SOIXANTE-HUITIÈME SESSION,
4E SÉANCE PLÉNIÈRE, MATIN
FEM/2232

La Commission de la condition de la femme débat du financement et des politiques de lutte contre la pauvreté des femmes et des filles

La Commission de la condition de la femme a poursuivi, aujourd’hui, les travaux de sa soixante-huitième session avec la tenue, dans la matinée, de deux tables rondes ministérielles consacrées à la mobilisation du financement pour l’égalité des genres et aux politiques de lutte contre la pauvreté des femmes et des filles. 

L’occasion fut également donnée aux intervenants de faire le point sur les bonnes pratiques pour renforcer les institutions et maximiser le financement afin de parvenir à l’égalité des genres et à l’autonomisation des femmes et des filles.

Les délégations ont notamment été informées que 10,3% de femmes dans le monde vivent dans l’extrême pauvreté, et que les femmes connaissent des taux de pauvreté plus élevés que les hommes, un écart qui devrait persister jusqu’en 2050.  Si la tendance actuelle se poursuit, 8% des femmes dans le monde vivront encore avec moins de 2,15 dollars par jour d’ici à 2030. 

Les travaux de cette session 2024 ont pour thème prioritaire « Accélérer la réalisation de l’égalité entre les hommes et les femmes et l’autonomisation de toutes les femmes et les filles en s’attaquant à la pauvreté et en renforçant les institutions et le financement dans une perspective d’égalité entre les hommes et les femmes ». 

La Commission de la condition de la femme poursuivra ses travaux demain, mercredi 13 mars, à partir de 10 heures. 

TABLES RONDES MINISTÉRIELLES

Table ronde 1: « Mobiliser les financements en faveur de l’égalité entre les genres et l’autonomisation de toutes les femmes et filles: politiques et stratégies pour mettre fin à la pauvreté des femmes et des filles » 

Les participants de cette table ronde ont détaillé les politiques et moyens budgétaires mis en œuvre pour remédier à la pauvreté qui touche bien davantage les femmes que les hommes.  Un chiffre a dominé les débats: les 10,3% de femmes dans le monde qui vivent dans l’extrême pauvreté. 

D’emblée, la Première Ministre de la Lettonie, qui présidait les échanges, a mentionné les réformes entreprises par son gouvernement afin d’assurer un revenu minimum aux femmes, notamment lors de leur retraite.  Elle a aussi appelé à combattre les stéréotypes de genre, qui peuvent influer négativement sur les choix de vie et de carrière.  La mise en place d’un congé paternité pour les hommes est également essentielle afin qu’ils assument leurs responsabilités de père, a-t-elle ajouté. 

Dans cette même veine, la Présidente du Sénat de l’Ouzbékistan a détaillé les changements d’attitude à l’égard des femmes dans son pays qui vise à ramener à 6% d’ici à 2030 le taux des femmes vivant dans la pauvreté.  « Mon pays a augmenté les ressources dédiées à la lutte contre la pauvreté des femmes », a renchéri la Vice-Présidente du Guatemala, en soulignant l’importance de reconnaître le travail non rémunéré des femmes. 

La Secrétaire du budget des Philippines a précisé quant à elle que 24% du budget de son pays est dédié à des politiques transversales concourant à l’autonomisation des femmes.  Elle a également évoqué la hausse des prêts alloués à des femmes entrepreneures, ainsi que les efforts pour faciliter l’accès des femmes aux soins de santé. 

De son côté, la Ministre des femmes de l’Égypte a insisté sur l’importance des transferts de fonds aux femmes. L’autonomisation des femmes n’est pas qu’une question de ressources et doit se réaliser par des moyens innovants, a-t-elle souligné.  Même son de cloche du côté de la Ministre des jeunes et de l’autonomisation des femmes du Canada qui a rappelé la part majoritaire assumée par les femmes s’agissant des tâches ménagères. 

La Ministre du développement social de la Jordanie a, elle, détaillé la politique visant à augmenter la participation des femmes dans la vie économique et sociale du pays, moyen essentiel de briser le « cercle vicieux de la pauvreté ». 

À son tour, la Ministre du travail et de la protection sociale de la Mongolie a indiqué que le code de la famille de son pays a été modifié afin de permettre un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie familiale des femmes.  Des lignes budgétaires spécifiques sont par ailleurs prévues pour aider les femmes victimes de violence, a-t-elle dit. 

