans un contexte où les tensions existant entre les partis politiques dans les grandes agglomérations urbaines peuvent entraîner des troubles civils, alors que dans les zones rurales de l’est, où l’administration est pratiquement absente, les élections peuvent être influencées par la présence continue de groupes nombreux de soldats congolais refusant le brassage, y compris les milices et les groupes maï-maï.


Dans ces conditions, les visites se multiplient auprès des protagonistes congolais dont celle du Secrétaire général lui-même du 21 au 24 mars.  Le Conseil de sécurité n’est pas en reste.  Il dépêche pour la septième fois depuis le déploiement de la MONUC en 2000 une mission sur place qui, prévue du 10 au 12 juin, est conduite par le Représentant permanent de la France.  La visite intervient à un moment où l’Ituri est stabilisé grâce à une action musclée des Forces armées de la RDC (FARDC) et de la MONUC et où dans les deux Kivus, des progrès sont enregistrés tous les jours.  À son retour, le chef de la mission déclare au Conseil, le 16 juin, que les conditions, notamment de sécurité, sont réunies pour que le peuple congolais puisse prendre part à un scrutin libre et équitable, malgré la subsistance de groupes armés à l’est de la RDC et une campagne électorale au ton parfois virulent.  C’est que le conflit ivoirien fait des émules.  En RDC, les adversaires du Président Joseph Kabila battent campagne sur le thème diviseur de la « congolité ».


Pour assurer le bon déroulement des élections, le Conseil décide, le 30 juin, de maintenir jusqu’au 30 septembre, l’augmentation temporaire de l’effectif redéployé de l’ONUB.  « Les élections sont un nouveau rendez-vous avec l’histoire que la RDC ne peut manquer », déclare le Représentant permanent de la RDC aux membres du Conseil, le 6 juillet.  Les acquis actuels ne doivent pas être hypothéqués au travers de concertations politiques sans issue », dit en écho le Représentant de la France qui, en tant que Président du Conseil pour le mois de juillet, a invité les délégations à commenter son rapport de mission.  Ces concertations politiques sont réclamées par une cinquantaine de partis politiques sur les 213 enregistrés dont l’UDPS, d’Étienne Tshisekedi, qui boycotte pourtant les élections.  Les concertations ont pour objectif de discuter des questions de la transparence du processus électoral, de la sécurisation des candidats, de la régulation des médias et de la prorogation de la transition après le 30 juin. 


En l’absence du Président Kabila, elles ont lieu le 30 juin sans résultat déterminant alors que la campagne électorale est lancée le 29 juin à minuit.  Elle se heurte d’emblée à un autre obstacle.  Promettant de barrer la route à toutes tentatives visant à imposer aux Congolais une mascarade d’élections, 19 candidats aux élections présidentielles réclament, le 4 juillet, le gel de la campagne.  Ils dénoncent un processus électoral entaché d’irrégularités et un climat d’insécurité et de tensions entretenu pour intimider le peuple congolais et étouffer l’expression démocratique.  Leurs craintes ne sont pas partagées par la majorité.  Le 30 juillet, les Congolais se rendent massivement aux urnes et à la surprise générale, de façon calme et ordonnée.  Le Conseil se félicite de la tenue des élections, après avoir prorogé l’embargo sur les armes pour une période d’un an, par la résolution 1698 du 31 juillet, qui s’élargit dorénavant aux responsables politiques et militaires ayant recruté ou employé des enfants dans des conflits armés.  Ce 3 août, dans une déclaration présidentielle, le Conseil appelle les Congolais à accueillir les résultats avec le même civisme et déplore les incidents survenus récemment, à Kinshasa, à Mbuji Mayi et à Mweka.


Les tensions ne s’apaisent pas et culminent même le 20 août, date de la publication des résultats par la Commission électorale indépendante (CEI).  Les 44,81% obtenus par Joseph Kabila et les 20,3% par son ancien Vice-Président, Jean-Pierre Bemba, sont accueillis par des émeutes et des coups de feu.  Le lendemain, alors qu’il est en compagnie des ambassadeurs du CIAT et du chef de la MONUC, Jean-Pierre Bemba échappe à un bombardement de sa résidence qui s’est produit en même que des affrontements dans d’autres parties de la ville de Kinshasa.  L’incident est imputé à des éléments incontrôlés de la Garde présidentielle de Joseph Kabila.  Le lendemain, les troupes présidentielles prennent position sur l’aéroport international et la résidence de Jean-Pierre Bemba fait l’objet de nouveaux tirs.  Vers midi, les choses se calment. 


Plus tard dans la journée, grâce aux pressions multiples de la communauté internationale dont le Comité des sages présidé par l’ancien Président du Mozambique, Joachim Chissano, un accord est signé sur le retrait des troupes de Kinshasa entre le Ministre de la défense, le Chef d’état-major des FARDC, l’Inspecteur général de la police nationale, le Commandant de la Garde présidentielle et le Conseiller militaire de Joseph Kabila ainsi que des officiers de la garde de Jean-Pierre Bemba, de l’EUFOR, de la Mission européenne de police (EUPOL) et de la MONUC.  Aux termes de l’accord, les parties créent également deux équipes mixtes pour la vérification du retrait.  Les gens ne sont pas rassurés pour autant.  Le 11 septembre, le CIAT juge bon de publier une déclaration dans laquelle il exprime sa préoccupation face à la circulation sans contrôle d’armes et d’individus armés à Kinshasa et appelle au cantonnement des forces de sécurité des deux candidats et des soldats des FARDC.  Le CIAT sera entendu.


Le deuxième tour des élections présidentielles est fixé au 29 octobre.  Échaudé, le Conseil se dit prêt, dans une déclaration présidentielle du 22 septembre, à prendre des mesures contre ceux qui en menacent la tenue pacifique, en particulier par le biais des « médias de la haine » ou en empêchant d’accéder, en incitant à la violence et en recourant à la violence pour empêcher les élections, en contester leurs résultats ou en ébranler le processus de paix.  Sept jours plus tard, le Conseil proroge jusqu’au 15 février 2007 le mandat de la MONUC.  Par la résolution 1711, il reconduit jusqu’au 31 décembre le redéploiement temporaire au profit de la MONUC de l’effectif détaché de l’ONUB. 


Une nouvelle fois, les Congolais créent la surprise et se rendent en grand nombre et de façon pacifique aux urnes.  Le Conseil leur rend hommage dans la déclaration présidentielle du 7 novembre dans laquelle il déplore les incidents « isolés » qui ont eu lieu notamment à Bumba et à Bikoro, dans la province de l’Équateur, et à Fataki, dans le district de l’Ituri, malgré la signature par les deux candidats du deuxième tour d’une déclaration d’intentions postélectorales.  Rien n’y fera.  Le 11 novembre, une altercation est signalée à proximité de la résidence de Jean-Pierre Bemba.  Quatre jours plus tard, la CEI proclame Joseph Kabila vainqueur avec 58,5% des voix.  Ses résultats doivent être confirmés par la Cour suprême de justice qui est saisie, le 18 novembre, d’un recours pour fraudes par le candidat malheureux.  Alors qu’elle l’examine, le 21 novembre, la Cour est incendiée et des affrontements et des échanges de tirs durent pendant 45 minutes devant ses locaux.  


