Conférence de presse

Conférence de presse du Comité pour la protection des journalistes: les arrestations et meurtres commis contre les membres de la profession sont en augmentation

16/02/2010
Communiqué de presseConférence de presse
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

C ONFÉRENCE DE PRESSE DU COMITÉ POUR LA PROTECTION DES JOURNALISTES: LES ARRESTATIONS ET MEURTRES COMMIS CONTRE LES MEMBRES DE LA PROFESSION SONT EN AUGMENTATION


Au vu de l’augmentation du nombre de journalistes tués ou emprisonnés par les autorités dans certains pays, le Directeur adjoint du Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a lancé aujourd’hui un appel au Secrétaire général pour qu’il réaffirme l’importance de la liberté d’expression, dans le cadre du mandat de l’ONU de promouvoir la paix et la sécurité dans le monde.


Au cours d’une Conférence de presse tenue à New York et parrainée par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), M. Robert Mahoney, accompagné de M. Bob Dietz, Coordonnateur du Programme pour l’Asie du CPJ, et de M. Maziar Bahari, correspondant du journal « Newsweek », arrêté en juin dernier en Iran où il a été détenu pendant quatre mois, a lancé le rapport annuel du CPJ, outil qui permet de sensibiliser l’opinion sur ces questions et parfois de faire libérer des journalistes détenus arbitrairement.


Rappelant que la liberté d’expression est un des piliers de la démocratie et que le Secrétaire général de l’ONU est déjà intervenu en faveur de cette cause, M. Mahoney a souligné l’urgence qu’il y a de réaffirmer ce principe, après les 70 assassinats de journalistes et l’arrestation de 120 autres en 2009.  « En s’adressant au Secrétaire général, on se tourne vers la communauté internationale dans son ensemble, ce qui a, par ricochet, un effet très fort », a noté M. Maziar Bahari.


M. Robert Mahoney a indiqué que, sur les 30 dernières années, 2009 avait été la plus sombre en termes de journalistes tués du fait de leur activité, le nombre le plus important d’assassinats ayant été constaté en Asie.  Il a donné l’exemple des nombreux assassinats commis aux Philippines en novembre dernier.  Déplorant les agressions et meurtres de membres de la presse, il a également noté l’augmentation du nombre d’arrestations par des gouvernements autoritaires qui s’attaquent particulièrement à l’exercice de la profession de journaliste.  En décembre dernier, on dénombrait 136 personnes emprisonnées à ce titre, et la situation a empiré depuis, avec les mesures répressives prises après les élections en République islamique d’Iran où, au moins 60 bloggeurs ou écrivains sont actuellement détenus, a relevé M. Mahoney.


Il a aussi signalé que les autorités de certains pays utilisent les nouvelles technologies contre les journalistes, citant le cas du Gouvernement de l’Iran qui utilise le site « FaceBook » pour surveiller les journalistes et les dissidents.  Il utilise ces technologies contre la presse alors que ce sont des outils dont celle-ci se sert, a-t-il constaté.


Victime lui-même de ces arrestations, M. Maziar Bahari a expliqué que les autorités iraniennes ont toujours regardé les journalistes avec suspicion.  La définition de l’espionnage dans la loi iranienne est proche de celle du métier de journaliste, a-t-il noté.  En outre, depuis les dernières élections présidentielles tenues en juin 2009, les autorités iraniennes « sont passées à une nouvelle phase ».  Non seulement elles harcèlent et arrêtent les journalistes, mais elles les utilisent aussi dans des scénarios préétablis.  « J’ai été personnellement victime d’un de ces scénarios », a précisé M. Bahari, « mais il y a plus de 65 autres journalistes, bloggeurs et écrivains qui peuvent être accusés d’espionnage pour la presse étrangère » en Iran, a-t-il prévenu.  En effet, les autorités ont annoncé qu’elles allaient faire passer une loi qui punirait pour espionnage quiconque travaillera pour un organe de presse étranger.  Or la sentence pour ce genre de crime est la peine capitale, s’est-il inquiété.


