LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME POURSUIT SON DEBAT SUR LES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS
Communiqué de presse DH/G/197 |
Commission des droits de l'homme
LA Commission des droits de l'homme poursuit son debat sur les droits economiques, sociaux et culturels
Le Représentant spécial pour les droits de l'homme au Cambodge appelle
à aider le pays à surmonter les graves difficultés auxquelles il reste confronté
GENEVE, le 7 avril -- La Commission des droits de l'homme a poursuivi, ce matin, son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels. Au titre des services consultatifs et de la coopération technique dans le domaine des droits de l'homme, elle a par ailleurs entendu le Représentant spécial du Secrétaire général pour les droits de l'homme au Cambodge, M. Peter Leuprecht, qui a présenté son rapport. M. Leuprecht a déploré que les progrès en matière de réformes judiciaires et législatives aient été si lents. Il s'est en outre dit préoccupé par le fait que les concessions forestières et foncières soient accordées sans tenir compte des intérêts des populations qui les habitent : «Le Cambodge ne devrait pas être vendu à des intérêts privés étrangers de cette façon», a-t-il estimé. En dépit de certains progrès, le Cambodge doit toujours faire face à de graves difficultés en matière de droits de l'homme et la communauté internationale devra aider ce pays à les surmonter, a conclu le Représentant spécial. Le Cambodge a réagi à cette déclaration.
S'agissant des droits économiques, sociaux et culturels, nombre de délégations ont fait part des progrès réalisés dans leur propre pays en matière de promotion de ces droits. La plupart des intervenants ont insisté sur l'impératif de lutte contre la pauvreté. Certains orateurs ont dénoncé les politiques mises en œuvre par les institutions financières et monétaires internationales qui ne favorisent pas la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. La mondialisation, si elle a des effets positifs sur de nombreux aspects de l'économie mondiale, n'a pas permis à tous les pays d'assurer le développement humain, a-t-il été souligné. Ont également été dénoncés les règles commerciales inéquitables et le protectionnisme des pays du Nord. Plusieurs délégations ont insisté sur la nécessité de lutter contre la pandémie du VIH/sida et ont attiré l'attention sur l'importance que revêt, dans ce contexte, la promotion du droit d'accès aux médicaments et aux traitements adéquats.
Il a été rappelé par plusieurs délégations que le succès de la réalisation progressive des droits économiques, sociaux et culturels passe par une coopération internationale accrue et efficace. Plusieurs orateurs ont exprimé leur espoir de voir rapidement élaboré le projet de protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui mettrait
en place un mécanisme de plaintes permettant de rendre ces droits justiciables. Selon la délégation des États-Unis, toutefois, affirmer que ces droits sont justiciables revient à faire des fausses promesses. Le représentant de l'Unesco a pour sa part proposé la nomination d'un rapporteur spécial sur les droits culturels.
Les représentants des pays suivants ont fait des déclarations: Syrie, Cuba, Chine, Vietnam, Pakistan, Inde, Venezuela, Paraguay, Ouganda, Algérie, Sri Lanka, Libye, États-Unis, Cameroun, Malaisie, Afrique du Sud (au nom du Groupe africain), République démocratique du Congo, Mexique, Norvège, Chypre, Suisse, Iraq, Saint-Siège, Koweït, Yémen, Serbie-et-Monténégro, Égypte, Botswana et Mongolie.
Ont également pris la parole les représentants de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, du Programme des Nations unies pour les établissements humains (Habitat), de la Banque mondiale, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), ainsi que de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco).
Les organisations non gouvernementales suivantes ont aussi fait des déclarations: Commission internationale de juristes (au nom également de Amnesty International); Fédération des femmes cubaines (au nom également de la Fédération démocratique internationale des femmes); Centre on Housing Rights and Evictions (au nom également de Grassroots Organization Operating Together in Sisterhood); Fédération internationale des femmes diplômées des universités (au nom également d'autres organisations); Mouvement international ATD quart monde (au nom également du Conseil international des femmes et de la Fédération internationale des assistants sociaux et des assistantes sociales); et Human Rights Advocates, Inc. (au nom également de Earthjustice et de International Human Rights Law Group).
La Commission poursuivra son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels cet après-midi, à 14 heures.
Présentation du rapport sur le Cambodge au titre des services consultatifs et de la coopération technique dans le domaine des droits de l'homme
M. PETER LEUPRECHT, Représentant spécial du Secrétaire général pour les droits de l'homme au Cambodge, a évoqué son récent voyage au Cambodge et relevé que la plupart des observateurs ont conclu que les élections communales de 2002 s'étaient déroulées dans de meilleures conditions que les législatives de 1998. La Commission électorale nationale ne doit pas se comporter «comme un tigre de papier» mais faire usage de tous ses pouvoirs afin de garantir que les élections de cette année se dérouleront sans menaces, sans intimidation, sans violence et sans corruption. Le Représentant spécial a déploré que les progrès en matière de réformes judiciaires et législatives aient été si lents et que ces réformes fassent l'objet de si peu de consultations publiques. Parmi les faits encourageants, il faut mentionner la création d'une École royale de formation des juges.
Parmi les sujets de préoccupation, le Représentant spécial a dénoncé les concessions forestières et foncières dessinées sans souci des intérêts des populations qui les habitent. Il s'agit là d'une évolution qui ne manquerait pas d'avoir des conséquences humanitaires et sur le développement durable. «Le Cambodge ne devrait pas être vendu à des intérêts privés étrangers de cette façon», a estimé M. Leuprecht. Il a relevé que l'une des principales activités dans ces concessions était l'exploitation forestière, malgré le moratoire imposé sur ce type d'industrie. Or, si la destruction des forêts se poursuit au rythme actuel, le Cambodge devra faire face à une catastrophe humaine et écologique qui aura des répercussions sur les générations futures. Le Gouvernement a pris l'engagement de procéder à des évaluations du problème, il convient qu'elles soient entreprises sans délai. Enfin, M. Leuprecht a salué le projet d'accord conclu entre les Nations Unies et le Gouvernement du Cambodge au sujet du procès des Khmers rouges. Il faut espérer que cet accord sera rapidement appliqué et que les anciens leaders du Kampuchéa démocratique seront enfin jugés, conformément au droit international. En résumé, en dépit de certains progrès, le Cambodge doit toujours faire face à de graves difficultés en matière de droits de l'homme, a souligné le Représentant spécial du Secrétaire général. La communauté internationale devra aider ce pays à les surmonter.
Dans son rapport sur la situation des droits de l'homme au Cambodge (E/C.N.4/2003/114), M. Leuprecht invite instamment les donateurs et le Gouvernement royal à adopter une approche participative et à permettre aux pauvres de se faire entendre. Le Représentant spécial souligne la nécessité de privilégier une croissance économique susceptible d'apporter des avantages à la totalité de la population et, en particulier, aux plus pauvres. Jusqu'à présent, priorité a été donnée à la croissance du secteur économique privé, avec un souci insuffisant du respect des droits de l'homme et de l'équité.
S'agissant de la réforme judiciaire, le Représentant spécial estime indispensable de procéder à une réforme structurelle globale du système judiciaire, ce qui implique que soient promulguées la loi sur le statut des juges et des procureurs, la loi relative à l'organisation et au fonctionnement des tribunaux judiciaires et que la loi relative au Conseil suprême de la magistrature soit révisée de façon approfondie. La modification de la loi relative aux partis politiques constituera une première étape d'une prise d'indépendance des juges et des procureurs à l'égard des influences politiques. En outre, le Gouvernement devrait créer un fonds autonome de service d'aide juridictionnelle pour les plus pauvres. Une action doit être entreprise pour mettre en place par des moyens législatifs un système d'aide juridictionnelle, afin d'assurer l'accès à la justice pour les indigents. Le Gouvernement devrait aussi accroître les ressources consacrées dans le budget national à la réorganisation du système judiciaire défaillant et lui donner une autonomie à la fois pour l'attribution des ressources et leur utilisation. Il devrait mettre au point, à titre prioritaire, un document de stratégie et un plan d'action pour la réforme juridique et judiciaire. Dans la perspective d'un processus législatif participatif, l'Assemblée nationale et le Sénat devraient modifier leur règlement intérieur en y intégrant des dispositions prévoyant des auditions publiques et en faisant des consultations publiques un préalable obligatoire. Par ailleurs, le Gouvernement devrait envisager la mise en place de cours d'appel régionales ou itinérantes et mettre en place un système de justice pour les mineurs.
