SG/SM/8814

OBSERVATIONS DU SECRETAIRE GENERAL LORS DE LA CEREMONIE QUI A MARQUE L’EMISSION D’UN TIMBRE A LA MEMOIRE DE RALPH BUNCHE ET LE CENTENAIRE DE SA NAISSANCE

07/08/03
Communiqué de presse
SG/SM/8814


SG/SM/8814

                                                            HQ/621

            7 août 2003


Observations du Secretaire general lors de la ceremonie qui a marque l’emission d’un timbre à la memoire de Ralph Bunche et le centenaire de sa naissance


Messagers méconnus de la coopération internationale, les timbres savent pourtant magnifiquement, dans leurs voyages autour du monde, transmettre, éduquer et ravir. Ceux qui sont émis aujourd’hui par l’Administration postale des Nations Unies font connaître au monde l’un des hommes que je considère comme un héros mais dont on se souvient trop peu de nos jours : Ralph Bunche, qui aurait eu 100 ans aujourd’hui.


Ces timbres montrent admirablement la dignité et l’humanité de Bunche. Mais, sauf tout le respect dû à l’artiste, aucune image à deux dimensions aussi petite ne peut pleinement rendre la complexité de cet éminent personnage du XXe siècle.


Ralph Bunche a participé à la création de l’Organisation des Nations Unies, en tant qu’artisan de la Charte des Nations Unies et l’un des principaux défenseurs de la décolonisation. Il a jeté les bases des opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Il a été intimement lié aux débats sur toutes les grandes questions avec lesquelles l’Organisation a été aux prises au cours des premières décennies de son histoire.


Mais ce n’est pas tout: il a été également une figure marquante du mouvement en faveur des droits civiques qui s’est créé aux États-Unis et un spécialiste reconnu des sciences politiques, domaine dans lequel il a ouvert des voies nouvelles, en ce qui concerne spécialement les relations entre les races.


Tout fonctionnaire des Nations Unies, où qu’il travaille et qu’il en ait conscience ou non, est redevable des travaux de Ralph Bunche, qui défendait passionnément la création d’une fonction publique internationale indépendante. Je me souviens qu’au début de ma carrière au sein de l’Organisation, c’est-à-dire vers la fin de celle de Ralph Bunche, nous considérions avec une admiration éperdue la longue liste de ses réalisations, qui est devenue pour nous un modèle.


La présente commémoration permet de rendre hommage à la mémoire de Bunche et de transmettre son héritage et sa sagesse aux nouvelles générations. C’est aussi l’occasion de se demander ce qu’il ferait en cette période dramatique de l’histoire de l’humanité et de celle de l’Organisation, à laquelle il a consacré une si grande partie de sa vie.


Il serait satisfait, je crois, de voir ce que nous faisons pour améliorer les opérations de maintien de la paix et autres interventions en cas de conflit.


Mais il serait profondément peiné de constater qu’il nous a fallu si longtemps pour prendre des mesures aussi modestes et horrifié de s’apercevoir qu’il aura fallu de nouveaux actes de génocide pour y parvenir.


Il serait heureux de savoir que les liens entre la paix, le développement et la liberté sont désormais plus largement reconnus, mais, là encore, découragé de voir que cela a pris si longtemps, ce qui a eu pour effet de perpétuer pauvreté et souffrances.


Bunche était, selon toutes les apparences, un homme patient, comme il sied à un négociateur pointilleux, déterminé à saisir toutes les chances de régler les différends par des moyens pacifiques. Mais, en son for intérieur, c’était un idéaliste ardemment convaincu de l’urgente nécessité de résoudre les nombreux problèmes de l’humanité, en particulier des opprimés et des démunis.


Lorsqu’il a reçu le prix Nobel de la paix en 1950, il a exprimé la profonde angoisse que faisait naître en lui l’incapacité des hommes de vivre en paix. En quelques mots mémorables, il a résumé la mission de l’Organisation des Nations Unies. L’Organisation a été créée, a-t-il dit, non seulement pour préserver la paix, mais aussi pour rendre possible le changement, même radical, sans bouleversement; elle n’a pas pour mission de défendre l’ordre établi. Je pense que cette déclaration est aussi valable aujourd’hui qu’elle l’était alors.


Nous devrions tous aujourd’hui essayer d’en retrouver l’esprit. Alors que nous poursuivons les efforts de Bunche et tentons de soustraire le monde à la complaisance et à l’indifférence, nous devrions faire ce que Bunche faisait et nous demander ce que chacun de nous peut faire pour édifier un monde meilleur et plus sûr pour tous. Se consacrer tous les jours à la défense de la paix, de la coexistence et du respect mutuel serait le meilleur moyen de rendre hommage à la force vitale, au champion de la paix et à la source d’inspiration qu’était Ralph Bunche.


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