En cours au Siège de l'ONU

7438e séance – après-midi
CS/11882

Le Chef de la MINUL souligne que l’épidémie d’Ebola, aujourd’hui éradiquée, a montré la « fragilité sous-jacente » du Libéria

La Représentante spéciale du Secrétaire général et Chef de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), Mme Karin Landgren, a affirmé, cet après-midi devant le Conseil de sécurité, que l’épidémie à virus Ebola, aujourd’hui pratiquement éradiquée, avait fait apparaître la « fragilité sous-jacente » du pays.

« Au-delà de la crise de santé publique, les Libériens ont été irrités par la réaction lente, au départ, du Gouvernement et par le coût croissant des services de base, tandis que le recours aux forces armées et l’imposition de l’état d’urgence ont également alimenté les peurs », a déclaré Mme Landgren, qui présentait le dernier rapport semestriel du Secrétaire général*.

La Représentante spéciale a annoncé que si aucun nouveau cas n’était décelé d’ici au 9 mai, le Libéria serait déclaré par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) « exempt du virus Ebola ».  « Après pratiquement 14 mois sous l’ombre d’Ebola, a-t-elle estimé, ce sera alors une source de bonne nouvelle pour le pays. »

« Les Libériens et leur Gouvernement, avec le soutien des Nations Unies et de leurs partenaires internationaux, sont venus à bout de l’épidémie », a-t-elle dit, en précisant que le 30 avril dernier, la Mission des Nations Unies pour l’action d’urgence contre l’Ebola (MINUAUCE) au Libéria avait fermé ses portes, transférant ses tâches résiduelles à la MINUL et aux bureaux des institutions des Nations Unies sur le terrain.  « Désormais, tous les Libériens doivent demeurer vigilants », a prévenu le Chef de la MINUL.

Dans son rapport, le Secrétaire général souligne que la période considérée a été « marquée par l’épidémie d’Ebola, une tragédie nationale qui, entre mars 2014 et mars 2015, a fait 4 353 morts, contaminé 9 798 personnes et privé 3 035 enfants d’un de leurs parents ou des deux ». 

« D’ordre sanitaire au départ, l’épidémie est devenue plus complexe lorsqu’elle s’est intensifiée en août 2014, et a eu de graves conséquences sur les plans politique et économique et sur la sécurité et la situation humanitaire, lesquelles risquent fort de s’inscrire dans la durée », écrit-il.

Mme Landgren a indiqué que le Gouvernement libérien avait pris des mesures pour assumer pleinement ses responsabilités en matière de sécurité d’ici au 30 juin 2016, comme l’avait demandé le Conseil de sécurité.  Le 6 mars, a-t-elle expliqué, le Conseil national de sécurité avait autorisé le Plan du Gouvernement du Libéria pour la transition de la MINUL, conformément à la résolution 2190 (2014) du Conseil de sécurité.  Mme Landgren a affirmé qu’elle avait exhorté le Gouvernement à inclure les secteurs de la justice et de la sécurité dans le programme de relèvement pour l’après-Ebola, tout en reconnaissant les lacunes en matière financière dans ce domaine.

Le temps est venu de régler les problèmes qui ont contribué à la propagation de l’épidémie d’Ebola, a poursuivi la Représentante spéciale, en citant notamment les faibles services sociaux en place, le manque de responsabilité et un gouvernement trop centralisé.  L’épidémie d’Ebola a montré, a-t-elle fait observer, que les divisions sociales existaient toujours et que la réconciliation restait à achever.  

Pour Mme Landgren, un dialogue ciblé sur l’exclusion sociale et les crimes du passé est nécessaire, de même que des efforts plus importants avec les pays voisins afin de promouvoir la stabilité régionale.

Dans tous ces domaines, a-t-elle dit, les enjeux seront de taille en 2017, date à laquelle aura lieu la prochaine élection présidentielle.  La communauté internationale doit envisager la façon de définir son propre appui au processus et de déterminer sa présence adéquate en termes de maintien de la paix afin d’éviter la perte des succès et gains enregistrés.

Le Président de la configuration Libéria de la Commission de consolidation de la paix (CCP), M. Olof Skoog, de la Norvège, a appelé, lui aussi à maintenir les efforts.  M. Skoog, qui s’est rendu dans le pays du 5 au 7 avril, a souhaité que les efforts soient engagés afin que le Libéria parvienne à zéro cas d’infection, grâce au renforcement des services de santé de base, en particulier dans les zones rurales.  

Il est urgent d’améliorer la situation économique et sociale du Libéria, notamment en garantissant l’accès à l’école primaire, le déploiement des filets de sécurité sociale et la création d’emplois pour les jeunes, a-t-il insisté, avant de rappeler que la création d’emplois pour les jeunes et les femmes était essentielle pour assurer la paix et la stabilité future du pays.

M. Skoog a également assuré qu’il était important d’accroître la confiance entre les populations et les institutions étatiques, par exemple en renforçant la reddition de comptes et les capacités institutionnelles.  

Il a proposé que les griefs découlant de la guerre civile fussent réglés, y compris par l’accélération de la mise en œuvre de plan national de réconciliation, une démarche essentielle pour préparer des élections pacifiques et crédibles en 2017 au Libéria.  Il a en outre mis l’accent sur la nécessaire autonomisation des femmes afin qu’elles puissent participer pleinement et de manière égale au processus électoral.

Le Président de la configuration Libéria a salué l’engagement des dirigeants de l’Union du fleuve Mano dans la lutte contre Ebola, en ajoutant qu’une telle coopération régionale, y compris au plus haut niveau, serait d’une grande importance pour le maintien futur de la paix et de la sécurité régionales.