« Ceux qui ont inventé la faim sont ceux qui mangent », a déclaré la Première Dame du Brésil, en rappelant que la pauvreté découle de choix politiques.  Elle a détaillé la politique publique « bolsa família » visant à sortir les femmes de la pauvreté au Brésil.  « Nous avons besoin d’une réforme de l’architecture financière internationale, laquelle, en l’état, pousse les pays vulnérables à s’endetter », a-t-elle dit, en ajoutant que cela sera la priorité de la présidence brésilienne du G20. 

La Ministre de la protection sociale du Ghana a, elle, centré son intervention sur la politique visant à développer l’esprit d’entrepreneuriat des femmes, précisant que les femmes vivant en milieu rural ont reçu la majorité des micro-prêts publics accordés au Ghana.  Même son de cloche du côté de la Ministre des femmes du Bénin qui a mentionné la politique de renforcement « des compétences de vie » des femmes. Grâce au micro-crédit, des femmes artisanes ont pu mener leurs projets à bien, s’est-elle félicitée. 

« Nous voulons toujours réaliser le rêve de Mandela, un pays libre, démocratique, non raciste, non sexiste », a déclaré la Ministre du développement social de l’Afrique du Sud, qui a détaillé la politique d’autonomisation des femmes noires, insistant en outre sur l’importance d’une budgétisation sexo-spécifique. 

En 2020, l’Arménie a été distinguée comme un des pays leaders s’agissant des politiques d’autonomisation des femmes, a déclaré le Ministre des affaires sociales de ce pays.  Il a en particulier détaillé la politique visant à épauler les mères célibataires.  « Malgré un contexte difficile, marqué par les agressions militaires, l’Arménie est déterminée à autonomiser les femmes », a-t-il assuré. 

De son côté, la Ministre de l’action sociale, de la famille et de la promotion des femmes de l’Angola a défendu un accès égal à une éducation de qualité afin que les femmes puissent s’extraire du « piège du chômage et de l’emploi informel ».  La Ministre des femmes et des droits humains de l’Équateur a appelé à remédier à l’écart salarial entre les hommes et femmes, qui est de 40% dans le monde, « à l’avantage des hommes bien sûr ». 

Son homologue des Émirats arabes unis a défendu une politique d’achats publics sensible à la question du genre, tandis que la Ministre de solidarité et de l’intégration sociale du Maroc a détaillé la feuille de route adoptée par son pays pour « l’inclusion financière » des femmes.  Le Sous-Secrétaire général chargé du développement économique au Département des affaires économiques et sociales (DESA) a ensuite conclu cette table ronde en soulignant les retards pris dans la réalisation de l’égalité des genres. 

Il a appelé à en faire davantage dans la reconnaissance du travail non rémunéré des femmes, soulignant en outre la nécessité de politiques budgétaires ambitieuses au profit des femmes.  Il a également appelé à combattre les préjugés qui frappent ces dernières, se disant néanmoins « encouragé » par les réformes engagées en ce sens dans de nombreux pays. 

Table ronde 2: « Bonnes pratiques pour renforcer les institutions et maximiser le financement afin de parvenir à l’égalité des genres et à l’autonomisation de toutes les femmes et filles »

Ce deuxième échange de la matinée a été l’occasion pour les intervenants réunis de souligner l’importance pour les États de se doter d’institutions publiques solides et responsables, ainsi que de politiques économiques, fiscales et sociales qui promeuvent l’égalité des sexes pour espérer mettre fin à la pauvreté des femmes et des filles.

Les ministres qui se sont succédé lors de cet échange sont venus apporter des exemples concrets de ce qui se fait dans leurs pays respectifs que ce soit pour garantir une égalité d’accès des femmes et des filles au marché de l’emploi; intégrer la question de l’égalité des genres à tous les niveaux décisionnels; éliminer les stéréotypes négatifs; garantir l’éducation des femmes et des filles; investir dans les femmes entrepreneures, et tendre vers l’objectif de « salaire égal à travail égal ». 

