LE CONSEIL DE SÉCURITÉ PREND CONNAISSANCE DES TRAVAUX DU TRIBUNAL SPÉCIAL POUR LA SIERRA LEONE ET DÉBAT DU SOUTIEN À LUI APPORTER
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Conseil de sécurité
5690e séance – après-midi
LE CONSEIL DE SÉCURITÉ PREND CONNAISSANCE DES TRAVAUX DU TRIBUNAL SPÉCIAL POUR LA SIERRA LEONE ET DÉBAT DU SOUTIEN À LUI APPORTER
Outre le fait que sa création et son mandat ont marqué un pas important dans la lutte contre l’impunité, le Tribunal spécial pour la Sierra Leone contribue largement à la consolidation de la paix dans ce pays et dans la région de l’Afrique de l’Ouest, ont fait remarquer les membres du Conseil de sécurité et les autres délégations qui se sont exprimés cet après-midi sur les travaux de cette juridiction, marqués cette semaine par l’ouverture à La Haye du procès de Charles Taylor.
Mme Asha-Rose Migiro, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, s’est dite impressionnée par les réalisations du Tribunal spécial, cinq ans après la fin d’un conflit de 11 années, qui a été caractérisé en Sierra Leone par un niveau de violence indescriptible et le recours systématique aux mutilations, aux violences sexuelles et aux meurtres de civils. Les délégations qui se sont exprimées se sont elles aussi félicitées de l’avancée des travaux du Tribunal spécial, dont leur ont parlé George Gelaga King, son Président, et Stephen Rapp, son Procureur.
À l’heure actuelle, a indiqué le Président du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, quatre procès mettant en cause neuf individus sont en cours. Trois d’entre eux se déroulent à Freetown, tandis que le quatrième, celui de Charles Taylor, l’ancien Président du Libéria, a lieu à La Haye. Il est reproché à ce dernier d’avoir notamment enrôlé des enfants de moins de 15 ans dans les forces militaires et les groupes armés qui ont commis des atrocités au Libéria, en Sierra Leone et dans le reste de la région, a rappelé le Procureur, après avoir précisé que le Tribunal spécial est la première juridiction pénale internationale à poursuivre en justice des individus pour ce motif.
L’importance du Tribunal spécial pour la Sierra Leone va bien au delà de l’aboutissement de ses procédures judiciaires, car son établissement a contribué au retour à la paix et à la sécurité durables en Sierra Leone et dans la région, a souligné le Président. Plusieurs intervenants ont évoqué l’héritage que laissera cette étape dans l’histoire du pays et de la région, le représentant canadien qualifiant l’attitude favorable du peuple sierra-léonais de véritable « vote de confiance » à l’égard du Tribunal spécial. La Section de diffusion de l’information du Tribunal fait d’ailleurs de gros efforts pour s’assurer que la rediffusion du procès de Charles Taylor soit accessible à tous les Sierra-Léonais et aux habitants de la région de l’Afrique de l’Ouest, ont relevé plusieurs délégations, tandis que d’autres, comme celle du Qatar, ont regretté que le procès de Taylor ait du être transféré à l’étranger.
Pour permettre au Tribunal d’achever ses travaux, plusieurs délégués, à l’instar du Procureur et du Président du Tribunal spécial, ont lancé un appel aux États Membres pour qu’ils y contribuent financièrement. Le budget dont il a besoin pour la période allant du 1er juillet 2007 au 31 décembre 2009, date présumée de la fin de ses travaux, a été estimé à 89 millions de dollars. Or les fonds actuellement disponibles seront épuisés d’ici au mois de novembre 2007, a averti son Président. Depuis le début des procès en 2002, l’Union européenne a financé à elle seule plus de 56% des dépenses totales du Tribunal, a précisé le représentant de l’Allemagne, qui parlait au nom des pays de l’Union européenne.
Il ne faut pas se laisser tromper par le concept « d’achèvement des travaux » a ensuite averti ce représentant. Pour lui, en effet, s’il apparaît que le Tribunal a pris toutes les dispositions nécessaires pour réaliser ses objectifs dans les délais impartis, l’aventure ne s’arrêtera pas à la fin des travaux. Il a rappelé qu’il faudra encore appliquer les peines, peut-être aussi prolonger la protection des témoins ou traiter les éventuels éléments nouveaux et enfin maintenir intacts les dossiers du Tribunal et y assurer l’accès. Le représentant a donc appelé la communauté internationale à examiner dès maintenant les « questions résiduelles » comme elle l’a fait pour les Tribunaux spéciaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.
LA SITUATION EN SIERRA LEONE
Déclarations
M. GEORGE GELAGA KING, Président du Tribunal spécial pour la Sierre Leone, a indiqué que le Tribunal spécial était arrivé à une étape critique de ses travaux et que ses activités s’étaient ralenties à Freetown. Le Président a informé le Conseil des procédures juridiques en cours ainsi que de la stratégie de sortie du Tribunal, de l’impact du Tribunal sur la Sierra Leone, et des domaines d’activités où le concours de la communauté internationale reste nécessaire pour garantir que le Tribunal achève son mandat avec succès. À l’heure actuelle, a précisé le Président, quatre procès mettant en cause neuf individus sont en cours. Trois d’entre eux se déroulent à Freetown, tandis que celui de Charles Taylor, l’ancien Président du Libéria responsable de crimes en Sierra Leone, se déroule à La Haye. Le procès de membres présumés des Forces de défense civile qui avait lieu devant la Première Chambre d’accusation du Tribunal spécial, a pris fin, et un jugement est attendu en juillet 2007. S’agissant du procès des membres présumés du Front révolutionnaire uni (FRU), la défense a entamé la présentation de ses arguments, a indiqué le Président du Tribunal spécial. Le jugement des membres présumés des Forces armées du Conseil révolutionnaire (AFRC), dont le procès a lieu devant la Deuxième Chambre d’accusation, sera quant à lui rendu le 20 juin, tandis que le procès de Charles Taylor s’est ouvert le 4 juin dernier, a rappelé M. King.