La priorité de la configuration Libéria, a-t-il déclaré, est de sauvegarder et de renforcer les gains de la consolidation de la paix.  Il a plaidé pour une bonne coordination avec le Conseil de sécurité afin de faciliter une transition responsable de la MINUL au cours des prochains mois, tout en aidant à la mobilisation des ressources en faveur du plan de transition gouvernemental.

De son côté, le Ministre de la justice et Procureur général du Libéria, M. Benedict F. Sannoh, a estimé que son pays avait parcouru un long chemin depuis la fin de la guerre civile.  Il a exprimé sa gratitude à la communauté internationale qui, avec l’appui solide des Nations Unies, avait permis au pays de se débarrasser du virus Ebola.  

Pour le Ministre, la corruption et l’impunité qui se poursuivent, comme le décrit le Secrétaire général dans son rapport, doivent être attribuées à des problèmes de capacité et non à un manque de volonté politique pour les combattre.  Il a ainsi cité une série d’initiatives qui ont été mises en place pour y faire face, ainsi que des travaux en cours dans le domaine de la réforme du secteur de la sécurité.

S’agissant de la situation des droits de l’homme, il a promis que son gouvernement restait déterminé à remplir ses obligations en vertu des lois nationales et du droit international.  

En ce qui concerne le plan de transition en matière de sécurité, M. Sannoh a reconnu la responsabilité du Gouvernement du Libéria à mobiliser les fonds nécessaires, tout en soulignant la nécessité d’un soutien accru des donateurs, compte tenu de l’ampleur des défis.  Il a dit compter sur la poursuite du partenariat avec la communauté internationale, non seulement pour garantir une région qui soit débarrassée du virus Ebola et aider à la transition en matière de sécurité, mais aussi pour appuyer les efforts du Gouvernement libérien en vue d’améliorer la situation économique et sociale et de renforcer la confiance entre les citoyens.

 

* S/2015/275

 

LA SITUATION AU LIBÉRIA

Vingt-neuvième rapport périodique du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies au Libéria (S/2015/275)

Le Secrétaire général, dans ce rapport sur la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), dont le mandat a été prorogé jusqu’au 30 septembre 2015, fait le point des principaux faits survenus depuis la publication de son dernier rapport, le 15 août 2014, (S/2014/598) et la lettre qu’il avait adressée le 28 août 2014 au Président du Conseil de sécurité (S/2014/644), qui traitent de l’impact de l’épidémie de fièvre hémorragique causée par le virus Ebola au Libéria.

La période considérée, écrit-il, a été marquée par l’épidémie d’Ebola, une tragédie nationale qui, entre mars 2014 et mars 2015, a fait 4 353 morts, contaminé 9 798 personnes et privé 3 035 enfants d’un de leurs parents ou des deux.  D’ordre sanitaire au départ, l’épidémie est devenue plus complexe lorsqu’elle s’est intensifiée en août 2014, et a eu de graves conséquences sur les plans politique et économique et sur la sécurité et la situation humanitaire, lesquelles risquent fort de s’inscrire dans la durée.

Elle a fait apparaître l’ampleur du manque de confiance de la population vis-à-vis des institutions nationales et les insuffisances de ces dernières, et accentué les divisions au sein de la société.  Les réformes, notamment politiques, s’en sont trouvées ralenties, même si de nouvelles possibilités de coopération sont apparues, tout particulièrement en ce qui concerne le renforcement des moyens d’action des autorités locales.

Le peuple libérien a fait preuve de résilience et de dignité face à l’épidémie d’Ebola, une tragédie nationale qui constitue probablement la menace la plus grave à laquelle le pays a été confronté depuis les guerres civiles.  L’épidémie a menacé de réduire à néant tout ce que le pays avait accompli depuis la fin de la guerre en 2003.  Pourtant, souligne le Secrétaire général, le Libéria conserve sa stabilité, ce qui témoigne de la ferme intention et de la volonté du peuple et du Gouvernement de faire échec à cette menace, avec l’aide des partenaires nationaux et internationaux.

L’épidémie causée par le virus Ebola a reculé au Libéria, le dernier cas ayant été diagnostiqué le 20 mars.  Le peuple et le Gouvernement libériens s’attellent maintenant de nouveau à la difficile tâche consistant à transformer leur nation.

Pendant trop longtemps, les efforts de réconciliation nationale ne se sont pas vu accorder la priorité qu’ils méritaient, et les problèmes de la corruption, de l’impunité, du népotisme et du copinage ont été largement ignorés, ajoute le Secrétaire général. 

Il invite donc la population et le Gouvernement du Libéria à poursuivre avec un sentiment d’urgence renouvelé la tâche essentielle qui consiste à transformer le tissu social et institutionnel du pays en faisant avancer les initiatives de réconciliation nationale, et en mettant en œuvre des mesures visant à renforcer la confiance dans l’utilisation des deniers publics.

Pour transformer le Libéria et renforcer durablement la stabilité durement acquise, le peuple et le Gouvernement du Libéria devront aussi redoubler d’efforts pour opérer des réformes politiques fondamentales dans le souci de l’intérêt commun.  La révision constitutionnelle en cours doit être l’occasion pour l’ensemble des Libériens de formuler une vision commune pour l’avenir de leur nation, qui reflète pleinement la grande diversité ethnique et religieuse du pays.

Le Secrétaire général demande donc instamment au Gouvernement du Libéria d’associer davantage les citoyens aux prochaines étapes du processus de révision de la Constitution, et aux préparatifs du référendum national, en assurant la participation d’un échantillon largement représentatif de la société libérienne (organisations de femmes et de jeunes, société civile, chefs religieux et traditionnels, acteurs du secteur privé et dirigeants locaux).

 

 

 

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