Les magistrats reprennent leurs travaux et le 27 novembre, ils confirment la victoire de Joseph Kabila.  Dès le lendemain, les Congolais et la communauté internationale sont pris d’un sentiment de soulagement.  Dans une déclaration, Jean-Pierre Bemba reconnaît sa défaite et s’engage à mener une « opposition républicaine ».  Le Conseil se félicite de ces évènements, le 6 décembre, dans une déclaration présidentielle.  Il appelle le prochain gouvernement démocratiquement élu à répondre avec l’ensemble de la population et les acteurs politiques congolais aux nombreux défis que connaît le pays, dont la gestion saine de ses ressources naturelles, la formation d’une armée professionnelle et l’éradication des groupes armés dans l’est du pays.  Le Conseil exprime d’ailleurs sa vive préoccupation à l’égard des récentes hostilités lancées par des unités armées non intégrées à Sake, dans la province du Nord-Kivu.  Le 22 décembre, il autorise par la résolution 1736, une augmentation de 916 personnes des effectifs militaires de la MONUC jusqu’au 15 février 2007.


Burundi: Consolidation de la paix


Autre « client » de la Commission de consolidation de la paix, le Burundi parcourt d’un pas déterminé un chemin parfois difficile vers la paix.  Il doit donner raison au Représentant permanent de la France qui affirmait, l’année dernière, que le refus des Forces nationales de libération (FNL/Palipehutu) d’Agathon Rwasa de se joindre au processus de paix n’était pas définitif.  Le Conseil en est en effet au remplacement de l’ONUB qui a été crée par la résolution 1545 du 21 mai 2004 avec pour mandat d’accompagner la mise en œuvre de l’Accord d’Arusha du 28 août 2000.


Le Gouvernement a pris des mesures pour consolider son autorité, indique le Secrétaire général dans son rapport du 14 mars.  Kofi Annan indique aussi que le processus de désarmement et de démobilisation se poursuit selon le calendrier établi et signale des progrès dans le démantèlement des milices.  Il prévient néanmoins que la réalisation d’une paix globale restera illusoire tant que les FNL mèneront des activités militaires et se tiendront à l’écart du processus de paix. 


Or, ayant proclamé l’expiration du délai pour les négociations, le Gouvernement burundais intensifie sa campagne militaire contre les FNL.  Partant, dans sa déclaration présidentielle du 23 mars, le Conseil demande la cessation immédiate des hostilités et, malgré la position du Gouvernement burundais, prend note avec satisfaction des déclarations que le chef des FNL a faites à Dar es-Salaam, manifestant sa disponibilité à négocier. 


Le Conseil a raison.  Le 18 juin, le Gouvernement burundais et les FNL signent l’« Accord sur des principes en vue de parvenir à une paix durable, à la sécurité et à la stabilité » où sont énoncés les principes convenus concernant les aspects politiques et militaires.  Le Conseil s’en félicite, le 30 juin, dans la résolution 1692 portant prorogation du mandat de l’ONUB jusqu’au 31 décembre 2006.  Après l’Accord du 18 juin, il reçoit une autre bonne nouvelle, le 7 septembre.  Au sommet de l’Initiative régionale pour la paix au Burundi, le Gouvernement burundais et les FNL signent un accord de cessez-le-feu global qui prévoit la cessation de toutes les hostilités et l’intégration des combattants du FLN dans les forces de sécurité nationale ou leur désarmement, démobilisation et réintégration.  Mais les tensions politiques internes s’aggravent.  Le 3 août, les Ministres de l’information et de l’intérieur annoncent qu’une tentative de déstabilisation a été déjouée.  Les médias nationaux crient à la fabrication et de nombreux partis politiques, groupes de la société civile et organisations de défense des droits de l’homme condamnent l’arrestation des prétendus responsables.  Le 5 septembre, la deuxième Vice-Présidente démissionne, en évoquant notamment les graves violations des droits de l’homme commises par le Gouvernement et le fait que le principe du droit n’est pas respecté.


Commentant la série d’arrestations, le Conseil encourage, le 25 octobre, les autorités burundaises à suivre des procédures régulières et à respecter les garanties prévues par la loi et leurs obligations internationales.  Il appelle aussi le Gouvernement et les FNL à appliquer rapidement et de bonne foi l’Accord de cessez-le-feu et à poursuivre leurs efforts tendant à résoudre les questions restantes dans un esprit de coopération.  Dans cette résolution 1719, le Conseil prie le Secrétaire général d’établir un Bureau intégré des Nations Unies au Burundi (BINUB), pour une période initiale d’un an à compter du 1er janvier 2007.


Succédant à l’ONUB, le Bureau doit concentrer ses activités sur la consolidation de la paix et la gouvernance démocratique; le désarmement, la démobilisation et la réinsertion ainsi que sur la réforme du secteur de la sécurité; la promotion et la défense des droits de l’homme et la lutte contre l’impunité; et la coordination des donateurs et des organismes des Nations Unies.


Ouganda: Paix avec la LRA


Après avoir semé la terreur, pendant 20 ans, dans le nord de l’Ouganda, l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), dont le chef Joseph Kony est poursuivi par la Cour pénale internationale (CPI), devient une véritable source de préoccupation depuis que certains de ses éléments se sont repliés au Soudan et en RDC.  Face aux agissements de cette « organisation terroriste », les Ministres ougandais des affaires étrangères et de la défense s’invitent au Conseil, le 19 avril, pour l’informer des mesures prises pour contrer l’impact humanitaire et sécuritaire du conflit.  Ils décrivent les activités du Mécanisme conjoint de coordination et de surveillance de haut niveau entre le Gouvernement de l'Ouganda, les Nations Unies, les principaux partenaires et les représentants des ONG visant à appuyer la stratégie.  Ils décrivent aussi le plan d'action du Gouvernement relatif à la situation humanitaire et à la réinstallation des personnes déplacées dans le nord de l'Ouganda et font état du plan d'urgence pour l'intervention humanitaire dans les régions où sévit la LRA.  Ils présentent enfin les résultats de l’« Opération Iron Fist », lancée en 2002 qui a contraint, selon eux, les membres restants de la LRA à se replier en RDC et dans le Sud-Soudan. 


Mais le Ministre de la défense plaide surtout pour une action plus résolue de la MONUC et de la MUAS.  Il propose même la signature d’un mémorandum d’accord entre son pays et la RDC qui, à l’instar de l’accord signé avec le Soudan, autoriserait ses Forces à poursuivre les membres de la LRA sur le territoire congolais.  Le Gouvernement de la RDC ne donnera aucune suite à cette requête.  Les initiatives continuent et le 26 août, le Gouvernement ougandais et la LRA signent, à Juba, dans la capitale du Sud-Soudan, un accord sur la cessation des hostilités.  L’accord implique aussi l’arrêt des opérations de propagande hostiles durant la poursuite des négociations de paix.  À partir du 29 août, la LRA accepte de quitter ses positions en RDC, au Soudan et en Ouganda pour se prendre à des points de rassemblement gardés par l’armée du Sud-Soudan.


