GA/PAL/950

LE MINISTRE DE LA PLANIFICATION DE L'AUTORITE PALESTINIENNE S'ADRESSE A LA REUNION SUR LE MUR DE SEPARATION ISRAELIEN

16/04/2004
Communiqué de presse
GA/PAL/950


LE MINISTRE DE LA PLANIFICATION DE L'AUTORITE PALESTINIENNE S'ADRESSE

A LA REUNION SUR LE MUR DE SEPARATION ISRAELIEN


GENÈVE, 15 avril -- La Réunion internationale sur les répercussions de la construction du mur dans le territoire palestinien occupé, y compris à Jérusalem-Est et alentour, a poursuivi ses travaux cet après-midi en entendant notamment le Ministre de la planification de l'Autorité palestinienne et le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation au sujet des effets dévastateurs de la construction du mur sur la vie et l'avenir de la population palestinienne.  Des experts indépendants, des représentants d'États membres et d'organisations non gouvernementales se sont également exprimés. 


M. Nabeel Kassis, Ministre de la planification de l'Autorité palestinienne, a déclaré que le mur de séparation, présenté comme étant une réponse à l'insécurité, est en fait un plan manifeste d'expansion et d'annexion du territoire palestinien.  Le mur a pour conséquence immédiate d'accentuer l'impact des mesures existantes prises par le Gouvernement israélien dans le cadre de sa politique de bouclage afin de contrôler les mouvements des Palestiniens et d'étendre son autorité.  M. Kassis a souligné les conséquences de l'édification du mur dans les domaines de la santé, de l'éducation et de l'agriculture.


M. Jean Ziegler, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur le droit à l'alimentation, a rappelé que plus de 900 Israéliens et près de 3000 Palestiniens ont été tués depuis la seconde Intifada.  Selon lui, derrière cette tragédie visible, il y a une tragédie invisible avec une crise humanitaire d'une gravité extrême qui frappe la population palestinienne. 


M. Mustafa Barghouti, Président de l'Association des Comités palestiniens de secours médical (Ramallah), a indiqué que, contrairement aux déclarations faites hier par le Président Bush et le Premier ministre israélien, le mur n'a pas été construit pour assurer la sécurité d'Israël, mais pour empêcher aux Palestiniens de mener une vie normale.


En réponse à une question d'une organisation non gouvernementale, M. Barghouti a indiqué que les déclarations faites hier par le Président Bush et le Premier ministre israélien, M. Sharon, n'ont fait qu'accentuer la difficulté du défi que doit relever la communauté internationale.  Le temps est peut-être venu d'adopter des sanctions à l'encontre d'Israël pour avoir créé un système d'apartheid, a-t-il ajouté.


Mme Dalit Baum, de la Coalition des femmes pour une paix juste (Tel-Aviv), déclarant que son organisation a été en première ligne dans le combat contre l'occupation, a affirmé que cette nouvelle barrière vise à détruire le système de solidarité en Palestine.

M. Georges Khouris, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a pour sa part souligné que 14,9 % des Palestiniens seront pris au piège entre le mur et la ligne verte, 23 % de la population palestinienne se trouveront séparés de ses terres et 43 % de la Cisjordanie seront annexés par Israël.  Par ailleurs, l'édification du mur entrave le bon fonctionnement du système éducatif car beaucoup de jeunes ne peuvent plus se rendre à l'école.


Les représentants du Maroc, de la Fédération de Russie, de la République populaire et démocratique de Corée et de l'Indonésie ont également pris la parole pour exprimer leur profonde préoccupation face aux conséquences de la construction du mur.


La Réunion entamera demain matin, à 10 heures, l'examen de la question de «La construction du mur et la violation du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits de l'homme.»


Déclarations


M. NABEEL KASSIS, Ministre de la planification de l'Autorité palestinienne, a déclaré que le mur de séparation, présenté comme étant une réponse à l'insécurité, est en fait un plan manifeste d'expansion et d'annexion du territoire palestinien.  Le mur a pour conséquence immédiate d'accentuer l'impact des mesures existantes prises par le Gouvernement israélien dans le cadre de sa politique de bouclage afin de contrôler les mouvements des Palestiniens et d'étendre son autorité.  À la suite de la construction du mur, 26 centres de santé ont été isolés et leur accès est de ce fait rendu très difficile pour les Palestiniens.  Par ailleurs, les cliniques gérées par les organisations non gouvernementales sont également devenues inaccessibles, de même que toute la partie ouest de Bethlehem.  Le mur de séparation ne fait qu'accentuer les difficultés rencontrées dans les secteurs de la santé, de l'éducation, de l'agriculture ainsi que dans le secteur privé. 


