CS/2248

LE CONSEIL EST SAISI DE PROPOSITIONS SUR LE RENFORCEMENT DE LA COOPERATION ENTRE L'ONU ET L'OUA EN MATIERE DE MAINTIEN ET DE CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE

29/01/2002
Communiqué de presse
CS/2248


Conseil de sécurité

4460 séance – matin/après-midi


LE CONSEIL EST SAISI DE PROPOSITIONS SUR LE RENFORCEMENT DE LA COOPERATION ENTRE L'ONU ET L'OUA EN MATIERE DE MAINTIEN ET DE CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE


L'Afrique est prise au piège de la pauvreté, des maladies, des conflits, de la pandémie du VIH/sida et par une multitude d'autres problèmes qui sont autant de preuves du défi considérable que doit relever le continent.  Ce diagnostic sévère a été posé par le Ministre des affaires étrangères de Maurice qui, en sa qualité de Président du Conseil de sécurité pour le mois de janvier, a convoqué, ce matin, une réunion publique sur la situation en Afrique.  Confirmant l'émergence de nouveaux dirigeants africains dotés de détermination et de courage politique devant la vérité et la réalité africaines "quelle que soit leur cruauté", le Ministre mauricien des affaires étrangères a invité les délégations à répondre à des questions essentielles* portant notamment sur le niveau d'engagement du Conseil en faveur des questions africaines et sur la différence de perception entre le Conseil et l'Organisation de l'unité africaine (OUA).  Le Secrétaire général de l'OUA, M. Amara Essy, la Vice-Secrétaire générale de l'ONU, Mme Louise Fréchette, et 39 autres délégations dont certaines étaient également représentées au niveau ministériel ont répondu à l'invitation du Président du Conseil.


A la première question, les membres du Conseil ont répondu en invoquant la multiplication de leurs initiatives, qui témoigne de leur volonté résolue de maintenir l'Afrique au coeur des priorités.  Ils ont laissé la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies mettre l'accent sur le renforcement considérable de la coopération entre l'ONU et les différentes organisations africaines, en particulier en Afrique de l'Ouest, et dans la région des Grands Lacs.  Illustrée par la création du Bureau du Représentant spécial en Afrique de l'Ouest, en décembre 2001, et par la coopération accrue avec la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), cette évolution des choses a été confirmée par le Secrétaire général de l'OUA qui a néanmoins jugé utile d'établir plus précisément les modalités du partenariat entre l'ONU, l'OUA et les organisations sous-régionales pour, a-t-il dit, assurer l'harmonisation et la coordination des actions sous-régionales, régionales et internationales.   Il existe des cas, a convenu, à ce propos, le représentant des Etats-Unis, où le Conseil, les Etats africains et les organisations du continent veulent désigner clairement les responsabilités et lorsqu'il se départit, à juste titre, de son impartialité devant la mauvaise foi d'une des parties au conflit, le Conseil doit pouvoir bénéficier de l'appui des gouvernements africains et des organisations régionales. 


Dans le cadre de la coopération entre le Conseil et les organismes africains, le Secrétaire général de l'OUA a proposé la mise en place d'un mécanisme de consultations entre le Conseil de sécurité et l'organe central de l'OUA.  Plusieurs délégations ont abondé dans ce sens, notamment le Ministre mauricien des affaires étrangères lui-même qui a suggéré la création d'un groupe de travail au sein du Conseil "pour rechercher de nouveaux moyens d'améliorer les


relations entre l'ONU et l'OUA".  A l'instar de ce dernier, les autres délégations africaines n'ont eu de cesse de convaincre la communauté internationale de la ferme résolution des dirigeants du continent d'assumer leur responsabilité en matière de paix, de sécurité et de développement du continent. 


C'est dans ce contexte que le Secrétaire général de l'OUA a fait part des efforts visant à renforcer le Mécanisme de l'OUA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits, au titre desquels certaines délégations ont appelé, compte tenu de sa dimension internationale, à une action vigoureuse contre les moteurs des conflits que sont les trafics illicites des armes légères et des ressources naturelles.  Concernant le commerce illégal des ressources naturelles, la Sous-Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères du Royaume-Uni a préconisé une aide plus soutenue du G-8; le représentant de la France proposant, pour sa part, la création, au sein du Conseil, d'un mécanisme permanent de suivi de la mise en oeuvre des embargos.  S'attardant plus particulièrement, aux côtés du représentant de la Sierra Leone, sur l'importance des processus de désarmement et de démobilisation, le Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo a lancé l’idée de créer une commission internationale d'enquête chargée d'enquêter sur les groupes armés et un mécanisme de surveillance le long des frontières communes entre son pays et le Burundi.


Le Secrétaire général de l'OUA a également fait part des efforts visant la transformation de l'OUA en Union africaine qui, a-t-il dit, ne sera pas une OUA bis mais témoignera d'une volonté renouvelée d'intégration des Etats africains, gage de la consolidation de la paix.  A cet égard, il a attiré l'attention du Conseil sur le Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) lancé en 2001 et qui, définissant la démocratie et l'état de droit comme préalable à toute perspective de paix, de stabilité et de prospérité économique, a pour objectif de jeter les bases d'une nouvelle coopération entre l'Afrique et le monde développé.  Le Haut Représentant de l'Union européenne pour la politique extérieure, présenté par le représentant de l’Espagne au nom de l’Union européenne et des pays associés, a accueilli ce Nouveau Partenariat comme la somme des objectifs communs de l'Afrique et de l'Europe.  Appuyée, pour sa part, par de nombreuses délégations, la Ministre des affaires étrangères de la Guinée a proposé la création, au sein du Conseil, d'un groupe de travail de haut niveau chargé d'élaborer une stratégie globale intégrée portant sur un plan d'action multisectoriel.


Outre les orateurs cités, les Ministres et Vice-Ministres des pays suivants ont pris la parole : Irlande, Norvège, Algérie, Sénégal, Zambie, Mozambique, Angola, Maroc, Afrique du Sud, ainsi que les représentants des pays suivants : Mexique, Colombie, Chine, Fédération de Russie, Bulgarie, Cameroun, Syrie, Egypte, Espagne, Tunisie, Bangladesh, Cuba, Côte d'Ivoire, Japon, Nigéria et Canada.


Le Conseil de sécurité poursuivra ce débat, demain jeudi 30 janvier à 16 heures.


* Lettre datée du 10 janvier 2002, adressée au Président du Conseil de sécurité

LA SITUATION EN AFRIQUE


Informations de base


La réunion tenue aujourd'hui par le Conseil de sécurité doit être perçue comme le suivi d'une initiative lancée le 25 septembre 1997 par la Présidence du Conseil, assumée, ce jour-là, par la Secrétaire d'Etat des Etats-Unis, Mme Madeleine Albright.  Ainsi, en présence du Président du Zimbabwe, en sa qualité de Président de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), du Secrétaire général de l'ONU, du Secrétaire général de l'OUA, et des ministres des affaires étrangères des autres pays membres du Conseil, une déclaration présidentielle avait été rendue publique qui considérait que les défis auxquels est confrontée l'Afrique exigent une réponse globale et dans ce cadre, demandait au Secrétaire général de présenter des recommandations concrètes sur la manière de poser les fondements d'une paix et d'une croissance économique durables dans ce continent.


Ce fut chose faite, le 16 avril 1998, jour où, présentant son rapport intitulé "les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique" (S/1998/318), Kofi Annan rappela qu'en 1996 seulement, 14 pays africains sur 53 ont été affectés par les conflits armés.  Son rapport présentait une analyse les sources des conflits, les différents modes d'intervention dont dispose la communauté internationale, les impératifs d'une paix durable, de la croissance économique et du développement durable.  Selon Kofi Annan, les progrès en la matière dépendent de trois facteurs essentiels à savoir une compréhension claire du défi, la volonté politique d'y répondre et les ressources nécessaires à une réponse appropriée.  En raison de l'importance et de l'ampleur des questions abordées, le rapport a été examiné, outre le Conseil de sécurité, par l'Assemblée générale et le Conseil économique et social; les deux premiers organes créant d'ailleurs des groupes de travail pour étudier plus avant les recommandations du Secrétaire général.


Parmi les évènements marquants qui ont suivi la parution de ce rapport, il faut noter l'adoption par le Conseil, le 18 septembre 1998, de la résolution 1197 qui appelle à la création d'un système d'alerte rapide favorisant la prévention des conflits au sein de l'OUA, à l'amélioration des échanges d'informations entre l'ONU et l'OUA et, dans ce cadre, à la mise au point d'indicateurs communs d'alerte rapide.  Un an plus tard, soit le 29 septembre 1999, le Conseil examinait, au niveau ministériel, le rapport d'étape du Secrétaire général (S/1998/1008) sur l'application des recommandations de son premier rapport.  A cette occasion, Kofi Annan déclarait que "l'afropessimisme et la lassitude face aux problèmes de l'Afrique est un affront à l'idée même d'une communauté internationale responsable".  Le 15 décembre 1999, le Conseil revenait sur la question de la coopération entre l'OUA et l'ONU dans un débat où la question de l'amélioration de cette coopération et celle des instruments à mettre en place pour résoudre et prévenir les conflits en Afrique sont posées.


Le 18 janvier 2000, le Vice-Président américain d'alors, M. Al Gore, est venu exprimer le vœu de son pays de consacrer le mois de janvier "Mois de l'Afrique" dans un débat consacré à l'impact du sida sur la paix et la sécurité en Afrique.  Ainsi, au cours de ce mois de janvier, outre les divers conflits en Afrique, le Conseil a examiné des questions telles que l'assistance humanitaire aux réfugiés, la prolifération des armes légères ou encore l'implication des enfants dans les conflits armés.


Déclarations


Mme LOUISE FRECHETTE, Vice-Secrétaire générale, a déclaré que le Conseil de sécurité devait profiter de la présence de M. Amara Essy, Secrétaire général de l’Organisation de l’unité africaine/Union africaine, pour envisager de renforcer davantage les relations entre les Nations Unies, l’OUA et les organisations sous-régionales.  Elle a noté que les consultations et la coopération entre l’ONU et les différentes organisations africaines avaient considérablement augmenté ces dernières années, en particulier en Afrique de l’Ouest et dans la région des Grands Lacs.  Avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en particulier, a-t-elle fait observer, l’ONU a travaillé sur les questions de sécurité concernant le bassin du fleuve Mano.  Elle a souligné que l’ONU devait oeuvrer en étroite coopération avec ces organisations pour développer des approches communes afin de prévenir les conflits et maintenir la paix.  Elle a déclaré qu’il fallait envisager de renforcer la coopération non seulement sur le plan politique mais également pour tout un éventail de questions, comme le VIH/sida et le développement économique et social.  Mme Fréchette a émis l’espoir que la création d’un bureau des Nations Unies en Afrique de l’Ouest et l’idée de tenir une conférence internationale sur la situation dans la région des Grands lacs pourraient améliorer les liens entre les institutions, tout en mettant en garde contre l’absence de volonté politique.


