LE CONSEIL DE SECURITE ENVISAGERAIT DES MESURES POUR ENRAYER LA FACULTE DU RUF DE CONTOURNER LES SANCTIONS ET DE POURSUIVRE LE CONFLIT EN SIERRA LEONE
Communiqué de presse CS/2098 |
Conseil de sécurité
4264e séance -matin et après-midi
LE CONSEIL DE SECURITE ENVISAGERAIT DES MESURES POUR ENRAYER LA FACULTE DU RUF DE CONTOURNER LES SANCTIONS ET DE POURSUIVRE LE CONFLIT EN SIERRA LEONE
Il examine un rapport sur les «diamants de la guerre»
Le Conseil de sécurité, réuni, ce matin, sous la Présidence de M. Kishore Mahbubani (Singapour), a examiné le rapport de son Groupe d’experts chargé de rassembler des informations sur les violations des sanctions sur les armes et les diamants imposées au Revolutionary United Front (RUF), par les résolutions 1132 du 8 octobre 1997 et 1306 du 5 juillet 2000. Selon le Groupe d’experts, les diamants sont devenus pour le RUF une importante ressource au service des ambitions militaires qu’il nourrit depuis 1991 malgré les efforts de paix, en particulier la signature de l’Accord de paix de Lomé du 7 juillet 1999 et le déploiement de quelque 13 000 hommes de la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL), créée par la résolution 1270 du 22 octobre. Les estimations des recettes tirées par le RUF de ces «diamants de la guerre» – diamants provenant de zones contrôlées par des forces combattant le gouvernement légitime – varient entre 25 à 125 millions de dollars par an.
Le rapport du Groupe d’experts décrit, dans le détail, la manière dont le RUF peut, dans un contexte international de réglementations laxistes, jouer de ses complicités au niveau des Etats et des individus pour écouler des diamants, acheter et acheminer des armes et, à cette fin, contourner les règles d’utilisation des aéronefs. A cet égard, la Gambie et la Côte d’Ivoire ainsi que le Libéria ont mis en cause la véracité des allégations les concernant tandis que le Burkina Faso, la Belgique, le Niger et l’Observateur de la Suisse ont fait part des mesures prises en faveur d’un respect plus strict de leur législation. Au nombre des complices du RUF, le Groupe d’experts a identifié surtout le Libéria qui, outre, son rôle majeur dans l’écoulement «des diamants de la guerre» et le contournement des réglementations de l’aviation civile internationale, a été confirmé dans celui d’appui actif au RUF et de fournisseur d’entraînement militaire, d’armes, de soutien logistique, de base de lancement des attaques ou encore de zone de retrait, et ce, malgré un embargo sur les armes imposé en 1992 par la résolution 788. Dans un rapport de 71 pages, le Groupe d’experts formule un ensemble de recommandations précises pour traiter de ces violations, lesquelles ont été appuyées par de nombreuses délégations, en particulier, la Sierra Leone. Le représentant sierra-léonais a exhorté le Conseil à endosser l’ensemble des recommandations dans une résolution «contraignante, adoptée au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies» et a rappelé au Conseil, dans ce contexte, l’appel en faveur d’une modification du mandat de la MINUSIL pour la rendre en mesure de travailler plus énergiquement à la cessation du conflit.
S’agissant des diamants, le Groupe d’experts recommande notamment l’harmonisation des écritures concernant les importations de diamants bruts; et l’instauration, dans les pays de l’Afrique de l’Ouest, d’un système de certification généralisé fondé sur celui du Gouvernement sierra-léonais, qui doit être suivi de l’établissement d’un système international. Accusant le Groupe d’experts d’outrepasser son mandat par des «mesures radicales» en lieu et place de recommandations visant au respect strict des sanctions, la Fédération de Russie a rappelé qu’au niveau intergouvernemental, aucun accord n’est en vue quant à l’établissement d’un système international de certification. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni, en revanche, ont inclus la recommandation du Groupe d’experts visant l’imposition d’un embargo sur les diamants en provenance du Libéria dans un projet de résolution soumis à l’examen du Conseil. Défendant le texte dont ils sont coauteurs, ces deux délégations ont argué de la nécessité de mettre fin à la politique de déstabilisation du Président du Libéria, M. Charles Taylor, dont l’appui aux mouvements rebelles en Guinée est également prouvé. A ce propos, le représentant de la Guinée a indiqué que son pays est victime d’attaques de groupes rebelles commanditées à partir de Monrovia et appuyées par le RUF, en jugeant « plus qu’impérieux » de mettre fin aux terroristes des autorités du Libéria. Outre, l’embargo sur les diamants, le projet de résolution prévoit des interdictions frappant les armes, les vols d’aéronefs, la vente de bois et le déplacement des hauts fonctionnaires du gouvernement.
En réaction à cela, le Ministre des affaires étrangères du Libéria a déclaré que, dans ces conditions, son Gouvernement ne peut maintenir « son engagement dans la recherche de la paix en Sierra Leone », conformément au mandat conféré par la Communauté pour le développement de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Le Gouvernement libérien, a-t-il expliqué, s'est lancé dans une politique alternative de désengagement de la Sierra Leone, illustrée notamment par l’expulsion de tous les membres du RUF. Si les délégations ont émis des doutes quant à la sincérité de ce changement de politique, beaucoup d’entre elles ont néanmoins souhaité une réflexion approfondie avant l’imposition de sanctions et la prise en considération des points de vues des Etats de la CEDEAO. La France a souhaité que les sanctions s’inscrivent dans une durée limitée, qu’elles ne pénalisent pas les populations libériennes, qu’elles soient liées à des critères précis de levée et qu’elles ne gênent pas le possible développement d’une solution avec l’aide de la CEDEAO.
La recommandation du Groupe d’experts tendant à créer, au sein du Secrétariat des Nations Unies, un mécanisme permanent de contrôle et de suivi du respect des sanctions a reçu l’assentiment de la majorité des délégations. Certaines d’entre elles, comme la Norvège, ont cependant jugé nécessaire de mener une réflexion plus avant sur le mandat et le format d’un tel mécanisme dont la création serait conforme à la résolution que l’Assemblée générale a adoptée, le 1er décembre, sur le rôle des diamants dans les conflits.
Outre les délégations citées, les pays membres suivants du Conseil ont pris la parole: Jamaïque, Mali, Colombie, Tunisie, Chine, Irlande, Maurice, Ukraine et Singapour. Les représentants de la Suède, au nom de l’Union européenne et des pays associés et du Canada sont également intervenus. Le rapport du Groupe d’experts a été présenté par le Président du Comité chargé de l’application des sanctions contre le RUF, M. Anwarul Karim Chowdhury (Bangladesh).
LA SITUATION EN SIERRA LEONE
Commerce des diamants et des armements en relation avec la Sierra Leone (S/2000/1195)
Le rapport du Groupe d'experts formule des recommandations qui visent notamment à régler la question du soutien apporté au Revolutionary United Front (RUF) de la Sierra Leone par le Liberia et son Président. Le Groupe d'experts note avec préoccupation que les résolutions du Conseil de sécurité concernant les diamants et les armes sont violées en toute impunité. En ce qui concerne les diamants, le Groupe rappelle que plus de 250 millions de carats sont extraits dans le monde chaque année, et que la Sierra Leone en a produit entre 2 millions de carats, dans les années 60, et 200 000 carats au milieu des années 90. De 1997 à 1999, seulement 36 384 carats ont été exportés officiellement de la Sierra Leone. Les diamants sont devenus la principale source de revenus du Revolutionary United Front (RUF), qui a lancé la guerre en 1991. Une grande partie des diamants du RUF sont vendus à Kenema et ailleurs en Sierra Leone. Ils sont pour la plupart sortis en fraude du pays. Des diamants du RUF ont aussi été vendus clandestinement en Guinée, mais c'est par le Libéria que transite la plus grande partie des diamants du RUF en quittant la Sierra Leone. Selon le Groupe, l'une des principales difficultés pour suivre le mouvement des diamants bruts, qu'il s'agisse ou non de ceux qui servent à financer la guerre, tient aux disparités dans la façon d'enregistrer les importations de diamants dans les grands centres de négoce. En outre, on ne dispose généralement pas de statistiques et, en outre, la distinction entre "pays d'origine" des diamants (pays d'extraction) et leur "pays de provenance" (pays dont les diamants ont été importés en dernier) n'a pas été faite jusqu'à récemment.