Le Ministre palestinien a souligné que l'accès aux terres est devenu difficile pour les agriculteurs, qui doivent également faire face à des problèmes de transports pour se rendre dans les marchés.  À cet égard, l'autorité palestinienne estime les pertes en matière de production agricole à plus de 28 millions de dollars par an.  Les problèmes de transports ont également des conséquences économiques désastreuses sur le secteur privé qui ne se fait aucune illusion quant à l'impact dévastateur du mur.  En matière d'éducation, certaines écoles sont dépourvues d'instituteur en raison de l'impossibilité matérielle de se rendre sur place.


La construction du mur de séparation a, en outre, endommagé les infrastructures de distribution d'eau.  Le Programme alimentaire mondial distribue actuellement de l'aide alimentaire à près de 25 000 personnes vivant dans des villages dans le territoire palestinien occupé.  Par ailleurs, l'accès au marché du travail en Israël s'est considérablement réduit depuis le début de l'Intifada.  Le Ministre a exigé qu'Israël cesse arrête la construction du mur, qui représente un déni total du droit du peuple palestinien à vivre dignement.


M. MUSTAFA BARGHOUTI, Président de l'Association des Comités palestiniens de secours médical (Ramallah), a indiqué que les déclarations faites hier par le Président Bush et le Premier Ministre israélien ont rappelé à la communauté internationale que ce mur fait partie de la stratégie d'Israël pour annexer toute la Palestine.  M. Barghouti a présenté des statistiques sur les effets socio-économiques résultant de la construction du mur.  Il a également indiqué qu'il existe actuellement plus de 700 barrages routiers.  Il a rappelé que, depuis l'Accord de paix d'Oslo, près de 102 colonies israéliennes se sont installées sur le territoire palestinien.  La construction du mur a également entraîné le déracinement de milliers d'oliviers.  Le mur est un instrument de destruction, a poursuivi M. Barghouti, et il n'a pas été construit pour assurer la sécurité d'Israël mais pour procéder à une épuration ethnique en empêchant notamment la population palestinienne de poursuivre des études et de vivre en paix.


M. Barghouti a souligné qu'une fois la construction du mur achevée, ce dernier sera plus long que ne l'était le mur de Berlin.  Plus de 800 000 Palestiniens vont être affectés par sa construction et de nombreuses collectivités palestiniennes seront complètement entourées et isolées par ce mur, qui a même séparé certains villages.  Le Gouvernement israélien est en train de transformer Gaza en une prison, a-t-il affirmé.


Faisant référence à la visite du Premier ministre israélien hier aux États-Unis, M. Barghouti a souligné que le Président des États-Unis ne jouait plus son rôle de médiateur.  Les colonies de peuplement illégales ont ainsi été légitimées et constituent une nouvelle forme d'apartheid en Palestine.  Si l'on anéantit la possibilité d'une solution qui aboutira à la création de deux États, qu'est-ce qui restera au peuple palestinien, s'est interrogé M. Barghouti, qui a souligné que la situation actuelle renforce le sentiment du peuple palestinien qu'une solution est impossible à trouver.  Les Palestiniens ne renonceront pas à leurs droits et poursuivront leur lutte pour l'indépendance, a conclu le Président de l'Association des Comités palestiniens de secours médical.


M. JEAN ZIEGLER, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur le droit à l'alimentation, a rappelé qu'il a été le premier Rapporteur à avoir été invité en Israël dans le cadre d'une mission des Nations Unies.  Il a souligné que plus de 900 Israéliens et près de 3 000 Palestiniens ont été tués depuis la seconde Intifada.  Derrière cette tragédie visible, il y a une tragédie invisible.  Aujourd'hui, 65% de la population palestinienne ne mange plus qu'une fois par jour et 15% des enfants vivent en anémie permanente.  M. Ziegler a affirmé que la crise humanitaire est extrêmement sérieuse et s'aggrave de jours et jours.  Elle est indiscutablement due aux mesures d'occupation, a-t-il ajouté, soulignant que l'argument selon lequel les nécessaires mesures de sécurité prévalent sur la crise humanitaire était irrecevable au regard du droit international.  La punition collective est illégale et surtout moralement absurde et inhumaine.  Dans l'hypothèse où la construction du mur serait achevée, il serait absolument impossible pour les Palestiniens d'accéder à leur droit à l'alimentation, a conclu le Rapporteur.