La Vice-Secrétaire générale a jugé qu’il fallait également aider les pays africains à renforcer leurs propres capacités logistiques, en particulier dans le domaine du maintien de la paix, et elle a insisté sur le manque de formation, de ressources et d’équipement qui empêche l’OUA et les organisations sous-régionales en Afrique d’avoir un plus grand rôle à cet égard.  Elle a mentionné certaines actions qu’a menées l’ONU pour rapprocher les Etats africains contributeurs de troupes et les pays donateurs.  Concernant les programmes de redressement des sociétés après les conflits, Mme Fréchette a reconnu que le manque d’intérêt pour cette question était souvent la source d’échec des processus de paix en Afrique.  Elle a également suggéré que les fonds nécessaires à la réconciliation nationale soient inclus dans le programme de financement des mandats des missions des Nations Unies. 


La Vice-Secrétaire générale a fait remarquer que les sanctions, pour la plupart limitées aux armes, avaient eu une efficacité réduite à cause de différents facteurs, notamment un manque de soutien politique, des frontières mal contrôlées ou un manque de ressources garantissant la mise en oeuvre efficace des sanctions.  Toutefois, a-t-elle ajouté, des progrès avaient été accomplis depuis la création par le Conseil de sécurité de comités d’experts chargés d’enquêter sur les violations.  Ces comités ont pu identifier des réseaux criminels impliqués dans la violation des sanctions.  Elle a noté qu’en Sierra Leone et en Angola, les ventes illicites de diamants étaient ainsi devenues plus difficiles et avaient empêché la capacité des groupes armés de défier la communauté internationale.  Elle a également fait allusion aux événements du 11 septembre, après lesquels la communauté internationale a montré une grande détermination à bloquer ceux qui utilisent les transactions commerciales et financières à des fins illégales et violentes.  Elle a émis l’espoir que le Conseil de sécurité profitera de cette volonté politique pour demander aux Etats de faire de la violation des embargos sur les armes un crime au regard de leur droit interne.  Enfin, la Vice-Secrétaire générale a déclaré que les événements du 11 septembre avaient montré à tous le danger que représentent les pays où les structures de gouvernement s’effondrent, et elle a souligné l’importance de ne pas laisser ces événements détourner notre attention des problèmes de l’Afrique.  Au contraire, a-t-elle conclu, le Conseil doit réfléchir davantage à ce qu’il peut faire pour renforcer les structures étatiques.


M. AMARA ESSY, Secrétaire général de l’Organisation de l’unité africaine (OUA)/Union africaine (UA), a insisté sur la part que l’OUA entend prendre dans la promotion de la paix et de la sécurité dans le monde en expliquant que l’Afrique a pris conscience de la nécessité d’intégrer ses efforts avec l’ONU et les autres organisations régionales.  Malgré les contraintes, le Mécanisme de l’OUA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits demeurent susceptible de concilier l’approche institutionnelle et l’approche pragmatique, a ajouté le Secrétaire général de l’OUA.  Pour lui, la rencontre d’aujourd’hui se tient à un moment critique où les conflits se distinguent par leur complexité.  La problématique de la paix et de la sécurité en Afrique se pose en termes différents que ceux prévus par la Charte de 1945.  Aujourd’hui, a précisé M. Essy, il s’agit de garantir la sécurité collective des Etats  mais aussi la sécurité globale des populations de phénomènes comme la grande criminalité ou la pandémie du VIH/sida.


Si l’ONU est la mieux indiquée pour régler les conflits en Afrique, les choses se compliquent lorsque des pays voisins des zones de conflits se départissent de leur obligation d’impartialité et deviennent partie prenante.  M. Essy a donc plaidé pour un renforcement du partenariat entre les Nations Unies et l’OUA lequel doit être étendu aux organisations sous-régionales.  Les modalités de ce partenariat, a-t-il ajouté, doivent viser l’harmonisation et la coordination des actions.  Pour asseoir ce partenariat, l’ONU doit intensifier sa coopération avec les organisations continentales et sous-régionales dont les actions sont coordonnées par l’OUA, a précisé le Secrétaire général de l’Organisation.  Par conséquent, il a suggéré la mise en place d’un mécanisme de consultations entre le Conseil et l’organe central de l’OUA. 


Il a poursuivi en soulignant que les efforts de restructuration de l’OUA, en particulier pour ce qui est de son Mécanisme de prévention des conflits, ne porteront des fruits que s’ils sont accompagnés d’une adhésion plus marquée de la communauté internationale dans le domaine du développement.  M. Essy a conclu sur la question de la transformation de l’OUA en Union africaine et sur le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).  En ce qui concerne le premier élément, il a indiqué que les projets de texte portant sur les organes prévus sont en cours de finalisation après consultations avec tous les acteurs dont l’Union européenne, perçue par l’Afrique, comme modèle d’intégration.  L’Union devrait être proclamée en juillet 2002 en Afrique du Sud, a annoncé M. Essy en précisant, une fois encore, que l’UA n’est pas une OUA bis mais bien l’instrument d’une avancée réelle sur la voie de l’unité africaine.


Mme VALERIE AMOS, Sous-Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères et au Commonwealth du Royaume-Uni, a déclaré que le Conseil de sécurité devrait adopter de nouvelles approches pour faire face à la nature changeante et diverse des violents conflits en Afrique.  En effet, la doctrine de maintien de la paix « classique » et la diplomatie en matière de conflit se sont révélés être des outils inefficaces pour traiter des conflits « asymétriques » et de plus en plus régionaux qui ont éclaté à partir de l’effondrement d’Etats où les distinctions entre les acteurs étatiques et non étatiques se sont estompées.  Dans de nombreux Etats africains, a-t-elle ajouté, les conflits régionaux et nationaux ont fini par faire partie de l’état normal des choses : les économies qui se retranchent derrière les symboles de l’Etat et de la souveraineté nationale, se sont construites grâce aux conflits, en en tirant profit et en les alimentant.  Il est nécessaire, a-t-elle déclaré, d’aider à transformer ces économies basées sur les conflits violents en des systèmes sains fondés sur la participation politique, sociale et économique, le respect des droits de l’homme et de la loi.  C’est une tâche énorme, a-t-elle reconnu, qui requiert à la fois un engagement politique pour fournir les ressources humaines et financières nécessaires, une adaptation des instruments et mécanismes à notre disposition, ainsi qu’une coordination précise du travail de différents acteurs et organisations, africains ou non, appartenant ou non aux Nations Unies.


La Sous-Secrétaire d’Etat a noté que d’importants progrès restaient à faire, en particulier pour améliorer la capacité de prévention des conflits de l’OUA et d’organisations sous régionales.  Pour ce faire, il faut renforcer la coopération dans le domaine des conflits entre ces organisations et les Nations Unies par le biais de consultations plus régulières, en procédant à un échange de l’information et en développant des projets communs.  C’est pourquoi, a déclaré Mme Amos, le Royaume-Uni a accueilli avec enthousiasme la proposition de Maurice d’établir un groupe de travail en vue d’améliorer les relations entre les Nations Unies et l’OUA.  La Sous-Secrétaire d’Etat a insisté sur la nécessité d’œuvrer en étroite coopération avec les organes africains pour renforcer leurs capacités en matière de prévention des conflits et de maintien de la paix, soulignant que c’était une façon d’encourager des solutions africaines aux conflits africains, un concept contenu dans le Nouveau partenariat pour le développement africain qui a été lancé récemment.


La Sous-Secrétaire d’Etat a également jugé que le G8 pouvait aider l’Afrique à atteindre ses buts en s’attaquant aux causes des conflits qui relèvent du domaine international comme les échanges commerciaux entre l’Occident et l’Afrique, l’exportation des petites armes et l’exploitation des ressources économiques par des acteurs extérieurs.  Nous devons également faire preuve de dialogue pour mobiliser les ressources financières et d’engagement pour améliorer le système de règlement des conflits des Nations Unies, a-t-elle déclaré, avant d’annoncer qu’au cours de la présidence du Conseil de sécurité par le Royaume-Uni, en juillet prochain, sa délégation donnera la priorité à l’Afrique.


MME LIZ O’DONNELL, Ministre des affaires étrangères de l’Irlande, s’est félicitée de la création du Nouveau partenariat pour l’Afrique et du rôle important joué par les Nations Unies en matière de consolidation, de maintien et de rétablissement de la paix.  Cependant, elle a appelé les pays africains à adopter les principes de la bonne gouvernance et la communauté internationale à favoriser l’intégration de l’Afrique dans l’économie mondiale.  Il faut également renforcer la coordination et la coopération entre les Nations Unies, l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et les organisations régionales  d’une part et entre toutes les institutions des Nations Unies actives sur le terrain, le Conseil de sécurité  et la société civile d’autre part.  Les instruments à notre disposition pour anticiper et régler les conflits, a poursuivi Mme O’Donnell, sont très efficaces mais doivent aussi être consolidés, de même que le rôle des organisations sous-régionales africaines.  Il est par conséquent indispensable de développer le dialogue et la coordination avec ces organisations. 


Les sanctions et les embargos, a estimé la Ministre, peuvent en outre jouer un rôle fondamental en matière de prévention des conflits mais leurs conséquences humanitaires doivent être sérieusement mesurées.  Elle a également souligné l’importance de la lutte contre le trafic illicite des petites armes et pour la sauvegarde des droits de l’homme.  Des politiques macroéconomiques viables, des programmes d’action transparents et efficaces ainsi que le renforcement du rôle des femmes sont aussi des domaines d’action prioritaire à ne pas négliger.  De son côté, la communauté internationale doit respecter les engagements pris dans le cadre du dernier sommet de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), notamment en matière d’investissement dans le domaine de l’éducation et prendre des actions décisives en matière de financement du développement, d’intégration commerciale et de réduction de la dette en faveur des pays africains.


M. KIM TRAAVIK, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, a formé le vœu que ces débats puissent être l’occasion pour le Conseil de sécurité d’adopter une approche plus cohérente à l’égard des conflits africains.  Il a également souligné que, compte tenu de l’interdépendance entre les conflits et les problèmes de développement, il est nécessaire de promouvoir une coopération plus étroite entre les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et les acteurs du développement à long terme.  Il a également fait sienne la volonté du Secrétaire général de voir les Nations Unies évoluer d’une culture de réaction à une culture de prévention en appelant un renforcement d’urgence de tous les efforts de paix sur le continent africain. 


