En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/10451-SC/8714-AFR/1380

LA PROTECTION DES POPULATIONS DU DARFOUR ET L’APPLICATION DE L’ACCORD D’ABUJA, LES PLUS GRANDES ÉPREUVES QUE L’ONU AURA CONNUES DEPUIS LES ANNÉES 90, DÉCLARE KOFI ANNAN

9 mai 2006
Secrétaire généralSG/SM/10451
SC/8714
AFR/1380
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

LA PROTECTION DES POPULATIONS DU DARFOUR ET L’APPLICATION DE L’ACCORD D’ABUJA, LES PLUS GRANDES ÉPREUVES QUE L’ONU AURA CONNUES DEPUIS LES ANNÉES 90, DÉCLARE KOFI ANNAN


On trouvera ci-après le texte intégral de la déclaration du Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, au Conseil de sécurité, le 9 mai:


Je voudrais vous remercier, Monsieur le Président, ainsi que tous vos collègues Ministres qui ont fait l’effort de venir à New York à la présente séance avec un préavis aussi bref.  Que le Conseil se réunisse à un niveau aussi élevé et aussi rapidement montre que vous avez tous conscience de l’occasion historique qui nous est offerte à présent d’instaurer la paix au Darfour, et de l’urgence pour nous d’agir pour que cette occasion ne soit pas perdue.


Je commencerai par féliciter le Gouvernement soudanais et la faction du mouvement de libération du Soudan qui ont signé l’Accord de paix d’Abuja, vendredi dernier.  Ce sont eux qui ont rendu cette occasion possible.


Nous devons également féliciter le Médiateur de l’Union africaine, Salim Ahmed Salim, des efforts inlassables qu’il a déployés tout au long des séries de négociations, et les Présidents Sassou N’Guesso et Obasanjo ainsi que leurs partenaires internationaux –Bob Zoellick, Hilary Benn et bien d’autres– qui méritent également une mention particulière pour leur rôle décisif aux étapes finales du processus.


Mais il n’y a lieu ni de se féliciter ni de se reposer sur ses lauriers.  Le Darfour est loin d’être en paix –comme les faits survenus hier nous l’ont si tragiquement rappelé.  Un énorme travail reste à faire et il n’y a pas de temps à perdre.


Premièrement, d’importants dirigeants rebelles n’ont pas encore signé l’accord.  Nous devons tout mettre en œuvre pour les convaincre de choisir la paix plutôt que le conflit pour le bien de leur peuple.  Si cette tragédie se poursuit à cause de ce qu’ils ont fait ou manqué de faire, l’histoire les jugera sévèrement.


Ensuite, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour veiller à ce que ceux qui ont signé l’accord l’appliquent effectivement sur le terrain et que la population du Darfour puisse survivre les mois à venir.  Pour cela, il faut assurer sa protection et sa subsistance –car, chassée de ses habitations et de ses fermes, elle ne peut se nourrir elle-même.  Et assurer sa subsistance signifie assurer la protection de ceux qui leur portent secours. 


À l’heure actuelle, il n’y a qu’une seule force sur le terrain qui puisse commencer à assurer une protection: la Mission de l’Union africaine au Soudan (MUAS).  Notre priorité immédiate doit donc être de renforcer cette force afin qu’elle entreprenne de mettre en oeuvre les éléments fondamentaux de l’accord et d’assurer réellement la sécurité des personnes déplacées.


Mais je crois que nous convenons tous maintenant que cela ne peut être qu’une solution de remplacement et que la MUAS doit être transformée dès que possible en une opération des Nations Unies plus importante, plus mobile, mieux équipée et dotée d’un mandat plus énergique.  Nous mobilisons actuellement toutes les énergies pour que cela se produise.


Le Département des opérations de maintien de la paix travaille étroitement avec l’Union africaine et la MUAS pour aider à satisfaire ses besoins immédiats.  Nous avons déjà envoyé du personnel dans la région pour y travailler et d’autres partiront dans les prochains jours.


Nous cherchons à nous entendre le plus rapidement possible avec nos partenaires de l’Union africaine sur les ressources additionnelles dont la MUAS aura besoin pour mettre en oeuvre les points clefs de l’accord d’Abuja et pour organiser ensuite une conférence sur les annonces de contributions probablement à Bruxelles, début juin.  Mais je lance aux donateurs un appel à ne pas attendre la tenue de cette conférence.  C’est dès maintenant qu’ils doivent se montrer très généreux.  Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre un seul jour. 


Je lance un appel à tous ceux qui se trouvent au Darfour pour qu’ils aident la MUAS à s’acquitter de sa tâche.  Des attaques comme celle d’hier, au cours de laquelle un interprète de la MUAS a été brutalement tué, ne doivent pas être encouragées, acceptées ou tolérées par quelque partie que ce soit.


Il est tout aussi urgent de réunir davantage de fonds en faveur de l’aide d’urgence.  En ce moment, la région connaît la pire crise humanitaire au monde.  Sans un appui massif et immédiat, les organismes humanitaires seront dans l’incapacité de faire leur travail, ce qui veut dire que des centaines de milliers de personnes de plus mourront de faim, de malnutrition et de maladie.


Entre-temps, nous devons et nous allons accélérer notre planification de la transition vers une opération des Nations Unies au Darfour –que le Conseil de paix et de sécurité de l’UA avait d’ailleurs demandée le 10 mars déjà et que le Conseil de sécurité avait approuvée le 24 mars dans sa résolution 1663 (2006).   


Il ne faut pas sous-estimer le défi que cela implique.  Aider à protéger les populations du Darfour et à mettre en oeuvre l’accord d’Abuja sera l’une des plus grandes épreuves que l’Organisation aura jamais connue –peut-être la plus grande depuis la Somalie, le Rwanda et la Bosnie au début des années 90.  Mais c’est un défi que nous nous devons de relever.  L’ayant accepté, nous ne pouvons plus tarder.


Il ressort clairement des travaux que nous avons déjà réalisés qu’une nouvelle force des Nations Unies devra être beaucoup plus importante que l’actuelle MUAS et qu’elle aura besoin d’un appui logistique important de la part des États Membres qui sont en mesure de le fournir. 


La prochaine étape sera de dépêcher une mission d’évaluation technique au Darfour.  Au cours de cette mission, l’ONU et l’UA procéderont de première main à une évaluation de la situation sur le terrain et consulteront le Gouvernement d’unité nationale du Soudan et les autres parties pour déterminer ce qui est nécessaire à l’application de l’accord de paix.  Aucune mission de maintien de la paix ne saurait réussir sans l’appui et la coopération des parties au niveau le plus élevé.


Voilà pourquoi j’ai écrit au Président Bashir pour lui demander d’appuyer cette évaluation et j’espère pouvoir très bientôt en discuter avec lui directement.  Son appui en faveur de cette mission vitale est essentiel.


Entre-temps, je lance à nouveau un appel à toutes les parties et au Gouvernement, en particulier, pour qu’ils respectent sans plus attendre le cessez-le-feu au Darfour et prouvent, par leurs actes, leur détermination d’honorer l’accord qu’ils ont signé.


Pour sa part, l’ONU –j’entends par là le Secrétariat, mais je compte également sur l’appui du Conseil– fera tout ce qui est en son pouvoir pour aider le peuple soudanais à clore ce chapitre tragique de son histoire.


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.