AMNESTY INTERNATIONAL SE DISSOCIE DE CERTAINES DISPOSITIONS DU DOCUMENT FINAL DU FORUM DES ONG
Communiqué de presse DR/D/948 |
AMNESTY INTERNATIONAL SE DISSOCIE DE CERTAINES DISPOSITIONS
DU DOCUMENT FINAL DU FORUM DES ONG
Durban (Afrique du Sud), le 6 septembre -- La Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, réunie à Durban depuis le 31 août, a poursuivi ce matin son débat général par l’audition de près d’une trentaine d’organisations non gouvernementales, en particulier Amnesty International qui a rappelé que les participants à la Conférence mondiale sont venus à Durban pour travailler ensemble contre le racisme et indiqué que son organisation appuie la plupart des dispositions figurant dans les documents adoptés par le Forum des ONG, qui reflètent les vues exprimées par les victimes. Toutefois, son organisation aurait souhaité que le langage utilisé pour exprimer la colère et les frustrations consacre l’unanimité plutôt que la division.
Le principal message qui a émergé du Forum des ONG est que les gouvernements ne se sont pas acquittés de leur obligation de faire face aux crises des droits de l’homme qui sont à l’origine de cette colère et de ces frustrations, a-t-il fait remarquer. De l’avis du représentant de l’Institut international pour la paix, il est essentiel de ne pas négliger les avantages tirés des conférences et séminaires internationaux qui débattent de questions liés à la discrimination car la ségrégation, l’exclusion et la marginalisation du fait d’origine et de la condition sociale favorisent de profondes fissures économiques et sociales dans nos sociétés. Les instruments mis en place sur le plan national appellent à une participation plus active de tous les groupes de la population pour en garantir une efficacité pleine et entière. A cet égard, la politique indienne de lutte contre le racisme et la discrimination offre le cadre nécessaire pour s’attaquer au problème de la discrimination fondée sur les castes, renforçant ainsi les capacités des Dalits.
Pour la représentante de Human Rights Watch, le racisme et la discrimination sous toutes ses formes sont universels. C’est pourquoi, la Conférence mondiale doit reconnaître que ces phénomènes existent et condamner le système des castes qui demeure en vigueur. Les femmes sont souvent victimes d’une double discrimination en raison de leur origine ethnique ou de leur situation familiale. Il faut que les gouvernements prennent des mesures efficaces pour prévenir ces phénomènes et faire preuve de responsabilité et de justice à l’égard des victimes. Elle a notamment observé que les dispositions relatives à la réparation pour les victimes de l’esclavage et de la traite des Noirs ne devront pas, sous quelque prétexte que ce soit, être l’objet de négociations qui viseraient à les vider de leur substance. Le passé esclavagiste devrait être reconnu et les mesures de réparation conséquentes adoptées.
De nombreuses autres organisations non gouvernementales ont attiré l’attention sur les difficultés rencontrées par les réfugiés et minorités, ont regretté que les gouvernements ne réagissent pas rapidement et énergiquement aux crises de droits de l’homme qui émergent. Elles ont souhaité que les projets de déclaration et de programme d’action que la Conférence adoptera renforceront les normes existantes du droit international et garantiront un suivi effectif.
Outre le Ministre de l’éducation et de la culture de l’Uruguay et le représentant du Mali, la Conférence mondiale a entendu dans le cadre de son débat général les représentants des organisations non gouvernementales : Islamic Women’s Institute; Asia Pacific Forum on Women, Law and Development; AFREcure – All for Reparations and Emancipation; Al-Khoei Foundation; Fraternité ND; Canadian Hispanic Congress; Union des écrivains et artistes de Cuba; European Roma Rights Center; Organization for the Solidarity of the Peoples of Asia, Africa and Latin America; International Institute for Peace; Institute on Race, Health Care and the Law; International Save the Children Alliance; Human Rights Watch; World Alliance of Reformed Churches; Amnesty International; Grand Council of the Crees; Rights of children; Guyana Human rights; Te Kawa Maro; Intl Catholic Migration Commission; Human Rights Association of Turkey; Indian Movement Tupaj Amaru; Susila Dharma International Association; Asociacion Proyecto Caribe; Mujeres peruanas unidas en Argentina; Organisation mondiale contre la torture (OMCT); et Metis National Council.
Les représentants de l’Iraq et de la Malaisie ont exercé leur droit de réponse.