Selon la stratégie d’achèvement, dont le document de description a été distribué aux membres du Conseil de sécurité, le Tribunal spécial conclura ses activités à Freetown et à La Haye à la fin de 2009. Une fois que le jugement des membres présumés du Front révolutionnaire uni (FRU) sera rendu, la Première Chambre aura achevé son mandat. S’agissant de Charles Taylor, le Président du Tribunal spécial a précisé que son procès durera jusqu’en novembre 2008 et qu’un jugement sera rendu en juin 2009. Une procédure d’appel pourrait être entamée à Freetown dès le mois de juillet 2008. Chaque procédure d’appel dure approximativement six mois et devrait prendre fin d’ici décembre 2008. On s’attend à ce que la Cour d’appel achève l’examen du recours en appel de Charles Taylor au plus tard au mois de décembre 2009. Un autre accusé, Johnny Paul Koroma, est toujours en liberté. S’il est arrêté d’ici la date d’achèvement des travaux du Tribunal, prévue en décembre 2009, le budget et la stratégie d’achèvement du Tribunal devront être revus.
L’importance du Tribunal spécial pour la Sierra Leone va bien au delà de la conclusion de ses procédures juridiques, car son établissement a contribué au retour à la paix et à la sécurité durables en Sierra Leone et dans la région. Le Tribunal spécial, a affirmé son Président, a contribué aux efforts déployés par le pays pour restaurer la primauté du droit et mettre un terme à l’impunité. Les activités du Tribunal font partie de l’héritage de la Sierra Leone et sont entrées dans le discours national. La Section de diffusion de l’information de la Cour a remporté d’importants succès en impliquant tous les acteurs de la société sierra-léonaise dans le déroulement du processus judiciaire. La Section fait de gros efforts, à l’heure actuelle, pour s’assurer que la rediffusion du procès de Charles Taylor, qui se déroule à La Haye, soit accessible à tous les Sierra-Léonais et aux habitants de la région de l’Afrique de l’Ouest dans son ensemble. Le Tribunal fait également tout son possible pour transférer son expertise et cherche les moyens de garantir la préservation de ses structures, de ses bâtiments et de ses archives, a dit M. King.
Le Président du Tribunal spécial a ajouté que pour achever son mandat, le Tribunal a besoin du soutien du Conseil de sécurité et de tous les États Membres. En priorité, il faudrait lui assurer des financements et des ressources prévisibles et fiables. Le budget dont il a besoin pour la période allant du 1er juillet 2007 au 31 décembre 2009 a été estimé à 89 millions de dollars. Les fonds actuellement disponibles seront épuisés d’ici au mois de novembre 2007, ce qui est une importante source de préoccupation, a averti M. King. Le Tribunal spécial a également besoin de l’appui de la communauté internationale afin de négocier et de conclure des accords supplémentaires pour garantir l’application des peines et la relocalisation des témoins, a indiqué le Président.
M. STEPHEN RAPP, Procureur du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, rappelant l’ouverture lundi dernier du procès de Charles Taylor, l’ancien Président du Libéria, a salué le rôle inestimable du Conseil de sécurité dans le renforcement de la paix et de la sécurité au Sierra Leone et en Afrique de l’Ouest, et l’a remercié pour son assistance au Tribunal spécial. Charles Taylor a été arrêté en 2006, a-t-il précisé, alors qu’il tentait de passer la frontière entre le Nigéria et le Cameroun, puis transféré devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone dont le siège est à Freetown. Sur décision du Conseil de sécurité en juin 2006, il a ensuite été conduit à La Haye où se déroule maintenant son procès devant le Tribunal spécial. Le mandat de cette juridiction est de poursuivre ceux qui ont la plus grande part de responsabilité dans les violations du droit international humanitaire qui ont été commises en Sierra Leone depuis le 30 novembre 1996, a expliqué le Procureur.
Le Bureau du Procureur a procédé à 13 inculpations qui ont été confirmées par un juge du Tribunal spécial et 11 personnes ont ainsi été appréhendées et traduites devant le Tribunal. Deux procès étant terminés, le Bureau du Procureur se prépare à un éventuel appel en attendant le prononcé des jugements, a indiqué M. Rapp. Un autre procès, celui des membres du Front révolutionnaire uni, devrait s’achever au début de 2008, a-t-il ajouté. Le procès de Charles Taylor se déroule à La Haye, a-t-il expliqué, sur la demande du Président du Tribunal spécial qui répondait aux inquiétudes de certains dirigeants de la région d’Afrique de l’Ouest. Il appartient maintenant au Procureur d’appeler des témoins à la barre et de fournir les éléments de preuve à l’appui des chefs d’inculpation qui dénoncent la planification, l’instigation et les ordres donnés par M. Taylor pour la commission de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et de violations d’autres dispositions du droit international humanitaire. Il lui est reproché en effet d’avoir enrôlé des enfants de moins de 15 ans dans les forces et groupes armés, ou de les avoir utilisés pour participer activement aux combats, a rappelé le Procureur.
Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, a fait remarquer M. Rapp, est la première juridiction pénale internationale à poursuivre en justice des individus pour le motif de recrutement d’enfants soldats qui constitue une violation du droit international humanitaire, a-t-il précisé. Les procès ainsi engagés sont la preuve de l’engagement de la communauté internationale à s’assurer que les responsables de crimes motivés par la haine, comme ceux commis en Sierra Leone, sont poursuivis. Ils lancent le message que des crimes tels que les mutilations, comme l’amputation de bras et de jambes, l’esclavage sexuel des femmes et des filles et l’utilisation des enfants soldats ne peuvent pas rester impunis.
Le Tribunal devrait s’accomplir de sa tâche d’ici à décembre 2009, a indiqué M. Rapp, qui a souligné la nécessité pour les États Membres de poursuivre leur soutien à la juridiction. Au cours des procès qui ont déjà eu lieu ou qui sont en cours, son Bureau a présenté 220 témoins et il y en a eu au total 354 qui ont été entendus. Ces témoins prennent pour la plupart de grands risques et le Tribunal spécial a l’obligation de les protéger, a-t-il rappelé, parfois même de les réinstaller. Les enquêtes exigent donc une coopération de la part des États Membres pour geler les éventuels actifs et y accéder, afin de pourvoir aux indemnisations des victimes. Le Tribunal spécial a besoin de fonds pour fonctionner, a plaidé le Procureur, rappelant qu’il s’agit d’une institution transparente sur le plan économique avec un budget pour les années 2007, 2008 et 2009. Les défis à relever sont sérieux, a conclu M. Rapp, qui a encouragé les États Membres à poursuivre leurs efforts pour que la justice soit rendue en Sierra Leone.
Mme ASHA-ROSE MIGIRO, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, a dit qu’elle était impressionnée par les réalisations du Tribunal spécial, cinq ans après la fin d’un conflit qui a duré 11 ans et qui a été caractérisé par un niveau de violence indescriptible et le recours systématique aux mutilations, aux violences sexuelles, et aux meurtres de civils. Ce Tribunal, s’est-elle félicitée, constitue un nouveau modèle hybride de justice internationale présente sur le territoire même où les crimes à juger ont été commis. Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone a le grand avantage de pouvoir bénéficier de personnel international et de professionnels sierra-léonais, a dit Mme Migiro. Mettant en avant le caractère exceptionnel du Tribunal, elle a précisé que celui-ci a non seulement traduit en justice des personnes accusées de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, mais également toutes les personnes accusées d’avoir enrôlé des enfants âgés de moins de 15 ans pour participer au conflit armé. S’inspirant de la jurisprudence des Tribunaux ad hoc pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie, le Tribunal spécial a mis au défi l’impunité qui a régné pour les crimes basés sur le sexe des victimes, comme les mariages forcés, et il a reconnu la nature unique que revêtent les crimes sexuels. Pour la première fois, l’esclavage sexuel est traité comme un crime contre l’humanité, s’est félicitée la Vice-Secrétaire générale.
En garantissant que les auteurs de ces crimes sont traduits en justice, le Tribunal spécial a contribué à la restauration et au maintien de la paix et de la sécurité en Sierra Leone, a estimé Mme Migiro. Elle s’est également félicitée des accomplissements du Service de diffusion de l’information du Tribunal spécial, qui a rejoint le rang des autres tribunaux spéciaux, en offrant un espoir aux générations futures. Le jour de l’ouverture du procès de Charles Taylor, a dit Mme Migiro, le Secrétaire général a encouragé tous les États Membres à continuer de fournir un soutien au Tribunal spécial. Le Tribunal a aussi besoin de leur aide pour ce qui est de la relocalisation des témoins, de l’exécution des peines et pour d’autres détails juridiques en souffrance. Je réitère fermement ces demandes aujourd’hui, a déclaré Mme Migiro.
Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a rappelé l’intervention militaire qui, il y moins de huit ans, a été nécessaire pour sauver la Sierra Leone. La Commission de consolidation de la paix continue d’aider ce pays qui se reconstruit, a-t-elle noté. Mais aux yeux du Royaume-Uni, le Tribunal spécial a un rôle encore plus important à jouer dans le redressement de la Sierra Leone, a-t-elle estimé. La même semaine que l’ouverture du procès de Charles Taylor, cette séance du Conseil de sécurité est particulièrement opportune, a-t-elle estimé. Elle a précisé que le Royaume-Uni a versé une importante contribution au budget de fonctionnement du Tribunal spécial. Elle a aussi indiqué que le Royaume-Uni pourrait accueillir Charles Taylor dans ses prisons s’il était condamné. Mme Pierce s’est aussi réjouie que, du fait de sa diffusion télévisée, la population de la Sierra Leone peut suivre le procès de Charles Taylor à La Haye. Pour permettre au Tribunal spécial d’achever ses travaux, elle a lancé un appel aux États Membres pour qu’ils contribuent financièrement à son fonctionnement, notamment en ce qui concerne la relocalisation des témoins.