Commentant cet accord, le 22 novembre, le Secrétaire général aux affaires humanitaires qui revient de la région où il s’est entretenu avec Joseph Kony salue le succès d’une étape qui peut permettre à des centaines de milliers de personnes déplacées de rentrer dans leur pays d’origine.  Si les membres du Conseil s’en félicitent, ils soulignent néanmoins la nécessité « impérieuse » d’accompagner le rétablissement de la paix d’une justice véritable.  Or, entre ruptures et reprises des négociations, Joseph Kony maintient sa position selon laquelle la CPI constitue un obstacle à la paix.


République centrafricaine: Tensions avec le Soudan et le Tchad


Si depuis le 24 août 2006, un Accord instituant une Commission mixte permanente pour lutter contre la criminalité transfrontière entre le Cameroun, la République centrafricaine et le Tchad, la situation est plus précaire dans les régions du nord et du centre.  L’attaque lancée fin juin par des groupes armés contre une base avancée des Forces armées centrafricaines (FACA) et de la Force multinationale de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC)-(FOMUC)- au nord-est, proche de la trijonction République centrafricaine/Tchad/Soudan, confirme la présence de mouvements rebelles.  Le Gouvernement centrafricain demeure sous la menace de rebelles et de bandes armées établis dans les zones frontalières du Tchad et du soudan et le chef de l’État, François Bozizé, reconnaît lui-même que la « sécurité est gravement menacée dans la partie septentrionale du pays qui vit pratiquement sous occupation et qui met en cause l’intégrité du territoire national ». 


Ces informations contenues dans le rapport du Secrétaire général du 19 octobre, conduit le Conseil à entendre, le 30 octobre 2006, en séance officieuse, le Premier Ministre de la République centrafricaine et le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau d’appui des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine (BONUCA), créé en 2000.  Le 22 novembre, le Conseil proroge jusqu’au 31 décembre 2007 le mandat du Bureau et par une déclaration présidentielle dans laquelle il demande que soit recherchée au niveau sous-régional une solution permettant de stabiliser les frontières du pays.  Il demande aussi aux autorités centrafricaines de faire rapidement le nécessaire pour restructurer les forces armées et renforcer leurs capacités opérationnelles, et encourage la FOMUC à continuer après le 30 juin 2007 d’apporter son appui aux forces centrafricaines. 


Le Conseil reçoit un autre rapport, le 28 décembre, qui signale des activités de troupes rebelles dans le nord du pays, à la préfecture voisine du Darfour, et dans le nord-ouest.  Des hommes armés sont reconnus par les autorités centrafricaines comme des groupes rebelles, qui cherchent à renverser le régime de François Bozizé.  Dans le nord, trois mouvements rebelles sévissent.  Il s’agit de l’Armée pour la restauration de la république et la démocratie, du Front démocratique du peuple centrafricain et de l’Union des forces républicaines.  Le Gouvernement accuse l’ancien Président, Ange-Félix Patassé, d’être en connivence avec les insurgés; certains pensant que l’Union des forces républicaines et les rebelles de l’ouest cherchent à faire jonction pour adopter une stratégie commune.  Par ailleurs, le climat de tension perdure entre le Soudan, le Tchad et la République centrafricaine.  Le Président en exercice de l’Union africaine s’étant dit favorable au déploiement d’une force internationale à la frontière entre ces trois pays; le Secrétaire général a dépêché, du 22 novembre au 3 décembre, une mission multidisciplinaire qui permettra au Conseil de dégager la stratégie nécessaire. 


EUROPE


Bosnie-Herzégovine: une intégration européenne à petits pas


« Le temps est venu de remettre les rênes aux mains des Bosniaques et de ses représentants élus », a déclaré le Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’application de l’Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine, Christian Schwartz-Schilling, au cours de la réunion qu’a tenue le Conseil de sécurité sur la situation dans ce pays, le 18 avril.


L’appropriation du processus d’intégration aux structures euroatlantiques par les dirigeants de la Bosnie-Herzégovine est d’autant plus souhaitable que ce pays a désormais les moyens d’assumer la responsabilité de ses réformes politiques et économiques, ont convenu les délégations à l’appui de l’exposé de M. Schwartz-Schilling.  Ce dernier s’est félicité de l’adoption par le Parlement bosniaque en avril 2006 d’un train de réformes constitutionnelles visant à accélérer la marche vers l’intégration européenne de la Bosnie-Herzégovine. 


Le Conseil de sécurité a affirmé que cette intégration était un préalable à l’émergence d’un État bosniaque européen et pleinement démocratique.  Toutefois, les membres du Conseil ont estimé que la Bosnie-Herzégovine, comme d’autres Etats de la région, ne parviendrait à cet objectif qu’à la condition que soit réglée la question de la coopération avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et que les fugitifs Ratko Mladic et Radovan Karadzic soient arrêtés et traduits à La Haye.


Lors d’une réunion tenue le 11 novembre, Christian Schwartz-Schilling a mis l’accent sur les retards pris dans la réforme des secteurs clefs de la société bosniaque, en particulier ceux de la police, de l’éducation et de l’audiovisuel.  La représentante de la Finlande, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a vivement regretté que la restructuration des services de police ait été reportée, et cela alors que l’Union a clairement fait savoir que sa mise en œuvre était indispensable à la conclusion d’un accord d’association.


Le 21 novembre, le Conseil a autorisé la prorogation de la Force multinationale de stabilisation (EUFOR) à l’appui de l’Accord de paix. Aux termes du projet de résolution 1722 (2006) adopté à l’unanimité, les États Membres reconduisent pour une période de 12 mois l’EUFOR -qui a succédé à la SFOR en 2004- sous la forme, au cours de ce nouveau mandat, d’une structure de commandement et de contrôle unifiée.


S’agissant des aspects militaires de l’Accord, l’EUFOR a été déployée pour occuper le rôle principal dans la stabilisation de la paix.  Le Conseil autorise aussi, par ce texte, les États Membres à maintenir un quartier général de l’OTAN.


Kosovo: Incertitudes et tensions jusqu’à la détermination du statut final de la province


Le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), Søren Jessen-Petersen, a présenté le 14 février une évaluation des progrès accomplis dans la mise en œuvre des « normes pour le Kosovo ».  Ces normes sont relatives, entre autres, au fonctionnement des institutions, au respect de l'état de droit ainsi que des droits de tous les habitants du Kosovo, au développement économique et à l'instauration d'un dialogue normalisé avec Belgrade.  Les délégations ont reconnu, avec M. Jessen-Petersen, que peu de progrès avaient été enregistrés dans la mise en œuvre desdites normes, en particulier celles portant sur les droits des minorités.


L’Union européenne a déclaré s’être pleinement engagée dans ce processus de mise en œuvre en vue d’aider à assurer un avenir au Kosovo au sein de l’Union.  C’est en ce sens que le représentant de la France a souligné que des progrès vers une société démocratique et multiethnique étaient indispensables pour ancrer le statut futur du Kosovo dans l’édifice européen. 


