LE SECRETAIRE GENERAL PLAIDE EN FAVEUR DE LA PAIX ET DU DIALOGUE ET REAFFIRME LE SOUTIEN DE L'ONU À LA CAUSE PALESTINIENNE
Communiqué de Presse
SG/SM/6501
LE SECRETAIRE GENERAL PLAIDE EN FAVEUR DE LA PAIX ET DU DIALOGUE ET REAFFIRME LE SOUTIEN DE L'ONU À LA CAUSE PALESTINIENNE
19980406 Le texte de l'allocution du Secrétaire général Kofi Annan, prononcée le 23 mars à Gaza, devant le Conseil national palestinien, est reproduit ci-après :C'est pour moi un grand honneur et un immense plaisir de me trouver parmi vous aujourd'hui, en tant que premier Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies à rendre visite à l'Autorité palestinienne. Au nom de l'Organisation, je voudrais rendre hommage au courage et à la ténacité dont ont su faire preuve le Président Arafat et le peuple palestinien. En faisant le choix audacieux et difficile de la paix, vous vous êtes résolument tournés vers l'avenir. L'histoire vous en saura gré en vous accordant un havre et une patrie.
C'est ensemble que nous avons entrepris le voyage qui nous a conduit jusqu'ici. À chaque croisée des chemins et à chaque nouveau cap, à chaque défi et à chaque victoire, l'Organisation des Nations Unies s'est toujours située aux côtés des défenseurs des droits légitimes du peuple palestinien.
Tout autre choix lui aurait été impossible. Votre cause, l'accès sans réserve à l'autodétermination du peuple palestinien, est également la nôtre. Elle est la manifestation des principes les plus sacrés, les plus durables et les plus universels de notre Charte.
Aujourd'hui à Gaza, je peux vous affirmer que les liens qui unissent le peuple palestinien à l'Organisation des Nations Unies sont plus forts que jamais. Notre dévouement à votre cause reste entier et notre foi en votre avenir, inébranlable.
Une solution juste et durable au défi que vous devez relever l'instauration de la paix dans des conditions équitables pour le peuple palestinien fera date dans l'histoire de l'Organisation. Cette solution devra se fonder sur le principe "terre contre paix", en application des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité.
Un long chemin a déjà été parcouru, mais il faudra encore attendre pour que votre rêve se réalise. Des progrès considérables ont été accomplis dans l'instauration d'un partenariat avec Israël, mais je crains toutefois que sa réalisation ne soit entravée par des obstacles majeurs. Vous reprochez à Israël de ne pas s'acquitter de ses obligations au titre des Accords d'Oslo. Le Gouvernement israélien affirme que l'Autorité palestinienne ne fait pas tout ce qui est en son pouvoir pour respecter les engagements auxquels elle a souscrit. Lors des entretiens que j'ai pu avoir ces derniers jours, j'ai constaté que le doute et le scepticisme prédominaient en ce qui concerne la bonne foi d'Israël. J'entendrai le point de vue d'Israël dans les prochains jours. Quel que soit le vrai et le faux dans les positions respectives des deux parties, il est clair qu'il existe une crise de confiance.
Ne vous laissez pas aller au désespoir. Ne vacillez pas, ne faiblissez pas. Ne succombez pas à la violence. Restez sourds aux incitations à la haine et aux cris de guerre. Ils ne l'emporteront pas, ils ne feront que retarder cette paix à laquelle vous aspirez.
Tant que sécurité et paix durables ne seront pas garanties pour les uns, elles ne pourront l'être pour les autres. Je ne saurais le répéter trop souvent ni le clamer trop fort. Le recours à la violence et à la terreur diffèrent depuis bien trop longtemps la matérialisation de vos aspirations. Ni vos amis, et ils sont nombreux, ni vos voisins ne pourront vous offrir le soutien et l'assistance que vous méritez aussi longtemps que la violence sera tolérée et qu'elle ne sera pas rejetée par tous.
Seuls le compromis et l'acceptation que deux peuples doivent vivre, et non mourir, côte à côte, apporteront la paix dans cette région. Permettez-moi de le répéter : seuls le compromis, l'acceptation que deux peuples doivent vivre, et non mourir, côte à côte, apporteront la paix dans cette région. Et cette paix ne pourra être instaurée que si les deux parties respectent pleinement leurs engagements et poursuivent le processus jusqu'à son étape ultime : un règlement de paix global.