Mme JACKIE W. SANDERS (États-Unis) a indiqué que cette séance d’information du Conseil qui se tient en présence du Président du Tribunal spécial et de son Procureur arrivait à point nommé, compte tenu de l’étape critique que traverse le Tribunal et notamment en raison de l’ouverture, le 4 juin dernier, du procès de Charles Taylor à La Haye. Les États-Unis, a-t-elle affirmé, ont toujours soutenu fermement les travaux du Tribunal depuis sa création et ont joué un rôle crucial dans les négociations ayant mené à l’adoption de la résolution 1315 (2000) du Conseil de sécurité qui appelait le Secrétaire général à conclure un accord avec le Gouvernement sierra-léonais afin de créer un tribunal indépendant permettant de traduire les personnes portant la plus grande part de responsabilité dans les atrocités commises dans ce pays. L’achèvement du mandat du Tribunal spécial, a précisé la représentante, fait partie des priorités des États-Unis.
Le Tribunal spécial constitue le premier test d’un nouveau modèle de justice internationale, à savoir un tribunal international, indépendant, à juridiction mixte et situé dans le pays où ont été commis les crimes, a signalé la représentante des États-Unis. Cet aspect constitue un héritage important pour l’avenir du pays, a-t-elle estimé. Dans ce contexte, nous demandons instamment aux dirigeants du Tribunal de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour remédier aux lacunes et aux retards dans les procès. Les États-Unis, qui ont consenti une enveloppe budgétaire de 35 millions de dollars depuis 2002 en faveur du Tribunal spécial, ont l’intention de lui verser des contributions supplémentaires afin qu’il puisse achever son travail. Nous appelons également tous les États Membres à en faire de même pour que la justice suive son cours, a dit la représentante.
M. LAZARE MAKAYAT-SAFOUESSE (République du Congo) a estimé qu’en organisant le procès de Charles Taylor, le Tribunal sert les objectifs de la Charte des Nations Unies. Les auteurs des crimes poursuivis par le Tribunal répondront tôt ou tard de leurs actes, a-t-il espéré. Le Congo apporte tout son appui au Tribunal spécial et veut contribuer à ses travaux pour permettre leur achèvement dans les délais impartis, a-t-il précisé. Il a aussi estimé que la communauté internationale dans son ensemble devrait profiter de cette expérience.
M. JEAN-PIERRE LACROIX (France) a réitéré l’importance que son pays attache à l’arrestation de Charles Taylor. Qu’un ancien chef d’État réponde devant un tribunal pénal des atrocités qu’il a encouragées et soutenues envoie un message fort, qui au delà de la Sierra Leone et de la région, est de portée universelle. Il s’agit d’un message d’espoir pour les victimes des crimes les plus graves et pour ceux qui luttent contre l’impunité, a estimé le représentant. La phase de présentation des témoignages, qui commencera bientôt, sera cruciale à cet égard. C’est aussi un avertissement pour les responsables de tels crimes où qu’ils soient. Le Conseil doit appuyer ces progrès. Il est important que le Conseil puisse suivre la mise en œuvre, par le Tribunal spécial, de sa stratégie d’achèvement des travaux, récemment révisée. Le Tribunal spécial s’est récemment doté d’un budget couvrant la période de travaux restant, ce qui est certainement un instrument utile qui permet de mieux évaluer l’effort financier attendu de nous, a ajouté le représentant. Le déplacement à La Haye de Charles Taylor a naturellement une incidence non négligeable sur ce budget, mais les considérations de sécurité qui ont justifié ce transfert restent à nos yeux valables. Il sera essentiel de veiller à ce que les travaux du Tribunal ne soient pas mis en péril par l’insuffisance des ressources, a dit le représentant de la France. C’est dans cet esprit que nous examinerons l’appel à de nouvelles contributions, a-t-il indiqué.
Mme YELLA ZANELLI (Pérou) a déclaré que sa délégation était engagée en faveur de la lutte contre l’impunité et salué l’importance de cette réunion dans ce domaine. Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone contribue à l’instauration d’une paix durable non seulement en Sierra Leone mais aussi dans la région tout entière, a-t-elle fait remarquer. Elle a ajouté que le procès de Charles Taylor montre que personne n’est au-dessus des lois. La représentante a aussi salué la contribution de la communauté internationale dans les procédures engagées, notant en particulier que les procès se déroulent à La Haye. Elle a ensuite parlé de la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement du Tribunal spécial pour souligner qu’il était important de créer de bonnes conditions pour que le système judiciaire local puisse poursuivre ceux qui ne relèvent pas de la compétence du Tribunal spécial. Elle a enfin engagé tous les États qui sont en mesure de contribuer aux travaux du Tribunal spécial à le faire.
Mme CHEN PEIJIE (Chine) a déclaré qu’en deux années d’activités, le Tribunal spécial pour la Sierra Leone a progressé dans ses travaux de manière louable. Elle a précisé que la Chine avait toujours appuyé les travaux du Tribunal spécial et entendait le faire à l’avenir. Le Tribunal a fait d’importants progrès puisque certains de ses procès sont achevés et que d’autres sont en cours, comme celui de Charles Taylor à La Haye. Un procès juste et indépendant pour M. Taylor contribuera à la promotion de la paix et de la stabilité dans la région d’Afrique de l’Ouest et nous comptons sur le bon déroulement des procédures de La Haye, a dit la représentante. Nous sommes aussi satisfaits du fait que le Tribunal spécial ait révisé sa procédure relative aux preuves pour accélérer ses travaux dans le cadre de sa stratégie d’achèvement. Relevant les difficultés que connaît le Tribunal, notamment en matière de coopération, la représentante a appelé les pays en mesure de le faire à continuer de l’appuyer et de coopérer avec le Tribunal spécial, notamment pour ce qui est de la réinstallation des témoins.