La Conférence mondiale reprendra ses travaux, cet après-midi à 15 heures.
CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME, LA DISCRIMINATION RACIALE, LA XÉNOPHOBIE ET L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE
Déclarations
M. ANTONIO MERCADER, Ministre de l’éducation et de la culture de l’Uruguay : Notre pays a toujours affirmé, durant le processus préparatoire, que cette Conférence a pour principal objectif de relever les défis posés par les formes contemporaines de racisme. Ce n’est en revanche pas le lieu approprié pour traiter de questions individuelles faisant référence à des situations concrètes particulières et susceptibles de nous faire oublier les nobles objectifs pour lesquels nous sommes réunis ici, à Durban. Nous avons tous fait des concessions pour parvenir à un document commun.
L’Uruguay est convaincu que la démocratie est le seul système politique permettant d’assurer à tous les individus une pleine et entière jouissance des droits de l'homme. C’est pourquoi il convient de mettre l’accent sur le lien indissoluble existant entre démocratie et lutte contre le racisme. Les préjugés et les tendances préjudiciables naissent dans l’esprit des personnes et c’est donc dès le plus jeune âge qu’il convient de combattre ces tendances. Aussi, l’éducation s’avère-t-elle un outil indispensable pour lutter contre le racisme et la discrimination. Aucun pays n’est exempt de racisme ou de discrimination raciale : il est donc indispensable d’adopter, aux niveaux national, régional et international, des politiques d’action affirmative nous permettant de remédier aux inégalités sociales actuelles et à la pauvreté qui affectent particulièrement les groupes les plus vulnérables.
M. LOUIS MARIE BASTIDE, chef de la délégation du Mali : Le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance compromettent l’union des hommes et la solidarité entre les peuples. Je crois fermement à la race humaine sans distinction de couleur, de culture, de langue ou d’ethnie. Le défi majeur qui nous est posé à Durban est d’imposer le respect de la diversité dans le but de bâtir un monde plus égalitaire. Il importe également de lutter contre les inégalités devant la justice, l’éducation, l’accès aux soins de santé qui frappent toujours les plus vulnérables. Les discriminations à l’égard des réfugiés, des minorités, des femmes et des enfants, des malades du VIH/sida interpellent la conscience et doivent faire l’objet d’une attention particulière au cours de nos travaux. Il faut nous tourner vers l’avenir et dépasser les barrières de la différence.
La traite des esclaves, l’esclavage et le colonialisme ne peuvent être assumés que si on accepte de reconnaître la réalité de ces crimes. Nous estimons que seule une réparation juste et équitable des torts subis permettra de construire l’avenir. D’autre part, comment cette Conférence peut-elle demeurer indifférente aux conditions du peuple palestinien. Il nous faut construite un monde de tolérance qui assurera l’unité dans la diversité, l’unité de l’homme. Nous nous trouvons à un moment critique où il importe de poser les jalons d’un ralliement mondial contre le racisme. Il faut donner à la culture de la tolérance une place de choix dans les programmes éducatifs et culturels. Nous sommes attachés à la lutte contre l’impunité et en ce sens nous encourageons les initiatives internationales en faveur du renforcement de la justice. Nous sommes attachés à la création d’un mécanisme de suivi des travaux de cette Conférence.
La représentante de l’Institut des femmes musulmanes d’Iran a fait observer que les femmes musulmanes sont nombreuses parmi les réfugiées. Les immigrants afghans en Iran et au Pakistan ont été contraints de quitter leur pays pour fuir la guerre. Les immigrants iraniens subissent souvent des discriminations fondées sur leur appartenance religieuse, de même que les Turcs en Allemagne ou dans d’autres pays arabes. Les Musulmans au Canada subissent le même sort, en dépit de la diversité qui marque ce pays. Il est urgent que l’on prenne conscience de ce problème et qu’on lui apporte une solution.
La représentante de l’Asia Pacific Forum on Women, Law and Development s’est identifiée comme membre de l’ethnie karen en Birmanie, pays où un régime militaire est au pouvoir depuis 1962. Elle a attiré l’attention sur la discrimination multiple dont elle souffre en tant que femme réfugiée appartenant à une minorité ethnique. Les soldats birmans sont les auteurs des violences sexuelles les plus atroces perpétrées contre des femmes appartenant à des minorités. Un changement politique s’impose en Birmanie, pays où l’on trouve plus de 50 000 personnes déplacées de l’intérieur. L’ANASE (Association des Nations de l’Asie du Sud-Est), la Chine, l’Inde et le Japon devraient réexaminer leurs politiques à l’égard de la Birmanie avec pour objectif de susciter les importants changements qui s’imposent dans ce pays.
