« En une génération, vous avez montré au monde que la transformation est possible pour construire un Rwanda où les cultures, les traditions et la paix sont partagées », rappelle Ban Ki-moon
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« EN UNE GÉNÉRATION, VOUS AVEZ MONTRÉ AU MONDE QUE LA TRANSFORMATION EST POSSIBLE POUR CONSTRUIRE UN RWANDA OÙ LES CULTURES, LES TRADITIONS ET LA PAIX SONT PARTAGÉES », RAPPELLE BAN KI-MOON
Vous trouverez ci-après le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, prononcée aujourd’hui à Kigali (Rwanda) à l’occasion de la cérémonie marquant le vingtième anniversaire du génocide du Rwanda:
Kuri jye, ni icyubahiro cyinshi kuba ndi kumwe namwe kuri uyu munsi ukomeye mu mateka y’u Rwanda. (Je suis très honoré d’être ici en ce jour important pour le Rwanda.)
C’est un très grand honneur pour moi d’être aux côtés du peuple rwandais et de si nombreux dirigeants venus du monde entier.
Le génocide des Tutsis perpétré au Rwanda a été l’une des pages les plus sombres de l’histoire de l’humanité.
Ce sont plus de 800 000 personnes qui ont été tuées de façon systématique -- des Tutsis en très grande majorité, mais aussi des Hutus modérés, des Twa et des membres d’autres groupes.
Pendant 100 jours, le sang a été versé. Vingt ans après, les larmes coulent encore.
Je tiens à exprimer ma solidarité avec tous les Rwandais dont le pays est encore sur la voie de la guérison.
Je suis conscient des conséquences dévastatrices qui se font encore sentir dans l’ensemble de la région.
Je suis souvent venu au Rwanda en tant que Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.
J’ai rencontré des survivants. J'ai entendu d’insoutenables récits d'actes de cruauté et de souffrances.
À ma première visite au mémorial de Gisozi, j’ai entendu et ressenti le silence de la mort.
Le silence de tous les disparus – et le silence de la communauté internationale à l’heure où vous aviez le plus besoin d’elle.
Nombre de membres du personnel des Nations Unies et d’autres ont fait montre d’un courage remarquable.
Mais nous aurions pu faire beaucoup plus. Nous aurions dû faire beaucoup plus.
Les casques bleus ont été retirés du Rwanda au moment où l’on en avait le plus besoin.
Un an plus tard, à Srebrenica, des zones que l’Organisation des Nations Unies avait déclarées « sûres » sont devenues dangereuses et des innocents ont été laissés à la merci des tueurs.
En l’espace d’une génération, la honte ne s’est pas effacée.
Aujourd'hui, la Syrie est en flammes et la République centrafricaine a sombré dans le chaos.
Le monde doit achever de surmonter ses divisions, remédier à son indifférence et en finir avec certaines zones d’incompréhension qui persistent sur le plan moral.
Les progrès accomplis donnent cependant un signe d’espoir.
La responsabilité de protéger empêche désormais les États de prétendre que telles ou telles atrocités criminelles sont une affaire intérieure.
La justice pénale internationale étend sa portée. Il est de plus en plus probable que les dirigeants et les chefs de guerre aient à répondre de leurs actes criminels.
Le travail remarquable effectué par le Tribunal pénal international pour le Rwanda a montré une fois de plus que la justice est indispensable à l’établissement d’une paix durable.
J’ai d’ailleurs exhorté le système des Nations Unies et la communauté internationale à faire des droits de l’homme une priorité.
Comme les génocides résultent d’une planification minutieuse, les violations des droits de l’homme doivent être considérées comme des précurseurs à des conflits et des atrocités.
J'ai moi-même envoyé un message aux représentants des Nations Unies dans le monde entier.
Ce message est simple: lorsque vous constatez que des personnes risquent d’être victimes d’atrocités criminelles, n’attendez pas d’instructions de la hiérarchie.
Dites les choses haut et fort, même si certains peuvent s’en offenser.
Agissez.
Notre premier devoir est toujours de protéger les personnes -- de protéger les êtres humains qui sont dans le besoin et exposés à un danger.
C’est ce que nous avons fait récemment au Soudan du Sud, où des milliers de personnes ont pris la fuite pour sauver leur vie lors des tout derniers combats.
L’Organisation des Nations Unies leur a ouvert les portes de ses missions de maintien de la paix pour qu'elles y trouvent refuge. La situation demeure fragile mais, grâce à ce geste, des milliers de personnes sont encore en vie aujourd’hui – et c’est là un effet des leçons tirées de ce qui s’est passé au Rwanda.
Il est certain que nos valeurs communes seront durement mises à l’épreuve par d’autres situations. Il faudra être à la hauteur.
Nous ne devons pas nous contenter de répéter éternellement « plus jamais ça ».
Il est, en ce qui concerne la condition humaine, une vérité qui est aussi alarmante aujourd’hui qu’elle l'était il y a 20 ans; la fragilité de notre civilité.
Les liens qui nous unissent peuvent se dissoudre en un instant.
Les sociétés peuvent retrouver très vite les tendances à la violence et à la déshumanisation qu’il est bien trop facile d’aller réveiller dans les recoins les plus sombres du cœur humain.
Dans aucun pays, si tolérant soit-il en apparence, on ne peut exclure la possibilité que certains s’en prennent à « l’autre ».
Il y a, dans toutes les régions du monde, même les plus avancées, des opportunistes qui manipulent les questions identitaires pour en tirer un avantage politique.
En une génération, vous avez, vous les Rwandais, montré au monde une autre vérité essentielle: la force de l’esprit humain.
Les survivants font preuve d’une résilience qui défie l’entendement.
Les enfants ont assisté à des actes de violence tellement graves qu’ils ont grandi du jour au lendemain. Et pourtant, vous et votre pays avez trouvé les moyens de revenir de très loin, de dominer des souvenirs effroyables et de revivre.
Vous avez montré au monde que la transformation est possible.
J’engage le Rwanda à continuer de renforcer la démocratie et la protection des droits de l’homme afin que son avenir soit celui d’un pays où règnent la liberté, la dignité et la sécurité et qui offre des perspectives à tous.
J’insiste pour que, dans l’ensemble de la région des Grands Lacs, davantage soit fait pour renforcer la prévention et la coopération afin d’assurer l’harmonie et la stabilité régionales.
Il y a 20 ans, des milliers de Rwandais ont trouvé refuge dans le stade où nous nous trouvons, échappant de justesse aux meurtriers et aux violeurs qui ont répandu la terreur à Kigali et dans les campagnes.
Les personnes ici présentes construisent un nouveau Rwanda, un Rwanda du partage des cultures, des traditions et de la paix.
Que le nom de cet endroit -- Amahoro, ou paix – nous guide à jamais.
Nzahoraiteka nibuka kandi nifatanya naban yarwanda. (Je me souviendrai toujours du peuple rwandais et je serai à ses côtés.)
Murakozecyane. (Je vous remercie.)
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