Le Représentant spécial attire également l'attention sur les questions liées aux terres et à la foresterie. Il propose au Gouvernement d'entreprendre un réexamen de l'ensemble des contrats de concessions foncières et de leur mise en œuvre, et envisager de faire usage de la faculté de résilier ces contrats lorsque les dispositions de la loi cambodgienne et les clauses conventionnelles n'ont pas été respectées. Le Gouvernement royal devrait, par une procédure consultative, élaborer et adopter le sous-décret nécessaire pour fixer les procédures visant à réduire les concessions sur les terres d'une superficie supérieure à 10 000 hectares et préciser les exemptions éventuelles. Aucune nouvelle concession ne devrait être accordée tant que le sous-décret fixant la procédure d'attribution de concessions n'a pas été adopté. En outre, la communauté internationale devrait veiller à ce que les projets de développement soutenus par ses membres prévoient des dispositions garantissant une consultation réelle et adaptée des organisations non gouvernementales et des populations concernées. S'agissant du logement dans les zones de réinstallation, le Représentant spécial estime que le Gouvernement et les autorités locales devraient prendre les mesures appropriées pour répondre aux problèmes de sécurité, de qualité de l'eau, d'assainissement et de mise en place de systèmes de santé et d'éducation liés à la situation des populations sans terre.
S'exprimant en qualité de partie concernée, M. SUOS Someth(Cambodge) a regretté que le Représentant spécial ne propose pas réellement d'approche nouvelle. Il a souligné que les progrès réalisés sont bien connus de la communauté des donateurs qui, lors de la réunion du Groupe consultatif, ont témoigné de leur appui au Cambodge. Il a estimé que le représentant spécial ne rendait pas justice aux progrès réalisés par le Cambodge qui est parvenu à la paix et à la stabilité et enregistre désormais une croissance de 6 %, alors que la région connaît un ralentissement économique. Ainsi, le Cambodge réalise maintenant plus d'un milliard de dollars en recettes d'exportation. Il a reconnu qu'il restait des domaines où le processus de réformes étaient lent, notamment en ce qui concerne les réformes judiciaires, administratives, éducatives. Il a déclaré qu'il ne prétendait pas que la situation des droits de l'homme dans son pays était parfaite, mais a demandé à la communauté internationale d'aider le Cambodge, notamment dans le cadre de la coopération technique. Il a également demandé, à ceux qui jugent aujourd'hui le Cambodge, où ils étaient quand les principes des droits de l'homme étaient foulés aux pieds par les Khmers rouges. Il a déploré que le rapport dont est saisie la Commission persiste dans une approche de confrontation et peigne un tableau sombre de la situation des droits de l'homme dans son pays. Insistant sur la nécessité d'établir un dialogue plus productif et une meilleure coopération, le représentant cambodgien a proposé à la Commission d'adopter une nouvelle procédure, par exemple en n'examinant ce rapport que tous les deux ans.
Suite du débat sur les droits économiques, sociaux et culturels
M. HUSSEIN ALI (Syrie) a dénoncé les politiques du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale qui privent les pauvres de la jouissance de leur droits économiques, sociaux et culturels. Toutefois, il a souligné la futilité de débattre de la jouissance des droits économiques sociaux et culturels alors que les femmes et les enfants d'Iraq tombent sous les balles américaines. Cela étant, le représentant a accusé l'économie de marché d'avoir renversé les valeurs. Au lieu que l'économie soit au service de l'humanité, c'est devenu le contraire. Il a déclaré que le monde était entré dans l'économie du sang et a accusé les États-Unis d'incendier les puits de pétrole pour que leurs multinationales puissent les éteindre. Il s'est indigné du mauvais film «choc et effroi» qui passe sur les télévisions et du très mauvais scénario qui coûte la vie aux Iraquiens. Il a accusé les autorités des États-Unis d'avoir foulé aux pieds la dignité de leur propre peuple, les institutions internationales, le peuple iraquien et même l'autorité du pape. Il a estimé que le peuple iraquien n'était pas la seule victime de cette guerre, pour laquelle les pauvres du monde entier paient un lourd tribut. Il s'est alarmé de voir le monde soumis à cette puissance et a déclaré son effroi devant les autorités de Washington qui planifient la mort de tant d'innocents.
M. JORGE-ALBERTO FERRER RODRÍGUEZ (Cuba) a déploré que certains rapporteurs aient fait état de difficultés financières et ne reçoivent pas tout l'appui auquel ils ont droit. Le représentant a souligné que, chaque année qui passe, de plus en plus de personnes sont privées de leurs droits, à cause de maladies évitables et des conditions économiques dans lesquelles ils vivent. Ces drames sont tus dans les pays occidentaux et dans la presse soit-disant libre. Un enfant qui meurt directement ou indirectement de faim n'a-t-il pas droit à la vie, a demandé le représentant? Combien de temps encore les profits financiers passeront-ils devant le droit à la vie, s'est-il interrogé. Les mesures de déréglementation imposées par les organisations financières internationales se soldent par une diminution du rôle de l'État et donc une dégradation des services de base destinés à la population, a-t-il souligné.
Le représentant cubain a également condamné le blocus que les États-Unis imposent depuis plus de quarante ans à Cuba, en contradiction avec les déclarations affirmant que l'alimentation ne doit pas être utilisée comme instrument politique. Ce blocus totalement illégal ne s'est pas assoupli, au contraire, sous l'actuel gouvernement des États-Unis, a souligné le représentant cubain, qui a déclaré que «les amendes pleuvent contre les voyageurs» des États-Unis qui se rendent à Cuba.
M. CONG JUN (Chine) a estimé que, s'ils ne favorisent pas la croissance économique dans les pays en développement, les pays développés ne pourront pas non plus poursuivre leur croissance. Il a insisté sur l'interdépendance et l'indivisibilité de tous les droits de l'homme et a souligné l'importance de permettre aux populations des pays en développement, qui constituent la majorité de la population mondiale, de jouir de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il a ensuite présenté les progrès et les objectifs de son pays, qui envisage notamment de mieux protéger l'environnement. Ainsi, la stratégie nationale prévoit que le produit national brut sera quadruplé d'ici à 2020 par rapport à l'an 2000, ce qui permettra d'assurer un système de protection sociale efficace, d'éliminer l'analphabétisme et d'assurer la jouissance de tous les droits de l'homme au peuple chinois, a-- déclaré le représentant.
MME HOANG BICH LIEN (Vietnam) a déclaré que son pays souscrivait pleinement aux efforts de la Commission pour la promotion des droits à l'alimentation, au logement, aux soins de santé. Le Vietnam, malgré les dévastations causées par la guerre, a tenté d'améliorer les conditions de vie et de garantir les droits de la population, y compris ses droits économiques, sociaux et culturels. En dix-sept ans d'efforts de reconstruction, d'importants objectifs ont été atteints dans tous les domaines, notamment en ce qui concerne l'amélioration des conditions de vie et le renforcement de l'état de droit. La croissance économique est soutenue, le PNB a doublé en dix ans; l'égalité entre hommes et femmes est consacrée par la loi et ancrée dans la pratique. Trente pour-cent du budget public est attribué au développement et au traitement de la pauvreté, notamment en faveur des régions les plus pauvres, montagneuses ou reculées. Près de 90% de la population a accès aux soins de santé, l'alphabétisation est maintenant généralisée. Bien que le Vietnam connaisse encore de nombreuses difficultés, la vie quotidienne s'est considérablement améliorée et les droits de chacun et chacune sont garantis.