M. NASSIR ABDULAZIZ AL-NASSER (Qatar) a estimé que le début du procès de Charles Taylor à La Haye illustre le fait que personne, quelle que soit sa position, n’est au-dessus de la loi, et que tout individu, quels que soient les crimes qu’il a commis, a droit à un procès équitable. M. Al-Nasser a salué les résultats concrets obtenus par le Tribunal et a souligné la nécessité d’établir un équilibre entre le respect du calendrier pour que les travaux s’achèvent en temps voulu, une mise en œuvre pleine, efficace et satisfaisante du mandat du Tribunal, et le respect des droits des accusés. Commentant, à son tour, les questions financières, le représentant a appelé les donateurs à fournir au Tribunal spécial pour la Sierra Leone les contributions nécessaires à son bon fonctionnement. Il a conclu en regrettant, une nouvelle fois, que le procès de Charles Taylor n’ait pas pu se tenir sur le continent africain. Il a donc souligné l’importance qu’il y a à faire en sorte que les peuples de la sous-région d’Afrique de l’Ouest soient dotés des moyens de suivre le procès, ce qui pourrait être fait grâce à un circuit fermé de télévision.
M. IGOR BARTHO (Slovaquie) s’est félicité de l’ouverture du procès de Charles Taylor à La Haye. Bien qu’il ait lieu à la Cour pénale internationale à La Haye, ce procès est et restera le procès du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, a-t-il déclaré. C’est pourquoi la Slovaquie salue et appuie les mesures visant à garantir que le déroulement du procès soit accessible aux Africains de l’Ouest, en facilitant la participation de journalistes et de représentants de la société civile du Libéria et de la Sierra Leone aux audiences; en préparant des synthèses vidéo et audio du procès; en les diffusant dans toute la Sierra Leone et en réalisant des enregistrements du procès de Charles Taylor qui seront disponibles dans les locaux du Tribunal spécial à Freetown. Le représentant slovaque s’est par ailleurs félicité du programme de sensibilisation mené en Sierra Leone par le Tribunal sur ses activités et résultats, qui peut, selon le représentant, servir de modèle aux autres tribunaux.
Mme BONGIWE QWABE (Afrique du Sud) a estimé que si des progrès importants ont été faits dans la mise en œuvre du mandat du Tribunal, l’assistance continue de la communauté internationale demeure néanmoins cruciale. Le projet de budget pour les trois prochaines années s’élève à 90 millions, a-t-elle dit, en invitant les donateurs internationaux à continuer à offrir leur appui. L’Afrique du Sud, a-t-elle ajouté, appelle les États à coopérer, à appuyer et à rallier l’appel du Président du Tribunal visant à conclure les accords liés à l’application des peines, la relocation des témoins, l’identification des biens des personnes condamnées, et l’appréhension de Johnny Paul Koroma, qui est toujours en fuite. L’Afrique du Sud est convaincue, a encore dit sa représentante, que la tenue d’élections libres et justes, le 11 août, et le travail du Tribunal contribueront à l’émergence d’une Sierra Leone pacifique et stable.
M. ALFREDO SUESCUM (Panama) a rendu hommage aux travaux indispensables du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, qui contribuent notamment à la mise en place de l’état de droit dans ce pays. Il a apprécié en particulier le fait qu’un ancien chef d’État n’ait pas pu échapper aux poursuites judiciaires. En outre, cette juridiction est la première à traiter de crimes nouveaux en droit international, comme le mariage forcé, le recrutement d’enfants ou les crimes d’esclavage sexuel, a relevé le représentant. Aux yeux du Panama, il est important que les travaux du Tribunal spécial répondent aux normes les plus élevées, a dit le représentant, en soulignant qu’il fallait pour cela lui fournir les moyens nécessaires à l’accomplissement de sa tâche. Il a aussi demandé quelles étaient les prévisions en matière de protection des témoins et d’indemnisation des victimes et a voulu savoir ce qui était prévu pour l’archivage des documents.
M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a estimé que le Tribunal spécial contribue de manière efficace aux processus de paix et de réconciliation dans la région d’Afrique de l’Ouest. Il a constaté une dynamique positive qui opère au sein du Tribunal et a estimé qu’il est nécessaire de la maintenir. L’arrestation de Charles Taylor a constitué un véritable tournant dans les travaux du Tribunal. Toutefois, a relevé le représentant, entre la décision prise par le Conseil de sécurité de transférer Charles Taylor à La Haye et le début de son procès, une longue période s’est écoulée. De plus, les audiences, qui n’ont commencé que lundi, ont été interrompues et ne devraient reprendre que le 21 juin. Quelle est la cause de ce nouveau retard et dans quelle mesure les délais d’achèvement des travaux du Tribunal sont-ils réalistes? a demandé le représentant.
M. ALDO MANTONAVI (Italie) a rappelé que son pays avait appuyé la création du Tribunal spécial et considéré que la création de cette instance joue un rôle crucial dans l’exercice du droit. Les premiers jugements doivent être prononcés sous peu et le Tribunal entame maintenant une nouvelle étape de ses travaux en commençant le procès de Charles Taylor, a-t-il fait remarquer. Il a considéré que la poursuite de nouveaux crimes internationaux, comme les mariages forcés dans les zones de conflit, contribue au développement du droit international. La création du Tribunal spécial est positive, mais il faudra veiller à ce que cette instance et les travaux qu’elle aura menés continueront à servir le pays après ses travaux, a-t-il aussi averti. Il a conclu, en estimant que l’adoption du budget pour 2007 et 2008 prépare la voie à une bonne stratégie d’achèvement.