Monsieur le Président Arafat, permettez-moi de vous saluer aujourd'hui alors que votre peuple est plus que jamais sur le point de voir se réaliser son rêve d'autodétermination. Voila 30 années que vous luttez pour la reconnaissance du peuple palestinien.
Savoir que l'on est le maître de son destin, qu'il existe un endroit où sa culture et ses traditions sont sacrées et que l'on peut lui donner le nom de patrie, voilà les fondements mêmes des aspirations de l'humanité.
Avec la sagesse et le courage de l'âge et de l'expérience, le Président Arafat n'a pas hésité, il y a cinq ans, à entreprendre aux côté de Yitzhak Rabin ce long voyage vers la paix dans l'espoir de concrétiser ces aspirations. Depuis lors, des progrès que nul n'aurait pu imaginer 10 ans auparavant ont pu être accomplis.
- 3- SG/SM/6501 6 avril 1998
De nouveaux liens de confiance et de coexistence se sont tissés. De nouvelles modalités de coopération et de nouvelles formes d'interaction s'instaurent.
De plus en plus de Palestiniens savent ce qu'autonomie signifie. La coopération entre Israéliens et Palestiniens est plus étroite que jamais, ils apprennent à se connaître, à s'entraider et sont de plus convaincus qu'ils ne pourront rien faire les uns sans les autres. Ce sont les premiers fruits de la paix, annonciateurs de bien d'autres récoltes.
L'ONU veut considérer ces prémices comme les fondements d'un développement durable, pacifique et viable pour le peuple palestinien. Notre attachement à la prospérité de votre peuple est aussi ancien que l'Organisation elle-même.
Au siège de l'Organisation, à New York, plus que nulle part ailleurs, on s'est attaché à défendre la cause palestinienne et à promouvoir les revendications du peuple palestinien.
Au Moyen-Orient, l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a été, au cours des 50 dernières années, le témoin de notre engagement. L'Office a dispensé un enseignement, des soins de santé et des secours d'urgence à plus de 3 millions de Palestiniens sur quatre générations, en Jordanie, au Liban, en Syrie, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Permettez-moi de dire aujourd'hui combien je suis fier de ce qu'il a accompli et d'exprimer ma gratitude au Président Arafat et à l'Autorité palestinienne, pour leur coopération.
Ensemble, nous dispensons un enseignement à près de 500 000 élèves dans 650 écoles. Nous gérons plus de 120 centres de soins de santé qui accueillent plus de sept millions de patients par an. Nous fournissons une aide alimentaire à 200 000 réfugiés et nous encourageons l'autosuffisance grâce à des projets d'atténuation de la pauvreté.
En outre, et c'est peut-être ce qui compte le plus, l'UNRWA cherche avant tout à faire bénéficier le peuple palestinien des acquis de la paix grâce à des projets et programmes d'investissement. Nous savons tous que l'absence de conflit ne suffit pas. Une paix qui n'existe que sur le papier, que ce soit ici ou ailleurs dans le monde, ne durera pas. Elle doit être vécue et ressentie tous les jours par chaque Palestinien.
C'est pourquoi la crise financière que traverse actuellement l'UNRWA me préoccupe au plus haut point et je ferai tout pour y mettre un terme. L'UNRWA est trop essentiel à l'avenir de la région pour qu'on le néglige. Il doit recouvrer toutes ses capacités au fil du temps.
- 4- SG/SM/6501 6 avril 1998
Lors de mes entretiens avec les dirigeants des différentes régions du monde, je les ai instamment priés de donner à l'UNRWA les moyens d'accomplir efficacement sa mission. En attendant, je vous suis reconnaissant de votre compréhension et de votre patience.
Le processus d'Oslo a également inauguré une nouvelle ère pour les activités de l'ONU au Moyen-Orient, notamment en faveur du peuple palestinien. En tirant parti de la longue expérience de l'UNRWA, nous avons pu accroître notre présence en Cisjordanie et dans la bande de Gaza et passer de trois organisations en 1993 à 15 en 1997.
Le montant total des fonds déboursés par l'intermédiaire de l'Organisation des Nations Unies s'élevait à 254 millions de dollars en 1996.
Grâce aux efforts conjugués du Coordonnateur spécial des Nations Unies et du Représentant spécial de l'Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), des activités de développement coordonnées et renforcées ont pu être mises en oeuvre en Cisjordanie et dans la bande de Gaza afin d'assurer une efficacité et une productivité optimales. Nous voulons que notre assistance bénéficie au plus grand nombre possible d'hommes, de femmes et d'enfants et améliore leurs conditions de vie.