M. FARRUKH IQBAL KHAN (Pakistan) a rendu compte des efforts consentis par le Pakistan pour améliorer la vie de ses populations. Il a donné les détails de la stratégie de sensibilisation de la population en matière de droits de l'homme et du projet du Gouvernement pour l'éducation, qui propose notamment des ateliers sur les droits de l'homme aux fonctionnaires et aux enseignants. Au plan international, il a regretté que les événements récents démontrent que le XXIe siècle risque d'être bien éloignée du monde que nous connaissions et chérissions. Il s'est inquiété des inégalités croissantes qui violent le droit fondamental de tous à un niveau de vie décent. Il a appuyé ses propos on citant des statistiques de l'Organisation internationale du travail qui estime qu'il y avait 180 millions de chômeurs à la fin de 2002 et que le nombre de pauvres vivant avec moins d'un dollar par jour était remonté au niveau de 1998, soit 550 millions. Il s'est indigné que 96 % des agriculteurs ne parviennent pas à produire suffisamment pour assurer leur sécurité alimentaire à cause des subventions que reçoivent, par exemple, les fermiers des États-Unis. Il a également attiré l'attention sur les 40 millions de personnes vivant avec le VIH/sida et sur la propagation de cette pandémie qui infecte 14 000 personnes chaque jour. Le représentant pakistanais a souligné que les dysfonctionnements du système économique mondial continuent d'accroître les disparités et annulent les efforts des pays pauvres, qui se retrouvent paralysés. Dans un tel contexte, il a recommandé que le Haut Commissaire aux droits de l'homme élabore un programme d'action mondial, qui permettrait de dégager des synergies du fonctionnement des mécanismes actuels, de réduire les inégalités et d'identifier les mesures en vue de prévenir les conflits.
M. RAMANATHAN KUMAR (Inde) a déploré que certains pays en voie de développement, jusque dans cette région de l'Asie, n'aient pas encore ratifié le Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels et s'obstinent, pour des motifs égoïstes, à refuser d'accorder la clause de la nation la plus favorisée à d'autres membres du même groupe régional. Il s'agit là de violations des obligations internationales en matière de droits économiques, sociaux et culturels. Ces droits ne peuvent être réalisés qu'au sein de sociétés libres, ouvertes et démocratiques, dans lesquelles les politiques gouvernementales reflètent la volonté populaire. La Constitution de l'Inde contient un chapitre sur les principes directeurs de la politique nationale, qui a reconnu ces droits avant même l'adoption du Pacte. Le représentant a toutefois souligné que le succès de la réalisation progressive des droits économiques, sociaux et culturels au niveau des pays passe par une collaboration internationale efficace. Le développement humain requiert quant à lui un développement économique continu et équitable. Or, la mondialisation, si elle a eu un effet positif sur de nombreux aspects de l'économie mondiale, n'a pas permis d'améliorer les possibilités du développement humain, ni concrétisé les avantages que laissait entrevoir l'intégration du commerce. Elle contraint maintenant les gouvernements à opérer des choix en matière de services, d'investissement et de propriété intellectuelle qui auront une influence négative sur le développement humain du fait de leurs effets pervers sur l'emploi, l'éducation et les mouvements de capitaux, notamment.
M. VLADIMIR GONZÁLEZ VILLAPAREDES (Venezuela) a mis l'accent sur les impératifs tant nationaux qu'internationaux de la lutte contre la pauvreté. Il a rappelé le soutien de son pays à la proposition de créer un fonds de solidarité mondial qui permette de rompre le cercle vicieux de la pauvreté. Il a proposé que ce fonds reçoive un pourcentage de la dette extérieure des pays en développement et des dépenses militaires des pays développés et que ces fonds soient investis dans des programmes sociaux de réduction de la pauvreté. Dans le même ordre d'idées, le représentant s'est déclaré favorable à l'adoption rapide d'un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels concernant un mécanisme de plaintes. Sur la question de la dette, il a appuyé les efforts des Nations Unies en vue de rechercher une solution commune et définitive au problème de la dette des pays en développement. Il s'est dit favorable aux programmes de reconversion de la dette en capital social pour financer des projets éducatifs.
Le représentant vénézuélien a ensuite attiré l'attention sur les efforts menés par son pays dans la lutte contre le VIH/sida, indiquant que le Venezuela privilégiait l'éducation et la prévention. Toutefois, il a estimé que les obstacles qui s'opposent à la réduction de la pandémie sont principalement économiques, du fait notamment du prix des médicaments. Il a souligné la nécessité de garantir l'accès des médicaments à tous. Dans ce contexte, il s'est dit favorable à la création d'un Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida.
M. RUBÉN RAMÍREZ LEZCANO (Paraguay) a déclaré que son gouvernement s'est fixé pour priorité le renforcement de sa politique des droits de l'homme, en particulier en matière économique et sociale, pour répondre aux déficiences structurelles dans ce domaine et la, détérioration des conditions ces dernières années, du fait notamment de la crise qui a secoué la région. Outre des facteurs internes que sont notamment l'enclavement du pays et la taille réduite de son économie, des obstacles tels que le protectionnisme des pays du Nord, les inégalités et les traitements discriminatoires en matière commerciale, et les effets secondaires de la mondialisation sont autant d'obstacles au développement à long terme du Paraguay. Le Gouvernement du Paraguay estime que la communauté internationale doit répondre de façon solidaire aux difficultés qu'une partie du monde rencontre dans la jouissance de ses droits économiques et sociaux.
M. Arthur GAKWANDI (Ouganda) a mis l'accent sur le message central qui ressort des rapports du Secrétaire général et des Rapporteurs spéciaux sur les droits à l'alimentation, à l'eau potable et à l'assainissement, à la santé et à l'éducation. Il a regretté que, malgré le consensus de la communauté internationale pour promouvoir ces droits, il continue d'y avoir un manque de coopération et que les indicateurs disponibles indiquent même un déclin du niveau de vie dans plusieurs parties du monde. Le représentant a en outre mis l'accent sur le droit à l'éducation qu'il a considéré comme la clé du de la réalisation de tous les droits de l'homme, en particulier des droits économiques, sociaux et économiques. Il a remercié la Rapporteuse spéciale sur le droit à l'éducation pour son rapport de mission au Royaume-Uni dans lequel elle a examiné le rôle de l'éducation pour le rétablissement de la paix en Irlande du Nord, estimant que son analyse et ses recommandations sont d'un grand intérêt pour son pays et pour plusieurs pays africains. Le représentant ougandais a indiqué que son Gouvernement a déployé des efforts considérables pour intégrer le droit à l'éducation dans le système éducatif mais que sa pleine réalisation reste subordonnée à la réalisation du droit au développement. À cet égard, il a mis l'accent sur la nécessité pour les pays développés de permettre l'accès à leurs institutions d'enseignement supérieur dans l'esprit du partenariat énoncé dans la Déclaration du millénaire et du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique. Dans cette optique, il a dénoncé les obstacles de plus en plus importants érigés par nombre de pays développés à l'accès de leurs institutions
d'enseignement supérieur, en particulier par le biais de droits d'inscription prohibitifs, ce qu'il a estimé discriminatoire. Il a demandé que la Rapporteuse spéciale accorde une attention particulière à ces mesures discriminatoires dans ses travaux futurs et que des enquêtes soient menées sur ces pratiques au regard du droit à l'éducation. Il a également demandé au Rapporteur spécial sur le droit au développement d'étudier comment la coopération dans le domaine de l'enseignement supérieur peut être intégrée dans les modèles de développement.