Le Groupe estime qu'il est impératif d'instaurer un système de certification généralisé fondé sur celui qu'à adopté la Sierra Leone. Dans l'immédiat et en l'absence d'un tel système, il est recommandé d'exiger de tous les pays d'Afrique de l'Ouest exportateurs de diamants, et tout particulièrement la Guinée et la Côte d'Ivoire, qu'ils appliquent des systèmes de certification analogues au système sierra-léonais. Si ces pays ne se sont pas exécutés dans un délai de six mois, le Conseil de sécurité devrait imposer un embargo international sur les diamants qui en proviennent. Le Groupe recommande de soumettre à l'embargo tous les diamants en provenance du Libéria jusqu'à ce que ce pays ait démontré de façon convaincante qu'il ne participe plus au trafic d'armes vers la Sierra Leone ou de diamants originaires de celle-ci. Le Conseil de sécurité devrait immédiatement soumettre à l'embargo tous les diamants dits gambiens jusqu'à ce que la concordance entre les exportations et importations de diamants de la Gambie puisse être établie. Il est urgent et impératif que les grands centres de négoce (la Belgique, le Royaume-Uni, la Suisse, l'Afrique du Sud, l'Inde, les Etats-Unis et Israël) se mettent d'accord pour harmoniser les écritures concernant les importations de diamants bruts et adoptent un système qui fasse clairement apparaître non seulement le pays de provenance mais aussi le pays d'origine. Chaque pays exportateur devrait établir un rapport statistique sur sa production annuelle et tous ces rapports devraient être compilés par le Conseil mondial du diamant et/ou l'organe de certification qui devrait résulter du processus de négociation intergouvernemental de Kimberly. Les pays d'origine devraient être distingués des pays de provenance. Le gouvernement de pays où se trouve une zone franche doivent prendre la responsabilité de la vérification des indications communiquées sur les diamants, avant leur réexportation. Cette remarque vaut en particulier pour la Suisse en raison des grandes quantités de diamants qui transitent par ses Freiläger et perdent ainsi leur traçabilité. Ayant été frappé par l'étendue des violations des sanctions décrétées par le Conseil de sécurité, qu'il s'agisse des armes ou des diamants, le Groupe estime qu'il serait préférable que le Conseil de sécurité dispose d'un mécanisme faisant partie de l'ONU, de contrôle et de suivis continus du respect des sanctions et des progrès dans la réalisation des objectifs fixés par la résolution sur la question adoptée le 1er décembre 2000 sur la question.
Dans ses recommandations concernant le contrôle des armes et de la circulation aérienne, le Groupe d'experts recommande d'interdire de vol tous les aéronefs portant un numéro d'immatriculation "EL-" et basés dans des aéroports autres que libériens, avec effet immédiatement et jusqu'à ce que les dispositions figurant dans les recommandations qu'ils ont émises aient été appliquées. L'interdiction inclut les avions basés à Chardjah et d'autres aéroports dans les Emirats arabes unis, au Congo-Brazzaville, en République démocratique du Congo, au Gabon, en Angola, au Rwanda et au Kenya. Il faudrait conseiller aux autorités aéroportuaires et aux opérateurs d'avions immatriculés au Libéria au cours des cinq dernières années de tenir toute leur documentation, leurs livres de bord et registres, et leurs manifestes de chargement prêts pour inspection. Il est recommandé en outre d'intimer à tous les exploitants d'aéronefs inscrits au registre libérien, où qu'ils soient basés, de déposer leurs certificats de navigabilité et permis d'exploitation ainsi que leurs documents d'assurance auprès du siège de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) à Montréal (Canada), y compris la documentation relative aux inspections effectuées les cinq dernières années. Les aéronefs de tous les exploitants qui ne se conformeraient pas à cette instruction devraient être interdits de vol définitivement. Les aéronefs qui ne répondraient pas aux normes de l'OACI devraient être interdits de vol définitivement. Le Groupe recommande également que l'on enquête sur toutes les importations d'armes et de matériel connexe au Burkina Faso effectuées ces cinq dernières années. Il recommande en outre que tout État ayant exporté des armes au Burkina Faso au cours de cette période mène une enquête sur l'utilisation finale effective de ces armes, et rende compte des résultats de cette enquête au Conseil de sécurité et au Programme de coordination et d'assistance pour la sécurité et le développement établi en vertu du Moratoire de la CEDEAO.
Compte tenu des cas de violation des sanctions sur lesquels le Groupe d'experts a enquêté et des informations rassemblées dans la région, le Groupe recommande au Conseil de sécurité d'encourager le renforcement du Programme de coordination et d'assistance pour la sécurité et le développement de la CEDEAO, avec l'appui d'Interpol et de l'Organisation mondiale des douanes. Le Conseil de sécurité devrait encourager les États membres de la CEDEAO à conclure des accords bilatéraux contraignants entre États ayant des zones frontalières communes, afin de mettre en place un système de contrôle efficace, collectif et convenu au niveau international comprenant l'inscription dans les registres, la délivrance de permis, et la collecte et la destruction des armes légères et des armes portatives. Dans le présent rapport, le Groupe d'experts a identifié certains courtiers en armes privés et intermédiaires responsables de la fourniture d'armes au RUF. Il faudrait élaborer un projet visant à déterminer les caractéristiques de ces courtiers avec la coopération d'Interpol. De même, vu l'importance des transports aériens dans la violation des sanctions, il faudrait déterminer les caractéristiques des principales compagnies de transport participant à ces pratiques, afin de trouver les moyens de renforcer encore l'application des sanctions.
Le Groupe estime que la responsabilité de l'arrivée massive d'armes en Afrique de l'Ouest incombe aux pays producteurs de ces armes comme à ceux qui les transportent et les utilisent. Le Conseil de sécurité doit trouver les moyens de restreindre l'exportation d'armes, surtout en provenance d'Europe orientale, dans les zones de conflit se trouvant sous embargo régional ou embargo de l'ONU. Il faudrait aussi envisager de décréter un embargo sur les exportations d'armes en provenance de certains pays producteurs, tout comme on a imposé un embargo sur les diamants venant de certains pays producteurs, jusqu'à ce qu'aient été mis au point des plans acceptables de certification. Il conviendrait de modifier les embargos décrétés par le Conseil de sécurité actuellement en vigueur de façon à y inclure clairement l'interdiction de la fourniture d'entraînement militaire et paramilitaire. Outre les recommandations qui précèdent, le Groupe est d'avis qu'il conviendrait d'envisager de faire appliquer par tous les États Membres de l'ONU une interdiction de voyage semblable à celle que les États-Unis imposent déjà aux hauts fonctionnaires et aux diplomates libériens, jusqu'à ce que le Libéria cesse définitivement d'appuyer le RUF et de contrevenir à d'autres sanctions imposées par l'ONU.
Déclarations
Présentant le rapport du Groupe d'experts sur la question du commerce des diamants et des armements en relation avec la Sierra Leone, M. KARIM ANWARUL CHOWDHURY, Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1132 (1997) concernant ce pays, a rappelé que les critères de vérification du Groupe ont mis l'accent sur les preuves. Le Groupe a notamment convenu qu'il fallait au moins deux sources d'informations crédibles et indépendantes pour étayer toute conclusion. Il a rappelé que les experts se sont rendus dans 21 pays, y compris les pays d'Afrique de l'Ouest concernés ainsi que les principaux centres de commerce et de polissage des diamants. Le Groupe a examiné comment et pourquoi les "diamants de la guerre" de la Sierra Leone réussissent, avec une relative facilité, à se frayer un chemin jusque dans le circuit commercial licite. Il a examiné comment les armes parviennent au RUF de la Sierra Leone, en dépit des embargos sur les armes mis en place par les Nations Unies. Les experts se sont également penchés sur l'adéquation du système de contrôle aérien dans la région de l'Afrique de l'Ouest et ont formulé des recommandations sur les manières d'améliorer ce système. Suite à ses recherches, le Groupe d'experts est parvenu à certaines observations et recommandations, précises ou de nature plus générale.
En ce qui concerne les mesures à prendre pour concrétiser ces recommandations, M. Chowdhury a estimé qu'outre le rôle proactif du Conseil de sécurité, la coopération et la solidarité internationales sont indispensables. Il a souligné que la nécessité d'un meilleur cadre de régulation des systèmes de contrôle aériens dans la région ne pourra être satisfaite sans une telle coopération. En outre, une assistance technique et financière est nécessaire. Pour traiter la situation en Sierra Leone, il faudra adopter une approche élargie, incluant d'autres acteurs que le Conseil de sécurité. M. Chowdhury a rappelé la dimension humaine de la tragédie que vit le peuple sierra-léonais. Il a déploré que des milliers de civils, dont un grand nombre d'enfants, soient victimes d'une violence brutale et confrontés à un avenir incertain. Des dizaines de milliers de Sierra-Léonais ont perdu la vie, un demi-million est devenu réfugié et environ trois ou quatre fois plus d'entre eux ont été déplacés. Le Groupe d'experts et le Comité des sanctions sont pleinement conscients de cette dimension humaine et espèrent que l'adoption et le respect des mesures contenues dans le rapport lanceront l'action nécessaire pour mettre fin à ces souffrances.
