LE CONSEIL DE SÉCURITÉ ENTEND UN EXPOSÉ SUR LA SITUATION TRÈS PRÉOCCUPANTE AU BURUNDI SUR LES PLANS SÉCURITAIRE, HUMANITAIRE ET POLITIQUE
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Conseil de sécurité
5897e séance – après-midi
LE CONSEIL DE SÉCURITÉ ENTEND UN EXPOSÉ SUR LA SITUATION TRÈS PRÉOCCUPANTE AU BURUNDI SUR LES PLANS SÉCURITAIRE, HUMANITAIRE ET POLITIQUE
« La situation au Burundi est particulièrement préoccupante », a déclaré cet après-midi M. Johan L. Løvald, Président des réunions spécifiques sur le Burundi organisées par la Commission de consolidation de la paix (CCP). L’Ambassadeur norvégien revient d’une mission dans le pays qui, a-t-il dit, a plus que jamais besoin de l’attention de la communauté internationale.
Dans l’ensemble, la situation s’est gravement détériorée sur les plans politique, sécuritaire et humanitaire, comme l’indique le rapport du Secrétaire général dont était saisi le Conseil de sécurité. Il est clair que sans paix et sécurité, il ne peut y avoir de développement ou de relèvement économique, a souligné M. Løvald, qui a qualifié d’« extrêmement inquiétants » les combats que se livrent les Forces de sécurité nationales et le Palipehutu-Forces nationales de libération (Palipehutu-FNL).
Le retour la semaine dernière de Palipehutu-FNL dans la capitale Bujumbura est un signe toutefois encourageant, a reconnu l’Ambassadeur. Sans le retour de cette formation au mécanisme conjoint de vérification et de surveillance et la pleine mise en œuvre de l’accord général de cessez-le-feu, les gains du Burundi en matière de consolidation de la paix seront compromis, a-t-il prévenu. Le déplacement de plusieurs centaines de milliers de personnes s’ajoute de manière dramatique aux préoccupations actuelles en matière de sécurité.
La crise est également politique, a poursuivi M. Løvald, qui a expliqué que le Parlement est actuellement bloqué par les divergences des partis politiques. Ils doivent sortir rapidement de l’impasse, a-t-il dit, sous peine de remettre en cause les préparatifs des élections nationales de 2010, dont il est essentiel qu’elles se tiennent dans les délais impartis, a-t-il ajouté.
La question du retour des réfugiés, qui se sont exilés en 1972 et 1993, ne fera qu’exacerber le problème actuel de la restitution des terres dans un pays extrêmement pauvre et surpeuplé. En plus des déplacements de populations causés par la reprise des hostilités à grande échelle, le Burundi continue de souffrir de pauvreté structurelle et de stagnation du développement, indique le rapport.
Depuis l’adoption par la Commission de consolidation de la paix, en décembre dernier, du mécanismede contrôle et de suivi du Cadre stratégique pour la consolidation de la paix au Burundi, la Commission s’est efforcée de répondre aux priorités définies par ce pays. Une première évaluation semestrielle de la mise en œuvre de ce Cadre aura lieu à la fin du mois de juin 2008, a annoncé M. Løvald. Au nombre de ces priorités, il a cité la nécessité pour la communauté internationale et des donateurs de réaffirmer leur solidarité à l’égard du Burundi.
Le représentant du Burundi a toutefois souhaité nuancer la vision donnée de la situation par le Représentant permanent de la Norvège, comme par le Secrétaire général dans son rapport. M. Augustin Nsanze a jugé que ce document contenait un certain nombre d’anachronismes et de contradictions. En le lisant, a-t-il fait remarquer, on a l’impression que le pays s’engage une fois de plus dans un nouveau cycle infernal de violence. C’est sans doute dans le contexte de peur et d’incertitude causé par les attaques du FNL sur Bujumbura et de quelques autres localités que le rapport a été élaboré sur un arrière-fond de pessimisme, a estimé le représentant.
Fort heureusement, la suite des événements a permis de reprendre confiance et d’envisager l’avenir avec plus d’optimisme, a-t-il affirmé, estimant que le retour des FNL à la table des négociations et la reprise des travaux du mécanisme conjoint de vérification et de suivi constituaient des éléments positifs.