M. Jessen-Petersen a estimé, s’agissant toujours des problèmes liés aux identités culturelles, que les pourparlers sur le statut final du Kosovo représentaient un espoir pour la minorité albanaise.  Ces pourparlers sont conduits sous l’autorité de l’Envoyé spécial des Nations Unies, Martti Ahtisaari, et ont pour but de régler la question du statut après les élections qui se tiendront en Serbie en janvier 2007.  M. Jessen-Petersen a également exhorté les Serbes du Kosovo à participer directement au processus politique et aux institutions provisoires, précisant qu’à cette fin, l’appui de Belgrade serait déterminant. 


Le 20 juin, lors de sa présentation devant le Conseil du rapport du Secrétaire général sur la situation au Kosovo, Søren Jessen-Petersen a déploré que les défaillances persistantes dans l’application des normes nourrissent les arguments de ceux appelant les Serbes du Kosovo à ne pas s’impliquer dans la négociation du statut de la province.  Cette réunion a aussi été l’occasion d’entendre les vues de la Présidente du Centre de coordination de la Serbie pour le Kosovo et Metohija, Mme Sanda Raskovic-Ivic, qui a accusé la MINUK de fermer les yeux sur les actes de violences ethniques menées contre les minorités « non albanaises ».  Dans son intervention, l’Autriche, au nom de l’Union européenne, a demandé à Belgrade et à Pristina de faciliter un statut final du Kosovo qui renforce la stabilité dans les Balkans au lieu de la menacer. 


Lors de sa venue le 13 septembre devant le Conseil, le nouveau Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la MINUK, Joachim Rücker, a déclaré que l’application des normes bénéficiait d’une attention plus grande depuis que le Groupe de contact avait présenté aux institutions provisoires une liste de 13 priorités dans les domaines de la protection et des droits des minorités.  Il a cependant reconnu que des progrès restaient à faire dans les secteurs de la justice et de l’économie, en vue de permettre au Kosovo d’intégrer l’économie mondiale et de rassurer les communautés.  La question des réfugiés albanais a été également examinée par les délégations, qui ont jugé que ceux-ci n’étaient pas assez nombreux à prendre le chemin du retour. 


« Le Kosovo continue d’avancer sur la voie des réformes démocratiques, ces progrès ne devant pas être occultés par le blocage des négociations sur le statut de la province », a déclaré le 13 décembre M. Rücker.  Présentant un nouveau rapport du Secrétaire général sur le Kosovo, le Représentant spécial a déploré les pressions exercées par Belgrade sur les Serbes du Kosovo pour qu’ils boycottent la mise en place des institutions de transition par le Gouvernement de Pristina, sapant ce faisant le travail de la MINUK.  Sanda Raskovic-Ivic a répondu que la non-participation des Serbes dénotait simplement une absence de confiance due à l’insécurité des déplacements à l’intérieur de la province. 


De son côté, l’Envoyé spécial Martti Ahtisaari, qui devait transmettre ses recommandations avant la fin de l’année, a décidé de reporter cette action au début de l’année prochaine, après les élections de février.  Un nouveau report pourrait susciter des tensions et favoriser les extrémistes des deux côtés, ont estimé plusieurs intervenants.  À l’inverse, la Fédération de Russie, estimant que le risque était d’aboutir à une société mono-ethnique au Kosovo, a considéré qu’une pause sur le statut était, à ce stade, une décision de bon sens.


Chypre: Le mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP) prorogé jusqu’au 15 juin 2007


La résolution 1687 (2006) adoptée à l’unanimité le 15 juin par le Conseil de sécurité avait permis dans un premier temps une prorogation de la Force jusqu’au 15 décembre 2006.  Par ce texte, le Conseil se félicitait de ce que la proposition tendant à la mise en place d’un mécanisme de discussions bicommunautaires au niveau technique ait été acceptée, et il encourageait une participation active à ces discussions sous la direction du Représentant spécial du Secrétaire général.  Il se félicitait également de ce que les deux dirigeants chypriote grec et chypriote turc aient convenu de se rencontrer à l’occasion de la prise de fonctions du troisième membre du Comité des personnes disparues.  Il est à noter qu’au cours de cette réunion, le représentant de la Grèce a plaidé pour que des négociations reprennent entre les deux communautés concernées. 


Le 15 décembre, le Conseil a décidé de proroger le mandat de la Force jusqu’au 15 juin 2007. La résolution 1728 (2006) demande, par ailleurs, à la partie chypriote turque et aux forces turques, composées de 40 000 soldats stationnés dans l’île, de rétablir à Strovilia le statu quo militaire qui existait avant le 30 juin 2000.  Il exprime, en outre, son soutien au processus convenu par les dirigeants.  Le Conseil encourage, en outre, la participation active aux discussions entre les deux communautés sous les auspices du Représentant spécial du Secrétaire général, et il demande que la phase préparatoire soit rapidement menée à bien en sorte qu’une véritable mission de bons offices puisse reprendre dès que possible. 


Par ce texte, le Conseil se félicite, par ailleurs, des efforts déployés par la Force pour donner application à la politique de tolérance zéro adoptée par le Secrétaire général concernant l’exploitation et les abus sexuels. 


L’UNFICYP a été créée en 1964 pour prévenir toute reprise des combats entre les communautés chypriote grecque et chypriote turque.  Elle demeure sur l’île afin de surveiller les lignes de cessez-le-feu et la zone tampon et d’entreprendre des activités humanitaires.


Géorgie: devant l’absence de progrès vers un règlement du conflit entre la Géorgie et l’Abkhazie, le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MONUG


Le 13 octobre, les 15 membres du Conseil ont adopté à l’unanimité la résolution 1716 (2006), présentée par la Fédération de Russie.  Par ce texte, ceux-ci, préoccupés par le manque de progrès vers un règlement global du conflit géorgien-abkhaze, ont décidé de proroger le mandat de la Mission d’observation des Nations Unies en Géorgie (MONUG) jusqu’au 15 avril 2007. 


Par ce texte, le Conseil réaffirme aussi l’attachement de tous les États Membres à la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Géorgie.  Il invite instamment les deux parties à respecter dans leur intégralité les accords et arrangements antérieurs relatifs au cessez-le-feu, au non-recours à la violence et aux mesures de confiance.  Par ailleurs, préoccupé par les actions que la partie géorgienne a menées dans la vallée de la Kodori, en juillet dernier, la partie géorgienne, le Conseil invite instamment celle-ci à faire en sorte que la situation dans la région soit conforme aux dispositions de l’Accord de Moscou et à ce qu’il n’y ait aucune présence militaire non autorisée par ledit Accord.  Le Conseil engage enfin les dirigeants abkhazes à prendre en compte la nécessité de veiller au retour dans la dignité des personnes déplacées et des réfugiés. 


Le Conseil de sécurité avait préalablement reconduit par deux fois le mandat de la MONUG.  Le 31 janvier 2006, il avait ainsi adopté à l’unanimité la résolution 1656 (2006) aux termes de laquelle il avait décidé de reconduire la Mission jusqu’au 31 mars. 