M. STEWART ELDON (Royaume-Uni) a appuyé la création d'un mécanisme international stable qui soit en mesure de protéger le commerce des diamants et qui soit efficace pour enrayer le trafic des «diamants de la guerre». Il a dit attendre du Secrétariat qu’il renforce sa capacité liée à tous les aspects des sanctions. Cela suppose, a estimé le représentant, l’adoption de mesures pour identifier les commerçants d’armes et autres intermédiaires. Il a dit espérer que le Groupe de travail informel sur les sanctions fera des recommandations dans ce sens. Le représentant a souhaité que les pays exportateurs d’armes prennent toutes les mesures pour vérifier les utilisations finales des armes commandées au moment de l’octroi de licences. Le rapport du Groupe d’experts, a poursuivi le représentant, a identifié un certain nombre de personnes et de sociétés, responsables des violations des sanctions. Dans ce contexte, il a dit l’intention de son pays d’examiner tous les cas et de mener des enquêtes, en exhortant les autres Etats à faire de même et à considérer, dans les législations nationales, les violations des sanctions comme un délit de droit pénal.
Il ne doit y avoir de refuge pour ceux qui violent les sanctions, a dit le représentant, en se déclarant particulièrement préoccupé de l’implication du Président du Libéria dans le soutien financier et militaire au RUF et dans la facilitation du trafic illégale de diamants et des violations de l’embargo aérien. Il ne fait plus aucun doute, a estimé le représentant, que le Président Taylor a cyniquement prolongé le conflit en Sierra Leone à des fins personnels. Cela ne peut continuer et, si, le Royaume-Uni se félicite des déclarations de Taylor sur la suspension de son soutien au RUF, il juge néanmoins ces ouvertures insuffisantes et tardives, étant donné que dans le même temps, des informations font état de l’appui du Président Taylor à la déstabilisation de la Guinée. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni, a poursuivi le représentant, ont proposé un projet de résolution qui imposerait une série de mesures à l’encontre du Libéria pour exercer une pression sur le Président Taylor. Ces mesures visent les interdictions sur le diamant libérien, les vols des aéronefs libériens, les déplacements des hauts fonctionnaires libériens et l’importation du bois libérien. Les sanctions seront levées dès que le Conseil aura constater une cessation du soutien au RUF et aux mouvements rebelles armés dans les autres pays de la région. C’est au Président Taylor de se rendre compte qu’il ne peut plus se dissimuler devant des déclarations d’innocence.
M. CURTIS A. WARD (Jamaïque) a déclaré que le rapport du Groupe d'experts vient à point nommé pour rappeler au Conseil que l'efficacité et l'observation des régimes de sanctions requièrent une surveillance et des ajustements constants. La délégation jamaïcaine pense qu'il est illusoire de penser qu'un Comité des sanctions réuni dans les sous-sols du Secrétariat des Nations Unies peut surveiller avec efficacité l'application de sanctions dans des contrées éloignées. Le représentant a recommandé que le Conseil réexamine sérieusement la proposition de créer un mécanisme spécial chargé de la surveillance de l'application des sanctions.
Le représentant a regretté que les violations du régime des sanctions soient généralisées et restent impunies. Il a estimé que ceux qui ont contribué ou aidé à des violations des sanctions sont aussi coupables de la situation humanitaire qui continue de prévaloir en Sierra Leone et la communauté internationale doit exercer des pressions afin que les résolutions du Conseil de sécurité soient respectées. La délégation jamaïcaine trouve inquiétante la fréquence avec laquelle le Groupe d'experts a imputé la responsabilité de violations des sanctions à des voisins de la Sierra Leone. Le représentant a ajouté que l'imposition de mesures tendant à une application efficace du régime de sanctions doit avoir un effet collatéral minimum sur les personnes non visées et il faut faire en sorte de toucher de façon certaine les personnes concernées.
Le représentant a conclu que les mesures recommandées par le Groupe ne seront efficaces que si tous les Etats membres adhèrent aux termes des résolutions de sanctions. Nous devons au peuple sierra-léonais de nous assurer que les richesses de leur pays soient utilisées pour son développement et non pas pour perpétuer la guerre.
M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a fait part de son appréciation des recommandations contenues dans le rapport du Groupe d’experts. Il a cité l’extension du régime de certification des diamants sierra-léonais et la mise en place d’un meilleur contrôle des exportations des petites armes par les pays producteurs eux-mêmes. Il a déclaré qu'il espère que la publication du rapport du Groupe d’experts, la prise de conscience de la communauté internationale, les dommages qui en résultent pour le Libéria amèneront le Gouvernement de ce pays à réviser sa politique. Trop de promesses ont été faites pour que l’on puisse se contenter de belles paroles, a dit le représentant, en appuyant le principe de l’établissement d’un régime de sanctions effectif contre les dirigeants libériens. Se félicitant de la décision de Monrovia d’expulser tous les dirigeants du RUF, le représentant a estimé qu’au-delà du Libéria, le règlement de cette crise en Afrique de l’Ouest nécessitera également la bonne volonté de tous les pays voisins et le souci d’aller vers la paix régionale plutôt que de jeter inutilement de l’huile sur le feu.
Les sanctions et autres mesures proposées doivent être de durée limitée pour assurer que le Conseil sera en mesure de réexaminer le dossier, y compris au regard, de l’évaluation qu’il fera à cette occasion pour proroger ces mesures, a-t-il souligné. De plus, ces mesures ne doivent en aucun cas pénaliser ou affecter la population libérienne, l’une des plus pauvres du monde. Ces mesures doivent être incitatives et liées à des critères précis de levée. Les mesures ne doivent pas gêner le possible développement d’une solution négociée avec l’aide de la CEDEAO. Elles doivent s’intégrer comme un élément d’un règlement politique global et ne pas se substituer à lui. Les vues de la CEDEAO doivent être écoutées et respectées par le Conseil de sécurité. La France, a conclu le représentant, privilégie une approche progressive dans la mise en œuvre des sanctions afin de permettre au gouvernement démocratiquement élu du Libéria de faire preuve de ses responsabilités.
M. MOCTAR OUANE (Mali) a exprimé la profonde préoccupation de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) face à la poursuite des conflits dans la sous-région, et particulièrement face à la situation en Sierra Leone. Il a rappelé que la CEDEAO a adopté un moratoire sur l'importation et l'exportation des armes en Afrique de l'Ouest. Le représentant s'est félicité de la tenue prochaine d'une réunion du Conseil de sécurité avec la CEDEAO sur cette question, qui permettra notamment un nouvel examen de la situation. Il a jugé positive la décision du Secrétaire général de créer une mission interinstitutions des Nations Unies qui se rendra en Afrique de l'Ouest. Le représentant a ajouté qu'il est primordial que le mandat de cette mission comprenne les domaines de la
paix et de la sécurité. Il a espéré que les travaux de la mission pourraient notamment aboutir à l'élaboration d'une stratégie régionale de paix que la CEDEAO pourrait mettre en place. Il a annoncé que les vues de la CEDEAO sur le rapport qui vient d'être présenté seront exposées lors de la prochaine réunion de la CEDEAO avec le Conseil de sécurité.
M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie) a félicité le Gouvernement sierra-léonais pour avoir mis en place un système de certification de diamants et a appuyé l’établissement d’un système mondial. Il a regretté que certains pays aient refusé de collaborer avec le Groupe d’experts et appelé le Conseil à les exhorter à la coopération. Sur les violations de l’embargo sur les armes, il a rejeté la responsabilité sur les pays producteurs, les pays intermédiaires et les pays destinataires, en arguant que les premiers ont une responsabilité particulière. Dans un régime laxiste d’exportateurs d’armes, certaines entreprises peuvent devenir de véritables menaces pour la paix et la sécurité internationales, a estimé le représentant qui a dénoncé les régimes laxistes dans l’utilisation des aéronefs. Il a appelé le Conseil à exiger un enregistrement plus transparent des navires et des aéronefs, en particulier, dans le cas des pays qui utilisent des pavillons de complaisance.