Ainsi la Ministre fédérale de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse de l’Allemagne, a concédé qu’en 2023, l’écart de salaire entre les hommes et les femmes était toujours de plus de 18% dans son pays.  Fort de ce constat, son gouvernement a adopté une loi pour atteindre la parité dans les postes à responsabilité de l’administration fédérale d’ici à 2025 et assurer une représentation de femmes à hauteur de 40% dans les conseils d’administration des banques. Une réforme de l’impôt sur les salaires a également été lancée. 

La Vice-Première Ministre et Ministre du développement social, du travail et de la protection sociale de Curaçao, qui présidait cette table ronde, a cité les mérites d’une budgétisation sensible au genre, qui permet aux gouvernements d’analyser l’impact des budgets sur le genre et allouer des ressources aux politiques qui s’attaquent aux inégalités.

Pour ce faire, il est essentiel que les données sur les allocations budgétaires et les dépenses soient disponibles en temps voulu et accessibles, a notamment souligné la Ministre de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations de la France, qui a expliqué que dans son pays, d’ici à 2025, la budgétisation sensible au genre s’appuiera sur des indicateurs concrets pour évaluer si les crédits concernés sont favorables ou défavorables à la réduction des inégalités des genres. En Espagne, depuis 2020, l’objectif est d’intégrer la réduction et l’élimination des inégalités dans toutes les politiques publiques, dès leur conception.  Ainsi, si l’impact de ces politiques sur l’égalité des genres s’avère négatif, elles sont exclues du budget, a expliqué la Ministre espagnole de l’égalité. 

Elle s’est également félicitée du succès remporté par la loi espagnole de 2007 qui impose des listes électorales équilibrées entre les hommes et les femmes.  Grâce à cette mesure, en 2023, les femmes occupaient 44,3% des sièges de députés et 43,3% des sièges de sénateurs.

La Ministre des affaires étrangères, de l’éducation et des sports du Liechtenstein, a mis en avant la politique de développement « sexosensible » de son gouvernement en parlant notamment d’un projet lancé au Cambodge pour réduire le fossé numérique qui reste un défi de taille pour les femmes et freine leur intégration à l’économie numérique. 

De son côté, la Ministre de la sécurité sociale de la Finlande, a attiré l’attention sur le problème de la ségrégation sexuelle sur le marché du travail qui commencerait, selon elle, dès la petite enfance.  Appelant à briser les stéréotypes, elle a souhaité des solutions transformatrices qui s’attaquent aux normes, attitudes, comportements et systèmes sociaux discriminatoires et aux structures de pouvoir qui maintiennent les inégalités entre les hommes et les femmes.  En Finlande, cela s’est traduit par une planification fonctionnelle de l’égalité des sexes depuis l’éducation de la petite enfance jusqu’à l’université et, sur le plan des politiques sociales, par des services de garderie d’enfants abordables et de qualité et des congés parentaux répartis équitablement entre les parents.  Même son de cloche en Autriche, où la budgétisation sensible au genre est explicitement désignée comme une dimension obligatoire de la budgétisation des performances.  Concrètement, le budget pour l’égalité de genre a triplé depuis 2019, y compris les investissements dans le système de crèches, a expliqué la Ministre fédérale de la femme, de la famille, de l’intégration et des médias. 

La Premier Ministre de Saint Martin, a expliqué que son gouvernement mise sur le pouvoir transformateur des petites et moyennes entreprises (PME), « moteurs de la croissance économique et du développement social », notamment en octroyant des aides financières aux femmes entrepreneures.  La Chine a également mis en place un système de microcrédits pour les femmes, a fait savoir la Ministre et Directrice adjointe du Comité de travail national sur les enfants et les femmes du Conseil d’État, qui a décrit un système très décentralisé de promotion de l’égalité des genres.  La Ministre de la solidarité nationale, de la famille et de la condition de la femme de l’Algérie, a indiqué pour sa part que le cadre légal fixé par la Constitution de 2020 prévoit la parité sur le marché du travail et de mesures politiques facilitant l’accès à l’emploi des femmes sur un pied d’égalité, y compris de soutien à la création de PME.  Au Paraguay, l’accent est mis sur des crédits agricoles alloués aux femmes rurales a expliqué la Ministre de la femme, alors que la Türkiye privilégie l’ouverture d’écoles en zone rurale pour autonomiser les filles, selon la Ministre de la famille et des services sociaux.

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