Par ailleurs, le Ministre norvégien des affaires étrangères a déclaré que la paix durable ne pouvait être imposée et devait être assumée par les Africains eux-mêmes.  Dans ce contexte, il a appelé les dirigeants africains à faire preuve de volonté politique pour construire une réelle coopération avec les Nations Unies dans le souci d’instaurer la paix et la sécurité.  A cet égard, il a cité les développements positifs en Sierra Leone, l’Accord de paix entre l’Erythrée et l’Éthiopie ou encore la mise en place du dialogue intercongolais, comme autant d’exemples à suivre en matière de coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales africaines.  Ces récentes évolutions, a-t-il ajouté, montrent que l’Afrique assume de façon croissante ses responsabilités, comme en témoigne la mise en place du Nouveau partenariat pour le développement en Afrique, qui reconnaît que la paix, la démocratie les droits de l’homme et la bonne gouvernance sont les préalables à tout développement durable.  En conclusion, il a déclaré que l’Afrique disposait d’un immense potentiel de croissance économique et de développement humain, mais que les sociétés n’auront pas accès à ce potentiel tant qu’elles seront en conflit. 


M. MIGUEL MARIN BOSCH, (Mexique) a appuyé le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) qui, selon lui, établit les bases d’une union africaine, plus forte, plus démocratique et plus libre.  Les conflits africains exigent une plus grande attention du Conseil et de l’OUA, a poursuivi le représentant en souhaitant que l’analyse de ces conflits soit faite sous une perspective globale visant la paix et une croissance économique durables.  Il est nécessaire, en la matière, que le Conseil s’attèle à la tâche mais, a précisé le représentant, aux côtés de l’Assemblée générale et d’autres organes des Nations Unies comme les institutions de Bretton Woods.  L’ONU doit agir moins par réaction que par action, a insisté le représentant en plaidant pour un niveau élevé d’aide publique au développement, d’un plus grand accès aux marchés mondiaux et d’un allègement de la dette en faveur de l’Afrique.  Il a également plaidé pour une assistance dans l’établissement d’institutions démocratiques.  Ce n’est que par le moyen du développement économique qu’il sera possible de résoudre les conflits, a dit le représentant en établissant le lien avec la Conférence de Monterrey sur le financement du développement.  Il a poursuivi en demandant une action vigoureuse contre le trafic illicite d’armes, l’exploitation illégale des ressources naturelles et les catastrophes humanitaires. 


Mme CAMARA HADJA MAHAWA BANGOURA, Ministre des affaires étrangères et de la coopération de la République de Guinée, a estimé que le fardeau de la dette, la baisse constante du prix des matières premières, la pauvreté, le VIH/sida, la mauvaise gouvernance et les conséquences des nombreux conflits sont au nombre des facteurs qui expliquent l’état actuel de l’Afrique.  Cependant, sans la paix et la sécurité, aucune chance ne saurait être accordée aux efforts de développement.  De même, la démocratie ne saurait être réalisée dans un état de pauvreté.  Dans ce contexte, la Ministre a renouvelé son plein appui à la tenue d’une conférence internationale sur les Grands Lacs et s’est félicitée des signes encourageants qui commencent à apparaître en maints endroits de l’Afrique de l’Ouest.  Elle a notamment rappelé les initiatives importantes prises par la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au nombre desquelles figurent, entre autres, la mise en oeuvre de nombreux mécanismes de prévention, de gestion et de règlement des conflits ainsi que la création de quatre observatoires comme dispositifs d’alerte rapide.  Ma délégation se réjouit, a poursuivi la Ministre, de l’étroite collaboration entre la CEDEAO et les Nations Unies pour la restauration de la paix et de la sécurité en Afrique de l’Ouest. 


Cependant, la paix a un prix, a rappelé la Ministre.  C’est pourquoi, l’extinction des conflits doit être accompagnée par l’élaboration et la mise en oeuvre d’un programme global et intégré de relèvement économique au sein duquel il convient de lutter en particulier contre le commerce illicite des ressources naturelles.  Il faut également envisager de mettre en place de nouveaux instruments qui aideront le Conseil de sécurité à prévenir et à résoudre les conflits en Afrique.  Dans ce contexte, la Guinée propose la création au sein du Conseil de sécurité d’un groupe de travail de haut niveau qui serait chargé de faire le point des actions initiées au titre de l’Afrique et dont les conclusions devraient déboucher sur l’élaboration d’une stratégie globale intégrée portant sur un plan d’actions multisectorielles.  De même, il serait souhaitable d’établir une coopération plus étroite entre le Conseil de sécurité et l’Organisation de l’unité africaine (OUA).  Enfin, la Ministre a estimé que, loin d’être un handicap pour l’Afrique, la mondialisation pourrait fournir à la fois le contexte et les moyens de son sursaut.  A cet égard, le Nouveau partenariat pour le développement (NEPAD) devrait permettre au continent africain de participer activement à l’économie et à la vie politique mondiales et de s’extirper de la marginalisation actuelle.


M.LEONARD SHE OKITUNDU, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République démocratique du Congo (RDC), a énuméré les mesures prises par le Président Kabila pour faire progresser l'application de l’Accord de paix de Lusaka, notant le respect du cessez-le-feu, l'acceptation du déploiement de la Mission d'observation des Nations Unies en République démocratique du Congo(MONUC), l'engagement de pourparlers directs avec le Rwanda et l'Ouganda ou le cantonnement des groupes armés rwandais à Kamina.


A cet égard, le Ministre congolais a appelé le Conseil et la communauté internationale en général à s'investir davantage dans le processus de désarmement, de démobilisation, de rapatriement, de réinstallation et de réinsertion (DDRRR) des groupes armés.  Il a suggéré que, comme ce fut déjà le cas à propos de l'exploitation illégale des richesses de la RDC, le Conseil autorise la création d'une commission internationale d'enquête chargée d'enquêter sur les groupes armés en vue de leur processus de DDRRR.  Cette commission, selon lui, aurait pour tâche de recueillir les informations spécifiques  sur les effectifs et leur localisation en RDC des éléments rwandais et de dresser le constat des efforts entrepris par le Gouvernement de Kinshasa.  La commission serait composée de membres du Conseil, de représentants de l'Union européenne, et de l'OUA notamment et devrait remettre son rapport dans un délai de deux mois.


Pour le Ministre, les préoccupations sécuritaires du Rwanda ne trouveront pas de solution par la voie militaire ni par le maintien de ses troupes en RDC.  En revanche, leur retrait ramènerait, a-t-il assuré, la paix et la stabilité dans la région des Grands Lacs.  Dans cet esprit, le Gouvernement congolais souhaite également la création d'un mécanisme de surveillance le long des frontières communes de la RDC et du Burundi, mettant en avant la corrélation entre les processus de Lusaka et d'Arusha.  En conclusion, M. She Okitundu, a réaffirmé l'engagement de son Gouvernement en faveur du dialogue intercongolais qui doit reprendre prochainement en Afrique du Sud.


M. ABDELKADER MESSAHEL, Ministre délégué chargé des affaires africaines de l'Algérie, est d'abord longuement revenu sur le Nouveau partenariat pour le développement en Afrique (NEPAD), adopté en juillet 2001 au Sommet de l'OUA à Lusaka.  Il s'agit là, selon lui, d'une initiative africaine abordant de manière globale et pragmatique la problématique du renouveau africain, qui place au rang des priorités le règlement des différends et la solution des conflits sur le continent.  Cette initiative, a-t-il souligné, vise à une meilleure articulation et cohérence des mécanismes et structures aux plans sous-régional, continental et international.


Le Ministre délégué a ensuite rappelé que son pays avait été maintes fois sollicité pour jouer un rôle de médiation, soit dans des conflits internes, comme dans le Nord du Mali ou du Niger, soit dans des différends bilatéraux comme entre l'Erythrée et l'Ethiopie.  De cette expérience, a-t-il dit, l'Algérie a tiré plusieurs enseignements.  Ainsi, il est apparu nécessaire de s'assurer de l'existence d'une volonté politique de la part des belligérants en faveur de la paix.  Pour ce faire, les recours à la médiation doivent se faire dans la clarté et la transparence et le médiateur désigné doit jouir d'une crédibilité reconnue.  L'intervention des facilitateurs, en coordination avec le médiateur à certaines étapes cruciales, est de nature à dynamiser le processus.  Il peut s'avérer nécessaire, a-t-il fait remarquer, de mettre en place un dispositif de sanctions ciblées concernant l'interdiction des ventes et livraison d'armes et de munitions, ou le commerce illicite de certains produits ou ressources stratégiques.  Enfin, le règlement d'un conflit doit s'accompagner de mesures visant à favoriser le relèvement et la reconstruction. 


Par conséquent, le Ministre délégué a énuméré dix conditions au succès d'un effort collectif international en faveur de la paix, parmi lesquels des apports financiers et techniques aux capacités du continent en matière de prévention, gestion et règlement des conflits, un appui significatif à l'OUA et aux organismes régionaux, une coopération internationale renforcée dans les domaines de la prévention des conflits et du maintien de la paix, une assistance au déminage et aux processus de DDRRR, une assistance aux pays qui accueillent les réfugiés et une coopération soutenue dans la lutte contre le terrorisme.


M. CHEIKH TIDIANE GADIO, Ministre des affaires étrangères du Sénégal, s’est félicité de l’excellent rapport du Secrétaire général sur “Les causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique”.  Il a appelé à un renforcement de la coopération entre l’ONU, d’une part, l’OUA et les organisations sous-régionales, d’autre part, dans le domaine de la prévention, la gestion et le règlement des conflits, notamment en faveur des pays comme la Guinée-Bissau et la Sierra Leone où règne encore une paix fragile.  A cet égard, il a salué la mise en place prochaine à Dakar, suite à une recommandation du Rapport Ibrahim Fall, d’un Bureau des Nations Unies en Afrique de l’Ouest.  Si importants que puissent être les efforts fournis par les Africains eux-mêmes, a-t-il ajouté, il convient de se rendre à l’évidence que seul un engagement déterminé de la communauté internationale, reconnaissant la pauvreté comme cause et conséquence des conflits, pourrait être salutaire pour les pays africains. 


Par ailleurs, le Ministre a exhorté la communauté internationale à soutenir le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique pour combler le déficit des ressources, augmenter l’épargne intérieure et attirer les capitaux privés extérieurs, pour assurer le financement des infrastructures, de l’agriculture, de l’éducation et de la santé, et pour réduire l’écart du “fossé numérique” avec le Nord.   En outre, il a défini la démocratie et l’état de droit comme préalables à toute perspective de paix, de stabilité et de prospérité économiques.  Dans cet ordre d’idées, il a souligné l’engagement des chefs d’Etat et de gouvernements de la CEDEAO, réunis à Dakar les 20 et 21 décembre dernier à l’occasion de la 25ème session de la Conférence au Sommet, de promouvoir un environnement politique et social apaisé fondé sur la démocratie, la tolérance, l’acceptation des différences et des compromis politiques, et de mettre en oeuvre des programmes communs de développement économique et social ainsi que la réalisation d’infrastructures de base collectives. 