M. Lazhar SOUALEM (Algérie) a relevé que les rapports des rapporteurs spéciaux et experts indépendants sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, soumis à l'attention de cette session de la Commission, s'accordent sur un bilan peut encourageant s'agissant du progrès accompli dans la promotion et la protection de ces droits. Le Professeur Jean Ziegler, Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, note que l'objectif arrêté en 1996 lors du Sommet mondial de l'alimentation, consistant à réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d'ici 2015, semble aujourd'hui compromis. En outre, faute d'accès aux soins et aux médicaments de base, les populations de certains pays, voire d'un continent - l'Afrique - sont menacées d'une destruction quasi-programmée. Attirant l'attention sur le déni du droit à un traitement adéquat face à la pandémie du VIH/sida, le représentant algérien a souligné que la fracture Nord-Sud dans ce contexte est plus que jamais notable. Rappelant en outre que la quatrième Conférence de l'Organisation mondiale du commerce, tenue à Doha en novembre 2001, a adopté par consensus une Déclaration sur l'Accord relatif aux aspects du droit à la propriété intellectuelle liés au commerce (ADPIC) et la santé publique dont un paragraphe stipule que l'Accord n'empêche pas et ne devrait pas empêcher les membres de prendre des mesures pour protéger la santé publique, le représentant a fait observer que la générosité de ces déclarations est malheureusement aujourd'hui l'otage d'une interprétation étriquée qui vise à les vider de leur substance et entrave, pour des raisons purement mercantiles, leur mise en œuvre effective. Lorsque le choix entre le respect du droit à la propriété intellectuelle et celui du droit à la vie privée est posé, ce dernier doit primer, a insisté le représentant.
S'agissant des effets des programmes d'ajustement structurel et de la dette extérieure, le représentant de l'Algérie a fait observer que l'Expert indépendant sur ces questions, M. Bernard Mudho, a estimé qu'en dépit des mesures correctives mises au point par les organismes de développement et par les institutions financières internationales, la situation financière des pays en développement continue de se dégrader. Il est de la plus haute importance que la Commission prenne d'urgence toutes les dispositions nécessaires afin que la Groupe de travail sur les effets des politiques d'ajustement structurel et la dette extérieure sur la jouissance de tous les droits de l'homme puisse s'acquitter de son mandat. D'autre part, la visite effectuée par M. Miloon Kothari, Rapporteur spécial sur le droit au logement, dans les territoires arabes occupés (janvier 2002) vient rappeler, si besoin est, les conditions inhumaines et insoutenables dans lesquelles est contrainte de vivre la population palestinienne, du fait des politiques de peuplement et de dévastations systématiques pratiquées par la puissance occupante, Israël.
M. Ranjith UYANGODA (Sri Lanka) a déclaré que les procédures spéciales relatives aux droits économiques, sociaux et culturels mises en place par la Commission ont contribué de façon importante à la mise au point de concepts d'application de ces droits. Le rapport de l'Expert indépendant sur l'extrême pauvreté est l'un de ces mécanismes et ses travaux constituent un outil très utile dans la lutte contre la pauvreté. Le représentant a fait valoir que le droit à la santé et à des services sanitaires gratuits est un élément de base des droits de l'homme et a été renforcé au Sri Lanka, dont le gouvernement dépense 1,3% de son budget à ce poste, soit 50% des dépenses publiques totales. L'espérance de vie à la naissance au Sri Lanka atteint 72, 1 ans, le taux de scolarisation des adultes atteint 91,6% et 96,8% pour les jeunes. Outre ces accomplissements, le Gouvernement du Sri Lanka a également accordé la priorité à plusieurs programmes d'assistance aux familles nécessiteuses, en leur procurant un logement adéquat dans les villes et les campagnes du pays.
M. Khlaed Abou Aisha ALBUAISHI (Libye) a regretté que depuis trois décennies, date de l'entrée en vigueur du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ces -droits ne jouissent toujours pas de la même considération que les droits civils et politiques, comme en témoigne le débat général de la Commission sur les violations des droits de l'homme où qu'elles se produisent dans le monde. Il s'est indigné de ce que les pays développés s'érigent en censeurs mais n'aident en rien les pays en développement à sortir de la pauvreté. Il a demandé comment la communauté internationale envisageait la réalisation des droits économiques et sociaux pour tous alors que l'on assiste à des guerres injustes et que des sanctions iniques sont imposées sur des pays en développement, les empêchant de venir en aide à leur population. Il s'est indigné des disparités croissantes entre les pays riches et les pays pauvres. Il a dénoncé les programmes de recherche qui se focalisent sur les maladies qui touchent les pays développés alors que les populations pauvres continuent de mourir de maladies qui pourraient être soignées.
M. Richard J. WALL (États-Unis) a assuré qu, e les États-Unis sont engagés à apporter aux individus les conditions qui leur permettront de réaliser leur bien-être économique, social et culturel. La population des États-Unis a accès à l'éducation publique gratuite. Ceux qui ne sont pas en mesure de trouver un emploi ont accès aux programmes de bien-être, tant au niveau de leur État qu'au niveau fédéral. Les soins de santé sont dispensés, à travers des programmes fédéraux et d'État, aux individus qui ne peuvent se les payer. Au niveau international, les États-Unis sont le plus grand contributeur du monde au financement des programmes d'atténuation de la pauvreté et de la misère.
À ceux qui voudraient que les droits économiques, sociaux et culturels soient justiciables, le représentant des États-Unis a fait observer que les gouvernements qui souscrivent à cette obligation devront fournir un logement aux millions de personnes qui affirment que leur logement actuel n'est pas adéquat. Ils seront en outre tenus de fournir de la nourriture à chaque citoyen. Et même lorsque cela n'est pas possible, ils devront fournir les meilleurs soins médicaux possibles à chaque citoyen. S'ils ne respectent pas ces engagements, ils devront s'engager à apporter une compensation financière. Affirmer que ces droits sont justiciables ne constitue qu'une fausse promesse, a estimé le représentant des États-Unis. Ainsi, le système communiste avait promis de respecter les objectifs économiques, sociaux et culturels mais n'y est pas parvenu. L'expérience a montré que les sociétés qui respectent les droits civils et politiques, pratiquent la démocratie et respectent la primauté du droit font mieux que les autres pour ce qui est de la réalisation des objectifs économiques, sociaux et culturels. Les démocraties libérales, c'est-à-dire basées sur le libre- marché, sont moins
vulnérables à la famine, a affirmé le représentant. En revanche, les gouvernements qui pâtissent d'un manque d'institutions démocratiques causent de grandes souffrances parmi leurs citoyens. Il n'est pas surprenant que ce soient ces mêmes gouvernements qui veuillent détourner l'attention de leurs propres lacunes et prétendent être victimes du colonialisme, de l'impérialisme, de la mondialisation et du racisme. En fait, les gouvernements doivent prendre la responsabilité de leurs actes, a déclaré le représentant des États-Unis.
M. Jean Simplice NDJEMBA ENDEZOUMOU (Cameroun) a déclaré que son pays est d'avis que, dans le cadre de l'indivisibilité et de l'interdépendance des droits de l'homme, il faille porter une attention égale aux droits civils et politiques d'une part, et droits économiques, sociaux et culturels d'autre part. C'est dans cet esprit que le Gouvernement camerounais vient d'adopter le Document de stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, après un processus de consultation ouverte aux différents acteurs de la société, y compris les organisations non gouvernementales. Parmi les questions sociales figure en première ligne la lutte contre le VIH/sida, dont le taux de prévalence est estimé à 11% dans le pays. Cette lutte est menée dans le cadre d'un comité national et combine la sensibilisation de la population avec la prise en charge des personnes infectées. Le coût mensuel de la trithérapie est ainsi tombé de 565 euros à environ 30 euros. L'ambition du Cameroun est d'ailleurs de pouvoir offrir cette thérapie à un coût encore plus faible, voire nul. Il estime donc que la communauté internationale devrait faire tout son possible pour que l'on n'abuse pas de l'argument lié à la propriété intellectuelle, qui a pour effet de priver les malades du Sud, et de l'Afrique en particulier, de l'accès aux produits leur garantissant le droit à la santé voire à la vie.
MME Hussain RAJMAH (Malaisie) a exprimé ses préoccupations concernant l'accroissement de la pauvreté dans les pays en développement alors que les pays développés jouissent d'une prospérité sans précédent. Les crises financières qui ont secoué l'Asie et l'Argentine ont montré que les pays en développement ne tireront pas profit de la mondialisation, notamment en termes de revenus et de répartition des richesses, si les fondations du système financier international sont faibles. C'est pourquoi il convient de dessiner un nouvel ordre économique mondial en vue de corriger les échecs du marché et réduire la marginalisation. Il faut que la mondialisation conduise à un renforcement de l'infrastructure des pays en développement, a-t-elle poursuivi, expliquant que son pays était favorable à un regroupement des ressources en vue d'aider les pays en développement à renforcer leurs infrastructures. Pour leur part, les pays en développement doivent également se préparer à faire face à la mondialisation en renforçant leurs capacités nationales, a-t-elle ajouté.