M. LESLIE KOJO CHRISTIAN (Ghana) a reconnu le rôle important joué par le Tribunal et a signalé que son pays attachait une importance considérable à sa stratégie d’achèvement. S’il ne mène pas à terme les affaires les plus sérieuses, le mandat du Tribunal ne sera pas achevé, a estimé le représentant. Il ne doit pas y avoir d’impunité pour les crimes et les atrocités les plus graves commis pendant la guerre. L’ouverture du procès de Charles Taylor est dans ce contexte un développement important dans la lutte contre l’impunité, a-t-il dit. Le représentant s’est félicité des progrès réalisés par le Tribunal qui a amendé ses règles de procédure et de preuves, ainsi que des succès remportés par le service de diffusion de l’information du Tribunal. Dans la recherche de la justice, il est important que les procédures du Tribunal ne soient pas perçues comme étant distantes et comme n’ayant aucun effet sur la vie des citoyens. Nous demandons à la communauté internationale de fournir au Tribunal tout le soutien nécessaire à l’achèvement de son mandat, a dit le représentant du Ghana.
M. HASAN KLEIB (Indonésie) s’est félicité des progrès du Tribunal spécial pour la Sierra Leone dans la réalisation de son mandat, et a notamment applaudi l’ouverture du procès de Charles Taylor. Il a apporté le soutien de sa délégation aux progrès accomplis par le Tribunal dans la mise en œuvre de sa stratégie d’achèvement. Il a émis l’espoir que les procès en cours seront menés dans le respect de la présomption d’innocence. Il est difficile de panser les blessures de la Sierra Leone, qui a grandement souffert des actions de Charles Taylor, a-t-il noté, mais ces procès devraient y contribuer. M. Kleib a jugé compréhensible que le Gouvernement soit toujours en difficultés après les années de conflit que la Sierra Leone a connues et a appelé la communauté internationale à l’appuyer pour les élections à venir, ainsi que pour le renforcement de ses capacités dans tous les domaines. Il a enfin émis l’espoir que les procès se déroulent sans heurts.
M. JOHAN VERBEKE (Belgique) a salué l’ouverture du procès de Charles Taylor cette semaine qui démontre combien l’impunité n’est plus de mise pour les personnes accusées des crimes les plus graves, quel que soit leur rang. Paix et impunité ne sont en aucun cas compatibles. Une des innovations du Tribunal, a ajouté le représentant, est qu’il pourrait prononcer la première condamnation pour le recrutement d’enfants soldats. Ceci ne manquera pas d’envoyer un message clair aux groupes armés partout dans le monde. Nous n’oublions pas que le conflit a été caractérisé par une brutalité extrême dont les enfants et les femmes ont été les premières victimes. La perception des victimes que la justice leur est rendue est cruciale. À cet égard, a ajouté le représentant, nous soulignons le travail remarquable accompli par le Tribunal spécial en matière de diffusion de l’information.
Le représentant a aussi salué l’avancée des travaux du Tribunal qui se concrétisera par un jugement attendu le 20 juin à l’encontre du Conseil révolutionnaire des forces armées et au mois de juillet à l’encontre des Forces de défense civile. Le représentant a aussi salué l’achèvement de deux documents, à savoir la stratégie d’achèvement des travaux et le budget pour les trois prochaines années. Décembre 2009, date d’achèvement des travaux du Tribunal spécial, n’est plus très loin, a encore relevé le représentant. Il faudra auparavant entamer une réflexion sur les fonctions résiduelles du Tribunal, comme la protection des témoins, l’exécution des peines, l’archivage. Il sera utile dans ce cadre de rechercher d’éventuelles synergies avec d’autres juridictions, comme les Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et pour l’ex-Yougoslavie.
M. ALLIEU IBRAHIM KANU (Sierra Leone) a indiqué que son pays continue de soutenir le Tribunal spécial et a estimé qu’il est essentiel que justice soit rendue, que la Sierra Leone surmonte son passé et redevienne l’un des pôles de l’Afrique de l’Ouest. Le Tribunal se doit d’être indépendant et juste, a-t-il souligné. Il a fait remarquer que, dès le début, la population de la Sierra Leone a été au premier rang de ceux qui réclamaient la création de ce tribunal, et que c’est pour cette raison qu’il est basé à Freetown. M. Kanu a indiqué que le Tribunal a créé un groupe de travail sur l’héritage qu’il laissera, pour renforcer l’état de droit et jouer un rôle actif dans la promotion des initiatives visant les mêmes objectifs. Dans cet esprit, il a parlé des efforts menés par le Tribunal pour permettre une consultation organisée, notamment par l’ONG dénommée « Pas de paix sans justice », sur la mise en œuvre de la loi sur le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Cette conférence a d’ailleurs donné lieu à la rédaction d’un projet de loi et ses résultats devraient être utiles pour les futures générations de Sierra-Léonais, a espéré M. Kanu.