M. KATELE KALUMBA, Ministre des affaires étrangères de la Zambie, a jugé important que les gouvernements, les organismes régionaux et l’Organisation de l’unité africaine (OUA) complètent leurs efforts et collaborent avec le Conseil de sécurité.  Une telle collaboration, a-t-il estimé, serait utile pour trouver une solution aux problèmes que connaît l’Afrique.  En dépit de la détermination des dirigeants africains, la paix ne règne toujours pas sur ce continent, a regretté le Ministre avant d’énumérer les causes internes et externes des conflits africains.  Quelles que soient ces causes, a-t-il souligné, les conséquences sont toujours dramatiques pour les personnes et les biens.  La prévention des conflits est une donnée importante du développement durable, a dit le Ministre en appelant la communauté internationale, dont les organismes donateurs, à coopérer avec les pays concernés.  Les politiques doivent être claires, cohérentes et bien coordonnées et, pour atteindre la paix, la communauté internationale doit participer à tous les efforts déployés.  Il faut pouvoir compter sur la confiance mutuelle et le partenariat, a encore dit le Ministre en rejetant d’emblée la notion de lassitude des donateurs.  L’Afrique n’a d’autres choix que de collaborer avec la communauté internationale, a-t-il insisté. 


Le Ministre a conclu sur la crise de direction en Afrique pour dénoncer une situation marquée par l’instabilité.  Il a donc souligné la nécessité de mettre en place des systèmes solides de gouvernance et de renoncer aux «initiatives politico-technocratiques incohérentes et transitoires» de certains dirigeants actuels.  Les Africains, a estimé le Ministre, ont perdu confiance dans leurs dirigeants du fait du manque de moralité des responsables politiques.  Il faut essayer de trouver les moyens de remédier à cette situation, a-t-il indiqué.

Mme FRANCES VELHO RODRIGUES, Vice-Ministre aux affaires étrangères et à la coopération du Mozambique, a déclaré que, sur le plan des principes, la meilleure solution était la prévention des conflits,  tout en notant que cela nécessitait des ressources et un niveau de développement rarement atteint dans la plupart des pays africains. Elle a ajouté que, pour prévenir les conflits, il faudrait traiter toutes les causes inhérentes, comme la pauvreté, les maladies, l’exclusion, les divisions ethniques et la prolifération des armes, sans privilégier aucune d’entre elles.  Pour assurer le succès des efforts de règlement des conflits, elle a insisté sur la nécessité de revoir les mandats et les approches traditionnelles du maintien de la paix, car les conflits actuels diffèrent profondément de ceux qui existaient à la création de l’ONU.  Soulignant l’aspect multidimensionnel des conflits actuels, elle a appelé le Conseil à adopter une approche d’ensemble à laquelle participeraient tous les intéressés. La Vice-Ministre a ajouté que ceux qui participent à la médiation des conflits devraient également avoir une connaissance approfondie les conflits, et a prôné l’application rapide du rapport Brahimi.  Elle a cité les initiatives de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).


Dans le domaine Du règlement des conflits, la Vice-Ministre elle a souligné l’importance de traiter d’autres problèmes importants comme la pauvreté, le sous-développement, et le sida, en soulignant que seule une approche commune pourrait permettre de trouver des solutions efficaces aux problèmes affectant le continent.  Elle a jugé que le NEPAD constituait une initiative pour la relance économique du continent et a appelé la communauté internationale à soutenir cette institution.  Dressant la  liste de ce qui doit être accompli pour mettre fin aux conflits en Afrique, Mme Rodrigues a déclaré que l’ONU devrait mettre en place un plan d’action global pour traiter des conflits en Afrique, et parvenir à obtenir, de la part des Etats Membres, les ressources nécessaires pour les missions de paix.  Elle a ajouté que l’ONU devrait s’engager dans les processus de paix avec une perspective à long terme, et mettre en œuvre chaque résolution adoptée dans le cadre des processus de paix.  Enfin, elle a demandé que le Conseil de sécurité et le Secrétaire général continuent de visiter, sur une base régulière, les pays en conflit, afin de maintenir un dialogue avec les parties et les autres acteurs et exercer une pression pour régler le conflit.


M. GEORGES CHIKOTI, Vice-Ministre des relations extérieures de l'Angola, a fait remarquer que les gouvernements africains sont confrontés à un doublé défi: réduire et prévenir le risque de conflits par le truchement de mesures politiques et, dans le même temps, mettre en oeuvre des politiques de promotion du développement économique et de la réduction de la pauvreté.  A cet égard, il a jugé que le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) constitue un nouvel espoir pour le continent.  Il a noté que la transition politique en Afrique centrale et en Afrique australe au cours des douze dernières années avait vu la fin de l'apartheid et l'émergence de démocraties grâce à des élections, en Namibie et en Afrique du Sud, mais avait fait naître un nouveau conflit en République démocratique du Congo.  Il a sur ce point rendu hommage à l'action des Nations Unies.


Evoquant la situation au Zimbabwe, le Ministre angolais a réitéré les appels en faveur de la consolidation de la démocratie et du bon déroulement des élections dans ce pays.  Mais il a aussi rappelé que les pays membres de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) avaient réclamé la fin de toute ingérence occidentale au Zimbabwe, sapant sa souveraineté et aggravant la situation.  Enfin, il a remercié le Secrétaire général qui maintient l'Angola au centre des préoccupations du Conseil de sécurité.


M. TAIEB FASSI FIHRI, Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères et à la coopération du Maroc, a rappelé l’engagement de son pays en faveur de l’unité africaine en invoquant sa participation aux opérations de maintien et de consolidation de la paix de l’ONU.  L’insistance de l’Afrique à saisir le Conseil de ses problèmes, a expliqué le Ministre, vient de son souhait de voir la communauté internationale s’impliquer davantage dans la sécurité et le développement du continent.  Dans ce cadre, le Ministre a appelé à une mise en œuvre pratique des recommandations du Secrétaire général et à la mobilisation des ressources pour en garantir la concrétisation.  Pour sa part, a-t-il ajouté, l’Afrique a pris des initiatives régionales et sous-régionales pour stabiliser ses conflits et en régler d’autres.  De plus, sur le plan de la démocratisation, de la bonne gouvernance, du respect des droits de l’homme et de la situation économique, des progrès ont été accomplis.  Toutefois, a convenu le Ministre, des efforts restent à déployer pour assurer une véritable intégration de l’Afrique au processus de mondialisation.  Il faut, a-t-il insisté, trouver des solutions à l’exacerbation des conflits, notamment ceux de nature ethnique, conséquences des frontières arbitraires. 


A ce stade, la communauté internationale ne peut plus se contenter de séparer les belligérants et de garantir les cessez-le-feu.  Elle doit mettre en place des initiatives intégrées visant le développement socioéconomique de l’Afrique.  Dans ce cadre, le Ministre a attiré l’attention du Conseil sur le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) qui exige le déploiement d’efforts organisés par l’Afrique et un intérêt soutenu de la communauté internationale.  Dans ce contexte, a souligné le Ministre, la responsabilité des Etats africains reste entière.  Il a vu dans les interactions sous-régionales la voie indiquée.  Le Ministre a conclu en appuyant la création d’un mécanisme de suivi de la mise en œuvre d’une stratégie globale en faveur du continent africain


Mme R.T.MABUDAFHASI, Vice-Ministre de l'environnement et du tourisme de l'Afrique du Sud, a plaidé pour que le Conseil de sécurité et la communauté internationale apportent leur contribution à la nécessaire renaissance africaine.  Les dirigeants africains, en une étape historique ont défini, selon elle, le cadre de leur action avec le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), partageant la ferme conviction qu'il est de leur devoir d'éliminer la pauvreté et de placer leurs pays sur la voie de la croissance et du développement durables, tout en participant activement à l'économie mondiale.  Pour la Vice-Ministre, ce partenariat devra insister sur trois axes en matière de sécurité et de paix, à savoir la promotion à long terme de conditions propices au développement et à la sécurité, la création au sein des institutions africaines de mécanismes d'alerte précoce et le renforcement des capacités africaines de prévention, gestion et règlement des conflits. 


Sur un autre terrain, la Vice-Ministre sud-africaine a appelé le Conseil de sécurité à revoir ses relations avec le Conseil économique et social (ECOSOC) afin de déterminer la manière dont ces deux organismes fondamentaux des Nations Unies peuvent répondre ensemble aux défis qui se posent en Afrique.  L'Afrique du Sud, a-t-elle poursuivi, appelle le Conseil de sécurité et les Nations Unies dans leur ensemble à porter assistance aux organismes régionaux africains dans les domaines suivants: prévention, gestion et règlement des conflits; rétablissement, maintien et consolidation de la paix; réconciliation, réhabilitation et reconstruction; et enfin, lutte contre la prolifération des petites armes, armes légères et mines terrestres. 


Evoquant ensuite le prochain lancement de l'Union africaine (UA), Mme Mabudafhasi a jugé que cette Union visait à renforcer la paix, la stabilité, la démocratie, la justice et le respect des droits de l'homme, à créer les conditions nécessaires à un développement durable et à la croissance économique et à éliminer la pauvreté.  Avec le NEPAD, ces deux initiatives sont, selon la Vice-Ministre, la clé pour résoudre les conflits en Afrique et placer le continent sur la voie d'un développement et d'une croissance durables.


M. IVAN SIMONOVIC (Croatie), Président du Conseil économique et social, a estimé que la nature multidimensionnelle des activités de consolidation de la paix exige une approche multisectorielle qui doit être adaptée à chaque situation particulière.  Le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social peuvent travailler ensemble de manière plus efficace, a-t-il dit en ajoutant que, compte tenu de l’indépendance de deux organes, le but doit être d’assurer une véritable collaboration afin d’assurer la complémentarité de leurs efforts.


M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie) a énoncé plusieurs points sur lesquels le Conseil de sécurité pourrait intervenir pour promouvoir le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Concernant la prévention des conflits, il a estimé qu’elle pouvait être améliorée par une meilleure coopération entre l’ONU et les organismes régionaux, par des missions politiques et militaires ponctuelles et de courte durée visant notamment à renforcer la confiance par la mise en œuvre des mesures adoptées lors des sommets de l’Organisation de l’unité africaine à Alger et à Lusaka contre les dirigeants politiques qui chercheraient à se maintenir au pouvoir de façon anticonstitutionnelle.  Evoquant les opérations de maintien de la paix, le représentant a estimé que cette tâche incombe au Conseil de sécurité en premier lieu, mais que la CEDEAO ou la SADC pourraient être encouragées à y participer, et que le Conseil pourrait recourir au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies pour les actions qui nécessitent un large appui international ou pour pouvoir incorporer des composantes civiles aux opérations africaines. 