M. Bahari a aussi expliqué que les autorités iraniennes n’avaient aucun respect pour la vie privée des personnes arrêtées.  Lors de mon arrestation, a-t-il donné comme exemple, on a utilisé les mots de passe de mes comptes email et « FaceBook » avant de m’interroger sur chacun de mes contacts.  Il a aussi indiqué que les forces de sécurité iraniennes piratent des sites Internet, comme cela a été le cas pour celui d’une radio de langue persane diffusant en Hollande et même pour un site Internet localisé en Chine.  Leur stratégie est de rendre précaire la situation des journalistes.  Ces derniers peuvent être arrêtés à tout moment, emprisonnés et torturés.


On ne peut pas espérer de résultats immédiats en Iran et il faut d’abord arriver à une compréhension profonde de la situation, a conclu M. Bahari, avant d’appeler la communauté internationale à augmenter la pression sur le Gouvernement iranien, notamment en rendant public les cas de journalistes arrêtés.


Il nous faut continuer à plaider la cause de ces journalistes et à faire connaitre les affaires que l’on peut prouver, car ça porte des fruits, comme cela a été le cas pour M. Bahari, a ajouté M. Mahoney.  Une déclaration ferme du Secrétaire général en faveur de la liberté d’expression serait un soutien fort à ce mouvement, a-t-il estimé.  L’ONU doit jouer un rôle de protection et de respect des droits de l’homme, a-t-il recommandé.


Dans le rapport publié par le CPJ, les meurtres et enlèvements de journalistes en Tchétchénie sont mentionnés comme une question d’importance internationale, a relevé un correspondant.  Rappelant les assassinats d’Estemirova, militante des droits de l’Homme en Russie, et de la journaliste Anna Politkovskaïa, M. Mahoney a expliqué l’autocensure que ces faits avaient provoquée chez certains journalistes, ce qui est compréhensible quand on sait que plus de 19 journalistes ont été assassinés depuis 2000 en Russie.  Nous menons une campagne de lutte contre l’impunité qui vise en particulier ce pays, a-t-il ajouté, assurant surveiller de près les progrès accomplis dans les poursuites judiciaires contre les meurtriers de journalistes en Russie.


Plus de 90% des cas de journalistes tués dans le monde ne sont pas poursuivis en justice, a d’ailleurs indiqué Bob Dietz.  Dans le cas de Daniel Pearl, assassiné au Pakistan, les autorités de ce pays ont mené une enquête et des poursuites qui ont conduit à un procès, a-t-il rappelé.  « Est-ce que ce procès était le plus respectueux des libertés fondamentales et des garanties de procédures?  Je ne peux pas dire ça, mais voici au moins un exemple de ce qui peut être fait lorsqu’un gouvernement a la volonté de s’attaquer au problème », a-t-il estimé.


En ce qui concerne les disparitions et les meurtres de journalistes au Mexique, M. Mahoney a indiqué qu’ils sont en grande partie liés à la criminalité organisée.  Nous poussons actuellement le Mexique à fédéraliser les crimes contre les journalistes, ce qui augmenterait les chances de poursuites judiciaires, a-t-il indiqué.  Il a aussi expliqué que les problèmes de trafic de drogue à la frontière avec les États-Unis ne sont pas couverts, car les journalistes qui le feraient se mettraient en grand danger.


En ce qui concerne les autres zones dangereuses pour les journalistes, les intervenants à la conférence de presse ont mentionné l’Iraq où le nombre d’arrestations a augmenté depuis la deuxième guerre, l’Afghanistan, le Sri Lanka et la Somalie.  En Chine, où on compte le plus grand nombre d’utilisateurs d’Internet à haut débit, il y a 24 journalistes en prison.  Enfin, M. Mahoney a noté le nombre croissant de journalistes pigistes qui sont en danger et a expliqué l’importance du rôle que joue le CPJ pour les défendre. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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