Par la résolution 1666 (2006) adoptée, également à l’unanimité, le 31 mars, le Conseil décidait cette fois de proroger le mandat de la MONUG pour une nouvelle période prenant fin le 15 octobre 2006, sous réserve du réexamen de ce mandat, auquel il procèderait le cas échéant si les conditions de sécurité évoluaient, notamment en ce qui concerne le mandat de la force de maintien de la paix de la Communauté des États indépendants (CEI).  Le Conseil a demandé, en outre, aux deux parties, abkhaze et géorgienne, d’exploiter au mieux tous les mécanismes existants afin de parvenir à un règlement pacifique, et de respecter les accords relatifs au cessez-le-feu, au non-recours à la violence et aux mesures de confiance. 


La MONUG a été établie en août 1993 pour vérifier le respect de l’Accord de cessez-le-feu conclu entre le Gouvernement de la Géorgie et les autorités abkhazes de Géorgie.  Le mandat de la MONUG a été élargi à la suite de la signature par les parties de l’Accord sur le cessez-le-feu et la séparation des forces de 1994.


AMÉRIQUE LATINE ET CARAÏBES


Haïti: Soubresauts de la paix


Après l’annonce, le 1er janvier, par le Gouvernement provisoire haïtien, du report à une date indéterminée du premier tour des élections présidentielle et législatives initialement prévues la semaine suivante, le Conseil de sécurité l’invite cinq jours plus tard à tenir ce premier tour d’ici au 7 février.  De son côté, la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) annonce le lancement d’actions militaires visant à rétablir la sécurité publique, indispensable au bon déroulement de ces élections.


Le 7 février 2006, ce sont près de 3,5 millions d’Haïtiens qui se rendent aux urnes pour élire un nouveau Président et un nouveau Parlement, lors des premières élections organisées dans ce pays depuis la chute en 2004 de Jean-Bertrand Aristide.  La tenue du scrutin est marquée par la désorganisation, des tensions et de nombreux blessés lors de mouvements de foule.  Dans le centre de la capitale, plusieurs milliers de personnes manifestent en milieu de journée pour exiger l’ouverture de nouveaux bureaux de vote.  Le Conseil électoral provisoire décide de repousser la fermeture des bureaux de vote dans les centres ayant débuté les opérations avec retard.  Dans une déclaration présidentielle adoptée le 9 février, le Conseil de sécurité demande à toutes les parties de respecter les résultats des élections, de continuer à participer au processus politique et de renoncer à toute forme de violence.  Les résultats préliminaires donnent un net avantage à l’ancien Président d’Haïti, René Préval.


Le 16 février, le Conseil électoral provisoire haïtien (CEP) annonce la victoire de René Préval à l’élection présidentielle avec 51,15% des voix, après un changement du mode de comptabilisation des votes blancs.  Le candidat en deuxième position à l’élection présidentielle, Leslie Manigat, critique la victoire « imposée » de M. Préval, en estimant que la « violence » avait été « récompensée ».  La victoire de M. Préval marque cependant un retour au calme dans le pays.


Le Conseil de sécurité entend le 22 février le Premier Ministre haïtien par intérim.  Un mois avant la prestation de serment de M. Préval, Gérard Latortue, vient « rectifier la mauvaise impression que suscitent parfois les gros titres des journaux trop habitués à projeter une image négative du pays et à occulter les changements réels et profonds qui sont en train de s’y produire ».  Deux ans après le début de la transition démocratique, Gérard Latortue déclare « mission accomplie », au regard du succès des élections malgré les menaces d’ordre institutionnel, organisationnel et sécuritaire.


C’est le Président René Préval qui se rend en personne au Conseil de sécurité le 27 mars pour y participer à une réunion ministérielle, au cours de laquelle la communauté internationale réitère son appui à la reconstruction de l’île.  Citant la pauvreté, le chômage, l’absence d’infrastructures de base et l’insécurité qui affectent son pays, le Président élu demande à la communauté internationale une aide financière accrue.  Le renforcement de l’assistance internationale aux réformes des institutions judiciaires et de la police est indispensable à celui de la démocratie, estime-t-il, en invitant le Conseil à appliquer les dispositions de sa résolution 1212 (1998), relatives à un programme à long terme en faveur d’Haïti, et à la communauté des donateurs et bailleurs de fonds de mettre en œuvre les mécanismes économiques et financiers du « Cadre de coopération intérimaire » (CCI), qui vient d’être prolongé jusqu’en 2007.  Concernant la sécurité dans son pays, le nouveau Président haïtien a sollicité un appui technique et financier plus important pour accélérer la mise en œuvre du programme de démobilisation, désarmement et réintégration des membres des milices et des bandes armées qui terrorisent les populations de certains quartiers et localités d’Haïti.


Saluant le 15 mai, par une déclaration présidentielle, l’investiture de René Préval à la présidence d’Haïti, le Conseil souligne qu’il reste de nombreux défis auxquels Haïti doit faire maintenant face, dont la nécessité d’instaurer un climat de sécurité stable, de consolider les institutions démocratiques, de favoriser la réconciliation nationale, l’ouverture à tous et le dialogue politique, de promouvoir et de défendre les droits de l’homme et l’état de droit, et de renforcer les capacités des pouvoirs publics.


Aussi, après avoir adopté le 14 février la résolution 1658, qui proroge une première fois pour une période de six mois le mandat de la MINUSTAH, le Conseil décide, le 15 août, de le proroger de nouveau jusqu’au 15 février 2007.  Aux termes de la résolution 1702 (2006), le Conseil décide également que la MINUSTAH comportera désormais un contingent d’un maximum de 7 200 militaires de tous rangs confondus et d’un maximum de 1 951 policiers civils.


En effet, comme l’indique le rapport du Secrétaire général (S/2006/592) dont est saisi le Conseil, si le bon déroulement des élections nationales a permis de tourner une nouvelle page de l’histoire d’Haïti, la situation sur plusieurs plans, et notamment en matière de sécurité, continue d’être préoccupante et déstabilisatrice.  La criminalité dans la capitale, Port-au-Prince, constitue encore une grave préoccupation car les sources d’instabilité perdurent et le pays manque encore de moyens pour rétablir l’ordre.  Les institutions de l’État, y compris la Police nationale, l’appareil judiciaire et les administrations publiques, ont en effet besoin d’une assistance considérable afin de pouvoir fonctionner de manière appropriée à tous les échelons, souligne le rapport.


Demandant à la MINUSTAH d’élargir son assistance afin d’aider le Gouvernement haïtien à renforcer les institutions de l’État, en particulier à l’extérieur de Port-au-Prince, le Conseil prie les autorités haïtiennes et la Mission d’instaurer une coordination optimale de façon à lutter contre la criminalité et la violence, en particulier dans les zones urbaines.  La MINUSTAH est également invitée à réorienter ses efforts de désarmement, démobilisation et réintégration, afin de mieux réaliser cet objectif, en mettant en œuvre un programme complet de lutte contre la violence adapté aux conditions locales, comprenant notamment une aide aux initiatives visant à améliorer la gouvernance locale et à renforcer l’état de droit, et à offrir des possibilités d’emploi aux anciens membres des bandes et aux jeunes à risque.