Dans quelques mois, des élections se tiendront en Sierra Leone dans une atmosphère de paix, a poursuivi le représentant, qui s’est félicité de ce que les citoyens sierra-léonais restent unis dans leur désir de démocratie. L’idée de cette juridiction a été un facteur important pour la cessation des hostilités, a ajouté M. Kanu, qui a évoqué la cérémonie spéciale au cours de laquelle des armes ont été brulées en Sierra Leone pour marquer la fin de la guerre. Cette cérémonie avait eu lieu quelques jours après la signature de l’Accord pour la création du Tribunal spécial. La vie du Tribunal a été caractérisée par plusieurs étapes, la dernière étant le procès d’un ancien chef d’État. Pour M. Kanu, il faut veiller à ce que la population de la Sierra Leone ait accès au procès de Charles Taylor, malgré sa délocalisation à La Haye. L’administration de la justice ne doit pas être onéreuse, a-t-il ensuite relevé, en notant que le Tribunal a réussi à se fixer des budgets limités. Il a enfin lancé un appel à la communauté internationale afin qu’elle respecte ses engagements concernant les ressources afin de donner au Tribunal la stabilité financière dont il a besoin pour les procédures de première instance et celle d’appel. Dans un grand effort de coopération, la Sierra Leone a pris l’initiative de solliciter la participation des États africains et des États Membres de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI), a précisé M. Kanu.
M. HENRI-PAUL NORMANDIN (Canada) a rappelé que tous les procès tenus à Freetown devraient se terminer sous peu et que les jugements dans deux de ces procès devraient être rendus au cours des prochaines semaines. En cas d’appel, à l’issue de ces mêmes procès, la procédure devrait se terminer à la fin de la prochaine année. Enfin, le Tribunal spécial devrait conclure définitivement ses travaux à Freetown et à La Haye d’ici à la fin 2009, a précisé le représentant. Il pourrait s’avérer utile de connaître le point de vue des Sierra-Léonais à ce sujet, a-t-il estimé, en s’appuyant sur une enquête récente selon laquelle 91% d’entre eux se sont dits « d’accord » ou « fortement d’accord » à la question de savoir si le Tribunal spécial avait contribué à instaurer la paix en Sierra Leone.
Malgré ce témoignage de confiance, il reste beaucoup à faire, a prévenu le représentant canadien, qui a expliqué que le financement continuait d’être l’un des problèmes les plus criants. Présidé par le Canada, le Comité de gestion du Tribunal spécial a pris des mesures, notamment en adoptant un budget sur trois ans, qui devrait lui permettre de conclure ses travaux en 2009. Le Canada a toutefois invité les pays qui le peuvent à apporter une contribution additionnelle pour lui permettre de mener à bien sa stratégie d’achèvement. Mais le Tribunal spécial se heurte à trois autres difficultés majeures: l’application des peines, la protection des témoins et les enjeux ultérieurs. Jusqu’à présent, seulement trois pays ont accepté de prendre en charge les individus condamnés à l’emprisonnement et seulement un petit nombre ont offert d’aider certains témoins, qui doivent être réinstallés dans un pays tiers pour leur sécurité, a regretté le représentant. En outre, a fait remarquer M. Normandin, la conclusion des travaux du Tribunal spécial suscitera un certain nombre de questions délicates, comme par exemple la question de l’accès du public aux archives. Dans ce cas, il sera essentiel de protéger les renseignements confidentiels qu’elles contiennent, tels que le nom des témoins, a-t-il fait observer.
Le Tribunal spécial sera la première instance de ce genre à devoir faire face à ces problèmes ainsi qu’à d’autres questions difficiles liées à la conclusion de ses travaux. Or, jusqu’à présent, cette juridiction a fait souvent œuvre de pionnier, a souligné le représentant. Il s’agit du premier tribunal pénal international à être financé par des contributions volontaires. C’est aussi le premier tribunal de l’histoire moderne à tenir ses délibérations dans le pays où les crimes sont réputés avoir été commis. De même, il s’agit de la première instance du genre à créer un bureau de défenseur principal. Enfin, le Tribunal spécial pour la Sierra Leone sera le premier à se livrer à un exercice complexe, à savoir la tenue de procès simultanés sur deux continents différents, à des milliers de kilomètres de distance l’un de l’autre. Il continuera d’apporter sa contribution au rétablissement du droit et à la fin de l’impunité si nous continuons de lui apporter la nôtre, s’est déclaré convaincu M. Normandin avant de conclure.
M. ARJAN HAMBURGER (Pays-Bas) a déclaré que le débat sur le Tribunal spécial pour la Sierra Leone se tenait à un moment important dans l’histoire du Tribunal, en raison notamment de l’ouverture du procès de Charles Taylor cette semaine à La Haye. Le travail du Tribunal contribue fortement à la lutte que nous menons contre l’impunité, a-t-il ajouté. Renouvelant l’appui des Pays-Bas au Tribunal spécial, et ce, jusqu’à l’aboutissement de la stratégie d’achèvement, M. Hamburger a déclaré que les Pays-Bas assumaient la responsabilité qui leur incombait en tant que pays hôte du procès de Charles Taylor et a fait part du soutien financier et logistique que son pays apportait à ce processus. Il s’est, à cet égard, dit satisfait de la coopération positive qui s’est instaurée, pour le jugement de Charles Taylor, entre l’État hôte, le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, et la Cour pénale internationale dont les infrastructures sont utilisées pour le procès Taylor.
Estimant que le respect des dispositions de la stratégie d’achèvement était essentiel, M. Hamburger a appelé le Tribunal spécial à faire tout ce qui est en son pouvoir pour y parvenir, et il a exhorté les États Membres à garantir des ressources financières suffisantes au Tribunal. Il est d’autre part important de souligner que le travail du Tribunal spécial ne s’achèvera pas complètement en 2009, et que l’héritage de l’institution doit être garanti pour le public en général et le peuple sierra léonais en particulier, a conclu le représentant néerlandais.