Le représentant de l’organisation AFRECure a recommandé la création d’un forum regroupant les populations de descendance africaine et un fonds d’affectation spécial qui serait financé par les gouvernements des pays d’accueil. Nous venons tous d’un même continent, l’Afrique, nous appartenons à de nombreuses tribus multilingues. En tant que peuples d’origine africaine, nous souhaitons que des indemnisations nous soient faites afin de soulager les souffrances du passé. Nous sommes perdus, séparés de nos origines africaines car quatre siècles d’esclavages et de métissage forcé par les abus sexuels des esclavagistes ont produit un peuple qui a perdu plus que son indépendance. C’est un peuple qui a perdu son identité, sa langue, sa culture. Nous souhaitons que cette Conférence déclare une Décennie qui soit consacrée à la définition de nos droits et à l’examen de nos conditions.
La représentante de la Fondation Al-Khoei a lancé un appel à la Conférence pour prier les gouvernements de prendre les mesures nécessaires visant à éliminer les multiples formes de discrimination, fondées notamment sur la religion et la couleur. Son organisation est profondément préoccupée par la détention de musulmans chiites depuis 1981. Il est essentiel que l’entente et le dialogue prévalent pour éliminer le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.
La représentante de Fraternité Notre-Dame a relevé que le racisme et la discrimination raciale sont l’apanage de la haine et le ferment de bien des guerres. Partout, ces fléaux endurés par nombre d’hommes et de femmes à travers le monde. Malgré les progrès enregistrés en matière de lutte contre le racisme, beaucoup reste à faire. Dans bien des pays, en particulier en Europe –et plus particulièrement en France- la liberté de religion n’est pas respectée et nombre de minorités religieuses et de jeunes congrégations sont taxées de sectes et interdites sous le simple prétexte qu’elles n’appartiennent pas aux institutions religieuses majoritaires établies et dans le but d’éliminer pour mieux régner.
La représentante du Canadian Hispanic Congress a déclaré que la communauté hispanophone fait partie de la communauté canadienne mais qu’elle entend garder son identité. Le Canada a toujours été un pays de minorités dont la politique repose sur des bases solides. Elle a expliqué que, comparé à d’autres pays, le Canada a développé le dialogue entre les régions. Nous estimons que chaque personne doit accepter de changer de mentalité pour se tourner vers l’avenir et bâtir un monde de tolérance. Les femmes doivent disposer d’une place égalitaire dans les sociétés.
La représentante de l’Union des écrivains et artistes de Cuba a rappelé que pendant des décennies, les populations d’origine africaine ont subi de nombreuses formes de discriminations. La grande majorité d’ascendance africaine continue de vivre dans des conditions très difficiles. L’exploitation des peuples est une exploitation cynique. Les pays qui nous ont colonisé ont pillé nos ressources. La Conférence mondiale doit inclure dans ses projets de déclaration et de programme d’action les dispositions visant à remédier aux injustices du passé et à envisager une réparation qui pourrait se traduire par l’élimination de la dette.
La représentante de European Roma Rights Center a souligné que, souvent, notamment en Europe orientale, les enfants des Roms sont cantonnés dans des écoles spéciales pour attardés. Les Roms (tsiganes) sont originaires d’Inde, a-t-elle rappelé avant de préciser que la communauté rom –considérée comme un groupe social n’appartenant à aucun pays- ne réclame aucun territoire. Cette communauté souhaite juste jouir de droits égaux, a-t-elle insisté. Aujourd’hui, la discrimination et la violence contre les Roms sont répandues, particulièrement en Europe. Les Roms souffrent de discrimination dans les domaines de l’éducation et du logement, en particulier en République tchèque et en Italie. Depuis l’entrée en vigueur de l’amendement à la loi sur les relations raciales en avril dernier, les autorités britanniques d’immigration peuvent exercer une discrimination à l’encontre de certains groupes puisqu’il leur est recommandé d’examiner plus attentivement la situation personnelle des membres de certains groupes désireux d’immigrer au Royaume-Uni.
