CONSEIL DE SÉCURITÉ: LA SITUATION AU DARFOUR N’A PAS CONNU DE VÉRITABLE AMÉLIORATION, CONSTATE LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT AUX OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX
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Conseil de sécurité
6054e séance – matin
CONSEIL DE SÉCURITÉ: LA SITUATION AU DARFOUR N’A PAS CONNU DE VÉRITABLE AMÉLIORATION, CONSTATE LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT AUX OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX
M. Alain Le Roy appelle donc les parties à s’engager sérieusement dans le processus politique
Le Conseil de sécurité a entendu ce matin un exposé de M. Alain Le Roy, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, sur le Darfour qui a constaté que si des progrès avaient été réalisés depuis le transfert d’autorité, il y a près d’un an, entre la Mission de l’Union africaine et l’Opération hybride Nations Unies-Union africaine au Darfour (MINUAD), ceux-ci avaient été beaucoup trop lents pour améliorer réellement la situation de la population et inadéquats pour résoudre la crise. Le représentant du Soudan a assuré pour sa part que son pays était pleinement engagé à poursuivre la coopération avec les Nations Unies afin de permettre d’achever le déploiement de la MINUAD et fait porter la responsabilité du manque d’avancées vers la paix sur les rebelles.
M. Le Roy a rappelé qu’après six ans de conflit, plusieurs millions de personnes survivaient dans des camps et étaient dépendants de l’aide humanitaire. « La situation ne s’est pas améliorée » et rien que ces derniers mois, 100 000 personnes supplémentaires ont été déplacés, a-t-il dit. La MINUAD a perdu 21 membres de son personnel pendant sa première année d’opération, a-t-il indiqué, avant de déplorer la poursuite des bombardements aériens par l’aviation gouvernementale alors que les autorités ont décrété un cessez-le-feu unilatéral. Pour sa part, Mme Susana Malcorra, Secrétaire générale adjointe à l’appui aux missions, a affirmé que l’objectif de déployer 60% du personnel en uniforme d’ici la fin de l’année était en cours de réalisation. Les défis consistant à déployer comme prévu 80% de l’effectif autorisé d’ici à la fin mars 2009, sont désormais bien connus, a-t-elle dit. M. Le Roy avait en effet rappelé auparavant que depuis plus d’un an, l’ONU demande aux États Membres la fourniture de diverses unités dont des hélicoptères légers tactiques et 18 hélicoptères de manœuvre. Il a réitéré son appel aux membres du Conseil d’appeler les pays contributeurs de troupes et qui sont susceptibles d’être en mesure de répondre à cette demande de le faire sans retard. Mme Malcorra a reconnu que la tâche était lourde et que l’on exigeait beaucoup aux pays contributeurs, du fait d’un environnement difficile au Darfour. C’est pourquoi, il leur est demandé d’être particulièrement méticuleux dans la préparation du déploiement de leurs unités afin que celles-ci soient parfaitement en mesure d’affronter les énormes défis de la MINUAD, a-t-elle précisé.
Mais même lorsqu’elle aura été pleinement déployée, a souligné de son côté M. Le Roy, « la MINUAD ne pourra pas apporter la paix par elle-même. Seul un règlement politique durable entre les parties mettra un terme à ce conflit », a-t-il rappelé. Il est donc extrêmement regrettable, a poursuivi M. Le Roy, qu’une autre année se soit écoulée et que les parties poursuivent leurs opérations militaires plutôt que de s’investir totalement dans des négociations politiques. Le Secrétaire général adjoint a néanmoins noté que le Forum du peuple soudanais, instance multipartite lancée en octobre, avait fait un pas dans la bonne direction. Des progrès ont été faits au niveau national pour débattre des questions que la population du Darfour a le plus à cœur –désarmement des milices, compensations, la création d’une région du Darfour, représentation politique et développement socio-économique. Le Gouvernement du Soudan s’est engagé à ce que les recommandations du Forum du peuple soudanais servent de bases de discussion pour le dialogue direct avec les mouvements armés et en direction d’un règlement politique. Pour que le Forum du peuple soudanais puisse faire la différence, il est critique qu’une action rapide soit entreprise pour mettre en œuvre ses recommandations. Les violations du cessez-le-feu unilatéral décrété par le Président Al-Bachir n’ont pas permis de promouvoir un climat de confiance entre les parties, a-t-il remarqué. Lors de ses contacts avec les mouvements armés, le Médiateur en chef conjoint, M. Djibrill Bassolé, a appelé les mouvements armés à décider au plus vite de leur participation et de leur représentation dans de futurs pourparlers de paix.
M. Le Roy a évoqué par ailleurs la question de l’éventuelle inculpation du Président Omar Al-Bachir par la Cour pénale internationale (CPI). « Nous avons reçu des signaux contradictoires du Gouvernement sur cette question », a-t-il dit. D’un côté, il y a eu des assurances qu’il n’y aurait aucune conséquence pour la MINUAD et la MINUS (Mission des Nations Unies au Soudan) si la CPI devait accéder à la demande d’inculpation formulée par le Procureur, M. Luis Moreno-Ocampo. Mais dans le même temps des déclarations de responsables gouvernementaux contredisent cette position, a constaté M. Le Roy. Celui-ci a assuré que les Casques bleus continueraient de travailler de façon impartiale, en coopérant de bonne foi avec toutes les parties pour faire avancer l’objectif de la paix et de la stabilité. « Nous sommes confiants que le Gouvernement continuera de remplir ses engagements en faveur de la paix au Darfour et coopérera avec les efforts de l’ONU en ce sens », a souligné le Secrétaire général adjoint.