M. AMINU BASHIR WALI (Nigéria) a estimé que la tenue de ce débat sur la situation en Sierra Leone ne pouvait pas mieux tomber, compte tenu du début du procès de Charles Taylor et de la nécessité urgente de fournir les ressources nécessaires pour permettre au Tribunal spécial pour la Sierra Leone d’être à la hauteur de la tâche qui lui a été confiée. Le Tribunal s’avère être une partie intégrante du processus de paix en Sierra Leone, en montrant que l’immunité politique d’un chef d’État ne l’empêche pas d’être poursuivi pour violations des droits de l’homme et crimes contre l’humanité, a dit M. Wali. Le Tribunal s’est prononcé contre le recrutement d’enfants soldats et a qualifié le mariage forcé de crime contre l’humanité et de violation du droit coutumier, a encore rappelé le représentant nigérian, avant de se réjouir du fait que le jugement des crimes de haine commis en Sierra Leone sera bientôt rendu.
Parlant des moyens de fonctionnement du Tribunal, le représentant a estimé que les contributions volontaires se sont révélées insuffisantes. Il a donc appelé la communauté internationale à étudier, de manière urgente, d’autres mesures pour consolider les fonds du Tribunal afin de lui assurer un flux prévisible de ressources financières qui permettrait, par exemple, de financer la participation des victimes aux procès et d’éviter des retards et des suspensions des activités du Tribunal. Cela permettrait aussi au Tribunal de gérer efficacement les autres problèmes auxquels il ne saurait échapper, comme la surveillance des détenus, les relocations et la protection des témoins, ou encore l’application des sentences, a ajouté le représentant du Nigéria.
M. THOMAS MATUSSEK (Allemagne), au nom de l’Union européenne, s’est félicité de ce que le nouveau projet de budget du Tribunal spécial pour la Sierra Leone couvre toute la période d’achèvement des travaux, à savoir de 2007 à 2009. Il a salué là l’intention claire du Tribunal de fonder son plan financier et administratif sur sa stratégie d’achèvement. Le Tribunal envoie ainsi, a commenté le représentant, un message politique fort à la communauté internationale lui indiquant qu’il est sur la bonne voie et qu’il a pris toutes les dispositions nécessaires pour réaliser ses objectifs dans les délais impartis. Mais il est tout aussi clair, a poursuivi le représentant, que pour finir ses travaux, le Tribunal a besoin de l’appui continu des États Membres. Il a rappelé, dans ce contexte, que depuis le début des procès en 2002, l’Union européenne a financé à elle seule plus de 56% des dépenses totales du Tribunal. En outre, plusieurs projets du Tribunal ont été financés par la Communauté européenne. L’Union européenne ne faillira pas à ses engagements, a promis le représentant.
Toutefois, a-t-il ajouté en s’en félicitant aussi, la présentation du Président du Tribunal spécial contient un certain nombre d’éléments qui vont bien au-delà des chiffres et dont le Conseil de sécurité et les États Membres, en général, devraient tenir compte. Le représentant a cité les campagnes de sensibilisation que le Tribunal a menées sur ses travaux, le recrutement d’un nombre remarquablement élevé de personnels locaux et le fait que le Tribunal ait imprimé un élan déterminant à la « culture d’état de droit ». Ces faits ne feront que renforcer l’appui international et la conviction qu’il n’y a pas de dichotomie entre la paix et la justice, a estimé le représentant en disant que toutes les sociétés ont droit aux deux, en particulier les victimes des oppresseurs sadiques. L’expérience de la Sierra Leone montre qu’il n’existe aucune loi qui voudrait que la justice soit sacrifiée au profit de la paix, a-t-il insisté avant de poursuivre.
« L’achèvement des travaux », a-t-il mis en garde, est un concept tentant mais, à bien des égards, trompeur, a poursuivi le représentant. L’aventure ne s’arrêtera pas à la fin des travaux. Il faudra encore appliquer les peines, en respectant les droits et le statut des condamnés. Il faudra peut-être aussi prolonger la protection des témoins ou traiter les éventuels éléments nouveaux. Il faudra enfin maintenir intacts les dossiers du Tribunal et y assurer l’accès. Le représentant a donc appelé la communauté internationale à examiner dès maintenant les « questions résiduelles » comme elle l’a fait pour les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda.
M. GEORGE GELAGA KING, le Président du Tribunal spécial, s’est dit encouragé par les messages de coopération adressés aujourd’hui par les membres du Conseil de sécurité et d’autres États Membres au Tribunal spécial. De son côté M. STEPHEN RAPP, le Procureur du Tribunal spécial, s’est félicité du vif appui exprimé par les États Membres ainsi que de leurs paroles d’encouragement. Répondant à la question posée par le représentant de la Fédération de Russie, il a précisé que Charles Taylor n’était pas présent à l’ouverture de son procès, ce qui explique le retard pris par le déroulement de cette procédure. Un avocat a été désigné qui représente M. Taylor et qui a pour responsabilité de le représenter dans toute la mesure de ses capacités, même s’il n’a pas reçu toutes les instructions dont il pourrait avoir besoin. Il y a eu une prolongation supplémentaire de trois semaines avant l’ouverture du procès Taylor afin que l’accusé puisse travailler avec son représentant avant le témoignage des premiers témoins. Il subsiste maintenant un certain nombre de questions pratiques que le Greffier devra régler, a dit M. Rapp. La question de la représentation juridique et du financement de la représentation des accusés est dans ce contexte de la plus grande importance, a-t-il souligné.
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