Telles sont nos possibilités d'action. C'est à vous qu'il appartient d'accomplir le reste. Vous et vous seuls pouvez donner vie à une politique palestinienne qui débouche sur la paix et la prospérité que mérite votre peuple.
Vous et vous seuls pouvez garantir la promotion et le respect constants des droits de l'homme, non seulement pour les Palestiniens qui ne relèvent pas de votre autorité, mais aussi pour les autres. Vous et vous seuls pouvez garantir que tous pourront bénéficier équitablement des retombées d'une croissance économique durable grâce à une bonne gouvernance à tous les niveaux de la direction.
Ce sont les responsabilités qu'il vous faudra endosser et les défis que vous devrez relever et je suis convaincu que vous saurez vous montrer à la hauteur de la tâche.
Alors que nous franchissons une nouvelle étape dans cette longue quête de la paix, il est indispensable de rappeler que c'est le dialogue et non la force qui nous ont conduits jusque-là.
Ce sont les négociations et non les ultimatums qui ont apaisé les dissensions et facilité les premiers pas. C'est le courage de voir dans l'ennemi d'hier le partenaire de demain qui a fait que le rêve semble plus réel que jamais.
- 5- SG/SM/6501 6 avril 1998
Les voix d'une très grande majorité d'hommes et de femmes, jeunes et vieux, palestiniens, israéliens et autres dans le monde entier aspirent à la paix. Ils savent quelles en sont les promesses et ont connu ses splendeurs.
Ce n'est pas le moment de tourner le dos à la paix. L'enjeu est trop important, trop a déjà été fait.
Je souhaiterais conclure en saisissant cette occasion pour vous préciser la nature de l'accord conclu avec le Gouvernement iraquien, ainsi que les obligations et les promesses qui y ont été consignées. Je suis allé à Bagdad, habilité par l'ensemble des membres du Conseil de sécurité, pour rechercher une solution pacifique à la crise. Cette crise a pu être évitée, du moins pour le moment.
Le mandat du Conseil de sécurité a été réaffirmé. L'accès des inspecteurs des Nations Unies a non seulement été rétabli, mais aussi étendu à tous les sites quels qu'ils soient. L'autorité du Président exécutif de la Commission spéciale des Nations Unies a été reconnue et renforcée.
C'est dorénavant aux dirigeants iraquiens de décider si la menace qui plane sur la paix et la sécurité internationales s'est évanouie à jamais. Ce sont eux qui doivent maintenant appliquer dans la pratique ce qui a été conclu sur le papier. Et ainsi, ils verront se rapprocher le jour où l'Iraq pourra faire à nouveau pleinement partie du concert des nations. Entre-temps, le programme élargi "pétrole contre nourriture" devrait permettre d'atténuer les souffrances de la population iraquienne.
L'accord conclu à Bagdad n'est ni une "victoire" ni une "défaite" pour quiconque individu, nation ou groupe de nations. L'Organisation des Nations Unies et la communauté internationale n'ont rien perdu, rien cédé ni concédé d'important.
Mais en mettant un terme, tout du moins pour l'instant, à la reprise des hostilités militaires dans le Golfe, c'est la paix, la raison et la diplomatie qui l'ont emporté.
Si cet accord est pleinement respecté et conduit, au fil du temps, à un renouveau dans le Golfe, si ce processus diplomatique, reposant tant sur des principes d'impartialité que sur la raison et la force, résiste à l'épreuve du temps, il constituera un précédent durable et précieux pour l'Organisation des Nations Unies et la communauté internationale. Mais il peut signifier beaucoup plus. J'espère aussi que cet accord pourra contribuer modestement mais sûrement, à relancer le processus de paix au Moyen-Orient, et prouver que la diplomatie et la négociation, pratiquées de bonne foi, avec rigueur et dévouement, peuvent permettre de régler les conflits les plus longs et les plus difficiles.
- 6- SG/SM/6501 6 avril 1998
L'Organisation des Nations Unies, créée avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale, voilà plus de 50 ans, ne peut oublier que même les haines les plus profondes entre les nations ne sont pas éternelles. C'est ce devoir qui nous incite à résister face à toutes les oppositions et qui nous fait croire qu'une paix juste et durable, ici comme ailleurs, n'est pas seulement nécessaire mais également possible.
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