Le troisième point soulevé par M. Valdivieso concerne la prolifération des armes légères : on en compte 100 millions en Afrique fournies, il y a de nombreuses années, par les acteurs de la guerre froide et utilisées, aujourd’hui, par des mercenaires et des groupes de criminels.  Le Conseil pourrait, entre autres, engager les pays exportateurs d’armes à contrôler davantage leurs ventes et les sociétés qui les fabriquent à contrecarrer leurs effets par des actions concrètes, et promouvoir l’identification publique des commerçants d’armes, notamment ceux qui violent les embargos.  Le délégué a également souhaité qu’une meilleure attention soit portée aux pays qui sortent de conflits :  il s’agit de mettre en œuvre les résolutions du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et la Colombie, a-t-il indiqué, se fait l’écho de la proposition visant à créer un groupe spécial sur le sujet au sein de l’ECOSOC, afin d’améliorer la coordination entre les organes des Nations Unies concernés.


Enfin, le représentant colombien a voulu rappeler les besoins particuliers des 15 millions de réfugiés et de personnes déplacées et des 30 millions de personnes vivant avec le VIH/sida sur le continent.  Des programmes d’un montant d’un milliard et 200 millions de dollars ont été présentés pour couvrir les besoins de 14,6 millions de personnes pour l’année 2002; l’année dernière, à peine la moitié de ces besoins avaient été couverts.  Mais, a-t-il néanmoins souligné, dans des pays comme l’Angola, la République démocratique du Congo, le Burundi, un nombre considérable de personnes ont besoin d’aide mais les organisations humanitaires internationales ne peuvent y accéder en raison des risques.


M. WANG YINFAN (Chine) a noté que les Nations Unies avaient enregistré un certain nombre de progrès dans plusieurs conflits africains, notamment en Sierra Leone, en République démocratique du Congo ou entre l'Ethiopie et l'Erythrée, mais que de nombreuses régions du continent restaient la proie des épidémies, de la guerre et de la pauvreté.  Il a évoqué le poids du colonialisme, notamment comme une cause de leur faiblesse économique, du manque d'éducation et comme obstacle au développement.  De l’avis de la délégation chinoise, le fait de débattre de la situation sur le continent et de rechercher des solutions à ces maux doit obligatoirement tenir compte du passé, des relations entre communautés et des réalités socioéconomiques.


Le représentant a rappelé le rapport du Secrétaire général sur les causes de conflit et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique, paru en 1998, le Sommet du millénaire et la Déclaration de Durban: la pauvreté et les disparités économiques liées au racisme et à la discrimination raciale, a-t-il souligné, ont contribué au sous-développement en particulier en Afrique et sont à l'origine de conflits armés.  Par conséquent, pour le représentant chinois, l’augmentation de l'aide au développement et l’éradication de la pauvreté contribueraient à régler les conflits sur des bases solides.  Il a souhaité que le Conseil institutionnalise un dialogue avec l'Organisation de l'unité africaine et que le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afrique de l'Ouest, qui doit être inauguré prochainement, renforce la coopération entre les Nations Unies et la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).  Le représentant a rappelé, à cet égard, les initiatives de son pays en faveur de l'Afrique, notamment le Forum de coopération Chine-Afrique et indiqué que vingt pays du continent avaient déjà signé avec Beijing le protocole sur la réduction et l'exemption de la dette.  Il a également annoncé que son pays entendait prendre une part plus active aux opérations de maintien de la paix en Afrique.


M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) s’est déclaré favorable à une approche généralisée pour le continent africain.  Il a soutenu qu’il fallait d’abord neutraliser les facteurs qui favorisent l’apparition des conflits.  Le représentant a souligné que les initiatives africaines, comme les missions de médiation de personnalités politiques, étaient fondamentales et il a demandé que ces efforts soient appuyés par le Conseil de sécurité ainsi que par la logistique de l’ONU.  Il a apporté son appui aux efforts de coordination entre les Nations Unies et l’OUA et s’est dit favorable à des programmes d’échange de personnel, de programmes communs de déminage.  Il a également insisté sur le rôle que peuvent jouer les Nations Unies pour parvenir à mobiliser les bailleurs de fonds. . Le représentant a plaidé pour des missions de la paix élaborées par les pays africains, en soulignant qu’il fallait prendre en compte les opinions des Africains eux-mêmes, qu’il s’agisse du commerce illégal des diamants ou des conflits.


Concernant la reconstruction après les conflits, le représentant a déclaré que l’ONU disposait de moyens de prévention très importants, notant toutefois que, pour les mettre en œuvre, il faudrait établir une meilleure coordination entre les organes des Nations Unies et mettre en place en Afrique des programmes globaux qui recouvrent à la fois le déminage, le désarmement et la réintégration des ex-combattants, ainsi que l’appui à l’administration et à la justice.  Il a insisté sur la nécessité de veiller à ce qu’il n’y ait pas de reprise de crise, en liant dans les programmes l’aide d’urgence et l’aide à la reconstruction.


M. STEFAN TAFROV (Bulgarie) a relevé que les conflits africains, souvent très complexes, provoquent des problèmes humanitaires aigus.  Durant les trois dernières décennies, plus de 30 conflits en Afrique ont eu lieu, a-t-il rappelé, et plus d'une quinzaine se déroulant actuellement.  Parmi leurs causes principales, il a cité le sous-développement et la faiblesse constitutive de beaucoup d'Etats.  Dans ce contexte, les tensions interethniques et interrégionales entraînent des conflits intérieurs et le phénomène se généralise.  M. Tafrov a noté que, grâce aux efforts du Secrétariat, la coordination entre le Conseil de sécurité et les autres organes de l'ONU est plutôt satisfaisante.  La Bulgarie juge en outre très positive la contribution de beaucoup d'organisations non gouvernementales et se félicite de la bonne coopération entre l'ONU et ces organisations.  En ce qui concerne le rôle de l'Afrique, la délégation bulgare a indiqué reprendre à son compte les conclusions du Scrétaire général, à savoir: démontrer sa volonté de s'appuyer sur des solutions politiques au lieu de recourir à des réponses militaires; assurer le respect des lois et des droits de l'homme, renforcer la démocratisation et promouvoir la transparence dans les affaires publiques; et appliquer les réformes nécessaires afin de promouvoir le redressement économique.


Le représentant s'est réjoui de la coopération entre les Nations Unies et l'Organisation de l'unité africaine (OUA).  La Bulgarie, quant à elle, entend relever quelques défis, a-t-il expliqué, notamment l’établissement d’une meilleure coordination entre les institutions de l'ONU et les organisations régionales et sous-régionales afin d’améliorer l'efficacité des activités entreprises.  Une autre priorité est, selon lui, la prise en mains par les pays africains de leurs destin et développement.  A cet égard, il a cité les décisions du Sommet de l'OUA de Lusaka, qui ont ouvert un nouveau chapitre dans l'histoire contemporaine du continent.  Mais, a-t-il fait remarquer, l'Union africaine aura besoin d'une nouvelle dynamique de coopération de la part de la communauté internationale, le Conseil de sécurité exerçant un rôle unique à cet égard.  Le représentant a aussi abordé la question de la médiation, notant que les efforts des envoyés spéciaux font une vraie différence dans le règlement des conflits.  Quant aux sanctions, il a considéré qu'elles devraient être mieux ciblées et adaptées à chaque situation concrète.  En tant que Président du Comité des sanctions sur la Somalie, la Bulgarie est prête à s'engager fortement à la résolution des problèmes dans ce pays.  Enfin, le représentant bulgare s'est dit très préoccupé par la prolifération des petites armes et armes légères, ainsi que par le sort des personnes déplacées et des réfugiés.  Il a salué à cet égard les efforts du Conseil de sécurité, du Haut Commissariat pour les réfugiés et des organisations non gouvernementales.


M. MARTIN BELINGA EBOUTOU (Cameroun) s’est félicité de ce nouveau débat et a formé le voeu qu’il puisse être l’occasion pour le Conseil de sécurité de marquer son engagement en Afrique dans l’espoir que soit mis fin à une politique de deux poids deux mesures.  Il a appelé l’Organisation des Nations Unies en général, et le Conseil de sécurité en particulier, à tout mettre en oeuvre pour faire de l’Afrique ce qu’elle ne doit jamais cesser d’être : un partenaire de choix pour la communauté des nations.  Il a regretté que les efforts de la communauté internationale n’aient pas toujours été à la hauteur de ce qu’exigeait la situation en Afrique, ce qui a été pour les Africains une grande source de frustration.  Néanmoins, il s’est félicité des engagements des Chefs d’Etat réunis au Sommet du millénaire pour remédier à ces insuffisances, notamment dans les domaines de la promotion de la paix, de la lutte contre la pauvreté et du soutien à la démocratie. 


Evoquant la mise en place des structures en charge des questions africaines, le représentant du Cameroun a regretté que l’action de l’Organisation se dilue en l’absence d’une politique clairement définie.  A cet égard, il a évoqué la nécessité de rationaliser les initiatives pour l’Afrique et de définir un véritable plan d’action.  Dans cet ordre d’idées, il a proposé la mise en place au niveau du Secrétariat général d’une unité de coordination des actions des départements et bureaux du Secrétariat qui favoriserait une approche intégrée du Secrétariat sur les questions africaines et permettrait une meilleure appréciation de la mise en oeuvre des recommandations.  Dans ce contexte, il a cité la création du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest comme un exemple à suivre en matière d’approche coordonnée et globale de prévention des conflits en Afrique.  Par ailleurs, M. Eboutou a expliqué que la situation de précarité dans laquelle vivent les populations africaines nous pousse à encourager et à soutenir toute politique de sanction qui cible les responsables désignés et épargne les populations civiles.  Pour lutter lutte contre la pauvreté, il a exhorté la communauté internationale à augmenter le volume de l’aide publique au développement, d’en améliorer la qualité et de convertir en dons le reliquat de la dette officielle bilatérale des pays africains les plus pauvres.  Enfin, il a demandé que les exportations africaines soient soutenues pour que le continent ne reste en marge de la mondialisation. 


M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a tenu à souligner un mot-clef : « résultat ».  Il s’est interrogé sur le lien entre les réunions sur l’Afrique et les résultats obtenus, en notant que la dernière réunion du Conseil de sécurité sur l’Afrique datait de décembre 1999.  Le représentant a rappelé les conclusions de cette réunion qui visaient à tenir plus de réunions avec l’Organisation de l’unité africaine (OUA), à engager davantage le Conseil de sécurité en Afrique, et à améliorer le système d’alerte rapide.  Quels ont été les résultats obtenus depuis cette date, s’est interrogé le représentant, en soulignant que le Conseil de sécurité avait pour faiblesse l’absence de mémoire institutionnelle.