Cependant, cet optimisme peut s’estomper si des dispositions ne sont pas prises pour consolider les acquis déjà atteints par mon pays, a reconnu M. Nsanze. Cela sera possible, a-t-il dit, si le Président du FNL, Agathon Rwasa, rentre au Burundi pour participer à la vie politique. Par ailleurs, certains partis politiques, profitant d’une Constitution mal conçue et impossible à réviser dans l’immédiat, préfèrent semer le désordre pour mettre le Gouvernement actuel à l’épreuve, a regretté le représentant.
Un certain nombre de parlementaires semblent ainsi ignorer à quels partis politiques ils appartiennent, alors qu’ils ont été élus sur des listes bloquées présentées par des partis politiques bien connus. D’autres ont quitté purement et simplement leurs partis et prétendent être des indépendants. Tous faussent les bonnes pratiques et la démocratie, a accusé M. Nsanze. Il faut trouver des mécanismes contraignant chacun à agir dans le cadre légal et au besoin, imposer à terme une révision de la Constitution si elle s’avérait un obstacle.
Évoquant les questions de justice, Augustin Nsanze a noté que la réforme de ce secteur n’avait pas encore atteint les résultats escomptés. La Commission vérité et réconciliation est difficile à démarrer, notamment parce que certains groupes et individus entretiennent la confusion et cherchent à contrecarrer ce processus. Le représentant burundais a donc demandé à l’ONU d’être prudente, car certains essaieront de l’utiliser en ce sens.
Troisième rapport du Secrétaire général sur le Bureau intégré des Nations Unies au Burundi (S/2008/330)
Le présent rapport couvre les principaux événements survenus au Burundi entre le 23 novembre 2007 et le 7 mai 2008. Dans l’ensemble, la situation s’est gravement détériorée sur les plans politiques, sécuritaire et humanitaire au Burundi au cours de la période considérée, y indique le Secrétaire général. Les hostilités ont repris à grande échelle entre les Forces de sécurité nationales et le Palipehutu-Forces nationales de libération (FNL), tandis qu’un regain de tensions entre les partis politiques a déclenché une nouvelle crise politique, qui a paralysé les activités du Parlement et du Gouvernement de large coalition formé en novembre 2007. Comme autres sources de préoccupation relevées au cours de la période considérée, le rapport signale les déplacements de populations provoqués par les hostilités, la poursuite des violations généralisées des droits de l’homme perpétrées par les Forces de sécurité nationales, l’absence de progrès en matière de justice transitionnelle et la menace de l’insécurité alimentaire.
Si l’application des dispositions de l’accord général de cessez-le-feu ne reprend pas, ce nouveau cycle de violence risque d’annihiler tous les acquis que le peuple burundais a obtenus à grand-peine depuis la signature de l’Accord d’Arusha, il y a huit ans. Les parties prenantes, tant à l’échelle nationale qu’internationale, craignent également, à juste titre, que la reprise des combats fasse tache d’huile et affecte les pays voisins, les actions transfrontalières des groupes armés ayant des incidences sur toute la région des Grands Lacs, rappelle le rapport.
Le Gouvernement burundais et les dirigeants du FNL partagent la responsabilité première de mettre définitivement un terme à plus d’une décennie de conflits violents, tout comme de tirer parti des chances qui s’offrent. Le Secrétaire général lance donc un appel aux deux parties afin qu’elles cessent immédiatement les hostilités et entament des pourparlers, premier pas vers la reprise du processus de paix. Comme il s’est engagé à le faire devant les dirigeants de l’Initiative régionale, le 6 mai dernier, le FNL doit non seulement se replier sur le Burundi, comme il l’a annoncé, mais encore effectivement participer aux travaux du mécanisme conjoint de vérification et de surveillance et de la Direction politique sans conditions préalables. Le Gouvernement est pour sa part instamment invité par le Secrétaire général à accorder à l’application de l’accord général de cessez-le-feu la priorité qu’elle mérite et à tout mettre en œuvre pour régler, de façon acceptable pour les deux parties, les questions qui entravent sa mise en pratique. Les deux parties doivent respecter rigoureusement les dispositions du Programme d’action qu’elles ont toutes deux approuvé.
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