Le Conseil de sécurité prie enfin les autorités haïtiennes de mener à bien dès que possible le second tour des élections législatives, locales et municipales, et demande à la MINUSTAH de fournir à cet effet toute l’assistance voulue, conformément à son mandat, avec l’appui des organisations régionales et sous-régionales.  Il demande à nouveau à la MINUSTAH d’appuyer le processus constitutionnel et politique en Haïti, y compris en offrant ses bons offices, et de favoriser le dialogue et la réconciliation au plan national.


Le 3 décembre, 29 000 candidats environ briguent quelque 8 000 sièges dans des assemblées municipales et locales, lors des premières élections tenues à ce niveau en 10 ans. Un second tour a lieu pour pourvoir trois sièges de sénateurs et 11 sièges de députés, les élections législatives qui ont eu lieu auparavant ayant dû être interrompues, dans certaines circonscriptions, pendant le scrutin.  Le lendemain, la MINUSTAH exprime sa satisfaction devant « le bon déroulement de ces élections », troisième étape du processus de reconstruction démocratique d’Haïti.  Celles-ci ont néanmoins été marquées par un climat de violence, notamment dans le centre du pays.  C’est pour cette raison que le Secrétaire général, dans son rapport en date du 19 décembre 2006 (S/2006/1003), recommande que la Mission soit prolongée d’une nouvelle période de 12 mois, avec les effectifs militaires et policiers actuellement autorisés.


AUTRES ASPECTS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES


La dernière résolution adoptée par le Conseil de sécurité en 2006 –le 23 décembre précisément-, marque l’apogée d’une série de séances consacrées cette année à la protection des civils dans les conflits armés dans tous ses aspects.  Aux termes de la résolution 1738, le Conseil condamne les attentats délibérés perpétrés contre des journalistes, des professionnels des médias et le personnel associé en période de conflit armé, rappelant qu’ils doivent être considérés comme des personnes civiles, respectés et protégées en tant que tels.


Dès le 28 avril, le Conseil renforce les mesures de protection des civils en période de conflit armé en adoptant la résolution 1674 (2006), qui réaffirme les dispositions du Document final du Sommet mondial de 2005 relatives à la responsabilité de protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, de la purification ethnique et des crimes contre l’humanité.  Par ce texte, il souligne que les États ont l’obligation de mettre fin à l’impunité et de traduire en justice quiconque est responsable de ces crimes.


Le texte vise tous les actes de violence et sévices commis en période de conflit armé, en particulier en ce qui concerne la torture et autres traitements prohibés, la violence sexuelle et la violence à motivation sexiste, la violence contre les enfants, le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats, la traite des êtres humains, les déplacements forcés, et le déni délibéré d’aide humanitaire.


Le 28 juin, le Conseil réfléchit aux moyens de « transformer sa résolution 1674 en une véritable plate-forme d’action », selon l’expression du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des Nations Unies pour les secours d’urgence, Jan Egeland, qui fait état de chiffres saisissants: selon ses estimations, 1 200 personnes meurent chaque jour en Iraq, au Soudan, en Ouganda, en Somalie, en Afghanistan ou en République démocratique du Congo (RDC). 


À cette occasion, le Coordonateur des secours d’urgence encourage vivement le Conseil à imposer des sanctions ciblées, lorsque, comme en Côte d’Ivoire, les populations civiles et le personnel humanitaire sont pris délibérément pour cible, tandis qu’en matière de lutte contre l’impunité, la saisine de la Cour pénale internationale (CPI) a été largement évoquée.


Par ailleurs, les délégations participant à ce débat soulignent l’importance de revoir périodiquement les mandats des opérations de maintien de la paix et de les affiner pour maximiser leur impact.  Ceci exige au préalable l’accès à des informations fiables, ont-elles fait remarquer, en notant la création du mécanisme permanent de protection (PROCAP) d’OCHA et la création prochaine à l’intention des équipes de pays de l’ONU, d’un mécanisme normalisé pour surveiller et faire rapport sur la protection des civils.


Lors de sa dernière intervention au Conseil de sécurité, le 4 décembre, en sa qualité de Secrétaire général adjoint, Jan Egeland estime que la protection des civils doit s’inscrire au cœur des mandats des opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  Ainsi, si le nombre de conflits a diminué de 40% depuis 1989, fait-il observer, la violence perpétrée contre les non-combattants a augmenté de 55% entre 1989 et 2005, la hausse la plus importante ayant été constatée ces cinq dernières années.  À l’heure où les civils sont parfois otages de situations auxquelles ils ne sont pas parties, comme au Darfour ou dans le Territoire palestinien occupé, M. Egeland insiste sur l’indispensable « dépolitisation » du concept de « responsabilité de protéger », entériné lors du Sommet mondial de 2005.  Une attention toute particulière devrait être accordée à la protection des personnes déplacées et des réfugiés, essentiellement des femmes et des enfants.


C’est la situation des enfants dans les conflits armés, catégorie particulièrement vulnérable, qui fait l’objet d’un débat du Conseil de sécurité le 24 juillet 2006, 10 ans après la publication du rapport « Graça Machel », l’ancienne Première Dame du Mozambique et actuelle épouse de Nelson Mandela, auteur du premier rapport sur cette question: 250 000 d’entre eux opèrent toujours dans le monde et des dizaines de milliers de filles continuent d’être victimes de viols et d’autres formes de violence sexuelle de la part des belligérants.  En outre, depuis 1996, les conflits ont causé la mort de deux millions d’enfants, le déplacement de 12 millions d’autres, tandis qu’au moins six millions d’entre eux ont été blessés ou mutilés, indique la Représentante spéciale du Secrétaire général pour cette question.


Cette séance marque l’occasion, pour le Conseil de sécurité, de réaffirmer sa détermination à faire respecter et appliquer sa résolution 1612, du 26 juillet 2005, cadre général pour la protection des enfants touchés par la guerre.  Ce texte prévoyait des mesures spécifiques pour mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants soldats et exprimait l’intention du Conseil de sécurité de combattre l’impunité en imposant des sanctions ciblées.  C’est dans le cadre de ce mécanisme de surveillance qu’un projet pilote a été lancé en RDC, où le recrutement et l’emploi d’enfants dans des forces de groupes armés, les enlèvements, sévices sexuels, meurtres et mutilations se poursuivent, en particulier dans les provinces du Katanga, de l’Ituri et du Nord-Kivu, et restent pour la plupart impunis.  La résolution présidentielle adoptée en fin de séance souligne l’importance qu’il y a à investir durablement dans le développement, notamment dans la santé, l’éducation et la formation professionnelle, afin d’assurer une bonne réinsertion des enfants dans la société et d’empêcher qu’ils ne soient recrutés de nouveau.