Le représentant de l’Organization for the Solidarity of the Peoples of Asia, Africa and Latin America a déclaré que plus de 4 milliards d’êtres humains vivent aujourd’hui en Afrique, en Asie en Amérique latine et dans les Caraïbes et attendent beaucoup de cette Conférence. Après avoir souffert de l’esclavage, de la traite et du colonialisme, ils sont aujourd’hui frappés par la misère et la pauvreté. Nous sommes ici pour que la porte des riches s’ouvre aux attentes des pauvres et pour que nous soyons unis pour combattre le racisme, a déclaré le représentant qui a appelé la communauté internationale à renoncer à l’égoïsme et à privilégier la solidarité afin d’atteindre les objectifs de cette Conférence. Les Nations Unies doivent mettre en place des programmes de développement durable et les peuples du tiers monde ne veulent plus être leurrés, a-t-il conclu.
M. PETER STANIA, représentant de l’Institut international pour la paix : En dépit de l’existence d’un cadre juridique et constitutionnel qui interdit toute forme de discrimination, la discrimination fondée sur les castes existe. Mais cette discrimination n’a pas grand chose à voir avec la race ou la nature de la politique indienne, qui cherche à garantir les droits de tous les groupes de la population. Cette discrimination résulte d’attitudes traditionnelles qui restent en vigueur dans le pays. Elle est plus rare dans les milieux où le développement et l’éducation ont marqué des progrès. Lorsque les sociétés sont fragmentées et favorisent la ségrégation les fissures sociales et économiques ne peuvent être que plus profondes. C’est pourquoi, il ne faut pas négliger les avantages tirés des conférences et séminaires internationaux qui débattent de ces questions. Les instruments visant à lutter contre ces fléaux sont plus efficaces sur le plan national lorsque ces problèmes existent. La politique indienne de lutte contre le racisme et la discrimination offre le cadre nécessaire pour s’attaquer au problème de la discrimination fondée sur les castes, renforçant les capacités des Dalits.
Le représentant de l’Institute on Race, Health Care and the Law – University of Dayton a mis en exergue les effets directs de la condition socioéconomique des individus sur leur état de santé. Le stress lié au racisme peut avoir des conséquences sur le plan psychosocial ainsi que sur la santé, a-t-il ajouté. Le racisme se manifeste également dans l’accès aux médicaments, notamment du point de vue des personnes affectées par le VIH/sida.
Le représentant de l’International Save the Children Alliance a souhaité que les mesures relatives à l’éducation dans le programme d’action devrait mentionner le droit des minorités de pouvoir apprendre leur langue maternelle à l’école. La question de la langue est étroitement liée au développement de l’identité de l’enfant et d’améliorer ses performances scolaires. Il a ajouté que le plurilinguisme est une force d’ouverture en direction des autres peuples et un atout dans les relations commerciales, par exemple. Il a appelé cette Conférence à tenir compte des intérêts des minorités.
La représentante de Human Rights Watch a fait observer que le racisme et la discrimination sous toutes ses formes sont universels. Il faut reconnaître que ces phénomènes existent et condamner le système des castes qui demeure en vigueur. Les femmes sont souvent victimes d’une double discrimination en raison de leur origine ethnique ou de leur situation familiale. Il faut que les gouvernements prennent des mesures efficaces pour prévenir ces phénomènes. Ils doivent faire preuve de responsabilité et de justice à l’égard des victimes. Elle a notamment observé que les dispositions relatives à la réparation pour les victimes de l’esclavage et de la traite des Noirs ne devront pas, sous quelque prétexte que ce soit, être l’objet de négociations qui viseraient à les vider de leur substance. Le passé esclavagiste devrait être reconnu et les mesures de réparation conséquentes adoptées.
La représentante de l’Alliance mondiale des églises réformées a demandé aux Églises de contribuer à mettre un terme à la violence et à l’application de la peine de mort. Aux États-Unis, le symbole de la justice est une femme qui, un bandeau sur les yeux, brandit une épée. Lorsque la justice est aveugle, elle est abandonnée et oubliée. La peine capitale est raciste car elle touche les personnes de couleur de manière disproportionnée. Pour un blanc qui commet un meurtre, la peine est en moyenne de huit ans alors qu’un meurtrier noir a toutes les chances de se voir appliquer la peine de mort.