S’agissant des recommandations sur le Libéria, le représentant s’est dit encouragé par la présence du Libéria à ce débat. Il a saisi l’occasion, pour lui rappeler la nécessité d’une coopération de tous les pays de la région pour assurer la stabilité. Concluant sur les recommandations relatives au contrôle des sanctions, le représentant s’est dit découragé sur l’observation du Groupe d’experts selon laquelle les sanctions sont violées sur les armes et sur les diamants en toute impunité. Il a salué la possibilité de dialoguer avec les membres de la CEDEAO avant de souligner l’importance qu’il y a à renforcer la capacité d’action du Secrétariat de l’ONU pour contrôler, de façon permanente, l’application des sanctions imposées par le Conseil de sécurité.
M. SAID BEN MUSTAPHA (Tunisie) a remercié le groupe d’experts et salué l’initiative prise par la CEDEAO en lançant une enquête sur le commerce et l’exploitation illicites des diamants sierra-léonais. Il a considéré que l’appréhension du problème nécessite une approche globale et experte, qui doit englober toute la chaîne des acteurs dans ce domaine. A son avis, cette approche devrait viser à resserrer l’étau sur le produit lui-même, par une action internationale concertée et coordonnée, comme par l’instauration d’un système de certification généralisée et d’un mécanisme de contrôle de l’application des sanctions par le Secrétariat de l’ONU, tels que préconisés par le groupe d’experts. S’agissant de la question du commerce des armements, il a appuyé la recommandation du gouvernement du Burkina Faso pour que le Conseil de sécurité supervise un mécanisme de contrôle de toutes les importations d’armes dans le territoire burkinabè et de leur utilisation, pendant trois ans.
Le représentant a estimé que les mesures à prendre par le Conseil de sécurité ne devraient concerner que le domaine visé et que les sanctions devraient avoir des objectifs précis et une limite dans le temps. L’extension des sanctions à d’autres domaines risque de créer de nouvelles difficultés, en particulier pour les populations des pays concernés qui subissent déjà l’impact des conflits armés dans la région, a-t-il expliqué en mettant l'accent sur l’importance de soutenir les efforts de la CEDEAO. Il a salué le prochain voyage des ministres des affaires étrangères de la CEDEAO à New York pour rencontrer les membres du Conseil de sécurité.
M. SHEN GUOFANG (Chine) a souligné la pertinence des recommandations contenues dans le rapport du Groupe d'experts. Il a rappelé que l'on sait depuis longtemps que le RUF, des éléments criminels ainsi que certains pays participent au trafic de diamants sierra-léonais. Il a ajouté que les sanctions du Conseil dans ce domaine sont en vigueur depuis longtemps mais que leur strict respect est insuffisant. Le représentant a déclaré que le Conseil de sécurité et la communauté internationale doivent redoubler d'efforts en faveur de la paix et insister auprès des parties au conflit en Sierra Leone afin qu'elles mettent en œuvre toutes les mesures nécessaires au retour de la paix. Il faut tarir les sources de financement du RUF. Le représentant a estimé qu'il faudra cependant éviter que l'application de sanctions ait des répercussions humanitaires et qu'il faudra prévoir un délai à ces sanctions. Il a déclaré qu'il faudrait accorder une attention particulière au contexte régional et a été d'avis que les sanctions ne sont pas le seul et meilleur moyen dont dispose la communauté internationale pour résoudre ces problèmes. Le représentant a estimé que le Conseil de sécurité doit jouer un rôle important dans le règlement de ce problème. Il a apprécié les efforts de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) pour résoudre ce problème, et a espéré qu'elle parviendrait à un règlement pacifique et rapide. Il a espéré que la réunion prochaine entre le Conseil de sécurité et la CEDEAO verrait un renforcement des liens et de la coopération du Conseil avec la région de l'Afrique de l'Ouest.
M. ANDREI E. GRANOVSKY (Fédération de Russie) a estimé qu’il reste encore beaucoup à faire pour faire respecter efficacement les sanctions et qu’il faudra encore du temps pour que les sanctions limitent la capacité du RUF de poursuivre le conflit. Commentant le rapport du Groupe d’experts, le représentant s’est dit frappé par le caractère radical de ses recommandations qui montre combien le Groupe a dépassé son mandat. Il a, par exemple, estimé que sur le commerce des diamants, la législation nationale doit continuer de primer. A cet égard, il a particulièrement regretté le fait que le rapport du Groupe ne fasse aucune recommandation sur la manière d’impliquer davantage les pays de la région au règlement de la question. Stigmatisant le caractère peu réaliste et coûteux des recommandations relatives au commerce du diamant, le représentant a jugé important que les mesures prises en la matière ne compromettent en rien les intérêts légitimes des pays impliqués dans le commerce légal du diamant. Il a estimé que la recommandation du Groupe d’experts d’établir un système international de certification dépasse largement son mandat, étant donné que la question fait l’objet d’un examen, dans le cadre du processus intergouvernemental et qu’aucun accord ne semble émerger en la matière. Concluant sur l’imposition des sanctions au Libéria, le représentant a souhaité un examen minutieux des mesures préconisées et la prise en considération des points de vues de la CEDEAO.
Pour M. RICHARD RYAN (Irlande), le rapport du Groupe d'experts confirme qu'il existe des violations importantes des résolutions du Conseil de sécurité. Il confirme notamment que la Sierra Leone continue d'être victime d'activités minières illégales. Illégale en elle-même, cette pratique est aggravée par le fait que les diamants extraits sont utilisés pour acheter des armes qui sont ensuite utilisées contre le peuple sierra-léonais. L'Irlande constate que les recommandations du Groupe d'experts sont nombreuses, et que certains sont à long terme. Certaines seront plus efficaces que d'autres. L'Irlande apporte son soutien au nouveau système de certification de diamants mis en place par les autorités de Sierra Leone, lequel constitue une mesure concrète. Le rôle des Etats voisins de la Sierra Leone est essentiel à cet égard. Le problème de l'origine des diamants n'est pas limité aux pays producteurs. Certains pays importateurs aussi devraient prendre des mesures et c'est pourquoi l'Irlande soutient la recommandation du Groupe d'experts concernant la mise en place d'un modèle de certification mondial. L'atelier de travail qui sera organisé en Namibie sur cette question est donc le bienvenu.
Cependant, a poursuivi M. Ryan, parler du rapport sans mentionner les graves allégations prononcées à l'encontre du Gouvernement du Liberia ne serait pas sérieux. Le rapport dépeint le rôle des autorités du Libéria dans la région comme hautement déstabilisatrice et destructrice. Le soutien que celles-ci apportent aux RUF présente de multiples aspects et apparaît comme solide et systématique. Ce rôle apparaît notamment dans la fourniture d'armes à la région et à dans la facilité avec laquelle des avions obtiennent des licences pour opérer sous pavillon libérien, facilité qui soulève de graves questions sur les règles régissant ces licences. Le rapport fournit d'autres preuves de la violation par le Liberia des embargos du Conseil de sécurité concernant l'importation d'armes sur son propre territoire, conformément à la résolution 788. L'Irlande, a rappelé le représentant, a déjà annoncé son soutien à un projet de résolution en cours de discussion au sein du Conseil de sécurité, et qui vise à mettre fin aux activités déstabilisatrices du Gouvernement libérien, en reprenant de nombreuses recommandations du groupe d'experts.
Le rapport montre encore que le système de contrôle aérien en Afrique de l'Ouest est totalement inadapté, notamment au regard des cargaisons meurtrières transportées. Or, a observé M.Ryan, il existe une corrélation presque parfaite entre un mauvais contrôle aérien et l'importation d'armes dans la région. Certes, ceux qui violent les lois au niveau régional ne sont pas seuls et les fournisseurs d'armes et d'avions sont installés fort loin de l'Afrique de l'Ouest. C'est pourquoi les gouvernements sous les juridictions desquels ces gens résident et d'où vient le matériel doivent eux aussi effectuer un contrôle réel. L'Irlande soutient les recommandations du Groupe d'experts et souhaiterait un renforcement de la collaboration avec les acteurs concernés et des institutions telles que l'Organisation de l'aviation civile internationale, Interpol ou l'Organisation internationale des douanes.
Nous ne devons pas nous faire d'illusions sur la rapidité avec laquelle certaines des mesures préconisées porteront leurs fruits, a reconnu le représentant, qui a toutefois appelé à ne pas non plus sous-estimer l'effet dissuasif d'une forte publicité sur certaines des personnalités concernées, ni les conséquences tant psychologiques que concrètes des mesures destinées à perturber l'afflux d'armes et leurs transporteurs.