Mme DALIT BAUM, militante de la Coalition des femmes pour une paix juste (Tel-Aviv), a indiqué que son organisation a dès le départ été sur la ligne de front contre l'occupation israélienne et a régulièrement organisé des manifestations au cours de ces quatre dernières années.  Les activités de ce mouvement consistent, entre autres, à tenter de détruire les barrages ou de construire des maisons pour les Palestiniens.  Mme Baum considère la construction du mur comme n'étant qu'un épisode de l'étouffement de la Palestine et comme un instrument qui vise notamment détruire le système de solidarité en Palestine.  Mme Baum a rappelé qu'un grand nombre d'Israéliens s'opposent à la politique israélienne.  « Ce qui est intéressant dans la lutte palestinienne aujourd'hui, ce sont des actions menées conjointement par des Palestiniens, des Israéliens et des étrangers » a-t-elle affirmé.  Chaque jour de survie est une victoire pour les femmes palestiniennes, a conclu la représentante de la Coalition des femmes pour une paix juste.


M. GEORGES KHOURIS, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a fait une présentation sur l'impact de l'édification du mur sur la vie des Palestiniens.  Il a souligné que 14,9 % des Palestiniens seront pris au piège entre le mur et la ligne verte, 23 % de la population palestinienne se trouveront séparés de ses terres et 43% de la Cisjordanie seront annexés par Israël.  Par ailleurs, l'édification du mur entrave le bon fonctionnement du système éducatif car beaucoup de jeunes ne peuvent plus se rendre à l'école.  Les problèmes d'accès ont également un impact sur la santé puisque près de 20 % de la population palestinienne n'a plus accès aux cliniques.  Plus de 100 000 arbres ont été abattus et plus de 36 000 canalisations d'irrigation ont été détruites.  Une corrélation très étroite entre l'édification du mur et la destruction des ressources naturelles est également notable.  Par le biais de différents programmes, le PNUD essaye d'alléger les souffrances de la population dans les régions les plus sévèrement touchées, en améliorant notamment l'accès à la santé et à l'alimentation.  Le PNUD entend décourager le déplacement des populations isolées par le mur, en créant des écoles et des infrastructures sanitaires.  Le PNUD insiste sur la nécessité de mettre en place des projets pouvant générer des emplois et compte sur le soutien des pays donateurs à cet égard.


La représentante du Maroc a souligné que son pays est profondément préoccupé par les conséquences de la construction du mur de séparation par les forces israéliennes dans les territoires palestiniens occupés.  L'édification de ce mur est illégale du point de vue du droit international et constitue une violation des Conventions de Genève.  La représentante du Maroc s'est référée au récent rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires et a souligné que l'édification du mur a de graves incidences sur les droits de l'homme.  Elle a pour effet d'aggraver les restrictions et de limiter l'accès de la population aux soins de santé et à l'éducation.  En outre, elle se traduit par la saisie illégale de biens palestiniens.  La construction illégale de ce mur portera inéluctablement préjudice au processus de paix au Moyen-Orient et à toutes les démarches entreprises pour instaurer la sécurité et la stabilité dans la région, a-t-elle affirmé.  Le Maroc appelle la communauté internationale à favoriser la mise en œuvre progressive et irréversible de la Feuille de route de façon à garantir au peuple palestinien le recouvrement de ses droits légitimes.  Le Maroc réitère son attachement à la reprise du processus de négociation qui constitue l'unique alternative possible pouvant mettre fin à ce conflit et arrêter le cycle infernal de la violence.


Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a souligné que la construction à grande échelle de ce mur constitue un problème extrêmement grave en raison du contexte actuel au Proche-Orient.  Par ailleurs, ce mur aura pour conséquence de rendre très difficile l'accès aux terres pour le peuple palestinien, ce qui constitue une violation des droits de l'homme.  Le représentant a ajouté qu'il était tragique de constater que cette mesure israélienne était soutenue par certains pays et il demande à Israël d'arrêter la construction du mur.


Le représentant de l'Indonésie a déclaré que son pays reste profondément préoccupé par la situation dans les territoires occupés et il a dénoncé les «actes cyniques d'Israël», notamment le récent assassinat du Cheikh Yassine.  L'Indonésie exige la suppression de ce mur et souligne que le terrorisme ne peut en aucun cas être invoqué pour justifier sa construction.  Une solution doit être trouvée pour mettre fin à «l'expansionnisme israélien», a conclu le représentant indonésien.


Le représentant de la Fédération de Russie a regretté la poursuite de la violence entre Palestiniens et Israéliens.  Il a rappelé que la paix ne peut pas être établie contre la volonté des peuples concernés et que l'utilisation de la force mène à une impasse.  Israël doit comprendre que l'occupation des terres palestiniennes ne fera qu'aggraver la situation et, s'agissant des Palestiniens, ces derniers doivent également se rendre compte que les actes terroristes conduiront aussi à une impasse.  Les Palestiniens et les Israéliens doivent abandonner tout acte qui va à l'encontre des objectifs du Quatuor.  La Russie, en tant co-parrain du processus de paix, rappelle que la Feuille de route est le point de départ des négociations et que les rencontres bilatérales entre les deux parties sont également le meilleur moyen de résoudre la crise.


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