Malgré des avancées indiscutables, beaucoup reste à faire sur le terrain pour que cesse le recrutement des enfants soldats, estiment le 28 novembre les membres du Conseil, saisis de deux rapports du Secrétaire général sur la question, le premier concernant la Côte d’Ivoire, le second le Burundi (parus respectivement sous les cotes S/2006/835 et S/2006/851).  Ces deux documents, qui dressent un tableau accablant de la situation dans ces deux pays, dénoncent en particulier les violences sexuelles contre les filles.  La détermination du Conseil de sécurité à lutter en ce domaine est réaffirmée aux termes d’une déclaration présidentielle adoptée en fin de séance et qui appelle les États et les parties concernés à collaborer avec les Nations Unies pour mettre fin à l’enrôlement d’enfants.  Intervenant au cours de cette réunion au niveau ministériel, le Secrétaire général appelle de son côté le Conseil à consolider les acquis et à élargir la portée des initiatives de lutte contre l’implication des enfants dans les conflits, se félicitant des premières poursuites intentées par la CPI.


La Présidente de la Cour internationale de Justice (CIJ) elle-même, Rosalyn Higgins, répond le 22 juin 2006 à l’invitation du Conseil de sécurité, qui débat ce jour-là des moyens de faire un meilleur usage de l’architecture juridique dont le Conseil dispose dans la promotion de l’état de droit en période de conflit et postconflit; de la lutte contre l’impunité pour les crimes internationaux; et du renforcement de l’efficacité et la crédibilité des sanctions.  Appuyée par la majorité des délégations, Mme Higgins a plaidé pour un recours plus systématique du Conseil auprès de la Cour.


Le 26 octobre, le Conseil de sécurité examine les progrès réalisés dans l’application de la résolution 1325 (2005), qui porte expressément sur la participation des femmes aux processus de rétablissement et de consolidation de la paix.  En fin de séance, une déclaration présidentielle condamne l’omniprésence des violences exercées contre les femmes dans les conflits armés et « appelle toutes les parties à des conflits armés à pourvoir pleinement et efficacement à [leur] protection », tout en insistant sur « la nécessité de mettre fin à l’impunité ».  Condamnant, par ailleurs, tout acte de violence sexuelle commis par des membres du personnel des missions de maintien de la paix des Nations Unies, le Conseil se dit favorable à l’institution de codes de conduite et de procédures disciplinaires afin de parvenir à la politique de « tolérance zéro » décrétée par le Secrétaire général.  La nécessité de faire une place à une « composante femme » dans les opérations de maintien de la paix pour y favoriser la parité est, par ailleurs, soulignée.


Le 20 mars voit l’occasion pour le Conseil de rappeler à quel point la protection des civils en période de conflit dépend étroitement de la circulation des armes légères et de petit calibre.  Dans le cadre de son débat annuel sur la question, ses membres, ainsi que les délégations participantes, se félicitent de l’adoption par l’Assemblée générale, en décembre 2005, d’un instrument international visant à permettre aux États de procéder à l’identification et au traçage rapides et fiables de ce type d’armes.  Elles regrettent cependant qu’il ne soit ni juridiquement contraignant, ni doté de dispositions sur les munitions.  Alors qu’un contrôle efficace des embargos et le renforcement des processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) sont identifiés comme des facteurs susceptibles de lutter contre les armes légères et de petit calibre, plusieurs représentants ont mis l’accent sur la nécessité de resserrer les interactions du Conseil avec l’Assemblée générale dans le cadre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, adopté lors de la Conférence des Nations Unies sur les armes légères, en juillet 2001.


Par ailleurs, dans le cadre de ses efforts de non-prolifération, le Conseil décide, le 27 avril, de proroger, pour une nouvelle période de deux ans, le mandat du Comité chargé de suivre la mise en œuvre de la résolution 1540 (2004) relative au non-accès des acteurs non étatiques aux armes de destruction massive (ADM).


Sanctions


Lors du débat du Conseil de sécurité du 22 juin sur le renforcement du droit international, le représentant de la France, Jean-Marc de La Sablière, se prononce pour la création au sein du Secrétariat, d’un « point focal » qui recevrait directement les demandes de radiation ou d’exemption des listes de personnes visées par des sanctions.  Cette proposition s’inspire à la fois des recommandations du Groupe de travail du Conseil sur les sanctions saluées par la résolution 1732, adoptée le 21 décembre, ainsi que des conclusions du rapport commandité au Watson Institute for International Studies, de Brown University, par l’Allemagne, la Suède et la Suisse, sur le lien entre sanctions ciblées et droits de l’homme.


Elle devient réalité lorsque le Conseil de sécurité adopte à l’unanimité, le 19 décembre, la résolution 1730, qui crée une procédure de radiation pour les personnes et les entités touchées par des sanctions internationales.  En adoptant cette nouvelle procédure de radiation, le Conseil demande au Secrétaire général de désigner un « point focal » chargé de recevoir les demandes de radiation.  Celui-ci sera chargé, en particulier, de les transmettre aux autorités gouvernementales à l’origine de l’inscription sur la liste, ainsi qu’au pays de résidence ou au pays auquel appartient la personne ou l’entité visée par les sanctions.  Soulignant que ce dispositif pouvait encore être amélioré, les membres du Conseil rappellent qu’ils ont à cœur d’assurer que des procédures équitables et claires soient instituées pour l’inscription d’individus et d’entités sur les listes des comités des sanctions et pour leur radiation de ces listes, ainsi que pour l’octroi d’exemptions pour raisons humanitaires. 


La résolution 1730 rappelle que les sanctions sont un instrument important de maintien et de rétablissement de la paix et de la sécurité internationales.  Mais avec le développement des régimes de sanctions applicables à des individus plutôt qu’à des entités, fait remarquer la représentante de la France, l’inadéquation des procédures de radiation des listes était devenue de plus en plus évidente.  Le sentiment grandissant qu’une fois inscrit sur une liste, on ne pouvait plus en être radié décrédibiliserait, a-t-elle dit, les comités des sanctions.  En facilitant la prise en compte des demandes de radiation des listes, le point focal permettra de renforcer l’efficacité des régimes de sanctions tout en conférant une plus grande neutralité aux procédures de radiation.


Les Présidents des Comités du Conseil de sécurité chargés de surveiller le respect des sanctions imposées au Libéria, à la Côte d’Ivoire, au Soudan et à la Sierra Leone, saisissent l’occasion de leur bilan annuel, le 20 décembre, pour faire part des divergences de vues qui persistent au sein de ces organes subsidiaires.  Il s’agit surtout du manque d’unité et du manque de volonté politique nécessaires à l’inscription sur les listes de personnes visées par les sanctions de nouveaux individus accusés d’incitation à la haine et à la violence dans certains pays, notamment en Côte d’Ivoire et au Soudan.  Par ailleurs, le 22 décembre, alors que le Conseil de sécurité venait d’adopter la résolution 1735 (2006), qui renforce le régime des sanctions à l’encontre du réseau Al-Qaïda, d’Oussama ben Laden et des Taliban, l’Ambassadeur du Qatar questionne l’objectivité de l’équipe chargée de surveiller l’application par les États de ces mesures.


Lutte contre le terrorisme


Dans une déclaration présidentielle en date du 20 décembre, le Conseil de sécurité réaffirme que le terrorisme constitue l’une des menaces les plus graves pour la paix et la sécurité internationales et réitère sa détermination à combattre toutes les formes de terrorisme, comme la Charte des Nations Unies lui en a confié la responsabilité.  Deux déclarations présidentielles, adoptées les 25 avril et 12 juillet, condamnent également sans équivoque les attentats perpétrés à Dahab, en Égypte, et dans différentes régions de l’Inde, notamment à Bombay.