M. JAMES B. CUNNIGHAM (Etats-Unis) s’est déclaré particulièrement perturbé par le fait que le Libéria, ancien défenseur de la cause namibienne pour l’indépendance, soit aujourd’hui complice du démembrement de la Sierra Leone et de la déstabilisation de la Guinée. Le Conseil, a dit le représentant, a entamé l’examen d’un projet de résolution imposant de nouvelles sanctions contre le Gouvernement du Libéria. Ces mesures tendent à mettre fin à l’appui du Président Taylor au RUF et à son implication continue dans le trafic des diamants de la guerre. Les Etats-Unis se trouvent dans l’obligation d’appuyer de nouvelles mesures contre le Gouvernement du Libéria en raison de son appui illégal aux
rebelles de Sierra Leone, de son soutien à l’un des insurgés les plus « répugnants » du monde et de son exploitation illégale des ressources naturelles de la Sierra Leone. Prenant note de la décision du Gouvernement libérien de se désengager de la Sierra Leone, le représentant a dit craindre que cette annonce de dernière minute ne soit davantage une ruse visant à diviser le Conseil de sécurité plutôt que le signal d’un changement véritable de politique.
Aucun désaccord n’existe au sein du Conseil ni au sein de la communauté internationale, a souligné le représentant, avant de se dire convaincu que le Ministre des affaires étrangères du Libéria, présent à cette réunion, n’hésitera pas à demander des preuves au Conseil et à l’inviter à respecter le principe de la présomption d’innocence. La seule manière pour le Conseil de mettre fin à la situation actuelle est de prendre des actions concrètes et non pas de faire montre de patience devant les promesses vaines du Gouvernement du Libéria. Le Groupe d’experts a établi un lien entre l’appui du Libéria au RUF et la violence continue en Sierra Léone et dans la région. Le Conseil ne doit épargner aucun effort pour briser ce lien et rétablir la paix et la sécurité dans la région. Les Etats-Unis attendent le jour où ils seront convaincus du rôle du Libéria comme partie à la solution plutôt que comme moteur de souffrances et d’instabilité.
M. ANUND PRIYAY NEEWOOR (Maurice) a déclaré que ce n'est pas sans un sentiment de révolte que l'on note avec le Groupe d'experts que les souffrances imposées au peuple de Sierra Leone par les rebelles ne servent pas une cause politique, sociale, économique ou humanitaire légitime, mais seulement l'enrichissement de quelques individus dans le pays et de leurs amis. La conscience collective que constituent les Nations Unies doit exiger des réponses de ceux qui sont accusés d'implication dans ces crimes haineux contre le peuple de Sierra Leone.
Le lien dans des ambitions politiques débridées, le commerce des armes et celui des diamants a déjà été mis en lumière par un Groupe d'experts similaires travaillant sur l'Angola, a rappelé le représentant. La Sierra Leone a été la deuxième victime de ce lien et un autre Groupe d'experts enquête aujourd'hui sur le même phénomène à propos de la République démocratique du Congo. La communauté internationale ne peut se permettre de laisser le complexe diamants-armes-politique franchir une nouvelle frontière. Ce phénomène a causé trop de souffrances humaines et détourné trop de ressources normalement destinées au développement. Le régime de sanctions mis en place par le Conseil envers la Sierra Leone a pour objectif de mettre fin au plus tôt à la guerre civile dans ce pays. Les violations des sanctions ne font que prolonger le conflit et les souffrances de la population. Elles constituent un acte répréhensible qui doit être vigoureusement condamné par chacun. Le rapport du groupe d'expert n'a pas seulement confirmé les violations, il a aussi désigné des coupables. Ses recommandations sont adaptées. Si une partie quelconque se sent blessée par le contenu du rapport, elle doit pouvoir s'exprimer devant le Conseil, en fournissant des preuves, et dans un délai limité, a ajouté M. Neewoor, qui a souhaité que le Conseil prenne le plus rapidement possible des mesures, sur la base des recommandations du Groupe d'experts.
M. VALERIY KUCHINSKY (Ukraine) s'est félicité des recommandations concernant la certification et le commerce des diamants, le contrôle de la circulation aérienne ainsi que de l'armement contenu dans le rapport du Groupe d'experts aient d'ores et déjà inspiré des mesures dans les pays de la région. Il a cité la décision récemment prise par le Gouvernement libérien de maintenir au sol tous les aéronefs immatriculés au Libéria ainsi que sa proposition de créer un organisme chargé, sous l'égide des Nations Unies, de surveiller le commerce des diamants et des armes. Le représentant a fait allusion aux mesures prises par les membres de la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest au niveau régional.
En même temps, M. Kuchinskiy a estimé que certaines des recommandations du Groupe d'experts sont discutables du point de vue du mandat du Groupe ainsi que des travaux qui se déroulent dans d'autres instances des Nations Unies. Il a cité le paragraphe 262 du rapport qui suggère que le Conseil envisage "de décréter un embargo sur les exportations d'armes en provenance de certains pays producteurs, tout comme on a imposé un embargo sur les diamants venant de certains pays producteurs, jusqu'à ce qu'aient été mis au point des plans acceptables de certification". A ce sujet, le représentant s'est dit convaincu que cette question, parmi d'autres questions de nature générale ou mondiale, doit être examinée par les instances compétentes qui sont spécialement chargées de leur examen. Il a fait la même observation au sujet des recommandations concernant l'établissement d'un système mondial de certification des diamants.
Le représentant s'est penché sur les passages du rapport dans lesquels son pays est cité. En ce qui concerne l'affaire de la livraison d'armes ukrainiennes au Burkina Faso, en 1999, le représentant a indiqué que l'enquête menée par les autorités ukrainiennes compétentes a démontré que cette livraison s'est faite en plein respect de la législation ukrainienne et des dispositions du Conseil de sécurité. Le Gouvernement ukrainien a plusieurs fois déploré les informations indiquant que la cargaison d'armes a ensuite été re-exportée en violation des dispositions du Conseil de sécurité. Pour ce qui est des informations concernant les activités de mercenaires ukrainiens, le représentant a une nouvelle fois rappelé que sa délégation a officiellement requis l'aide du Comité des sanctions concernant la Sierra Leone afin qu'on lui communique les informations dont dispose le Groupe d'experts, afin de faciliter une enquête par les autorités judiciaires ukrainiennes. Le Conseil a également été informé que la législation ukrainienne interdit les activités de mercenaires et prévoit des poursuites contre les personnes qui s'y livrent.
M. WEGGER CHR. STROMMEN (Norvège) a estimé que les sanctions doivent être utilisées avec prudence et qu’il faut à tout prix éviter qu’elles aient des effets secondaires non désirés sur la population civile. Le représentant a souligné la responsabilité générale des Etats membres d’honorer les obligations découlant des résolutions de l’ONU portant imposition de sanctions et a appelé, les pays d’Europe à reconnaître le rôle de l’importation de diamants illicites d’Afrique et de l’exportation d’armes à des acteurs non étatiques dans la poursuite des conflits. Les autorités doivent tout mettre en œuvre pour prévenir toute violation des sanctions en s’attaquant aux pratiques et au commerce douteux. Il a estimé que la recommandation visant la mise en place d’un mécanisme général de contrôle des sanctions mérite un examen plus avant. Pour le représentant, la création d’une capacité au sein du Secrétariat des Nations Unies pourrait renforcer le respect des sanctions. Il a souhaité une réflexion minutieuse sur le mandat et la forme de cette capacité.
Le représentant a appuyé la recommandation visant à créer un système international de certification pour les diamants et à créer, en attendant, un tel système à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest. Le représentant a jugé qu’il est temps d’aller au cœur du problème et d’imposer des sanctions au Libéria pour le contraindre à cesser de déstabiliser la région par son trafic de diamants et d’armes.
M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a déclaré que la population civile sierra-léonaise a vécu plus de dix années de brutalités, d'accords de paix avortés, de meurtres, de viols et de mutilations de milliers de personnes par le RUF. Il a noté que si les sanctions proposées par le Groupe d'experts, si elles sont suivies par le Conseil et appliquées, elles constitueront l'embargo le plus sérieux et le plus complet qui aura été imposé à un pays africain dans des temps récents. Il a ajouté que les sanctions sont, pour le Conseil de sécurité, un important outil dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales. M. Mahbubani a souligné que la crédibilité des Nations Unies exige que nous réagissions fermement contre les responsables de violations de ces sanctions et contre ceux qui encouragent ou participent à des activités destinées à porter atteinte à la stabilité de leurs voisins régionaux. Commentant les critères de vérification que s'est fixés le Groupe d'experts ainsi que le "droit de réponse" qu'il a accordé à chacun des acteurs mentionnés dans son rapport, le représentant s'est félicité de la possibilité qui sera offerte, la semaine prochaine, d'entendre les vues de la délégation ministérielle de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest.