Le représentant d’Amnesty International a rappelé que le racisme constitue une attaque flagrante contre la notion même des droits de l’homme, et ceux qui en souffrent peuvent légitimement en demander réparation en vertu de la loi. Malheureusement, les systèmes politiques et judiciaires reflètent fréquemment les préjudices de leurs sociétés. Les arrestations, les condamnations et les jugements, ainsi que le traitement des réfugiés montrent que les gouvernements dans le monde ferment les yeux devant la discrimination raciale. Il ne peut y avoir de justice quand il y a racisme. Amnesty International appelle donc tous les Gouvernements à adopter des stratégies et des plans d’actions nationaux de lutte contre le racisme dans l’administration de la justice. Notant qu’un certain nombre de ses recommandations figurent dans les projets de texte de la Conférence, Amnesty International demeure toutefois préoccupée par les questions clés qui restent en suspens ou qui sont tout simplement ignorées. De toute évidence, la peine de mort continue d’être appliquée de manière discriminatoire dans de nombreux pays. Ces pays doivent enquêter sur tout impact disproportionné de la peine de mort sur les groupes raciaux.
Le représentant a également appelé les Gouvernements à déclarer un moratoire pour les exécutions faisant l’objet de telles enquêtes. Un moratoire est une question de justice et de logique, et non pas de compassion. La Conférence est priée de reconnaître le sort des Dalits, en tant que groupe victime de discrimination en raison de ses origines. Les formes multiples de discrimination, y compris celles résultant du racisme et de l’orientation sexuelles doivent être prises en compte. La Conférence devrait en outre reconnaître que les réfugiés et les demandeurs d’asiles sont de plus en plus exposés à la xénophobie et au racisme, et il faut donc leur assurer une protection en vertu du droit international. Enfin, les gouvernements doivent reconnaître les abus du passé, y compris l’esclavage et le colonialisme et réparer les préjudices infligés. Il faut également répondre à la crise des droits de l’homme au Moyen-Orient, dans le cadre des droits de l’homme, et non pas sous l’angle politique.
Nous sommes venus à Durban pour œuvrer ensemble contre le racisme, mais les délibérations ont été difficiles, même parmi les organisations non gouvernementales. Amnesty International appuie la plupart des dispositions figurant dans les documents adoptés par le Forum des ONG, qui reflètent les vues exprimées par les victimes. Toutefois, elle aurait souhaité que le langage utilisé pour exprimer la colère et les frustrations consacre l’unanimité plutôt que la division. Le principal message qui a émergé du Forum des ONG est que les gouvernements ne se sont pas acquittés de leur obligation de faire face aux crises des droits de l’homme qui sont à l’origine de cette colère et de ces frustrations. Ce que nous avons essentiellement entendu est un appel à l’aide. Nous ne devons pas l’ignorer parce que nous n’apprécions le ton, mais les gouvernements sont tenus de l’entendre et d’agir de manière urgente. La première Conférence mondiale de ce millénaire nous offre une occasion unique d’établir des valeurs modernes, non pas par la rhétorique mais par une action concrète qui fera véritablement une différence dans la vie des populations.
La représentante du Grand Council of the Crees a expliqué qu’elle représentait les James Bay Cree qui est un peuple autochtone du Canada. Elle a regretté que le Gouvernement canadien avait déplacé cette population en raison d’un projet de barrage hydroélectrique. Aujourd’hui, elle a estimé à 2% la surface de terres d’origine qui reste à ce peuple et dénoncé le refus du Gouvernement canadien de reconnaître les droits des James Bay Cree notamment sur les forêts. Elle a dénoncé la double discrimination dont sont victimes les femmes issues de peuples autochtones.
La représentante de Rights of Children a rappelé que l’avenir appartient aux jeunes. Elle a souligné que les jeunes sont touchés particulièrement par le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance y relative. C’est pourquoi est-il indispensable que la Conférence adopte le paragraphe 78 de la déclaration finale.
La représentante de Guyana Human Rights Association a souligné la nécessité de nous unir dans la lutte contre le racisme et la discrimination dans la mesure où nous appartenons à la même humanité. Les actes d’exclusion, de préférences raciales et d’abus verbal constituent des formes de discrimination dont sont victimes chaque jour des millions de personnes dans le monde en raison de leur race, leur origine ethnique, leur langue ou leur religion. Il est donc essentiel de mobiliser toutes les énergies, en particulier les jeunes, pour combattre ces fléaux et créer un climat harmonieux pour tous.