Dressant la liste des échecs et des avancées en Afrique, M. Mahbubani a noté qu’il y avait eu des améliorations significatives dans le domaine du règlement  des conflits, en particulier en Afrique de l’Ouest.  Il a toutefois rappelé que, dans le domaine du maintien de la paix ; on trouvait, d’un côté, les pays soutenus par les institutions internationales et, de l’autre, ceux qui étaient laissés de côté.  Il a insisté sur la nécessité de régler le problème, jugeant également important de faire le point pour voir si on progresse ou on régresse en matière de maintien de la paix.  Le représentant s’est félicité de la proposition du Président du Conseil de sécurité de mettre en place un groupe de travail qui serait chargé de la question.  Notant le nombre important de réunions consacrées à l’Afrique, il a déclaré qu’il faudrait organiser autre chose que des réunions et il a salué l’initiative du Conseil de sécurité d’avoir invité le Conseil économique et social à participer à la séance.  Les questions de sécurité et les questions économiques étant liées, il faut, a-t-il souligné, que nous nous rapprochions des autres organes des Nations Unies.


M. MIKHAIL WEHBE (République arabe syrienne) a souligné que les problèmes de l’Afrique nécessitent une approche multisectorielle et les stratégies de règlement des conflits doivent tenir compte de leurs causes profondes.  Outre les efforts entrepris pour améliorer la situation sur le continent visant à réduire la pauvreté et la lutte contre les pandémies mortelles, comme le sida et le paludisme, il est essentiel de trouver une solution juste au problème que pose le fardeau de la dette, a poursuivi le délégué.  La communauté internationale ne peut ignorer les défis graves que doit encore relever le continent africain.  Il a ainsi appelé à considérer les problèmes que sont les répercussions négatives des sanctions ou la situation des millions de personnes déplacées et de réfugiés.  Le processus de paix en Sierra Leone a obtenu des résultats concrets, s’est-il félicité, de même que des progrès ont été enregistrés entre l’Ethiopie et l’Erythrée.  Mais la Syrie estime que des efforts restent à faire dans d’autres régions, d’autant que certains conflits menacent de déborder sur les pays voisins. 


La délégation syrienne préconise un changement de stratégie privilégiant la prévention fondée sur le maintien et la consolidation de la paix, reprenant ainsi les recommandations du Secrétaire général contenues dans son rapport de 1998 sur les « causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique.  Les stratégies de règlement des conflits doivent aussi tenir compte de leurs causes profondes et, même lorsque des accords de paix sont conclus, il est nécessaire de mobiliser et de coordonner les efforts internationaux et ceux des donateurs.  Si les ressources financières ne sont pas mobilisées et si le redressement économique n’est pas assuré, a souligné M. Wehbe, il subsistera le risque de voir ressurgir les conflits.  Il a par ailleurs insisté sur la collaboration entre les Nations Unies et l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et sur la nécessité de coordonner les consultations entre les deux organisations, ajoutant qu’il faudrait aussi promouvoir les capacités africaines de maintien de la paix. 


Le délégué syrien a enfin appelé à établir des stratégies nationales et régionales intégrées, citant en exemple les problèmes que doivent résoudre les pays de l’Union du fleuve Mano.  Il faut rechercher un règlement global des problèmes qui se posent, a-t-il estimé, plaidant également pour la création de liens institutionnels et, par le biais de ces liens, d’une véritable confiance entre pays d’une même région.  Il faut enfin et de manière urgente peser le poids des sanctions appliquées à certains pays africains parmi les plus pauvres du monde, a-t-il encore insisté, indiquant que son pays n’est pas convaincu que celles-ci puissent contribuer à l’élimination des principales causes de conflit mais ne pourraient plutôt que les exacerber.  Par ailleurs, l’engagement pris par les pays africains de favoriser le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) mérite le ferme appui de la communauté internationale, notamment en mobilisant les ressources nécessaires, a-t-il déclaré, souhaitant que l’inauguration prochaine de l’Union africaine (UA) donne l’occasion de reconstruire le continent et lui permette de s’intégrer à la mondialisation et d’en tirer les fruits. 


M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a souligné que l’Afrique avait enregistré, ces dernières années, d’incontestables progrès mais que de nombreux conflits freinaient et occultaient ces avancées.  Le représentant est revenu sur les interventions du Conseil de sécurité en Afrique, dans le domaine de la prévention des conflits, en soutenant les initiatives de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et des organisations sous-régionales, comme dans celui du règlement des conflits.  Il a salué la réussite de l’opération de paix, conduite avec le concours de la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui a permis le désarmement et la démobilisation de 43 000 combattants, et qui permettra, avec la tenue d’élections, de mettre un terme définitif à dix ans de conflit.  Regrettant que les espoirs nés du processus d’Arta ne se soient pas concrétisés en Somalie, le représentant a déclaré qu’il fallait organiser, dès que les circonstances le permettront, le retour des Nations Unies à Mogadiscio.  M. Levitte a souligné que c’était cependant en République démocratique du Congo que le Conseil de sécurité s’était le plus investi et qu’il était déterminé à poursuivre son action jusqu’à la paix.  Il a déclaré que le moment était sans doute venu de réfléchir, avec les partenaires africains, aux objectifs d’une nouvelle mission du Conseil, qui pourrait se rendre dans la région dès le printemps.


Dans le domaine des sanctions, le représentant a déclaré qu’elles s’étaient montrées efficaces contre l’UNITA angolaise et le RUF sierra-léonais parce qu’elles étaient ciblées, assorties d’objectifs politiques clairs, et régulièrement évaluées par des panels d’experts indépendants.  Il a déclaré qu’il faudrait accentuer les pressions pour tarir les trafics d’armes et de matières premières, et a proposé la création d’un mécanisme permanent de suivi de la mise en œuvre des embargos décidés par le Conseil de sécurité.  Une unité d’experts indépendants pourrait être créée, a-t-il suggéré, sous la supervision du Conseil de sécurité et des comités des sanctions.  La France soumettra, dès les prochains jours, un texte sur ce sujet. Rappelant que la France avait des liens historiques tissés par l’Histoire, il a déclaré que son pays était déterminé à poursuivre son action en faveur de la paix, avec l’OUA et le Conseil de sécurité. 


M. JOHN D. NEGROPONTE (Etats-Unis) a d'abord indiqué, pour démontrer l'engagement de son pays en faveur de l'Afrique, que pour la seule année 2001, les relations commerciales entre les Etats-Unis et l'Afrique ont généré près de 30 milliards de dollars; les premiers devenant le plus grand marché pour le second.  Enumérant  les initiatives prises par son pays en faveur de la paix et du développement en Afrique, le représentant a néanmoins souligné le rôle crucial des Nations Unies et du Conseil de sécurité dans la réalisation des objectifs communs en Afrique.  En matière de promotion de la paix et de la sécurité sur le continent africain, rien, a ajouté le représentant, ne peut remplacer des nations stables et une organisation régionale dynamique.  Conscient des limites en la matière, il a encouragé le Bureau de liaison de l'OUA à tenir des consultations avec le Conseil sur les activités du Mécanisme de prévention des conflits. 


Le Conseil, a poursuivi le représentant, doit toujours donner aux parties au conflit l'occasion d'accepter un règlemnt négocié.  Toutefois, si l'une d'entre elles finit par laisser voir sa mauvaise foi, le Conseil a le droit de se départir de son impartialité et de bénéficier, ce faisant, de l'appui des gouvernemnts africains et des organisations régionales.  Les enseignements tirés des conflits africains montrent que, lorsque le Conseil et les gouvernements africains désignent ensemble le responsable de la poursuite d'un conflit, un nouvel élan existe pour mettre fin à l'aggression.  Dans tous les cas, la fin des conflits exige des dirigeants africains et de leurs gouvernements qu'ils prennent des mesures vigoureuses en faveur de la paix lesquelles doivent viser à renforcer la démocratie, la bonne gouvernance et l’état de droit.  Dans ce domaine, l'OUA a marqué une étape historique lorsqu'elle a décidé de nier son accès aux gouvernements qui ont pris le pouvoir par des moyens anticonstitutionnels. 


M. ANIL KUMARSINGH GAYAN, Ministre des affaires étrangères de Maurice, a d’abord décrit l’Afrique comme un continent riche en ressources naturelles et minières et qui attend pourtant, de manière désespérée, l’attention et l’appui de la communauté internationale dans les domaines politique, économique et technologique.  L’Afrique est prête, a-t-il affirmé, à corriger les erreurs du passé et à effacer l’image négative trop souvent véhiculée par les médias.  L’Afrique, a-t-il encore affirmé, a aujourd’hui à sa tête des dirigeants dotés de la détermination et du courage politique nécessaires pour confronter la vérité et la réalité, quelle que soit leur cruauté.  Le Ministre des affaires étrangères a donc proposé la création d’un groupe de travail ad hoc composé des membres du Conseil pour étudier la mise en œuvre et le renforcement de la coopération et la coordination entre le Conseil et le Conseil économique et social.  Se déclarant préoccupé par les liens entre les conflits et la prolifération illicite des armes légères, l’exploitation illégale des ressources naturelles et l’inefficacité des sanctions, le Ministre a appelé à la finalisation du processus de réexamen des régimes des sanctions. 


Que les causes des conflits soient internes ou externes, il n’en reste pas moins, a poursuivi le Ministre, que plus de 7  millions d’Africains sont morts et 10 millions se sont trouvés réfugiés ou déplacés au cours des 32 guerres qu’a connues le continent depuis la période post-coloniale.  Fort heureusement, bon nombre de conflits ont connu une solution, s’est-il félicité en saluant les efforts de l’OUA et des mécanismes régionaux comme la Communauté pour le développement de l’Afrique australe (SADC).  M. Kumarsingh Gayan a aussi jugé nécessaire de mettre en place un système d’alerte rapide arguant que l’Afrique dispose d’un réservoir d’éminents dirigeants et d’anciens chefs d’Etat à qui peut être confiée la tâche de détecter les signes de tensions. 


Le diagnostic est simple, a estimé le Ministre, l’Afrique est piégée par la pauvreté, les maladies, les conflits, le VIH/sida et aussi, a-t-il convenu, par une multitude d'autres problèmes qui démontrent la tâche immense du continent africain.  Dans ce contexte, le Ministre a fait l’analyse selon laquelle la détermination de certains chefs d’Etat africains de rester au pouvoir vient de la peur de velléités de vengeance que pourraient nourrir leurs successeurs.  Pour le Ministre des affaires étrangères, cette question doit être examinée sans passion et de manière objective.  L’Afrique, a-t-il estimé, a suffisamment de maturité pour garantir à tout Président sortant un minimum de sécurité personnelle et les ressources nécessaires à une vie digne.  Enumérant les progrès de l’Afrique dans les domaines de la démocratie, de l’état de droit, de l’économie, de l’émergence de la société civile ou encore de la liberté de la presse, le Ministre a appelé les Africains à s’approprier leurs difficultés pour, en cas de solutions, pouvoir s’approprier les succès.  Le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et l’Acte fondateur de l’Union africaine, a-t-il conclu, contiennent des engagements et des objectifs dont il faut se féliciter.