M. IBRAHIM M’BABA KAMARA (Sierra Leone) a estimé que le rapport du Groupe d’experts est une réponse claire à l’appel lancé par le Président de la Sierra Leone tendant à ce que l’on prenne des mesures contre ceux qui continuent d’appuyer le RUF en se livrant au trafic d’armes et de diamants. Les recommandations contenues dans le rapport sont d’une grande portée mais sont viables, a souligné le représentant en ajoutant qu’elles comportent véritablement des solutions pour le retour de la région à la stabilité, en particulier la Sierra Leone. Le Gouvernement de la Sierra Leone, a-t-il souligné, a toujours renoncé à la tactique de la dénonciation. Mais combien de temps la solidarité africaine pourra-t-elle justifier que l’on se taise sur le sort des victimes du conflit et la prolongation des souffrances? Combien de personnes impliquées dans le trafic des diamants de la guerre et celui des armes peuvent se cacher sous le manteau de la fraternité africaine? Combien de temps faudra-t-il ignorer ceux qui appuient un mouvement rebelle qui a enlevé, pris en otage, humilié, désarmé et même blessé des soldats de la paix des Nations Unies. Les révélations contenues dans ce rapport amènent à dire «cela suffit»..
Le représentant a souscrit aux conclusions du Groupe d’experts, en particulier, aux preuves apportées selon lesquelles le Libéria appuie le RUF à tous les niveaux. «Dire la vérité à un ami ne détruit pas l’amitié», a dit le représentant en appelant le Conseil de sécurité à endosser les recommandations du Groupe d’experts dans une résolution contraignante, adoptée, au titre du Chapitre VII de la Charte. Ce faisant, a estimé le représentant, le Conseil contribuerait à prévenir une escalade des conflits dans la sous-région de l’Afrique de l’Ouest. A cet égard, le représentant a rappelé qu’un grand nombre d’Etats et d’organisations ont demandé au Conseil de modifier le mandat de la MINUSIL pour permettre notamment le déploiement des troupes du Groupe de contrôle de la CEDEAO (ECOMOG) aux frontières de la Guinée et du Libéria.
L’année dernière, pendant trois mois, alors que le RUF s’adonnait au trafic de diamants, d’armes et à la guerre, le Gouvernement sierra-léonais était contraint, conformément aux dispositions de la résolution 1306, d’arrêter ses exportations de diamants. Le régime de certification mis en place, en octobre dernier, fait aujourd'hui l’objet d’un contrôle du Comité des sanctions du Conseil de sécurité. Alors que le Libéria continue d'appuyer le RUF, le Gouvernement de la Sierra Leone doit respecter le paragraphe 7 de la même résolution relative à l’embargo sur les armes. La Sierra Leone, a poursuivi le représentant, subit des restrictions du fait de mesures obligatoires du Conseil. Toutefois, a-t-il affirmé, le peuple sierra-léonais, malgré ces restrictions, s’engagent résolument dans la voie de la paix et de la sécurité pour le pays et les pays voisins. Si le Conseil souscrit aux mesures du Groupe d’experts, il contribuera à instaurer une paix véritable au Libéria et en Sierra Leone ainsi qu’à la stabilité de toute la région de l’Afrique de l’Ouest.
M. MONIE R. CAPTAN (Libéria) a accueilli le rapport du Groupe d'experts avec de sérieuses réserves. Il a rappelé que la participation du Gouvernement libérien à la résolution du conflit en Sierra Leone est le résultat d'un mandat qui lui a été accordé par la CEDEAO. Le Gouvernement libérien n'aurait pas pu rester indifférent à ce conflit car il partage une histoire, une culture et des liens familiaux communs avec la Sierra Leone. Ce gouvernement considère que la paix en Sierra Leone est synonyme de paix au Liberia. Conformément au mandat qui lui a été confié, le Président du Libéria a organisé une série de réunions à Monrovia, entre les dirigeants du RUF et ceux de la CEDEAO. Le représentant a indiqué que des réunions entre les dirigeants du RUF et de l'AFRC ont également été organisées. Le Président a désamorcé la menace d'une confrontation armée entre MM. Foday Sankoh et Sam Bockarie qui aurait pu faire "dérailler" le processus de paix en Sierra Leone. Il convient de rappeler qu'à la demande la CEDEAO et des Nations Unies, le Président du Libéria a négocié la libération de plus de 500 personnels du maintien de la paix des Nations Unies tenus en otages par le RUF. Le représentant a déclaré que ces efforts déployés par le Président du Libéria l'ont été dans le seul objectif de renforcer le processus de paix en Sierra Leone.
En ce qui concerne les diamants, le représentant a déclaré que le Gouvernement du Libéria ne peut ni confirmer ni infirmer que la guerre en Sierra Leone soit financée par la vente de "diamants du conflit". Toutefois le gouvernement libérien peut confirmer qu'il n'est pas lié et ne participe pas au commerce illicite de diamants sierra-léonais. Il a souligné que le Groupe d'experts n'a pas été en mesure de fournir des preuves sur les transactions financières pour lesquelles le Gouvernement libérien est d'accusé d'exporter et de vendre annuellement pour plus de 217 millions de dollars de diamants. Il a ajouté qu'aucune personne qui soit familière au commerce et à l'industrie de diamants ne confirmerait, comme l'a fait le Groupe, qu'avant le conflit de la Sierra Leone, la production annuelle de diamants de ce pays s'élevait à 450 millions de dollars. Notant que le trafic de diamants est un problème mondial, le représentant a déclaré que son gouvernement est mal armé pour le résoudre car il sort d'une guerre civile de sept ans qui a détruit ses infrastructures nationales.
Pour ce qui est des armes et de l'entraînement des membres du RUF, le représentant a déclaré que le Groupe d'experts se trompe en supposant que la quasi-totalité des armes du RUF proviennent de sources extérieures, nommément du Libéria. Etant donné les multiples sources d'approvisionnement mentionnées dans le rapport, il est injuste et erroné de la part du Groupe de conclure que le premier fournisseur en armes du RUF est le Libéria et que c'est là l'effet d'une politique gouvernementale. Le Gouvernement libérien confirme qu'il possède un camp d'entraînement de ses organisations de sécurité internes. Le représentant a souligné que le Gouvernement libérien n'y entraîne aucun ressortissant étranger.
Exposant les initiatives gouvernementales libériennes, le représentant a notamment déclaré que le Gouvernement libérien a réagi aux allégations d'activités illicites à ses frontières en faisant des propositions concrètes aux Nations Unies, notamment concernant le déploiement de la MINUSIL du côté libérien de la frontière avec la Sierra Leone. Le 22 janvier 2001, le Gouvernement du Libéria a décidé de garder au sol tous les appareils immatriculés au Libéria. Il a mis fin aux engagements de tous les agents agissant en son nom en matière d'inspection et d'enregistrement des avions. Poursuivant, le représentant a déclaré que le Gouvernement libérien désire continuer à être engagé constructivement dans la recherche de la paix en Sierra Leone, mais qu'il ne peut maintenir cet engagement au vu des allégations graves soulevées par le Groupe d'experts, en particulier celle selon laquelle le Libéria n'a pas joué un rôle constructif en Sierra Leone. Le Gouvernement libérien s'est donc lancé dans une politique alternative de désengagement de la Sierra Leone. Conformément à cette politique, tous les membres du RUF, y compris M. Sam Bockarie, ont été priés de quitter le Libéria. Tous les membres du RUF ont quitté le Libéria, à l'exception de M. Sam Bockarie dont le retour a été refusé par la direction du RUF. Il ne sera plus permis que des membres du RUF transitent par le territoire libérien et il ne sera plus délivré d'autorisation de tenir des réunions sur le sol libérien.