En réponse, le représentant du Soudan a assuré que son gouvernement avait « rempli toutes ses obligations » pour faciliter le déploiement de la MINUAD. Au sujet du cessez-le-feu unilatéral, il a souligné que certains groupes avaient procédé à des attaques contre des unités de police afin de provoquer le Gouvernement. En outre, les coups de main contre des convois humanitaires sont, a-t-il estimé, un moyen de se procurer une source de revenus pour les groupes armés. Dans une allusion à l’inculpation éventuelle du Chef de l’État soudanais par la CPI, il a recommandé au Conseil de protéger le processus de paix de toute menace, comme celles représentées par les initiatives du procureur de la Cour.
RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN
Rapport du Secrétaire général sur le déploiement de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (S/2008/781)
Dans ce rapport en date du 12 décembre, le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-moon, fait le point de la situation au Darfour au cours des mois d’octobre et novembre. Il souligne que l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) continue de faire face à d’énormes difficultés. La violence et les déplacements se poursuivent, les activités humanitaires sont compromises, des affrontements entre les parties se produisent à intervalles réguliers et les parties ne sont toujours pas parvenues à un accord de paix négocié.
La MINUAD a mis l’accent sur la protection des civils et le déploiement des unités militaires et de police. Au 30 novembre, le personnel déployé comptait près de 12 500 personnes dont près d’un millier de militaires et quelque 2 500 policiers. M. Ban Ki-moon lance à nouveau un appel à ceux qui sont en mesure de fournir des moyens essentiels à la mission pour qu’ils le fassent sans tarder. Il rappelle en effet qu’il n’y a toujours pas eu d’annonces de contributions concernant des éléments essentiels tels que des hélicoptères tactiques légers et 18 hélicoptères de manœuvre. En tout état de cause, il est essentiel d’obtenir l’appui et la coopération soutenus du Gouvernement afin de faciliter le déploiement de la MINUAD et de l’aider à s’acquitter de son mandat, souligne-t-il.
Sur le plan politique, le Secrétaire général rappelle que le Gouvernement soudanais s’est attaché à relancer le dialogue politique interne dans le cadre de l’initiative multipartite du Forum du peuple soudanais. « Cela pourrait faciliter un règlement négocié au Darfour », estime-t-il, en rappelant toutefois que les progrès véritables se mesureront à l’aune des mesures concrètes qui seront prises. Il est crucial en particulier que le Gouvernement tienne l’engagement qu’il a pris concernant le versement d’indemnisations, l’aide au développement et la collaboration avec les groupes armés.
Tout en se félicitant de la déclaration de cessation des hostilités faite unilatéralement par le Président Al-Bashir le 12 novembre, le Secrétaire général déplore profondément que le Gouvernement du Soudan poursuive ses activités militaires. Les informations faisant état d’actes de violence, d’affrontements et de bombardements aériens depuis la déclaration unilatérale de cessez-le-feu du 12 novembre sont très préoccupantes, note-t-il, car « elles démentent l’intention constructive reflétée dans les déclarations du Gouvernement ». Il « demande de nouveau à toutes les parties de faire preuve de modération et de renouveler leur engagement en faveur d’une cessation immédiate et inconditionnelle des hostilités ».
Il constate à cet égard que le Médiateur en chef conjoint Union africaine-ONU pour le Darfour a progressé sur la voie de l’élaboration d’un accord-cadre sur lequel fonder concrètement les pourparlers de paix une fois que les parties seront prêtes. Mais son succès est fonction de la volonté des parties de s’associer constructivement au processus de paix et de l’appui indéfectible de la communauté internationale afin que toutes les autres initiatives entrent dans le cadre des efforts entrepris par le Médiateur en chef conjoint, M. Djibrill Bassolé.
Sur le plan humanitaire, le Secrétaire général constate que la cessation des hostilités est également indispensable si l’on veut améliorer l’acheminement des secours. Il se dit « profondément préoccupé par le fait que l’insécurité continue de porter gravement atteinte aux civils et d’entraver les initiatives prises par la communauté humanitaire afin d’apporter une aide vitale aux populations ». Il engage « le Gouvernement soudanais à respecter les obligations que lui imposent les normes internationales relatives aux droits de l’homme et le droit humanitaire, notamment en ce qui concerne la protection des civils ». Des informations inquiétantes font en effet état d’actes d’intimidation et de harcèlement à l’égard de déplacés, notamment des femmes, qui sont pris pour cible par des milices en maraude.
En ce qui concerne le mandat d’amener, demandé le 14 juillet par le Procureur de la Cour pénale internationale à l’encontre du Président Al-Bashir, le Secrétaire général rappelle que les Nations Unies respectent l’indépendance de la Cour et « souligne l’importance cruciale qu’il y a pour toutes les parties à se conformer pleinement aux décisions de la Cour. « Nos opérations de maintien de la paix et nos activités humanitaires et de développement au Soudan se poursuivront de façon impartiale et nous coopérerons de bonne foi avec tous les partenaires en vue d’aider à faire régner la paix et la stabilité dans le pays », assure-t-il.
Malgré des déclarations constructives, « les combats se poursuivent au Darfour, des civils innocents continuent de souffrir, le personnel de la MINUAD et les membres du personnel humanitaire sont menacés et les parties n’ont pas activement recherché une solution politique », regrette le Secrétaire général. M. Ban conclut que « la paix ne peut pas être imposée. Tant le Gouvernement soudanais que les mouvements rebelles armés doivent comprendre que la violence ne servira pas leurs objectifs et que la crise au Darfour ne peut être réglée que par des négociations politiques et un accord de paix global et sans exclusive » .
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