La représentante de Malaisie a ensuite fait part des propositions qui se sont dégagées lors du treizième sommet du Mouvement des pays non alignés, réuni à Kuala Lumpur en février 2003. À cette occasion, 116 pays en développement ont exprimé de vives préoccupations face à la marginalisation croissante qui les frappe. Ils se sont inquiétés des barrières commerciales et technologiques qui leur sont encore imposées alors qu'ils s'efforcent d'apporter les modifications structurelles nécessaires à leur économie en vue de s'intégrer dans l'économie mondiale. Malheureusement la poursuite et l'accélération de la mondialisation continue de creuser les fossés financier et technologique, en particulier le fossé numérique, a-t-elle regretté. Dans un tel contexte, les pays non alignés estiment que les efforts internationaux de développement devraient se concentrer sur l'élaboration d'un ordre économique international plus juste, qui permette aux pays en développement de prendre pleinement part au processus de décision.
M. Sipho George NENE (Afrique du Sud, au nom du Groupe africain) a fait observer que les rapports du Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la mondialisation soulignent la nécessité pour la communauté internationale de se pencher sur la question. La mondialisation économique crée de nombreux obstacles à l'exercice des droits fondamentaux de la personne, a poursuivi le représentant sud-africain. Il a affirmé que les accords commerciaux internationaux devraient traiter prioritairement des problèmes de développement et être mis en œuvre de telle manière que, grâce à un traitement différentiel et spécial, les pays africains puissent bénéficier de la libéralisation du commerce. L'Afrique est le continent le plus gravement affecté par les effets néfastes de la mondialisation, a rappelé le représentant sud-africain. Sur 800 millions d'habitants, l'Afrique compte 340 millions de personnes vivant avec moins d'un dollar par jour. Si elle n'est pas rapidement enrayée, la pandémie du sida décimera inexorablement un continent entier, a-t-il prévenu. Bien sûr, une telle situation peut être analysée à la lumière de contextes nationaux dans lesquels la démocratie et la bonne gestion des affaires font défaut; mais il est largement reconnu que les institutions mondiales de développement ainsi que les institutions commerciales, monétaires et financières mondiales devraient réformer leurs modes opératoires et leurs règles de manière à contribuer à l'instauration d'un environnement international propice à la réalisation de tous les droits de l'homme, y compris le droit au développement.
Dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, les Africains cherchent à mettre en place une orientation novatrice en faveur du développement humain, des valeurs de droits de l'homme et de l'éradication de la pauvreté, ainsi qu'un nouveau partenariat mondial sur la base d'une responsabilité partagée mais différenciée, a rappelé le représentant sud-africain.
M. ANTOINE MINDUA KESIA-MBE (République démocratique du Congo) a déclaré qu'après avoir hérité du fardeau de trente-deux ans de gabegie financière et de corruption généralisée, le nouveau pouvoir congolais avait initié un plan triennal de reconstruction nationale dont la guerre a freiné l'exécution depuis le 2 août 1998. En quatre ans, le conflit qui sévit en République démocratique du Congo a généré une situation plus que désastreuse dans tous les domaines : destruction des infrastructures économique, sanitaire et scolaire; quatre cent mille citoyens congolais réfugiés dans les pays voisins; deux millions de personnes déplacées, trois millions cinq cent mille morts. À cause de la guerre, le Gouvernement a été contraint d'affecter plus de 80% de son budget à l'effort de guerre, privant ainsi la population des soins de santé convenables, la jeunesse d'une bonne éducation, les fonctionnaires et enseignants d'un salaire régulier. La misère du peuple congolais a atteint des proportions inhumaines : le pouvoir d'achat est nul, le chômage généralisé, les fermiers ont abandonné leurs champs devant l'insécurité qui règne dans les territoires occupés. La famine est totale. Par dessus le marché, le pays est victime du pillage de toutes ses ressources végétales et minérales. Il est inadmissible qu'au XXIe siècle, des sociétés multinationales et des États étrangers s'installent impunément dans un pays pour en extraire gratuitement et sans aucune contrepartie les ressources naturelles d'autrui. Malgré cet état de guerre qui lui est imposé, la République démocratique du Congo n'a jamais baissé les bras et continue de se battre pour
assurer sa mission qui est d'assurer le bien-être de la population. Elle a notamment adopté, en concertation avec les organismes financiers internationaux (FMI, Banque mondiale), un «Plan intérimaire renforcé» destiné à jeter les bases de la reconstruction et de la relance économique. Après deux ans d'application de ce plan, tous les espoirs sont permis pour son succès et cela dans la perspective de la fin de la guerre avec la signature récente (2 avril) de l'Accord global et inclusif devant régir la période de transition.
M. Erasmo MARTÍNEZ(Mexique) a souligné l'indivisibilité et l'interdépendance de tous les droits de l'homme et a insisté sur la nécessité d'éliminer la discrimination et les inégalités entre les sexes pour assurer que les droits économiques, sociaux et culturels deviennent une réalité pour tous. Il s'est déclaré convaincu qu'il fallait se doter de bases fermes qui reconnaissent le droit des femmes à la propriété et aux ressources. C'est pourquoi le Mexique présentera un projet de résolution dans ce sens à la Commission. Le représentant a ensuite présenté la politique d'«économie à visage humain» adoptée par son pays dans le cadre du programme «oportunidades» qui s'efforce de jeter les bases du développement social pour les familles les plus pauvres, notamment en améliorant la qualité de l'éducation, en favorisant l'alphabétisation des adultes, en améliorant le fonctionnement des services sociaux de base, y compris la nutrition de la femme. Il a précisé qu'en outre, la stratégie de réduction de pauvreté mise en œuvre par le Mexique s'appuyait sur la participation de tous les groupes dans l'élaboration, la mise en œuvre et l'évaluation de tous les programmes. Il a déclaré que son pays veillait au respect de l'obligation redditionnelle et à l'élaboration de mécanismes de contrôle d'exécution des programmes. Au plan international, le représentant mexicain s'est déclaré favorable à l'adoption d'un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui permettrait au Comité de recevoir des communications individuelles. Contrairement à certains, il a estimé que la reconnaissance que la réalisation des économiques et sociaux pouvait être progressive ne constituait pas un obstacle à l'adoption d'un tel protocole.
M. Sverre BERGH JOHANSEN (Norvège) a fait observer que le manque de droits économiques et sociaux est étroitement lié à la pauvreté et que le manque de droits et de libertés politiques est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté. Les individus socialement et politiquement exclus sont davantage susceptibles de devenir pauvres et les pauvres sont davantage vulnérables à la marginalisation sociale et politique. S'il est un fait que la plupart des droits économiques, sociaux et culturels doivent être réalisés progressivement, cela ne signifie pas qu'ils doivent faire l'objet d'un engagement moindre, a souligné le représentant. Rappelant que de nombreux pays se débattent avec des conflits, la pauvreté et nombre de défis en matière de développement, il a souligné que leur situation devient souvent encore plus compliquée du fait des effets dévastateurs de l'épidémie de VIH/sida. Le traitement de ces problèmes est une responsabilité qu'il convient d'assumer ensemble, a affirmé le représentant. Il a formulé l'espoir que les travaux au sein du Groupe de travail sur un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels se traduiraient par un instrument susceptible de favoriser la promotion et la protection des droits de l'homme.