Le représentant a ajouté que le Gouvernement du Libéria conteste l'inclusion de M. Ian Smillie parmi les membres du Groupe d'experts car celui-ci, dans un article publié en janvier 2000, a accusé sans preuve le Gouvernement libérien de fournir des armes au RUF et de l'aider à commercialiser les diamants d'origine frauduleuse. En outre, il a estimé que le Groupe d'expert a outrepassé son mandat, qui est de fournir des solutions au renforcement des mesures imposées par le Conseil et non pas de nouvelles mesures punitives, comme les recommandations visent à le faire, en particulier l'interdiction de voyage de diplomates libériens ainsi qu'un embargo temporaire sur les exportations de ce pays. Le représentant a espéré que le Conseil de sécurité encouragerait et soutiendrait l'initiative régionale de la CEDEAO en vue de parvenir à un règlement pacifique du conflit. Il a indiqué que le Gouvernement du Libéria propose un nouveau programme visant à contrôler le commerce illicite des diamants en Afrique de l'Ouest et en particulier au Libéria. Le gouvernement requiert l'engagement actif des Nations Unies afin de renforcer la sécurité à ses frontières. Le Gouvernement accepte que les Nations Unies surveillent ses aéroports et ses ports afin d'éliminer l'entrée de matériel de guerre susceptible d'être réorienté vers la Sierra Leone.
M. PIERRE SCHORI (Suède), au nom de l’Union européenne et des pays associés, a estimé qu’il est temps pour la communauté internationale de montrer clairement par des actions concrètes que les activités dénoncées dans le rapport du Groupe d’experts ne seront plus jamais tolérées. Il a demandé que le Libéria et toutes les autres parties impliquées dans les violations des sanctions cessent immédiatement leurs activités. Le Groupe d’experts, a poursuivi le représentant, fait un certain nombre de recommandations dont certaines vont au-delà du mandat du Conseil de sécurité et tombent sous les prérogatives d’autres instances. Le représentant a cité, en exemple, le rôle dans les conflits, de la prolifération des armes légères. Il a exprimé la disposition de l’Union européenne d’appuyer les efforts en cours, comme le moratoire de la CEDEAO ainsi que les efforts de certains pays visant le renforcement de la réglementation liée au trafic aérien et aux contrôles douaniers. Appuyant sans réserve les recommandations du Groupe d’experts concernant les diamants, le représentant a estimé que l’exercice d’une pression accrue sur le Président du Libéria et ses associés constitue un élément clé de la réponse que doivent apporter le Conseil et la communauté internationale à la crise en Afrique de l’Ouest.
M. MICHEL DUVAL (Canada) a remarqué que le rapport du groupe d’experts à examiner en profondeur les causes économiques de certains conflits, dont ceux de l’Angola et de la République démocratique du Congo (RDC), à dénoncer ceux qui soutiennent ces guerres et qui en profitent et, au besoin, à prendre des mesures sérieuses, à savoir l’imposition de sanctions ou d’embargos. Le rapport apporte une base suffisante pour l’adoption de sanctions dirigées contre ceux qui ont été identifiés par le Groupe, a-t-il indiqué tout en favorisant l’imposition immédiate d’un embargo sur les exportations de diamants en provenance du Libéria, étant donné le rôle certain que joue ce pays en tant que point de transit des pierres précieuses extraites illégalement en Sierra Leone, et l’élaboration de mesures de contrôle sévères à appliquer dans les pays voisins. Le Conseil doit faire participer les organismes compétents à l’élaboration des mesures et assortir celles-ci de critères explicites pour éviter l’ambiguïté.
Il est essentiel de poursuivre la tendance de l’utilisation des sanctions comme outil de maintien de la paix et de la sécurité internationales, car il y va de la crédibilité du Conseil, a-t-il souligné. Cependant, le contrôle des sanctions serait plus efficace si l’ONU abordait leur surveillance et leur application sur une base moins provisoire et plus systématique. Dès lors, a souligné M. Duval, le Conseil doit mettre en place les mécanismes nécessaires pour détecter les violations et déterminer tant leurs sources que les méthodes utilisées. De plus, les mécanismes de surveillance devraient être maintenus pendant toute la durée de chaque régime de sanction ciblée a-t-il suggéré tout en proposant qu’il serait plus efficace de n’avoir qu’un seul bureau de surveillance au lieu de trois groupes séparés. Enfin, il a réaffirmé son appui aux efforts internationaux visant à mettre au point des mesures efficaces et pratiques afin d’éliminer les diamants de guerre, en accordant une attention particulière aux propositions en faveur d’un régime international de certification des diamants bruts.
M. JENO C. A. STAEHELIN (Suisse) a déclaré que la Suisse s'exprime rarement devant le Conseil de sécurité mais qu'aujourd'hui, elle estime qu'une intervention s'impose car elle est mentionnée dans le rapport du Groupe d'experts créé par la résolution 1306 concernant la Sierra Leone. Il a souligné que son Gouvernement est lui aussi préoccupé par la situation en Sierra Leone et par l'instabilité qui en découle pour l'ensemble de la région. Le Gouvernement suisse soutient les efforts de l'ONU et de la CEDEAO tendant à apporter une solution rapide et durable à ces problèmes. La Suisse considère que les sanctions des Nations Unies qui visent notamment à supprimer les bases économiques et financières permettant la perpétuation du conflit, comme un instrument important en vue de la réalisation de ces objectifs. Le contournement de ces sanctions se pose particulièrement à propos de l'importation illégale de diamants bruts venant de la Sierra Leone. A cet égard, le représentant a rappelé que le Gouvernement suisse a notamment pris des mesures additionnelles pour faire respecter plus efficacement le régime de sanctions dans les ports francs et dressé une liste de pays potentiellement vulnérables au trafic des diamants alimentant les conflits qui requièrent une vigilance accrue.
Le Gouvernement suisse regrette que le rapport du Groupe d'experts - contrairement au récent rapport analogue sur les sanctions contre l'UNITA - ait mentionné de façon partiale et incomplète les mesures prises par la Suisse dans ce sens. Le représentant a ajouté que son pays soutient les efforts internationaux en vue de l'élaboration d'un système de certification universel. Il a conclu en relevant que son Gouvernement attache un grand prix à la promotion de la paix et de la stabilité en Sierra Leone et dans les pays voisins car il en va de la sécurité des populations, certes, mais aussi du développement durable de toute la région.
M. CHEICK AHMED TIDIANE CAMARA (République de Guinée) a mis l'accent sur les atrocités commises depuis une décennie au Libéria et en Sierra Leone, "deux pays martyrs", les centaines de milliers de personnes contraintes à l'exil ainsi que les importants dégâts matériels causés. Il a salué la détermination des Etats de la CEDEAO et sa force d'interposition, l'ECOMOG, qui ont pu mettre fin au génocide au Libéria. Il a regretté que la restauration de la paix et l'instauration d'élection libre dans ce pays et qui ont permis à ceux-là mêmes qui étaient responsables de ce génocide d'accéder au pouvoir, n'aie atténuées leur "ardeur guerrière". Le représentant a estimé que l'implication et le soutien manifeste du Gouvernement libérien aux différents mouvements de rebelles de la sous-région n'est plus à démontrer. Il a déclaré que les autorités de Monrovia poursuivent une politique de terrorisme, violant ainsi tous les principes de la Charte des Nations Unies, de l'OUA, de la CEDEAO et de la Mano River Union. Le représentant a ajouté que tout le monde connaît le soutien du Liberia et de son président aux rebelles du RUF.
Le représentant a indiqué que son pays est victime d'attaques rebelles commanditées à partir de Monrovia et appuyées par les rebelles du RUF. Ces attaques ont causé de nombreuses pertes en vies humaines dont celle d'un fonctionnaire du HCR, d'importants dégâts matériels et un véritable désastre humanitaire par le déplacement des populations frontalières et la dispersion de centaines de milliers de réfugiées. En dépit de la dernière déclaration du Président du Conseil de sécurité condamnant ces attaques et désignant expressément le Libéria, les incursions se poursuivent. Le représentant a jugé plus qu'impérieux de mettre fin aux activités terroristes des autorités de Monrovia et
de briser le lien entre les diamants de la Sierra Leone et l'approvisionnement des mouvements rebelles en armes. La délégation guinéenne a espéré que les sanctions ciblées envisagées constitueront un signal fort au Président libérien pour mettre fin à son soutien à des mouvements rebelles et terroristes.
M. MICHEL KAFANDO (Burkina Faso) a indiqué que la première mesure prise par son pays a consisté en la création, dès le 22 mars 2000, d’un comité interministériel de suivi des sanctions contre l’UNITA. En conséquence, l'interdiction est désormais faite aux ressortissants de l’Angola et de la Sierra Leone, à l’exception de ceux en mission officielle du gouvernement légal de ces pays, d’entrer, de transiter ou de séjourner au Burkina Faso. Par la suite, le Gouvernement a prohibé, par un décret du 27 octobre 2000, toutes transactions sur les pierres et métaux précieux, provenant des zones de conflit, sur toute l’étendue du territoire national du Burkina Faso. Dans la foulée, le Burkina Faso a accueilli successivement à Ouagadougou, trois missions d’enquête des Nations Unies auxquelles le gouvernement a donné toute liberté et toutes facilités. Les missions ont pu visiter des entrepôts militaires, interroger les personnes de leur choix et avoir des séances de travail avec le Comité interministériel. La mesure la plus significative et la plus décisive a été, aux yeux du représentant, celle découlant de la décision de mettre en place un mécanisme de contrôle des importations d’armes et de leur utilisation, mécanisme qui sera placé, pendant une période de trois ans, sous la supervision des Nations Unies.