M. AHMED ABOUL GHEIT (Egypte) a appelé les Nations Unies à faire preuve de volonté politique afin de redynamiser les performances de l’Afrique.  A cet égard, il a cité en exemple le rôle des Nations Unies dans Le règlement de trois conflits majeurs en Sierra Leone, en République démocratique du Congo (RDC) et entre l’Ethiopie etErythrée, mais aussi dans la lutte contre le VIH/sida et la malaria.  Il a également exhorté le Conseil de sécurité à faire preuve d’une volonté consistante, impartiale et équitable dans son approche à l’égard des dossiers africains.  Car, a-t-il précisé, on ne comprend pas les contradictions entre les efforts déployés en Erythrée et en Ethiopie alors que la Somalie, pays voisin, est négligée, entre l’action déterminée en RDC et celle secondaire menée dans des pays limitrophes comme la République centrafricaine et le Burundi voisins, et entre l’action exemplaire menée en Sierra Leone alors que l’insécurité au Libéria et en Guinée  suscite moins d’intérêt. 


Le représentant égyptien a, par ailleurs, appelé l’Organisation de l’unité africaine (OUA), les différentes organisations sous-régionales et les Etats africains à assumer de manière croissante leurs responsabilités face aux problèmes qu’ils rencontrent.  Rappelant la responsabilité première du Conseil de sécurité dans les questions de maintien de la paix et de la sécurité internationales, il a déclaré que le règlement des problèmes et conflits africains n’attendait pas moins de détermination que ceux rencontrés en Afghanistan, au Timor oriental, au Kosovo, en Bosnie-Herzégovine ou ailleurs.  En outre, il a souligné la nécessité de définir objectivement ce que l’Afrique attend des Nations Unies et ce que les Nations Unies attendent de l’Afrique et de mettre en place un mécanisme de consultation entre les Nations Unies et l’OUA, notamment entre le Conseil de sécurité et les organisations sous-régionales de l’OUA.  Dans ce contexte, il a suggéré que la future mission du Conseil de sécurité en Ethiopie et en Erythrée puisse servir d’exemple pour la mise en place d’un tel mécanisme.  Enfin, évoquant les événements du 11 septembre 2001, M. Aboul Gheit a déclaré que l’Afrique était un partenaire de la lutte contre le terrorisme qui devait s’engager à appliquer la Convention de l’OUA pour la prévention et la lutte contre le terrorisme.  Dans le même ordre d’idées, il a appelé à mettre en oeuvre le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique, ce qui, selon lui, est le meilleur moyen d’éradiquer tous les problèmes qui sont autant de terreaux fertiles pour le terrorisme. 


M. INOCENCIO ARIAS (Espagne), s’exprimant au nom de l’Union européenne et des pays associés, a rappelé que l’Afrique représente une priorié pour l’Union européenne.  A ce titre, étant donné l’extrême importance des enjeux de la réunion d’aujourd’hui, sa délégation invite le Haut Représentant pour la politique extérieure de l’Union européenne, M. Javier Solana, à présenter la position commune.


Poursuivant, M. SOLANA a rappelé l’engagement de l’Union européenne auprès des pays africains, grâce à la mise en oeuvre de partenariats contractuels conclus dans le cadre du processus de Barcelone et des Accords de Cotonou.  L’Union européenne continuera en outre d’appuyer le mécanisme de prévention, de gestion et de règlement des conflits de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et envisage actuellement de verser une contribution au Fonds pour la paix de l’OUA.  La coopération entre l’OUA et l’ONU doit être renforcée, a poursuivi M. Solana, de même que le dialogue avec les organisations régionales qui sont des éléments essentiels d’intégration économique et politique.  En matière de gestion des crises et de consolidation de la paix, il est important que toutes les institutions du système des Nations Unies oeuvrent en étroite coopération.  Dans ce contexte, l’Union européenne est pleinement engagée dans un travail de coopération avec l’ONU, notamment dans le domaine de la lutte contre le trafic illicite des armes. 


M. Solana s’est en outre félicité de la création de partenariats stratégiques entre l’Union européenne et l’ensemble des Etats africains.  Le deuxième sommet ministériel Afrique-Union européenne se tiendra prochainement au Burkina Faso et, l’année prochaine, le troisième sommet aura lieu au Portugal afin de renforcer ces efforts de coopération.  Un autre pilier de la politique européenne en faveur de l’Afrique est la lutte contre la pauvreté, les maladies et les conflits, a rappelé M. Solana, indiquant, à cet égard, que l’Union européenne participe de façon très active à la préparation de la Conférence de Monterrey sur le financement du développement et du Sommet de Johannesburg sur le développement durable.  De même, l’Union européenne accorde la plus grande importance au renforcement des mécanismes d’alerte rapide, notamment par un appui au développement et au renforcement des capacités africaines.  Cependant, il faut garder à l’esprit que la politique de prévention des conflits peut échouer, a précisé M. Solana.  C’est pourquoi, il est indispensable de déployer des mécanismes d’assistance en situation de crise.  Il a également indiqué que l’Union européenne continuera de défendre les valeurs fondamentales de la démocratie, de la primauté du droit, des droits de l’homme et de la bonne gouvernance.  Le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), importante initiative qui montre clairement que l’Afrique et l’Union européenne ont des objectifs communs, doit avant tout permettre aux pays africains de profiter des avantages de la mondialisation.  Nous devons tous contribuer au succès de l’Afrique car cela permettra d’instaurer un monde plus juste et plus sûr et de réduire la dépendance vis-à-vis de l’aide, a-t-il conclu.


M. NOUREDINE MEJDOUB (Tunisie) a regretté le caractère inadéquat des initiatives du Conseil de sécurité aux spécificités culturelles, sociales, économiques et politiques africaines, mais aussi l’insuffisance des ressources pour leur mise en oeuvre.  Il a indiqué que, selon lui, l’importance et l’intérêt stratégique que représentent certains pays ou régions influençaient dans une large mesure les décisions du Conseil de sécurité.  Illustrant son propos, il a regretté que la question somalienne demeurait quasi-absente de l’ordre du jour dudit Conseil.  Il a également déclaré que trop peu d’intérêt était accordé à la prévention du déclenchement et la résurgence des conflits et à l’éradication de leurs causes profondes, en particulier économiques, et ce, malgré le fait que tous les acteurs, y compris le Conseil de sécurité reconnaissent le lien étroit entre la paix, la stabilité et le développement.  De plus, a-t-il ajouté, les ressources allouées aux activités préventives et de consolidation de la paix, quant elles existent, ne sont pas dans la plupart des cas à la hauteur des objectifs recherchés.


Dans ce contexte, le représentant de la Tunisie a appelé au renforcement des capacités africaines en matière de maintien de la paix et de la prévention des conflits en assurant la formation des troupes et en fournissant l’assistance nécessaire aux structures régionales africaines concernées.  Dans le même ordre d’idées, il a appelé à la mise en place d’une coordination et d’une concertation réelles et efficaces entre les organes des Nations Unies, en particulier le Conseil de sécurité, l’OUA et les autres organisations sous-régionales africaines, en vue d’assurer la prise en considération des spécificités propres à l’Afrique.  En outre, il a souligné la nécessité de rompre avec la culture de réaction et passer à une culture de prévention en précisant que la stabilité d’un pays est toujours tributaire de la stabilité des pays voisins.  Parmi les autres propositions formulées, M. Mejdoub a également appelé à réexaminer le régime des sanctions et à créer un mécanisme international de contrôle de la circulation et de la fourniture des armes.  En conclusion, il a exhorté la communauté internationale, quelle que soit la lourdeur de la tâche, à soutenir inconditionnellement le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique, afin d’aider les pays africains à relever le défi du développement, de la paix et de la stabilité.


M. IFTEKHAR AHMED CHOWDHURY (Bangladesh) a déclaré que deux conflits, au Burundi et en République démocratique du Congo, mettent au défi les Nations Unies et les chefs d’Etat africains de la région des Grands Lacs.  Il s’est dit toutefois convaincu que la paix était possible si on pouvait convaincre les acteurs régionaux de coopérer et de faire des compromis, mais que cela ne pouvait être le seul fait du Conseil de sécurité, et que le rôle des organisations régionales et sous-régionales était crucial.  Il a aussi déclaré que tous les acteurs, des organisations non gouvernementales aux agences des Nations Unies, jouaient un rôle, en particulier en Afrique.  Citant la quatrième conférence de haut niveau sur la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales qui s’est tenue en février 2001, il a rappelé que cette réunion s’était concentrée sur la consolidation de la paix après les conflits, ainsi que sur la prévention des conflits, deux sujets étroitement liés.  En effet, a-t-il souligné, la consolidation de la paix après les conflits, qui implique de mettre en place la reconstruction et la réconciliation, a pour but de prévenir la récurrence des conflits.


Notant que le rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique avait été suivi d’une série de résolutions, le représentant a fait remarquer que les engagements pris ne sont pas toujours suivis par une action.  M. Chowdhury a ajouté que l’Afrique avait également besoin de construire ses capacités pour tirer profit de l’accès aux marchés qui lui sont ouverts, et que la Structure intégrée pour le renforcement des capacités en matière commerciale, coordonnée par six institutions internationales, devait être mise en place immédiatement.  Pour profiter du commerce, il faut d’abord avoir la capacité d’en faire, a-t-il rappelé.  Le représentant a déclaré que les initiatives nouvelles rendaient le futur de l’Afrique plus prometteur que son passé, citant ainsi le Forum économique mondial, la conférence des Nations Unies sur le financement du développement ou bien le nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique.


M. BRUNO RODRIGUEZ PARRILLA (Cuba) a tout d’abord insisté sur le fait que la recherche de la paix et de la sécurité impliquait le développement et l’éradication de la pauvreté.  Il a également relevé que les méthodes de travail du Conseil de sécurité, au sein duquel l’Afrique ne compte aucun membre permanent, ne contribuent pas à conférer au continent toute l’attention qu’il requiert, ce qui plaide, selon le représentant, en faveur d’une réforme de cet organisme.  Le représentant cubain a ensuite donné quelques chiffres concernant l’Afrique et illustrant la pauvreté qui y règne, pour relever que ce continent dépense plus pour le service de la dette que pour les domaines de la santé et de l’éducation réunis.  Aussi, a-t-il réclamé l’annulation de la dette extérieure, sans conditions ni contraintes, jugeant qu’elle avait été déjà réglée et à plusieurs reprises.