MME POLLY IOANNOU (Chypre) a déclaré que la promotion et la protection des droits économiques, sociaux et culturels a toujours été au cœur des préoccupations du Gouvernement de la République de Chypre. Cependant, cette politique a été freinée par la destruction prolongée et systématique de l'héritage culturel dans la partie nord de l'île, soit 37% du territoire occupé par les troupes turques. Depuis l'invasion de 1974, la Turquie a appliqué une politique préméditée de modification du caractère démographique, culturel, religieux et ethnique de la région qu'elle occupe. En violation totale des résolutions pertinentes des Nations Unies, le patrimoine continue d'être pillé, détruit et exporté illégalement. Les appels de la communauté internationale sont restés sans réponse et Chypre en appelle une fois de plus à ce que tout soit fait pour sauver ces manifestations uniques de la civilisation.
M. Jean-Daniel VIGNY (Suisse) s'est félicité de l'approche adoptée par le Rapporteur spécial sur le droit à la santé et s'est déclaré convaincu que ce mandat permettra de faire des avancées considérables dans l'identification et la mise en œuvre de mesures pratiques et concrètes pour lutter contre le VIH/sida. Dans ce cadre, il s'est réjoui de l'engagement de certains responsables de l'industrie pharmaceutique, notamment suisses, d'améliorer l'accès aux médicaments en pratiquant des politiques de prix différenciés. Il a espéré que l'ensemble du secteur s'engagera dans cette voie. Il a réaffirmé que son pays continuera de s'engager en faveur des procédures spéciales de la Commission et de toute initiative permettant de faire progresser une meilleure compréhension et application des droits économiques, sociaux et culturels de manière objective, consensuelle et non polémique. Il a fait part du soutien de sa délégation à la création du groupe de travail intergouvernementale visant à l'établissement de lignes directrices volontaires pour aider les États à réaliser le droit à l'alimentation. Il a espéré que tous les États, ainsi que le Haut Commissariat, feront bénéficier ce groupe de travail de leur expertise. En conclusion, en vue d'assurer une meilleure réalisation de tous les droits économiques, sociaux et culturels, le représentant suisse s'est déclaré favorable à une meilleure coopération entre les rapporteurs spéciaux de la Commission chargés d'études dans ce domaine et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels.
M. Khalil A. KHALIL(Iraq) a déclaré qu'après l'agression de 1991 contre son pays et suite à l'embargo qui l'a frappé pendant douze année, plus de 2 millions de personnes ont péri en Iraq. Pendant douze ans, les gouvernements des États-Unis et du Royaume-Uni n'ont pas cessé leur agression contre le peuple iraquien et, depuis quelques semaines, ces pays sont venus détruire les infrastructures de l'Iraq tout en poursuivant leur agression contre la population. Des milliers de personnes ont été blessées du fait de ces agressions perpétrées contre le peuple iraquien et son droit à l'autodétermination. L'agression contre la civilisation de Mésopotamie est extrêmement grave, a insisté le représentant iraquien. Il en va de la responsabilité de la communauté internationale de ne pas rester silencieuse face à ce qui se produit actuellement dans le pays.
MME HELENA NYGREN KRUG (Organisation mondiale de la santé), a déclaré que l'OMS est déterminée à atteindre les Objectifs de développement pour le millénaire. La santé est un des moyens de réduire la pauvreté et d'atteindre le développement durable. L'accès aux médicaments est l'un des éléments les plus importants des soins de santé et déterminant pour la réalisation du droit à la santé. Un tiers de la population mondiale n'a pas accès aux médicaments de base. De nombreux progrès sont en train de bouleverser les soins de santé. L'OMS et ses partenaires sont préoccupés des relations complexes entre propriété intellectuelle, innovation et santé publique. Le droit fondamental à la santé doit rester au centre de ce dispositif. La santé ne connaît pas de frontières et
le droit à la santé dépend de tous les autres droits humains, qu'il s'agisse des droits civils et politiques, de la liberté d'information ou encore de l'égalité de tous, notamment entre hommes et femmes. L'OMS est en outre très préoccupée, du point de vue des droits de l'homme, par l'évolution de la pandémie du VIH/sida, le traitement de la santé mentale et les problèmes de violence.
M. RAFAEL OLAYA (Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge) a rappelé que, cette année, le Conseil économique et social des Nations Unies a choisi pour thème principal de son segment humanitaire le passage du secours humanitaire au développement. Fondant son propos sur les nombreux exemples recueillis par la Fédération en Afghanistan, en Angola, à Timor-Leste et à Sri Lanka, il a expliqué que cette transition devait s'appuyer sur le renforcement des capacités locales. Pour ce faire, a-t-il poursuivi, les programmes doivent prendre en considération les droits économiques, sociaux et culturels et la dignité humaine, qui constituera le thème principal de la Conférence internationale de la Fédération qui se tiendra à Genève en décembre 2003. Il a ensuite mis l'accent sur divers éléments qui peuvent contribuer à un passage efficace du secours au développement tels que le Sommet mondial sur la société de l'information. Toutefois, il a estimé que cette transition ne saurait réussir sans que des ressources soient allouées à la lutte contre le VIH/sida ou sans le renforcement des capacités locales, y compris celles de la société civile. Dans ce contexte, il s'est félicité de la déclaration adoptée par le troisième Forum mondial sur l'eau et a déclaré que la Fédération s'emploierait, pour sa part, à réduire la vulnérabilité des individus et des communautés en coopération avec les organisations de développement locales, nationales et internationales.
MME ANNA KAJUMULO TIBAIJUKA (Programme des Nations unies pour les établissements humains - HABITAT) a rappelé que, selon son organisation, près de 900 millions de personnes dans les pays en développement vivent dans la pauvreté sans disposer en toute sécurité d'un toit. S'il est vrai que construire de nouveaux logements et améliorer le parc de logements existant constituent des préalables à la réalisation des droits en matière de logement, les questions de l'égalité d'accès à un logement adéquat, de l'égalité d'accès à des ressources en matière de logement ainsi que la lutte contre le phénomène des sans-abri et la recherche d'alternatives aux expulsions forcées constituent autant d'éléments cruciaux pour la réalisation du principe d'un abri adéquat pour tous. La représentant d'Habitat a par ailleurs rappelé que la violation des droits fonciers ainsi que des droits de propriété et de logement des femmes reste répandue. La pandémie du VIH/sida exacerbe ce problème dans la mesure où les femmes et les enfants survivants sont souvent privés de leurs foyers et de leurs terres par les autres membres de la famille. De l'avis d'Habitat, il est essentiel que le mandat du Rapporteur spécial sur le droit à un logement adéquat soit prolongé.
M. ELWYN GRAINGER-JONES (Banque mondiale) a déclaré que la Banque avait pour mission de lutter contre la pauvreté et que, dans ce contexte, il convenait de se demander ce que les droits de l'homme en général apportent au processus de prise de décision politique, de même pour les droits spécifiques tels que le droit à la santé ou à l'éducation. D'autre part, il convient de consacrer assez de temps et d'attention aux réformes et aux politiques nécessaires à l'amélioration des systèmes d'aide aux groupes les plus pauvres. Si la démarche prend en compte, outre l'accès aux services, leur efficacité et leur durabilité, les défis augmentent en proportion, mais la probabilité d'un succès durable également.
M. DIARMUID MARTIN (Saint-Siège) a souligné que toute approche de réduction de la pauvreté doit se fonder sur les droits de l'homme, ce qui suppose l'adoption de politiques qui considèrent que les individus sont responsables de leur vie. Dans ce contexte, il a dénoncé les pratiques qui empêchent les femmes de jouer un rôle actif dans la société et a insisté pour qu'elles reçoivent une protection égale en droit. Estimant que l'extrême pauvreté est un affront à la dignité humaine, il a recommandé que toute approche de réduction de la pauvreté fondée sur les droits de l'homme insiste sur la responsabilité des États. Les États doivent non seulement veiller au respect des besoins fondamentaux de leur population, mais aussi adopter des politiques qui renforcent les capacités humaines, a-t-il précisé. Pour ce faire, les populations pauvres doivent avoir la possibilité de participer à la prise de décision dans les domaines qui les concernent, car le fait d'être pauvre n'enlève rien à leur humanité, a-t-il insisté. De la même manière, les programmes internationaux, notamment dans le domaine de la réduction de la dette, ne doivent plus ignorer les savoirs locaux. Il est regrettable que les politiques en faveur des pauvres aient trop souvent omis de faire appel à la créativité des personnes vivant dans la pauvreté. C'est une erreur à laquelle il importe de remédier, a-t-il estimé. En dernier lieu, le représentant a appelé l'attention sur la tragédie du VIH/sida, notamment en Afrique, et a estimé que là encore, l'accent devait être mis sur l'humain. Ainsi, la lutte contre la pauvreté passe aussi par la lutte contre la stigmatisation des personnes vivant avec le sida. Elle implique la lutte contre toutes les formes de discrimination qui portent atteinte à la dignité humaine, s'est-il exclamé.