Le représentant de Te Kawa Maro-Maori Organization a pris la parole au nom des Maoris de Nouvelle-Zélande et estimé que cette Conférence doit déboucher sur des excuses et des réparations pour les victimes du racisme. Il a expliqué qu’on ne peut nier le colonialisme et l’esclavage et a ajouté que ceux qui rejettent le principe de réparation et de compensation pour ces phénomènes du passé n’ont pas compris le monde dans lequel ils vivent. Il a expliqué qu’il y a une renaissance de l’identité Maorie et expliqué qu’il y aurait forcément des changements dans la manière dont ce peuple est considéré en Nouvelle-Zélande. Concernant le principe de l’autodétermination, contenu au paragraphe 27 du projet de déclaration, il a estimé qu’il ne pouvait être restreint, encore moins dans le contexte de cette Conférence contre le racisme.
La représentante de l’International Catholic Migration Commission a rappelé que son organisation a été créée en 1950 pour s’occuper des réfugiés. Depuis, son mandat s’est élargi pour englober les personnes déplacées. Ces dernières font de plus en plus l’objet de racisme, de discrimination et de xénophobie à travers le monde, a-t-elle fait observer. Elle a recommandé aux 172 États qui ne l’ont pas encore fait d’adhérer à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. Une attention particulière devrait être accordée à la situation des migrants en situation irrégulière.
Le représentant de Human Rights Association de la Turquie a rappelé que la Turquie est un pays multiculturel, multiconfessionnel, multilingue et multiethnique. Pour autant, la structure de l’Etat repose sur l’identité ethnique turque et son système politique, juridique et administratif a été élaboré sur la base de l’origine ethnique turque. Les institutions mises en place par l’Etat ne concernent que la langue, l’histoire, la culture, le folklore et la littérature turques. Il n’existe aucun cadre juridique ou administratif en faveur de la promotion, de la protection et de l’enseignement des langues des minorités. Le système politique et juridique du pays n’en tient nullement compte; au contraire, il les entrave ne laissant ainsi que deux choix aux autres groupes de population : quitter le pays ou être contraints à l’assimilation. Le statut de minorité n’a été reconnu qu’aux Grecs orthodoxes, aux Arméniens, aux Juifs et aux Bulgares. En dépit de ce statut, ces minorités sont confrontées à des difficultés dans l’exercice de leur droits. Les Kurdes qui comptent près de 20 millions de la population turque ne bénéficient d’aucune reconnaissance de la part du Gouvernement turc. Suite au conflit qu’a connu la Turquie depuis 1993, plus de 3 600 villages kurdes ont été brûlés et vidés de leur population, provoquant le déplacement forcé de plus de 3 millions de Kurdes. C’est pourquoi, l’Association turque des droits de l’homme encourage la Conférence mondiale à multiplier les efforts visant à reconnaître et à assurer le droit à l’éducation et à l’enseignement, pierre angulaire de l’existence et de la survie des minorités.
Le représentant du Indian Movement “Tupaj Amaru” a déclaré que les peuples autochtones étaient venus ici à Durban pour demander justice et réparations avant de qualifier la période coloniale d’hécatombe qui fait partie des pages les plus sombres de l’histoire occidentale. Il a accusé les puissances occidentales d’être responsables de ce crime contre l’humanité qui a détruit et assujetti les communautés autochtones. Il a estimé que cette Conférence ne serait jamais le lieu approprié pour rétablir la vérité sur cette barbarie historique dont ont été victimes les populations autochtones. Il a dénoncé un véritable génocide et un crime contre l’humanité, ajoutant que les descendants pleurent la mémoire de leurs ancêtres. Il a ajouté que le pillage des ressources amérindiennes qui avait fait la richesse de la couronne espagnole et aux puissances occidentales et condamné les peuples autochtones à la misère la plus cruelle. Il a exigé que des excuses, des réparations aux peuples autochtones soient faites et demandé que la Conférence de reconnaisse le droit à l’autodétermination des peuples autochtones.
La représentante de Susila Dharma International Association a indiqué qu’elle représentait un réseau de plus de soixante organisations non gouvernementales humanitaires oeuvrant notamment au bien-être social. Elle a relevé que seul l’échange entre les individus et les peuples offre de bonnes perspectives à l’esprit humain. Il faut que la Conférence fasse sienne cette vision des choses et travaille dans un esprit de coopération et non de confrontation.