En matière de lutte contre le terrorisme, le Conseil de sécurité dispose de trois Comités qu’il a établis en vertu de ses résolutions 1267 (1999), 1373 (2001) et 1540 (2004).  Ces trois organes subsidiaires s’occupent respectivement de la mise en œuvre des sanctions contre Al-Qaida et les Taliban, de la lutte antiterroriste et de la prévention de la prolifération des armes nucléaires, chimiques et biologiques.


Venus à présenter cette année leurs travaux trimestriels les 21 février, 30 mai et 28 septembre, les Présidents de ces organes subsidiaires sont invités par le Conseil à renforcer leur dialogue et leur coopération, ainsi qu’à rationaliser leurs méthodes de travail.  Plusieurs délégations soulignent également la nécessité de respecter le droit international, les droits de l'homme et les droits des réfugiés dans la lutte contre le terrorisme pour la rendre efficace et légitime.  C’est dans ce contexte qu’est saluée la coopération entre l’ONU et Interpol, consacrée le 8 août 2006 par l’adoption de la résolution 1699 (2006).


De son côté, l’Assemblée générale adopte le 8 septembre 2006, la Stratégie antiterroriste mondiale de l’Organisation des Nations Unies, aux termes de laquelle les États Membres se disent déterminés à s’abstenir de toute activité à caractère terroriste ou d’y participer, et à prendre les mesures pratiques pour que leurs territoires respectifs ne soient pas utilisés à des fins terroristes.  Cette Stratégie engage également les Etats à coopérer pleinement pour enquêter, poursuivre et faire traduire en justice les responsables d’actes de terrorisme.


Quelques jours après le lancement officiel, le 19 septembre, de cette Stratégie, les délégations présentes lors du dernier bilan des travaux des Comités de lutte contre le terrorisme les invitent à renforcer la coopération avec les organisations régionales et la société civile.  Plus largement, la question de la coopération de l’ONU avec les organisations régionales et sous-régionales fait l’objet d’un débat annuel le 20 septembre, dont ressort la nécessité d’améliorer constamment cette interaction pour mieux faire face à l’émergence de conflits multidimensionnels.  Une déclaration présidentielle adoptée à l’issue de cette réunion ministérielle entérine la volonté du Conseil d’élargir cette concertation.  Plus tôt dans l’année, les membres du Conseil ont entendu un exposé du Président de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), le Ministre des affaires étrangères de la Belgique, Karel De Gucht, qui s’est engagé le 16 janvier à promouvoir davantage les synergies et les complémentarités entre les Nations Unies et l’OSCE.  Le Président en exercice de l’Union africaine et Président de la République du Congo, Denis Sassou-Nguesso, est également venu, le 31 mai, plaider devant le Conseil pour un renforcement du partenariat instauré entre les Nations Unies et l’Union.


Tribunaux pénaux internationaux


À deux reprises en 2006, les 7 juin et 15 décembre précisément, les Présidents et Procureurs des Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et le Rwanda (TPIR) viennent rendre compte de la mise en œuvre de la Stratégie d’achèvement de leurs travaux, selon laquelle l’achèvement des procès de première instance est fixé d’ici à la fin 2008 et la fin des travaux en 2010.


Pour eux, le succès de la stratégie d’achèvement dépend principalement de deux facteurs: l’arrestation des fugitifs et la capacité des juridictions nationales de se saisir des affaires impliquant des personnes de rang intermédiaire ou subalterne, que leur enverraient les Tribunaux, en se fondant sur deux critères: l’exclusion de la peine de mort et le strict respect des garanties judiciaires.  Or, le TPIY comptabilise toujours six fugitifs, dont Mladic, Karadzic et Djordjevic, tandis que pas moins de 18 accusés échappent toujours au TPIR, dans les deux cas principalement en raison du manque de coopération et de volonté politique des États concernés.  La faiblesse de certaines juridictions nationales est également mise en cause par les Présidents et les Procureurs.


Comme l’ont fait remarquer les membres du Conseil, juges et procureurs, il semble que les personnes recherchées par les Tribunaux espèrent pouvoir se soustraire à la justice internationale après la clôture de ces deux juridictions.  Il serait donc regrettable que la stratégie d’achèvement des travaux soit appliquée avant l’arrestation et le jugement des individus accusés des crimes les plus graves.


Le Conseil a, par ailleurs, tenu cette année cinq autres réunions concernant la plupart du temps la nomination ou la prorogation du mandat de juges ad litem appelés à siéger dans ces deux juridictions (28 février, 10 avril, 13 juin, 29 août et 13 octobre).


Opérations de maintien de la paix 


Cette année, le Conseil de sécurité a organisé deux débats sur les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  Le premier, en date du 22 février, porte sur les conclusions d’un audit auquel a procédé le Bureau des services de contrôle interne (BSCI), entre juillet et décembre 2005, sur les pratiques de gestion et de passation des marchés du Département des opérations de maintien de la paix (DPKO).  Ces conclusions sont sans appel: l’inadéquation des mécanismes de contrôle conjuguée avec l’absence de supervision et de directives a permis des surévaluations budgétaires, voire des malversations, des cas de fraude et de gaspillage.  S’exprimant en fin de séance, le Groupe des 77, la Chine et le Mouvement des pays non alignés nient au Conseil de sécurité le droit d’examiner les questions liées à la gestion de l’ONU qui, selon eux, relève exclusivement des prérogatives de l’Assemblée générale et de sa Commission administrative et budgétaire.


Le lendemain, un exposé du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, permet au Conseil d’examiner les actions entreprises par son Département pour mettre un terme aux abus sexuels dont se sont rendus coupables des soldats de la paix et des membres du personnel civil sur le terrain.  À cette occasion, les délégations présentes ont plaidé pour l’adoption d’une stratégie globale de lutte contre les abus sexuels commis par ces personnels.


Le Conseil de sécurité adopte le 6 décembre son rapport annuel à l’Assemblée générale, qui couvre la période allant du 1er août 2005 au 31 juillet 2006 (S/2006/942).  Après avoir transmis, le 21 juin, au Comité d’admission de nouveaux membres de l’ONU la demande de la République du Monténégro, le Conseil recommande le lendemain à l’Assemblée générale d’admettre le Monténégro en qualité d’État Membre. 


Départ de Kofi Annan


Le 22 décembre, le Conseil rend hommage au Secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, en adoptant par acclamation la résolution 1533 (2006), dans laquelle il lui exprime sa « profonde gratitude » pour « son dévouement aux buts et principes énoncés dans la Charte de l’ONU et au développement des relations amicales entre les nations ».  Malgré le bilan globalement positif du Conseil qui adopte désormais des mandats plus cohérents et plus solides en en surveillant mieux l’application, Kofi Annan a exprimé ses regrets de quitter son poste alors que le Moyen-Orient se trouve dans une situation toujours aussi dangereuse et que le peuple du Darfour attend d’être secouru.  Le Secrétaire général sortant a également souligné la nécessité d’avancer en ce qui concerne l’élargissement et la représentativité de la composition du Conseil.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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