MME ODILE SORGHO MOULINIER (Programme des Nations Unies pour le développement, PNUD) a rappelé que le respect de ses droits fait de l'être humain un meilleur acteur économique. Elle a rappelé que le Secrétaire général des Nations Unies a confié à l'Administrateur du PNUD la responsabilité de coordonner, en sa qualité de Président du Groupe de travail des Nations Unies pour le développement, la campagne relative aux Objectifs du millénaire pour le développement ainsi que les activités de suivi au niveau national. Pour le PNUD; cela implique une action à quatre niveaux: faciliter l'intégration des Objectifs du millénaire pour le développement dans tous les aspects de l'action du système des Nations Unies dans chaque pays conformément aux priorités qu'ils ont eux-mêmes fixées; aider les pays en développement à établir leurs rapports de suivi des Objectifs du millénaire; promouvoir le projet de recherche des Nations Unies pour le millénaire; et mettre en œuvre une stratégie de campagnes de sensibilisation associant en particulier la société civile et l'ensemble des partenaires de la communauté internationale. La dignité et la valeur de la personne humaine seront au centre de toutes ces activités, a souligné la représentante du PNUD.
Mme Aisha M.S. AL-ADSANI(Koweït) a déclaré que la Constitution de son pays prévoyait le droit à l'éducation pour tous les Koweïtiens. L'éducation est donc obligatoire et gratuite au Koweït, l'État étant tenu d'assurer les conditions matérielles de la réalisation du droit à l'éducation. Le pays a lutté avec succès contre l'analphabétisme, qui est tombé à 4% pour les hommes et 12% pour les femmes, a fait valoir le représentant, qui a ajouté que ces résultats ont été salués par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation et la science et la culture (Unesco). Des efforts ont également été déployés en faveur des handicapés, avec tout un train de mesures, et notamment des écoles spéciales à leur intention. Les efforts du Koweït dans ce domaine ont été reconnus au niveau international, et également salués par l'Unesco. La représentante koweïtienne a en outre souligné qu'en ce qui concerne la redistribution des ressources, le Koweït se place en tête des pays arabes en termes de développement humain.
M. IERO CALVI-PARISETTI (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture - FAO) a rappelé que les Chefs d'État et de gouvernements avaient réaffirmé, lors du Sommet mondial sur l'alimentation qui s'est tenu à Rome en juin 2002, «le droit de toute personne d'avoir accès à une alimentation saine et nutritive» et invité la FAO à établir un groupe de travail intergouvernemental, notamment pour définir un ensemble de principes directeurs visant à soutenir les efforts des États membres pour réaliser ce droit. Ce groupe de travail a été formellement mis en place en novembre 2002 et a tenu sa première session en mars 2003. Au cours de cette première session, il a tenu un débat général qui a permis aux États comme aux participants non étatiques de contribuer sur un pied d'égalité à un échange de vues constructif. Le Groupe de travail a chargé son bureau d'établir un premier projet de directives volontaires pour sa deuxième session, prévue en septembre 2003. Le Secrétariat de la FAO travaille en outre étroitement avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme pour soutenir le Groupe de travail et a également impliqué les institutions des Nations Unies basées à Rome, telles que le Programme alimentaire mondial notamment. Le représentant a souhaité que la Commission des droits de l'homme poursuive son appui au travail en cours à la FAO en faveur d'une meilleure application et réalisation du droit à une alimentation saine et adéquate en tant qu'outil pour atteindre les objectifs du Sommet mondial pour l'alimentation ainsi que les objectifs de développement du Millénaire.
M. Ali Saleh ABDULLAH (Yémen) a fait état des grands progrès réalisés par son pays dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels, précisant que ces droits font l'objet de textes législatifs au Yémen. La décentralisation et l'octroi d'une grande autonomie aux provinces ont permis à celles-ci d'élaborer des politiques de développement qui leur soient propres. Le Yémen est déterminé à lutter contre la pauvreté, qui constitue l'une des pires formes de violation des droits de l'homme. Une attention particulière a été apportée dans le pays aux questions des ressources humaines, de l'éducation, de la santé et de la sécurité sociale, a précisé le représentant yéménite. Le Gouvernement a adopté une stratégie globale de lutte contre la pauvreté pour la période 2000-2005, et le pays cherche à promouvoir les investissements dans certains secteurs. L'enseignement est obligatoire au Yémen et le pays se concentre en particulier sur la promotion de l'éducation des femmes, a souligné le représentant.
MME Kerstin HOLST (Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture) a rappelé que tous les droits sont interdépendants. L'Unesco est chargée en particulier de défendre les droits culturels, et approuve la désignation d'un mécanisme de la Commission chargé d'examiner la question du respect des droits culturels de chacun et la garantie du maintien de leur diversité. L'Unesco élabore de son côté une stratégie d'enseignement des droits de l'homme, et mène des études dans ce domaine. La représentante a souligné que les droits économiques, sociaux et culturels sont trop souvent négligés, et qu'il faut identifier les obstacles à la réalisation de ces droits. Le droit à l'éducation est déterminant pour la réalisation de toute une série d'autres droits. Dans le même ordre d'idée, il faut insister sur l'éducation aux droits de l'homme, car ces droits ne peuvent être appliqués si leur contenu et les modalités de leur application ne sont pas connus. C'est pourquoi l'Organisation est très impliquée dans la mise en application du Plan d'action de la décennie des Nations Unies pour l'éducation aux droits de l'homme, notamment par l'examen des lois et pratiques des pays afin de promouvoir l'intégration des normes des droits de l'homme dans les plans d'action nationaux.
M. Milorad SCEPANOVIC (Serbie-et-Monténégro) a souligné que la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels vise à assurer aux personnes des conditions de vie qui respecte la dignité humaine et permettent le plein développement de l'être humain. En dépit de progrès manifestes, la Serbie-et-Monténégro demeure confrontée à de grandes difficultés dans la mise en en œuvre du processus de transition démocratique. Le représentant a indiqué que son pays considère l'application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels comme particulièrement important et souligné à cet effet que la Serbie-Monténégro compte sur la coopération internationale pour l'aider dans ses efforts pour appliquer les dispositions du Pacte. Il a également réaffirmé l'importance du rôle des institutions des Nations Unies dans le soutien qu'elles apportent à ces efforts. Il a fait observer que le Ministère des droits de l'homme et des minorités, récemment institué, permettra au Gouvernement de mieux coordonner son action avec les institutions internationales et de mieux s'acquitter ainsi de ses obligations en vertu des instruments internationaux.
MME IHAM KHALIL (Égypte) a rappelé que son pays a consacré dans sa Constitution le principe de l'obligation de l'État à œuvrer à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Elle a salué les efforts déployés par la Commission pour protéger les droits de l'homme en général et les droits économiques, sociaux et culturels en particulier. L'Égypte est d'avis que les pays devraient s'abstenir de prendre des mesures qui, tels les embargos alimentaires, pourraient avoir des effets néfastes sur la jouissance du droit à l'alimentation à travers le monde. La représentante égyptienne a plaidé en faveur de l'élaboration rapide d'un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels afin de créer un mécanisme de plaintes. Par ailleurs, elle a estimé qu'il fallait accorder aux pays qui en ont besoin un traitement préférentiel afin de respecter le principe de l'équité qui est essentiel dans le contexte des droits de l'homme.