Evoquant ensuite la menace grave que le VIH/sida pose au développement durable, il a souligné que les effets dévastateurs de cette pandémie sur l’Afrique sub-saharienne sont équivalents à ceux qu’auraient soixante-dix bombes nucléaires comme celles qui ont frappé Nagasaki et Hiroshima si elles étaient lâchées sur la région..  Il a rappelé les efforts que son pays a entrepris en faveur de l’Afrique, notamment en termes d’éducation et de formation, avec l’envoi au total de 80 000 coopérants cubains sur le continent.  Il a également réitéré les propositions faites par le Président Castro lors du Sommet du millénaire d’envoyer 3 000 spécialistes de la santé exercer gratuitement en Afrique sub-saharienne et créer l’infrastructure de base nécessaire à l’administration des traitements antirétroviraux.  La seule condition serait que les pays industrialisés contribuent aux traitements médicaux et fournissent les ressources nécessaires.  Le représentant a, à cet égard, insisté sur le fait que les médicaments vitaux, y compris ceux traitant le sida, ne pouvaient être protégés par des brevets : on ne peut pas faire de profits avec la vie d’êtres humains, a-t-il conclu, rappelant l’offre faite par son pays lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée à la lutte contre le VIH/sida, concernant notamment l’octroi gratuit, outre des médecins et experts, du traitement de 30.000 malades du SIDA. 


M. PHILIPPE DJESSAN DJANGONE-BI (Côte d'Ivoire) a rendu hommage aux excellents rapports thématiques publiés par le Secrétaire général sur la situation en Afrique, notamment celui sur les causes de conflits en Afrique et les moyens d'y faire face.  Il a fait valoir que, depuis quelques années, l'Afrique travaille résolument à trouver des solutions à ses nombreux problèmes politiques, économiques et sociaux, et que quelques résultats ont été atteints sur le terrain de la résolution des conflits, grâce à l'action d'éminents dirigeants africains.  Il a cité en exemple les Présidents Nelson Mandela et Ketumile Masire, pour le Burundi et la République démocratique du Congo, et le Président Abdel Aziz Bouteflika pour ce qui concerne le conflit Ethiopie-Erythrée.  Dans la sous-région ouest-africaine, a-t-il ajouté, les dirigeants de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) n'ont ménagé aucun effort pour que la paix revienne, avec le concours appréciable des Nations Unies.  Le représentant a remarqué que les efforts du continent africain dans la recherche de solutions aux problèmes politiques se vérifient dans le domaine économique et social.  L'Afrique et ses dirigeants cherchent aussi activement à créer des mécanismes pour opérer des réformes intérieures et renforcer la bonne gouvernance, a-t-il noté.  La démocratie s'enracine lentement mais sûrement.  Elle n'est pas seulement l'affaire des gouvernants, mais aussi une culture à l'échelon des citoyens.  Pour être réelle et durable, a considéré M. Djangone-Bi, cette démocratisation a besoin du développement et, par conséquent, de la disposition de la communauté internationale à vouloir sincèrement aider ce continent.


Selon les estimations de l'ONU, a rappelé M. Djangone-Bi, 52% des personnes qui vivent avec moins d’un dollar par jour se trouvent en Afrique.  Il a aussi indiqué que, pour atteindre l'objectif de la Déclaration du millénaire de réduire la pauvreté de moitié d'ici 2015, les spécialistes disent que les pays africains devront bénéficier d'un taux de croissance annuel de 7 à 8%.  Sur le plan social, le représentant a abordé le fléau du VIH/sida, qui frappe davantage la jeunesse et le système éducatif, l'épidémie fauchant particulièrement les enseignants.  Il a rappelé que l'Afrique a décidé à Abuja de consacrer environ 10 à 15% des budgets des gouvernements africains à la lutte contre le sida.  Enfin, en ce qui concerne la politique, l'Afrique s'est dotée, avec la création de l'Union africaine, du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, qui seront considérés dans les années à venir comme l'acte constitutif du développement africain.  Les Nations Unies se doivent d'être à l'écoute des initiatives qui émanent des africains et chercher des moyens d'appuyer ses initiatives, a-t-il conclu.


M. KOJI HANEDA (Japon) a déclaré qu’en dépit des efforts considérables accomplis, les pays d’Afrique sont encore confrontés à de nombreux obstacles qui peuvent menacer leur paix et leur stabilité.  Il a souligné que la paix interne, la sécurité et la stabilité sont des conditions essentielles pour parvenir à un développement soutenable dans n’importe quelle société, et que la bonne gestion des affaires publiques joue un rôle important à cet égard.  Le représentant s’est félicité de la décision de transformer l’Organisation de l’unité africaine en Union africaine, notant que ce changement met l’accent sur le rôle de l’Union dans la promotion de la paix, de la sécurité, de la stabilité et de la bonne gouvernance à travers le continent africain.  Le représentant a reconnu le rôle que pourrait jouer le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), en fournissant une orientation politique pour les activités de l’Union africaine.  Le fait que plusieurs plans de développement aient été soumis par des personnalités africaines montre la volonté des Africains de reprendre à leur compte le processus de consolidation de la paix et de développement.  Ca délégation japonaise rappelle que son pays avait accueilli deux fois la conférence internationale de Tokyo sur le développement africain (TICAD) depuis 1993 et qu’en décembre dernier, une réunion préparatoire à la prochaine conférence TICAD III avait permis d’adopter une déclaration présidentielle relative aux possibilités de coopération entre le NEPAD et la conférence internationale de Tokyo.


M. T.O. APATA (Nigéria) a regretté que les promesses de développement de l’Afrique formulées, il y a quarante ans, n’aient pas été tenues.  Cependant, il s’est félicité des progrès accomplis dans le domaine du rétablissement de la paix en Sierra Leone, au Burundi, en République centrafricaine et en Guinée-Bissau.  De même, il a estimé que le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) représente une avancée importante en ce sens qu’il reconnaît la responsabilité première des dirigeants africains en matière de développement mais réaffirme également que l’appui de la communauté internationale est indispensable.  Il faut encourager la consolidation des partenariats entre les gouvernements et les organisations non gouvernementales ainsi qu’entre le secteur public et le secteur privé, a poursuivi le représentant.  Il est en outre indispensable de renforcer les mécanismes de prévention des conflits, de promouvoir la démocratie, les droits de l’homme et le développement des infrastructures, de restaurer la stabilité macroéconomique ainsi que de revitaliser le système éducatif. 


En ce qui concerne la coopération avec les organisations régionales, le Nigéria, tout en se félicitant des efforts déployés par le Conseil de sécurité pour construire une synergie avec la communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), estime néanmoins que le Conseil doit renforcer son appui aux diverses initiatives régionales dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité en Afrique.  Dans ce contexte, le représentant a souhaité que les Nations Unies apportent une aide substantielle au mécanisme de prévention, de gestion et de règlement des conflits de l’Organisation de l’unité africaine (OUA).  Il faut également que le Conseil de sécurité institutionnalise, en matière de sanctions, la prise en compte des analyses des dirigeants des sous-régions concernées.  Enfin, les seigneurs de guerre qui ont commis des crimes contre l’humanité doivent être traduits en justice conformément au droit international, a conclu le représentant.


M. IBRAHIM M. KAMARA (Sierra Leone) a rappelé qu'il y a à peine une semaine, le processus de désarmement finalisé, dans son pays, grâce à la collaboration de la Mission des Nations Unies, a permis de désarmer quelque 42 000 ex-combattants.  Devant ce succès, le représentant s'est néanmoins demandé si la communauté internationale aurait pu répondre plus  rapidement à la situation critique de la Sierra Leone et contribuer ainsi à sauver la vie de milliers de personnes.  Compte tenu de la gravité de la situation humanitaire actuelle, force est de constater, a-t-il estimé, que la réponse internationale a été lente voire tardive.  La situation en Sierra Leone, a-t-il poursuivi, comme les autres situations de conflit en Afrique, montre le caractère inapproprié du concept de conflit interétatique.  La plupart de ces prétendus conflits civils et internes ont une dimension et une nature internationales, a insisté le représentant en expliquant qu'il s'agit, en fait, de conflits alimentés et financés par des réseaux internationaux de trafic illicite d'armes et de transfert illicite de diamants et d'autres minerais précieux.  Les principaux bénéficiaires de ces transactions illégales, a encore insisté le représentant, se trouvent à des milliers de kilomètres du théâtre des conflits.  La lutte contre ces fléaux participe de la prévention des conflits tout comme les opérations de consolidation de la paix, a-t-il estimé. 


En effet, les conflits peuvent renaître de leurs cendres si la communauté internationale ne fournit pas en temps voulu les ressources adéquates pour financer la réintégration des anciens combattants.  Compte tenu de son expérience, la Sierra Leone estime nécessaire de contrôler les mécanismes chargés de la mise en oeuvre des sanctions, d'appuyer l'envoi de missions d'établissement des faits aussitôt que possible pour enquêter sur les violations du droit international, et de renforcer les efforts de consolidation de la paix en donnant les moyens aux organismes des Nations Unies de fournir les ressources non seulement pour le désarmement mais aussi pour la réintégration des anciens combattants.  Les problèmes africains nécessitent une réponse globale et rapide, a conclu le représentant en insistant sur les termes "globale" et rapide".


M. PAUL HEINBECKER (Canada) a déclaré que l’Afrique est la preuve tragique du coût des conflits non maîtrisés, notamment au Rwanda, en Sierra Leone, au Burundi, et en République démocratique du Congo, soulignant qu’un Africain sur cinq vit dans une situation de conflit et que le continent compte 18 millions de réfugiés et de personnes déplacées.  Il a, en revanche, vu un signe encourageant avec le lancement du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) par lequel, selon lui, les dirigeants africains ont montré leur volonté d’agir au niveau de l’ensemble du continent.  Cette initiative montre clairement que la marginalisation du continent nous menace tous.  Les participants au G8 à Gênes, a-t-il fait remarquer, se sont félicités du NEPAD et ont créé un Groupe de soutien.  Pour sa part, le Gouvernement du Canada a dégagé plus de 300 millions de dollars américains pour appuyer les activités de ce Groupe


De l’avis de la délégation canadienne, certaines critiques adressées aujourd’hui au Conseil sont injustes car des efforts considérables ont été accomplis, notamment par le biais des missions d’information du Conseil ou les commissions d’enquête, même si la prévention doit être améliorée.  Des efforts ont également été faits pour mieux garantir la protection des civils.  Le Conseil a ainsi donné mandat aux forces déployées dans le cadre des opérations de maintien de la paix de protéger les civils en Sierra Leone, mais il faut que cela devienne une caractéristique type de toutes les missions, a-t-il plaidé.  Il faut aussi examiner la prolifération des armes légères et mettre en place des procédures de marquage et aussi de destruction accompagnant les programmes de désarmement et de démobilisation.  Le représentant a regretté par ailleurs que les richesses de l’Afrique ne puissent être utilisées au profit du continent et soient, au contraire, sources de violences.  En conclusion, il a rappelé que les gouvernements se devaient de protéger leurs peuples et qu’il fallait les assister dans cet effort. 


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