Le représentant de l’Asociacion Proyecto Caribe (Costa Rica) a fait observer que les Costariciens d’origine africaine ne sont pas reconnus en tant que minorité. C’est pourquoi son association demande que le pardon pour les victimes des injustices du passé soit présenté. Les formes de racisme résultant de l’origine se manifestent encore au Costa Rica, comme dans de nombreux pays de la région. C’est pourquoi, la mobilisation des ressources et des énergies est essentielle pour mettre au point des mesures de prévention efficaces.
La représentante de Mujeres Peruanas Unidas en Argentina a expliqué que les femmes sont souvent chef de famille car elles représentent plus de 50% de la population. Dans certains cas, plus de 70% des femmes migrantes péruviennes travaillent clandestinement comme des domestiques ou dans le textile en Argentine. Elle a dénoncé les discriminations dont sont victimes les Péruviens en Argentine en matière d’accès au travail, à la santé et à la justice. Elle a dénoncé les stéréotypes qui assimilent les Péruviens à des voleurs. Elle a expliqué que les migrantes péruviennes s’organisent tant bien que mal pour améliorer leurs conditions de vie. Elle a expliqué que son organisation forme ces femmes migrantes, leur offre des moyens d’éducation ainsi qu’une couverture juridique afin de les aider à s’intégrer dans la société argentine.
La représentante de Espacio Afro Americano a souligné que les personnes d’ascendance afro-américaine sont victimes de racisme et de discriminations au quotidien. Elle a affirmé que la traite transatlantique a toujours constitué un crime contre l’humanité dont il convient de réparer les conséquences. Parmi les victimes de déplacements internes, on compte un grand nombre de personnes d’ascendance africaine ainsi que de nombreux autochtones. Il est essentiel de libérer l’île de Vieques afin d’assurer la reconnaissance des droits fondamentaux des personnes qui subissent la présence de militaires sur l’île.
Le représentant de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a constaté avec regret que tant le texte de la déclaration que celui du programme d’action de la Conférence mondiale ne répondent pas suffisamment à nos attentes. Ces textes doivent renforcer les normes existantes et –en aucun cas– ne doivent être interprétés comme relativisant les obligations découlant des instruments internationaux. De même, L’OMCT soutient sans réserve les propositions novatrices présentées le 3 septembre dernier et tendant à créer des synergies renforcées ou nouvelles entre les institutions du système des Nations Unies et les mécanismes tant conventionnels qu’institutionnels. Mais on constate que ces efforts ne peuvent suffire à eux seuls à assurer une mise en œuvre efficace et effective du programme d’action. C’est pourquoi, nous demandons aux Etats à cette Conférence de créer –comme cela est proposé dans le projet de programme d’action– un observatoire permanent composé d’experts indépendants pour assurer le suivi systématique de la mise en œuvre du programme d’action.
Le représentant du Metis National Council a expliqué que son organisation est originaire du Canada où les métis dans ce pays font partie du peuple autochtone. Il a expliqué qu’ils n’aspiraient pas au séparatisme mais juste à se voir reconnaître l’autodétermination dans le cadre fédéral canadien. Il a regretté le déni de droit dont sont victimes les populations métisses, en particulier dans l’Ontario. Il a demandé la suppression du paragraphe 27 de la déclaration de la Conférence qui est une atteinte aux droits des peuples autochtones. Il a ajouté que les minorités autochtones peuvent apporter beaucoup à la construction de sociétés tolérantes et démocratiques.
Droits de réponse
Le représentant de l’Iraq a rejeté les allégations proférées ce matin par l’ONG Al-Khoei Foundation concernant l’arrestation d’individus chiites. L’Iraq ne pratique aucune discrimination fondée sur la religion.
Le représentant de la Malaisie, répondant à la déclaration faite hier par l’ONG SUARAM, a souligné que les incidents qui se sont produits au début de l’année précédaient une mésentente intercommunautaire entre membres de communautés différentes mais n’avaient rien à voir avec un quelconque racisme ambiant. La Malaisie compte plus de 1,5 million de travailleurs étrangers. Lorsque parmi eux se faufilent des clandestins, le Gouvernement les renvoie mais en aucun cas les clandestins ne sont maltraités durant les procédures d’expulsion.
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