Le mécanisme est régi par une Haute Autorité composée de membres du gouvernement et du Parlement, qui a compétence, sous la supervision de l’ONU pour contrôler toute importation d’armes par le gouvernement, en veillant au strict respect des dispositions du moratoire de la CEDEAO sur l’importation, l’exportation et la fabrication d’armes légères, en veillant également au respect des règles de passation des marchés publics ainsi que des procédures d’émission du certificat de destination finale et de la rédaction du manifeste d’importation. La Haute Autorité est également compétente pour prévenir et empêcher tout trafic illicite d’armes sur le territoire du pays. Il a assuré que les Nations Unies seront informées de l’affectation des armes acquises par le Burkina Faso au titre du budget national et que tout mouvement d’armes fera l’objet d’une communication préalable au Secrétaire général de l’ONU. C’est en raison de tous ces efforts qu’il est difficile pour le Burkina de comprendre les recommandations faites dans le rapport sur de nouvelles enquêtes sur les importations du Burkina Faso durant les cinq dernières années, c’est-à-dire bien avant même la prise en charge du dossier Sierra Leone par le Conseil. Le Burkina Faso pense que la meilleure prime à son engagement total à coopérer avec les Nations Unies seraient de solder le passé pour donner des chances au présent et à l’avenir.
M. BABOUCARR-BLAISE ISMAILA JAGNE (Gambie) a déclaré qu’à la lecture du rapport du Groupe d’experts qui met en cause la Gambie, le Gouvernement et le peuple gambiens ont été abasourdis par des allégations sans fondements. Ce Gouvernement et le peuple auraient souhaité que le Groupe d’experts fasse preuve de la courtoisie requise avant d’avancer des affirmations qui, si elles n’étaient pas graves, seraient risibles voire ridicules. Pourtant, a rappelé le représentant, le mandat du Groupe d’experts précise bien que toutes les preuves doivent être portées à l’attention des gouvernements concernés. Il est vrai, la Gambie n’a jamais nié l’implication de certains de ses ressortissants dans le commerce illicite de diamants et il s’agit même d’un sujet de plaisanterie avec «les frères de la Sierra Leone».
Néanmoins, l’honnêteté intellectuelle exige que l’on établisse une distinction claire entre les individus et les gouvernements, a dit le représentant avant d’insister, au nom de son Gouvernement, pour que le Groupe d’experts se rende en Gambie et présente les preuves de l’implication de la Gambie dans le trafic de diamants et le trafic d’armes. La Gambie veut être traitée avec justice. Elle est prête à mettre tout en œuvre pour rétablir sa dignité mais souhaite avant cela donner une dernière chance au Conseil de sécurité de s’expliquer. Il est possible, a reconnu le représentant, que des diamants transitent par la Gambie mais il est, en revanche, ridicule d’affirmer que le Gouvernement tire des bénéfices de ce commerce. La Gambie a toujours fait et fera toujours tout son possible pour trouver une solution honorable à la crise en Sierra Leone. Pour l’heure, elle attend du Groupe d’experts qu’il retire ses allégations et qu’il fixe la date de sa visite en Gambie que le Gouvernement attend avec impatience.
M. CLAUDE BOUAH-KAMON (Côte d'Ivoire) a noté que son pays est cité à plusieurs endroits dans le rapport du Groupe d'experts comme étant de ceux qui auraient des rapports privilégiés avec les pays ou les parties au conflit en Sierra Leone, mieux qui servirait de lieu de transaction commerciale de diamants ou de navigation aérienne au bénéfice des protagonistes de la guerre sierra-léonaise. Le représentant a déclaré que, du fait de la situation politique instable vécue par ce pays depuis le 24 décembre 1999, la Côte d'Ivoire n'a pu fournir au Groupe d'experts les statistiques qu'il avait requises sur l'importation et l'exportation de diamants en dehors ou à l'intérieur de la Côte d'Ivoire avant l'élaboration du rapport mais qu'elle l'a fait dans une correspondance datée du 4 janvier 2001. S'agissant du Liberia, le représentant a déclaré qu'à l'instar des autres pays limitrophes de la Côte d'Ivoire, le Libéria et la Côte d'Ivoire partagent les mêmes peuples, divisés artificiellement par la frontière héritée de la colonisation. Il a précisé que c'est à cause de cette similitude ethnique que l'intégration des réfugiés libériens en Côte d'Ivoire s'est faite dans l'harmonie. Le représentant a rappelé que feu le Président Houphouet-Boigny, son gouvernement et le peuple de Côte d'Ivoire n'ont épargné aucun sacrifice pour aider au retour de la paix au Libéria. Il a ajouté que ce sont les efforts de la diplomatie ivoirienne qui ont permis d'amener M. Foday Sankoh "de sa retraite de la forêt sierra-léonaise à la table des négociations". "Mais que les relations que nous avons eues et avons avec ces deux pays frères, le Libéria et la Sierra Leone, et même le RUF", a déclaré le représentant, "soient interprétées comme favorables à des agissements répréhensibles que condamne la communauté internationale, ne nous semble pas juste".
Poursuivant, M. Bouah-Kamon a déclaré que les activités privées d'un homme d'affaires israélien installé à Abidjan, qui serait très proche du Président Charles Taylor, comme mentionné au paragraphe 216 du rapport, ne sauraient être imputées au Gouvernement ivoirien, d'autant que cet homme est titulaire d'un passeport diplomatique libérien. Pour ce qui est des généralités techniques concernant les systèmes de contrôle de la circulation aérienne en Afrique de l'Ouest, le représentant a adhéré à toute initiative visant à rendre plus efficaces les sanctions des Nations Unies qui ne mettent pas en péril ses intérêts nationaux. Le représentant a affirmé que le Gouvernement ivoirien n'a jamais permis et ne permettra pas, à qui que ce soit, de se servir du territoire ivoirien pour porter atteinte à l'intégrité territoriale et politique d'un pays en Afrique et dans le monde.
M. ANDRE ADAM (Belgique) a rappelé le rôle de premier plan joué par la Belgique dans le processus de Kimberley dont un des objectifs est précisément de mettre en place le système international de certification, recommandé aujourd’hui par le Groupe d’experts. En la matière, le représentant a exprimé la disponibilité de son pays à mettre son expérience au service de la communauté internationale pour que ce système soit élargi. Le représentant s’est dit convaincu que quelle que soit la nature du système de certification mis en place, la transparence sera l’un des éléments clés de son succès. Il a indiqué, à cet égard, que son pays publie mensuellement et annuellement des statistiques complètes sur les importations et les exportations de tous les diamants. Le représentant a appuyé l’idée de la création d’un mécanisme de contrôle et de suivi continus du respect des sanctions, conscient du risque de chevauchement et de double emploi causé par l’existence parallèle de trois groupes d’experts.
M. OUSMANE MOUTARI (Niger) a déclaré que son pays travaille étroitement avec les autres membres de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest dans la perspective d'assurer à la sous-région ouest-africaine et à son continent la paix, la stabilité et le bien-être auxquels ses populations aspirent si profondément. Voilà pourquoi dès qu'il a été saisi des informations parues dans le rapport du Groupe d'experts, le Gouvernement nigérien a procédé aux investigations préliminaires nécessaires et communiqué au Secrétariat un courrier indiquant que l'«avion BAC-111 immatriculé VP-CLM et appartenant à la compagnie Aeroleasing Ink a effectivement atterri à Niamey le 22 décembre 1998 à 21h11 locales en provenance de Monrovia pour en repartir le 23 décembre 1998 à 19h02». Ce courrier indiquait en outre qu'à présent, il n'est pas possible d'indiquer le type de marchandises que transportait cet avion du fait que les archives ne sont conservées que pendant trois mois. Le représentant a ajouté que les Autorités nigériennes ont cependant ordonné que des investigations soient menées pour obtenir les renseignements demandés. En tout état de cause, le Niger apportera sa coopération pleine et entière à toute initiative visant à rétablir la paix et la sécurité.
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