M. Charles T. NTWAAGAE(Botswana) a engagé des mesures pour réexaminer de façon permanente les politiques, les procédures et la législation dans le but d'y incorporer les droits garantis par les instruments internationaux auxquels le Botswana est partie.. De grands investissements ont ainsi été consentis les secteurs de l'éducation, du logement, de l'agriculture et de l'infrastructure sociale en général. Des mesures spéciales sont aussi prises pour faciliter la vie et faire respecter les droits des personnes handicapées. Le grand défi qui menace les efforts de développement du Botswana reste cependant le VIH/sida. Parmi les mesures prises pour contenir ses effets, il faut mentionner la mise à disposition de thérapies ARV et la prévention de la transmission du sida de la mère à l'enfant. Enfin, les résolutions prises lors des grandes conférences sur le développement devraient être effectivement appliquées; pour ce faire, des mécanismes de surveillance et de suivi devraient être mis en place par les Nations Unies, a suggéré le représentant botswanais.
MME Badarch SUVD (Mongolie) a indiqué que son pays a pris des mesures systématiques pour protéger et promouvoir les droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a deux ans, une Commission nationale indépendante des droits de l'homme a été instituée et de nouvelles lois ont été adoptées en la matière. Toutefois, la transition de la Mongolie à l'économie de marché, ainsi que les effets de la mondialisation, se sont révélés douloureux sur le plan des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier en ce qui concerne la persistance de la pauvreté et du chômage. Évoquant le programme du gouvernement de réduire de 25% la pauvreté d'ici 2005 ainsi que ses différents programmes de rétablissement économique, de promotion du développement durable, de la primauté du droit, de la santé, de l'éducation et de l'emploi, la représentante a toutefois souligné que la coopération internationale joue un rôle essentiel pour aider les pays en développement ou en transition à mettre en œuvre leur politiques de développement et ainsi permettre la pleine réalisation des droits économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement.
M. SEDERMAN (Commission internationale de juristes, au nom également de Amnesty International) a demandé que le mandat du Groupe de travail chargé d'élaborer un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels tienne compte des analyses conceptuelles déjà existantes concernant un projet de protocole instaurant un mécanisme de plainte, et qui émanent d'une grande variété de sources : jurisprudences nationales, régionales et internationale des organes ayant des procédures liées aux violations des droits économiques, sociaux et culturels; conférences et instruments nationaux et internationaux ayant clarifié la nature et la portée de ces droits; commentaires généraux et autres documents émanant du Comité des droits économiques, sociaux et culturels; projet de protocole élaboré par ce même Comité; expériences des rapporteurs spéciaux dont les mandats relèvent des droits économiques, sociaux et culturels…).
MME MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ (Fédération des femmes cubaines, au nom également de la Fédération démocratique internationale des femmes) a déclaré que les femmes étaient les plus touchées par les politiques d'ajustement structurel, politiques qui les privent de tous leurs droits : à la vie, à l'alimentation, à la dignité, à l'éducation. La mondialisation est un échec, la croissance de la pauvreté est effrayante avec des taux qui peuvent atteindre 70% en Amérique latine. Les pays développés se nourrissent de la misère des autres, a dénoncé la représentante. D'ailleurs même dans ces pays, certaines catégories des populations sont totalement défavorisées, par exemple aux États-Unis, où 30 millions de citoyens vivent dans des conditions de pauvreté extrême. Ces pays, plutôt que de dénoncer les pays en voie de développement devant la Commission, devraient traiter les maux dont ils souffrent. Aussi longtemps qu'il y aura des gendarmes et des personnes prêtes à les suivre, et un développement inégal, il n'y aura pas d'impartialité ni de participation équitable dans les décisions des Nations Unies.
MME BIRTE SCHOLZ (Centre on Housing Rights and Evictions - COHRE, au nom également de Grassroots Organization Operating Together in Sisterhood - GROOTS) a indiqué au 70% des habitants de la planète ne sont pas logés convenablement, surtout les femmes déplacées ou qui perdent leur logement à cause d'expulsions. Les besoins des femmes sont placés sous silence et la pauvreté est ainsi féminisée, a souligné la représentante. Un logement convenable est une composante intégrale du bien-être des femmes, a-t-elle ajouté. Demandant à la communauté internationale et aux États d'agir pour permettre aux femmes d'avoir accès à la propriété de logements convenables. Leurs droits doivent être protégés et promus tandis que les pratiques patriarcales et archaïques doivent être abolies. La représentante a exhorté la Commission à s'assurer que les États respectent leurs obligations internationales en garantissant les droits des femmes à un logement convenable, à la propriété et à la terre, et ainsi à l'égalité sans discrimination, au bien-être et à la dignité.
MME TINA CAAMBA (Fédération internationale des femmes diplômées des universités, au nom également d'autres organisations) a attiré l'attention de la Commission sur le rapport du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) pour 2002 qui met l'accent sur la pauvreté des femmes et la nécessité de se pencher sur les droits des femmes en matière de santé génésique. Rappelant qu'un tiers des foyers à travers le monde sont dirigés par des femmes, la représentante a fait observer que la moitié de ces foyers appartiennent aux groupes les plus pauvres des sociétés. Aucune société ne peut se prétendre démocratique si elle empêche les femmes de participer à la construction de l'avenir de la société dans laquelle elles vivent. La représentante a remercié l'Union européenne et le Bangladesh pour avoir fait de l'égalité des femmes l'une de leurs plus hautes priorités.
M. THIERRY VIARD (Mouvement international ATD quart monde, au nom également du Conseil international des femmes et de la Fédération internationale des assistants sociaux et des assistantes sociales) a déclaré que les pauvres essaient chaque jour de transformer par eux-mêmes leur situation, avec d'autres citoyens qui s'engagent à leurs côtés. Que ce soit en Europe du Sud, où des habitants menacés dans leur droit au logement se sont mobilisés en faisant circuler une pétition et ont obtenu gain de cause auprès des autorités, ou en Afrique de l'Est, où une communauté rurale s'engage avec les familles les plus défavorisées pour alléger leur fardeau tout en suscitant un accord autour de la priorité à accorder aux pauvres. Sur le plan régional et national, les travaux de la Commission et du Haut-Commissariat aux droits de l'homme commencent à inspirer des initiatives, dont le dernier exemple est une loi récente adoptée par le Québec qui donne une base juridique à une approche qui fait référence à l'ensemble des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. L'expérience a montré que pour qu'il y ait des progrès durables en matière de lutte contre l'extrême pauvreté et l'exclusion sociale, il est nécessaire d'entreprendre des politiques fondées sur l'ensemble des droits fondamentaux. ATD-Quart-Monde demande donc à la Commission de poursuivre son travail pionnier dans ce domaine et de donner suite à la résolution 55/106 de l'Assemblée générale, en étudiant prioritairement les moyens concrets de réaliser un partenariat avec les plus pauvres, entre autres initiatives.
MME TINAROSE CAMBA (Human Rights Advocates, Inc., au nom également de Earthjustice et de International Human Rights Law Group) a souligné qu'il est indispensable que les États prennent des mesures pour contrôler les activités des entreprises multinationales, en particulier en ce qui concerne les activités de transport ou de traitement des déchets toxiques. À cet égard, elle a mis l'accent sur les effets néfastes du retraitement de déchets dans des pays n'ayant pas les capacités techniques adéquates, sur la santé des habitants. Elle a cité l'exemple de la pollution au plomb dans la province de Guiyu en Chine où sont détruits des vieux ordinateurs provenant des États-Unis. La représentante a également dénoncé les mouvements de certaines industries vers des pays où les responsables de la production de déchets peuvent échapper à leur obligation de nettoyage. Elle a cité un exemple au Mexique où le propriétaire américain d'une entreprise coupable de grave pollution de l'environnement a pu passer la frontière sans être inquiété.
Soulignant le rôle des multinationales à travers la privatisation de services de base tels que l'eau, la représentante a mis en garde contre les effets de ces privatisations sur l'accès des populations à ces services de base. Elle a souligné que les accords de libre-échange ainsi que les politiques d'ajustement structurel ne doivent pas entraver la capacité des États à assurer la pleine réalisation des droits de l'homme, en particulier le droit à la vie, à la santé et à un environnement sain.
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